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mencèrent les travaux réguliers de l'expédition. De très bonnes photographies de l'aurore boréale et de son spectre furent faites à cette époque par M. Sikora. Les aurores étaient surtout fréquentes au sud, à l'est, et, à l'ouest de la station, tandis que, dans le nord, elles étaient rares. Au sud, l'aurore affectait généralement la forme d'arcs alors qu'à l'est et à l'ouest, elle était disposée en faisceaux que l'on voyait émerger des massifs de montagnes voisines. Le phénomène était fréquent et intense surtout le soir jusqu'à 10-11 heures; après minuit, il devenait rare et diffus. D'après les observateurs russes, la configuration du sol a incontestablement une influence importante sur l'aspect de l'aurore boréale. Derrière les massifs à l'est et à l'ouest de la baie de Goës, on observait des foyers d'où partaient, tantôt des rayons isolés, tantôt des faisceaux en forme d'éventail, tantôt des draperies s'agitant et miroitant dans le ciel. Un des plus beaux aspects du phénomène est la forme dite radiante; des rayons très fins partent d'un point situé au zénith et vont en se dispersant dans toutes les directions. Le météore présentait généralement une couleur blanche, avec des nuances différentes mais presque imperceptibles. Un moment, on a observé un rayon vert intense. Quand le phénomène se présentait sous l'aspect de draperies, de serpents, ou de tourbillons, apparaissaient trois couleurs (rose ou rouge cramoisi, violet et vert). Le rose et le rouge étaient surtout très apparents. Les spectres de l'aurore boréale sont caractérisés par trois traits intenses et d'autres très nombreux, mais, à peine marqués. Plusieurs d'entre eux correspondent aux traits d'azote; ce qui justifierait l'hypothèse d'après laquelle l'aurore apparaît, sous l'influence de l'induction électro-magnétique du soleil.

Pour photographier l'aurore, le temps de pose variait de 2 à 40 minutes. Le phénomène ne change pas très rapidement, comme on le suppose généralement à tort; au contraire, il persiste très longtemps, et, lorsqu'il affecte la forme d'un arc, il reste souvent immobile pendant plusieurs heures.

A l'approche de la nuit polaire les tempêtes de neige devinrent très fréquentes et acquirent une très grande violence. Les instruments et les constructions souffrirent beaucoup de ces ouragans. En décembre, la température fut particulièrement élevée; souvent, par des temps pluvieux, elle s'éleva à + 3° C.

A partir de janvier 1900 le temps devint plus clair. Le 22, le crépuscule dura près de huit heures. Ce mois fut également relativement chaud. Quelques jours le thermomètre monta au-dessus de 0°. Le 14 février, on put manger, pour la première fois, sans lampe, et, le 23, les explorateurs saluaient le retour du soleil. Le véritable hiver ne commença qu'en février, avec des températures de 29° C., et, de fréquentes tempêtes qui duraient des journées entières. Le 17 mars, la température descendit le plus bas (-31°,6 C.).

Dès la fin de février furent entreprises des reconnaissances, afin de découvrir l'itinéraire le plus commode vers les points trigonométriques de la côte orientale du Spitsberg, les monts Keilhau et Hedgehog. Mais, en raison du froid et des tempêtes, les expéditions de longue durée ne purent commencer que le 13 avril. A cette date deux détachements partirent, MM. Serghiievsky et Sikora vers le mont Keilhau, M. Vassiliev vers le mont Hedgehog. Au pied du Hornsundstind les deux troupes furent arrêtées par une tempête. Le 15, le temps étant devenu plus propice, les

explorateurs purent poursuivre leur route. MM. Serghiievsky et Sikora vers le sudest, M. Vassiliev vers le nord-est. Si le premier détachement ne put atteindre le mont Keilhau, il réussit, toutefois, à reconnaître la route; un autre jour, on pourrait donc recommencer l'entreprise avec de plus grandes chances de succès. Le détachement de Vassiliev, après avoir traversé la chaîne du Hornsundstind par un col situé dans sa partie septentrionale, atteignit, le 17 avril, le glacier de Horn, et, le lendemain, à cinq heures du soir, arriva en vue du signal érigé sur le mont Hedgehog. Après plusieurs tentatives pour atteindre le sommet, que l'existence de nombreuses crevasses couvertes de neige rendit vaines, on battit en retraite. Le retour dura cinq jours. Pendant l'excursion, le Hornsund avait débâclé, et, pour rallier la station la petite troupe dut faire le tour de la baie.

Cette excursion, qui fut très pénible, amena la découverte, à l'ouest du Hornsundstind, d'une importante chaîne de montagnes à laquelle fut donné le nom de Bredikine, en souvenir du savant professeur d'astronomie, ancien directeur de l'observatoire de Poulkovo. M. Vassiliev a ainsi traversé deux fois, entre le Hornsund et le Stofjord, l'extrémité méridionale du Spitsberg, région demeurée jusqu'ici complètement inconnue.

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Le 28 avril, par un temps superbe et une température de 17° C., MM. Serghilevsky et Sikora repartirent pour le mont Keilhau. Le 4 mai, ils arrivaient au pied de la montagne, et, trois jours après, en atteignaient le sommet où ils s'établissaient sous la tente avec deux matelots, tandis que les autres membres de l'expédition repartaient pour le Hornsund. La température qui, d'abord, était de- 12° s'éleva, ensuite à 5° C. Le 13 mai, les deux opérateurs purent faire plusieurs observations astronomiques et géodésiques et le 1er juin, déterminer à plusieurs reprises la latitude, l'azimut et l'heure de passage du soleil au méridien. Deux jours après, grâce à un temps très clair, ils exécutaient avec succès toute la série des observations astronomiques. Le 4 juin, on put déterminer les azimuts des côtés du triangle Hedgehog-Hornsundstind. Le 8 juin, M. Akmatov vint remplacer MM. Serghiievsky et Sikora qui retournèrent au Hornsund.

Le 11 mai, MM. Vassilief et Akmatov repartirent du Hornsund pour le Hedgehog; seulement après une marche très pénible de huit jours et mille péripéties, ils arrivèrent au pied de la montagne. Par suite de l'impossibilité d'établir un campement au sommet de cette cime et du manque de vivres, les explorateurs durent de nouveau battre en retraite. M. Vassiliev alla porter le reste des provisions à Serghiievsky, sur le Keilhau, tandis que M. Akmatov repartait directement pour le quartier général.

Le 8 juin, l'expédition de ravitaillement arrivait dans le Hornsund. Le brise-glace, le Ledokol amenait M. Tchernychev et, avec lui, MM. Kostinsky Pédachenko, Ostachenko-Koudriavtsev, Stelling, Schenrock, Siegel, et, l'étudiant Backlund.

Le 10, MM. Serghiievsky et Sikora rentraient à la station d'hiver apportant de mauvaises nouvelles de l'état des glaces dans le Storfjord. Le même jour, le Rurik mouillait dans le Hornsund et l'expédition se trouva ainsi au grand complet.

Suivant le plan élaboré en commun par tous les membres de l'expédition, MM. Vassiliev et Sikora partirent, le 14 juin, pour atteindre le Hedgehog par la côte

orientale, emmenant avec eux six pêcheurs d'Arkhangelsk, un sous-officier, un matelot et dix-huit chiens. Pour faciliter l'ascension du glacier, le capitaine du Bakan chargé de conduire les géodésiens au pied de la montagne leur adjoignit le lieutenant Bourkhanovsky, l'enseigne Ounkovsky et plusieurs hommes d'équipage. La navigation fut rendue difficile par les glaces flottantes, néanmoins, après six heures de route, les explorateurs débarquaient près du point d'où M. Vassilieff avait commencé l'ascension du Hedgehog, le 17 avril.

De son côté, M. Tchernychev, parti sur le Bakan, reconnut le cap Sud et le Storfjord. Malgré un brouillard intense le navire arriva sans encombre à Whales Head (côte orientale du Spitsberg occidental) 1, près de la cime portant le signal. L'ascension de la montagne fut immédiatement effectuée. MM. Kostinsky et Pédachenko demeurèrent sur ce sommet avec deux hommes, pendant que le Bakan, se dirigeait vers le mont Hedgehog, au pied duquel il arrivait cinq heures plus tard. M. Serghiievsky débarqua pour s'assurer si M. Vassilief se trouvait au sommet de la montagne. Il y arriva à minuit et y rencontra son collègue.

Au retour de M. Serghiievsky, le navire se dirigea vers la baie de Betty, au pied du mont Keilhau. Tous les explorateurs présents firent l'ascension de ce sommet où ils trouvèrent M. Akmatov. Le 22, l'érection d'une solide pyramide fut terminée au sommet de la montagne. Le même jour, le Bakan et le Ledokol se séparèrent le premier retourna dans le Hornsund, tandis que le second demeurait dans le Storfjord.

Voici maintenant le résumé des travaux exécutés par les différents groupes de l'expédition depuis ce moment:

Le Bakan se rendit à l'ile des Danois, et, après une nouvelle relâche dans le Hornsund, s'engagea de nouveau dans le Storfjord, mais partout les glaces l'empêchèrent d'approcher des côtes.

Le Ledokol réussit à aborder au Whales Head, où M. Schenrock fit des observations magnétiques. Après cette excursion, il revint au pied du Hedgehog, où M. Serghiievsky débarqua pour ramener avec lui M. Vassiliev, qui avait réussi à effectuer sur ce point tous les travaux astronomiques et géodésiques prescrits par le programme de l'expédition.

Le 7 juillet, les navires russes étaient de nouveau réunis dans le Hornsund. Les conditions s'étant modifiées et Vassiliev ayant terminé les travaux sur le Hedgehog, les membres de l'expédition dressèrent un nouveau plan de campagne. L'exploration de l'intérieur du Spitsberg aux environs des monts Svanberg et Chydenius fut décidée et confiée à MM. Vassiliev et Backlund qui devaient emmener avec eux un sous-officier, les sept pêcheurs d'Arkhangelsk et tous les chiens. M. Tchernychev devait se joindre à cette troupe et en prendre en quelque sorte la direction. M. Serghiievsky et tous les autres membres de l'expédition eurent pour mission de se rendre dans le Storfjord, afin d'ériger un signal au cap Agardh, de préparer l'exploration de Whales Point, et, d'ériger des signaux supplémentaires. En passant près du cap Sud, ils devaient tenter de s'approcher du pied du mont Keilhau et de se

1. Ne pas confondre Whales Head avec Whales Point sur la Terre d'Edge.

renseigner sur la marche des travaux poursuivis par MM. Siegel et Akmatov sur cette montagne.

Voyons maintenant ce qui a pu être exécuté de ce programme.

Le 30 juillet, MM. Vassiliev et Backlund débarqués dans la Klaas Billen Bay se dirigèrent vers le mont Chydenius, en suivant le versant ouest du massif de Svanberg. Le 1er août, ils furent obligés de s'arrêter à une altitude de 700 mètres devant une chaîne infranchissable de montagnes granitiques. Cette chaîne avait déjà arrêté en 1896 l'explorateur anglais Martin Conway'. Ils purent tourner cet obstacle et faire route sur un plateau couvert de neige. La plus grande altitude de ce plateau est de 1400 mètres. Pendant toute la durée du voyage des pluies torrentielles et des brouillards intenses forçaient les voyageurs à s'arrêter à chaque instant et les exposaient aux plus graves dangers. Mais, grâce à une reconnaissance systématique des lieux, MM. Vassiliev et Baklund purent découvrir, enfin, le mont Newton (Newton Toppen), un des sommets de la partie méridionale de la chaîne Chydenius, et, s'établirent à la base de cette cime, à une altitude de 940 mètres. Le 7 août, à 4 heures du matin, le temps s'éclaircit et ils purent trouver, sur un des contreforts du mont Newton, un emplacement convenable pour l'érection du signal. Ce signal est visible de différents points du réseau trigonométrique établi dans la partie septentrionale de l'archipel. La construction du signal achevée, le 8 août, à midi, M. Vassiliev détermina l'heure du passage, la latitude, la déclinaison, sur un point situé à 10 kilomètres au sud du mont Newton.

Le 13 août, l'expédition atteignit le sommet du mont Svanberg qui s'étend du nord au sud, sur une longueur de 1 500 mètres, et, de l'est à l'ouest, sur 500 mètres. Cette cime n'offrant pas un emplacement convenable pour Térection d'un signal, M. Backlund en établit un sur un sommet voisin auquel fut donné le nom de mont Backlund, en l'honneur de l'académicien, directeur de l'observatoire central de Pulkovo auquel La Géographie doit la communication de tous ces renseignements sur les importants travaux de la mission russe. Le 30 août, toutes les observations astronomiques et géodésiques étaient terminées.

Du mont Backlund, on aperçoit tous les signaux, sauf celui du cap. Agardh; ce signal auxiliaire doit donc être également visible de tous les autres points du réseau de triangles.

Pour terminer, indiquons maintenant le résultat des travaux poursuivis dans le Storfjord. Au signal du Whales Head MM. Kostinsky et Pédachenko purent exécuter toutes les observations astronomiques et géodésiques prescrites; M. Kostinsky, en outre, fit des levés au 50 000 et des observations météorologiques très complètes. Au cap Sud, M. Akmatov réussit des observations de la plus haute importance. Les visées faites par lui sur le Whales Point allongèrent l'arc de méridien mesuré d'environ 30 minutes ou d'un neuvième de l'arc à mesurer.

Après cette campagne si fructueuse, l'expédition russe quitta le Spitsberg, et, le 13 septembre, arriva en bon état à Tromsö.

1. Sir Martin Conway n'a point été arrêté par une chaîne de montagnes, mais par une indisposition de l'un des hommes qui l'accompagnaient (Voir Sir Martin Conway, With Ski and Sledges, Londres 1897, et, l'Alpinisme au Spitsberg adapté par Charles Rabot, Paris, Hachette. (Note du secrétaire de la Rédaction.)

En résumé, la mission russe a accompli la plus grande partie de la tâche qui lui avait été confiée; elle a mesuré les triangles du réseau méridional et déterminé la position jusque-là douteuse de cinq sommets. De plus, elle a prouvé que tous les points géodésiques de la côte est sont accessibles de la côte ouest au moyen de traîneaux. L'expédition a exécuté, en outre, de très nombreuses et intéressantes observations magnétiques au moyen d'excellents instruments Wilda Edelmann et du magnétographe Mascart. Enfin, elle a relevé des portions importantes de l'inté rieur du Spitsberg jusque-là inconnues, et, le capitaine Siegel a fait l'hydrographie des approches du cap Sud.

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