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très grande abondance des marchandises de provenance européenne, telles que étoffes, sucre, café, thé, quincaillerie, parfums, savon, etc.

Nous pouvons donc espérer créer dans cette région un débouché pour nos produits, mais à la condition expresse de respecter l'organisation du commerce local. Ce commerce est tout entier entre les mains des Tripolitains, et, il y aurait le plus grand danger pour l'avenir de nos possessions à vouloir les supplanter. Nous devons leur fournir les marchandises de vente dont ils ont besoin, en créant des entrepôts, sans vouloir nous mêler de transaction. En un mot, nous devons être leurs fournisseurs et non leurs concurrents.

J'aurais beaucoup à dire encore sur toutes ces régions, mais le temps me fait défaut. Il ne me reste plus qu'à exprimer ici, encore une fois, mes remerciements à tous, fonctionnaires ou officiers des trois missions, qui m'ont tant facilité la tàche. Ce sera le grand honneur de ma vie d'avoir eu de tels collaborateurs. Grâce à eux, cette tâche a été simplifiée et le but qui m'avait été assigné complètement atteint.

GENTIL.

De Zinder au Tchad et conquête du Kanem

par le capitaine P. Joalland

Chef de la mission Afrique centrale

Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs,

En 1898, une mission placée sous les ordres du capitaine Voulet quittait la France. ayant pour objectif le Tchad par la route de l'ouest. Le colonel Monteil avait déjà, en 1890, accompli ce voyage; son livre De Saint-Louis à Tripoli par le Tchad a été pour nous le guide le plus sérieux, un vrai Bædecker africain. Un de nos compatriotes, le capitaine Cazemajou, accompagné de l'interprète Olive, avait résolu de refaire la première partie de la route du colonel, en suivant une route plus au nord que celle de Kano. Notre brave camarade devait trouver la mort à Zinder, assassiné avec Olive par le sultan de ce pays. Dans la pénétration par le sud, Crampel avait été tué à El-Kouti, en cherchant la route du Congo au Tchad. M. Gentil devait relever l'étendard et le porter au but. De l'autre côté, Cazemajou et Olive tombaient en cherchant la route du lac par l'ouest; il nous était réservé de réussir par cette route, comme M. Gentil avait réussi par le sud.

La mission Voulet disposant d'effectifs considérables avait pour but de reprendre l'itinéraire Cazemajou, ou mieux, d'étudier la limite fixée par la convention francoanglaise du 14 juin 1898, d'atteindre le Tchad, de soumettre le Kanem et là de se conformer aux instructions que lui enverrait le gouvernement.

Cette mission comprenait :

Les capitaines Voulet et Chanoine, M. Peteau, Pallier et moi comme lieutenants, le D' Henric, et trois sous-officiers, le sergent-major Laury, le sergent Bouthel, et le maréchal des logis Tourot.

M. Peteau quittait la mission peu après son arrivée sur le Niger. C'est donc à l'effectif de 8 Européens et de 570 fusils que la mission allait se lancer sur la route du Tchad. Il serait intéressant de parler de notre traversée du Soudan; on comprendra aisément que le transport à 2500 kilomètres de Dakar d'une pareille masse, n'ait pu s'effectuer sans difficultés.

Passage de la route de ravitaillement en plein hivernage, descente du Niger de Bammako à Sansanné haoussa, traversée de la boucle de Djenné à Say, tous faits remarquables où chacun de nous dut déployer le maximum d'énergie et où les autorités militaires et civiles rivalisèrent de dévouement pour nous permettre d'atteindre notre point initial dans les meilleures conditions possibles.

LA GÉOGRAPHIE. III.

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Mais toutes ces différentes étapes ainsi que celles qui vont suivre jusqu'au 17 juillet 1899 ne sont pas encore du domaine de l'histoire; elles appartiennent à l'enquête judiciaire que mène le commandant Laborie.

J'arrive donc au sujet de ma conférence qui est le rendu compte des faits qui ont suivi la journée du 17 juillet 1899.

Après les tristes événements qui ont marqué cette date, la mission était reconstituée sous le commandement du lieutenant Pallier. J'ignorais alors que j'avais été promu capitaine, à la date du 2 juin 1899. Notre premier devoir fut de faire au colonel Klobb des funérailles dignes de lui; je partis un soir avec ma compagnie et mes cavaliers, soit environ 200 hommes, et, j'inhumai solennellement le colonel au village de Dankori. La nuit venait de tomber, la lune éclairait cette scène grandiose; l'émotion la plus violente nous étreignait tous; nos braves noirs eux-mêmes sentaient combien poignante était la scène à laquelle ils assistaient. Ils voyaient là le dénouement des tragiques événements qui venaient de se dérouler sous leurs yeux. Je profitai de l'occasion pour parler à mes hommes du devoir et de la justice de Dieu. Que leur ai-je dit exactement? Je ne le sais, mais ce qu'il y a de certain, c'est que plus tard aucun de ces hommes ne m'abandonnera, et, lorsque je ferai appel aux bonnes volontés pour continuer la mission, il n'en manquera pas un et c'est avec eux que nous irons planter le drapeau français sur le Tchad. Quelques jours après, mon ami Meynier, qui était tombé grièvement blessé au côté du colonel, étant à peu près remis, nous reprenions la route vers l'est. Nous entrions à Zinder le 30 juillet, la ville était évacuée. Le combat de Tyrméni livré la veille au sultan de Damaghara avait suffi à nous laisser la place. Je reviendrai plus tard sur ce pays de Zinder qui mérite à tous points de vue d'attirer l'attention de tous ceux qui s'intéressent aux choses coloniales. Un mois après, le 4 septembre, le lieutenant Pallier, estimant qu'il ne pouvait pas continuer la route vers l'est, reprenait la route du Soudan avec 300 hommes, le Dr Henric, le sergent-major Laury et le maréchal des logis Tourot. Le lieutenant Meynier et le sergent Bouthel seuls m'avaient offert leurs services. pour rester avec moi.

Le lieutenant Pallier ayant quitté Zinder le 3 septembre, je restais comme rési dent dans cette ville avec 300 hommes, entièrement dévoués à ma personne et prêts à reprendre la marche en avant si je le leur ordonnais. Tous avaient signé un engagement d'un an pour servir sous mes ordres.

Le 15 septembre, le sergent Souley Taraoré était assez heureux pour tuer dans une reconnaissance l'ancien Serky Amhadou, l'assassin du capitaine Cazemajou. Par cette mort le pays de Damaghara était complètement pacifié et tous les habitants rentraient dans Zinder quelques jours après. J'étais sans nouvelles du commandant Lamy, ou plutôt un homme d'Agadez m'annonçait que la mission Saharienne était partie dans l'ouest, sur la route de Gao.

La dépêche du 7 juillet 1899 disait au colonel Klobb que la jonction avec la mission Foureau-Lamy n'était pas le principal objectif, qu'il y avait, au contraire, un intérêt national à arriver le plus tôt possible sur le Tchad. Dans ces conditions, j'ai cru de mon devoir de reprendre la marche vers l'est, si malheureusement arrêtée par les événements antérieurs.

Les causes qui avaient arrêté le lieutenant Pallier n'existant plus, je me préparai à partir. Cette remise en route devait se faire sans retard, car il était de toute nécessité de profiter de l'enthousiasme que j'avais pu exciter chez les tirailleurs. De plus, je savais par renseignements, qu'il y avait une bande de 100 kilomètres sans eau à parcourir pour arriver au Tchad; la pleine lune avait lieu le 18 octobre, je dus donc en profiter pour faire cette étape pénible. En conséquence, je fixai le départ aux premiers jours d'octobre.

Organisation de la Mission. L'ancienne mission Voulet était mal organisée pour surmonter les difficultés de la route. Le convoi se composait, en effet, de bœufs porteurs, d'ânes, de chameaux, le tout conduit par des Mossis, gens indolents et incapables de rendre des services autrement que comme porteurs.

L'impôt de soumission de Zinder avait été payé en chameaux. J'engageai immédiatement 25 bellahs; ces gens, grands convoyeurs du désert, devaient nous rendre les plus grands services. Le convoi, qui avait toujours été pour nous une source perpétuelle d'ennuis, n'a plus désormais alourdi notre marche. En outre, chaque tirailleur était monté à chameau, un animal lui était affecté et était destiné à le transporter, lui, son supplément de cartouches et un minimum de 50 litres d'eau, si besoin en était.

L'instruction de nos méharistes fut vite faite, grâce à la bonne volonté et à l'entrain des hommes. L'honneur de cette organisation revient à M. le lieutenant Meynier, dont l'intelligence et le dévouement ont été au-dessus de tout éloge. Ayant servi longtemps dans la région de Tombouctou, il possédait la connaissance parfaite de ce moyen de transport.

Je n'insiste pas sur la nouvelle éducation morale que nous avons dû donner à nos hommes; ce que je puis affirmer, c'est que nous leur avons inculqué l'idée du devoir et de la justice, et, au lieu de se conduire en Sofas, ils se sont montrés, pendant toute la mission, des tirailleurs fiers de travailler pour la France.

Le 3 octobre, la nouvelle mission quittait Zinder. Je laissais dans ce poste le sergent Bouthel avec une garnison de 100 fusils. J'emmenais avec moi le lieutenant Meynier, car si je venais à disparaître pendant la campagne, je considérais qu'un sous-officier n'aurait pu mener à bonne fin la mission confiée par le gouvernement, tandis qu'à Zinder le sergent Bouthel était assez intelligent pour bien remplir le rôle que je lui assignais.

La colonne était ainsi composée: 130 tirailleurs, 14 canonniers, en tout 165 fusils et un canon de 80 mill. de montagne; 20 spahis; 180 chameaux; 30 chevaux; 23 chameliers.

Le convoi transportait les vivres, les cartouches de réserve et les munitions d'artillerie. La mission possédait 100 000 cartouches, 50 coups de canon et 163 bons fusils.

Le 10 octobre, nous arrivions à Gouré. Là je recevais la nouvelle que le commandant Lamy se trouvait à Agadez, retenu en ce point par la mauvaise foi des gens qui se refusaient à lui servir de guides; de plus la mission Saharienne était fort éprouvée par le manque de vivres et de moyens de transport. Le commandant ne comptait arriver à Zinder que vers le milieu de novembre. J'envoyai aussitôt au

sergent Bouthel l'ordre de fournir à la mission tout ce qu'elle demandait. Grâce à ce secours, la mission Foureau-Lamy devait pouvoir continuer sa route vers le Tchad.

De Gouré jusqu'à Kakara (Long. 9° 16') se trouvent plusieurs villages assez importants. Nous arrivions à Kakara, dernier village avant le Tchad, le 17 octobre. A 65 kilomètres de ce point se trouve le puits de Mihr; au delà s'étend un long espace sans eau que j'estimais de 100 kilomètres, mais qui, par suite des crochets, se trouva être de 125 kilomètres.

Arrivés à Mihr le 19, à onze heures du soir, nous employions les journées du 20 et du 21 à charger l'eau destinée à la rude étape de Mihr à Wudi, où l'on arrivait, après avoir parcouru 125 kilomètres, en trente-huit heures, et, 525 kilomètres en vingt et un jours. Dans cette belle marche, je n'avais perdu ni un homme, ni un cheval, ni un chameau, et tous les tirailleurs étaient aussi joyeux que nous, en voyant notre drapeau flotter gaîment sur les rives du Tchad.

Malgré les événements les plus terribles, la mission Joalland-Meynier avait recueilli toutes les bonnes volontés et avait la joie de couronner de succès les efforts faits par le gouvernement pour la pénétration dans le centre de l'Afrique.

Le lendemain 23, j'arrivais à N'Guigmi, où je restai jusqu'au 2 novembre. Je signai avec le sultan un traité nous donnant la rive ouest du Tchad, de Barroua à N'Guigmi, et la rive nord jusqu'au Kanem.

Les renseignements recueillis alors sur le pays que nous allions parcourir nous faisaient prévoir de grosses difficultés. Elles furent encore plus grandes que nous l'avions pensé.

Tout le pays entre N'Guigmi et N'Gouri est absolument désert. Autrefois habité par des noirs, il a été complètement abandonné depuis l'arrivée des Ouled Sliman; les habitants se sont tous retirés vers le Tchad et le sud du Kanem.

J'avais eu soin de constituer un fort approvisionnement de mil. La question des vivres, qui ne s'était jamais posée jusque-là, devenait, à partir de ce jour, la question principale; pendant toute la durée de la mission, je n'ai pu donner que la demi-ration aux hommes et aux chevaux alors que je demandai à tous le maximum d'efforts. Jusqu'à Rig-Rig nous ne trouvâmes âme qui vive et pourtant notre marche était continuellement surveillée. Tout le long de notre route on voyait s'allumer de grands feux, mais nous ne réussîmes point à nous aboucher avec les indigènes pour leur faire part de nos intentions pacifiques.

Le 8 novembre, j'arrivais à Rig-Rig, après avoir traversé les terrains arides du nord du Tchad. Rig Rig est le centre d'un groupe de petits villages occupé principalement par des Tebbous et situé à l'est de Kiskaoua.

Tout était évacué, mais une reconnaissance fut soudain attaquée par une centaine de Tebbous. Le sergent Souley Taraoré qui commandait la reconnaissance se distingua là une fois de plus; l'ennemi se battit avec une telle énergie, qu'il fut impossible de faire un seul prisonnier; trente hommes restaient à terre, mais de notre côté nous avions un tué et trois blessés.

Une autre reconnaissance était attaquée dans les mêmes conditions; le sergent Boubou Taraoré qui la commandait forçait l'ennemi à battre en retraite.

Situation politique du Kanem lors de notre arrivée. Avant de raconter les opé

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