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La culture du café dans le monde

Dans cette étude, à laquelle nous entendons conserver un caractère purement géographique, nous laisserons de côté tout ce qui concerne la culture, la manipulation et le commerce du café, car ces diverses questions nous entraineraient à des développements hors de proportion avec le cadre qui nous est imposé. Nous ne voulons pas davantage discuter ici le problème économique soulevé par la question des droits d'entrée et nous nous contenterons de le signaler en passant.

Pour limiter notre sujet, nous avons divisé cette étude en trois parties : 1o la géographie des espèces naturelles de caféiers; 2o la répartition des cultures dans le monde; 3° la consommation du café dans les divers pays. Ces trois parties, pour être d'inégale importance, ne sont pas moins dignes de solliciter l'attention du géographe.

I

Répartition géographique des espèces naturelles.

Le caféier est une plante du genre Coffea, appartenant à la famille des Rubiacées. Cette famille, qui occupe le quatrième rang, par ordre d'importance numérique, se trouve principalement répandue dans les régions chaudes du globe, et il n'est certainement pas un voyageur botaniste qui n'ait été frappé de l'abondance des Rubiacées dans les forêts tropicales. C'est une observation que nous avons eu maintes fois l'occasion de faire dans le Mayombe (Congo), où les arbustes du sous-bois, sans compter de nombreux arbres de grande taille, appartiennent à cette famille.

Or les Rubiacées sont, au contraire, peu abondantes dans les pays tempérés. On ne compte en France que six genres appartenant à cette famille, et ces six genres ne comportent qu'une soixantaine d'espèces. En Belgique, le nombre de ces espèces se réduit même à quatorze1; il est de seize seulement pour la région parisienne et de vingt-deux pour la Lorraine. Et, cependant, la famille

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1. Crépin, Manuel de la Flore de Belgique.

2. G. Bonnier et G. de Layens, Nouvelle flore des environs de Paris, Paris. 3. D.-A. Godron, Flore de Lorraine, Paris, 1861.

des Rubiacées comprend, pour le monde entier, plus de trois cents genres de quatre mille espèces!

La flore tropicale actuellement connue est incomparablement plus riche en Rubiacées. Pour en fournir des preuves, nous n'avons qu'à consulter les ouvrages concernant la flore des pays chauds. Le Père Düss' signale aux Antilles 41 genres et 68 espèces; de Cordemoy2, à la Réunion, 17 genres et 31 espèces; Engler3, à la côte occidentale d'Afrique, 58 genres et 221 espèces; Durand et Schinz', à l'État indépendant du Congo, 36 genres et 75 espèces; Ach. Richard, en Abyssinic, 17 genres et 36 espèces, etc. Nous pourrions étendre cette liste et montrer ainsi que la famille des Rubiacées est réellement l'une des plus répandues dans les parties chaudes du globe. C'est, d'ailleurs, l'opinion spécialement autorisée d'Oscar Drude. D'après lui, 75 pour 100 des espèces de la famille sont tropicales et recherchent surtout les forêts chaudes et humides. Nous nous contenterons de dire, pour terminer, que, sur 712 espèces de l'État indépendant, décrites par Durand et Schinz, nous trouvons la famille des Rubiacées en première ligne avec 75 espèces, les Légumineuses avec 73, les Composées avec 64, les Labiées avec 33, etc. Ces exemples suffisent, croyons-nous, pour justifier ce que nous avons dit de l'énorme prédominance des Rubiacées dans les régions tropicales.

Cette famille compte d'ailleurs un assez grand nombre de plantes utilisées par l'homme. Nous ne citerons que les suivantes : Quinquina (genre Cinchona); Ipecacuanha (Cephalis Ipecacuanha A. Rich); Garance (Rubia tinctorum L.); Gambir (Uncaria Gambir Rosbg.); Cafe (genre Coffea) appartenant à la tribu des Ixorées, qui paraît essentiellement africaine.

Le caféier est, sans contredit, au point de vue de l'extension de sa culture comme à celui de l'importance du produit qu'il nous procure, l'un des végétaux les plus utiles.

Nous nous bornerons ici à la description sommaire du caféier d'Arabie (Coffea arabica L.) qui est, comme nous l'avons déjà dit, l'espèce la plus communément cultivée. C'est un arbuste ou petit arbre, pouvant atteindre 8 à 9 mètres de hauteur, et, présentant de loin, quand il est couvert de ses fruits, quelque ressemblance avec un cerisier. L'écorce de la tige, rude à la surface, présente habituellement une coloration grisàtre; les branches, longues, flexibles, étalées, portent des feuilles en toutes saisons, car le caféier d'Arabie

1. R. P. Düss, Flore phanérogamique des Antilles françaises, in Ann. de l'Institut colonial de Marseille, 1897.

2. E. Jacob de Cordemoy, Flore de l'ile de la Réunion, Paris, 1895.

3. D' A. Engler, Die Pflanzenwelt Ost-Afrikas und der Nachbargebiete, Berlin, 1895.

4. Th. Durand et Hans Schinz, Etude sur la flore de l'État indépendant du Congo, Bruxelles, 1896. 5. Ach. Richard, Voyage en Abyssinie, Paris, 1847.

6. Oscar Drude, Manuel de géogr, botan., édit. franç., p. 232.

est une plante à feuilles persistantes. Les feuilles sont presque toujours elliptiques ou ovales, ou encore atténuées aux deux extrémités; leur largeur varie de 1 cent. 5 à 5 centimètres et leur longueur de 5 centimètres à 20 centimètres. Le pétiole mesure, en moyenne, 1 centimètre de longueur, et la pointe qui termine le limbe 1 cent. 5. De chaque côté de la nervure médiane se voient 9 à 12 nervures secondaires à direction nettement recourbée; les bords de la feuille sont souvent un peu ondulés.

La floraison est de courte durée; mais elle se reproduit plusieurs fois dans le cours d'une année. Les fleurs ressemblent quelque peu à celles du jasmin d'Espagne et dégagent une odeur pénétrante. Elles sont toujours réunies au nombre de 3 à 7 à l'aisselle d'une feuille et chaque groupe de trois fleurs est. entouré de quatre bractées.

La fleur, portée par un pédoncule très court, possède un calice pourvu de cinq divisions très petites ou même à peine marquées. La corolle, à cinq divisions, présente un tube qui mesure un demi centimètre de long; les lobes sont lancéolés et obtus; ils ont environ 0 cent. 7 de long. Les étamines exsertes possèdent un filet très court (0 cent. 15) et des anthères de 0 cent. 60 à 0 cent. 70 de long. Les deux stigmates, qui ont jusque 6 à 7 millimètres de long, font saillie aussi en dehors du tube de la corolle. Le style mesure environ 1 cent. 5 de longueur; mais quelquefois il est beaucoup moins long et se trouve caché dans le tube de la corolle.

A la suite de la pollinisation, la corolle, les étamines et le style disparaissent; mais l'ovaire, entouré par le calice, persiste et donnera le fruit. Or, cet ovaire, formé de deux loges séparées par une cloison et contenant chacune un ovule, fournira deux graines. Ce fruit présente habituellement une forme ovoïde et, à son sommet, on peut distinguer facilement, sous la forme d'une petite couronne, ce qui reste des bords du calice, comme on le retrouve d'ailleurs au gros bout d'une poire de nos pays.

Le fruit de caféier d'Arabie est généralement désigné sous le nom de cerise. A maturité il est rouge jaunàtre, plus rarement jaune (var. amarella) ou blanc (var. leucocarpa). La paroi de ce fruit comprend trois parties : l'une extérieure, formée d'un parenchyme assez serré et provenant du tissu du calice; une deuxième formée par un parenchyme lâche et peu résistant; enfin, une troisième, constituée par une couche de cellules à parois très épaisses et constituant une enveloppe dure, résistante, assez analogue au noyau qui entoure la graine chez l'amandier, mais cependant beaucoup plus mince. Cette dernière couche vient former, au milieu du fruit, une cloison double, séparant les deux loges. Dans chaque loge se trouve une graine qui est convexe sur son côté extérieur, mais qui est plane et marquée d'un sillon longitudinal du côté interne. Cette graine comprend un tégument très mince, qui manque le plus souvent sur les graines livrées au commerce, et recouvrant l'amande,

composée d'un albumen corné renfermant un embryon à cotylédons foliacés.

Parfois il arrive qu'une des graines avorte: alors, celle qui reste empiète quelque peu sur l'autre loge, et, au lieu de rester plane d'un côté, devient plus ou moins convexe; mais cette face se reconnaît toujours à la présence du sillon dont elle est marquée (cafés caracolis).·

Quand la graine est encore recouverte de l'enveloppe parcheminée que forme la partie la plus interne du fruit, on dit que le café est en parche. Beaucoup de planteurs le livrent aujourd'hui sous cette forme, au lieu de l'expédier en grains.

Le fruit jeune du caféier est vert; mais il devient bientôt rougeâtre et, à la maturité, il tire sur le noir. Après la cueillette, les fruits sont, d'abord, débarrassés de leur pulpe (dépulpage) et on obtient, par cette première opération, le café en parche. Ensuite l'enveloppe parcheminée est, elle-même, enlevée par la décortication et les graines sont alors mises en liberté telles que le commerce les livre à la consommation.

La principale espèce cultivée est le Coffea arabica L. Or, à l'encontre de l'opinion généralement admise, nous ne croyons pas qu'elle soit originaire -d'Arabie, car cet arbuste n'y a jamais été rencontré à l'état spontané. Il est, au contraire, connu depuis fort longtemps en Abyssinie où il porte le nom de Boun'. L'abbé Raynal pense que le caféier, véritablement originaire d'Abyssinie, a été transporté dans l'Yémen par les conquérants éthiopiens : il serait, par conséquent, d'origine africaine. Cependant, en l'absence de toute preuve certaine, il convient de rester dans le doute, car d'anciennes relations, comme celles du Père Tellez, jésuite portugais, et de Ludolfe, ne font même pas mention du café. Il est vrai, toutefois, que Charles-Jacques Poncet3, qui effectua un voyage en Ethiopie dans les années 1698, 1699 et 1700, rapportait avoir eu connaissance de la culture du café dans le pays. L'auteur du Voyage de l'Arabie heureuse est très porté à adopter cette opinion sur l'origine du caféier dit d'Arabie; on voit donc par là qu'elle n'est pas nouvelle.

Le Coffea arabica L. n'est, d'ailleurs, pas l'unique espèce originaire de l'Afrique, car on en compte actuellement un grand nombre, réparties à la côte occidentale et à la côte orientale, comme on peut s'en rendre compte, plus

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1. Ach. Richard (Voyage en Abyssinie, tome IV, Botanique, Paris, 1847) s'exprime comme il suit : Ce qu'il y a de certain, c'est que le caféier (il s'agit du Coffea arabica L.) croit en abondance et tout à fait sans culture dans le pays des Changallas. On le cultive abondamment dans les provinces de l'Enarrea et de Caffa. Mais partout ailleurs, en Abyssinie, il est peu cultivé. 2. Abbé Raynal, Histoire philosophique et politique du commerce et des établissements des Européens dans les deux Indes.

3. Cette relation est insérée dans le quatrième Recueil des Lettres écrites des Missions étrangères, imprimé à Paris en 1704.

4. Voyage de l'Arabie heureuse par l'Océan oriental et le détroit de la mer Rouge, Amsterdam, 1716.

facilement que par une sèche énumération, en consultant la carte planisphère qui accompagne cette étude. (Les numéros en couleur rouge indiquent les espèces rencontrées dans les divers pays.) On ne distingue pas moins de 22 espèces à la côte occidentale d'Afrique (de Wildeman, Congrès de botanique, 1900), et, parmi les plus importantes, nous signalerons : C. arabica L.; C. liberica Hiern; C. stenophylla G. Don; C. canephora Pierre, etc.

A la côte orientale d'Afrique, nous devons, tout d'abord, signaler Coffea arabica, probablement originaire des provinces d'Abyssinie. Plus au sud, du côté de Mozambique, on rencontre C. zanguebariae Lour.; C. racemosa Lour.; C. Ibo Frohner.

Trois espèces se trouvent confinées dans les îles voisines C. brachyphylla Radlk. à Nossi-Bé; C. mauritiana Lour. et C. macrocarpa A. Rich., aux îles Maurice et de la Réunion.

Les espèces indigènes d'Asie sont, sans exception, des plantes de régions montagneuses C. bengalensis Roxbg. se rencontre dans l'Himalaya jusqu'à 850 mètres d'altitude, au Bengale, à Java et à Sumatra; C. Wightiana W. et Arn. et C. travancorensis W. et Arn. se trouvent à Travancore et à Ceylan jusqu'à une altitude de 1 100 mètres; C. salicifolia Miq. s'élève jusqu'à 1 200 mètres à Java. Dans les montagnes du Bengale (de 700 à 1500 mètres) se trouvent les espèces du sous-genre Lachnostoma, C. Khasiana Hook., f. Mysore, et C. Jenkinsii Hook., f. du Bengale, au voisinage desquelles il conviendrait de placer C. densiflora Bl., de Java, et C. uniflora K. Sch., de la Nouvelle-Guinée.

De toutes les espèces du genre Coffea une seule est véritablement l'objet d'une grande culture, c'est le C. arabica L., dont on connaît un certain nombre de variétés. Il est vrai qu'on cherche depuis un certain nombre d'années à propager la culture du C. liberica Hiern, et, plus récemment, celle de C. stenophylla G. Don.

Certaines espèces appartenant au genre Coffea ne sont, d'ailleurs, pas susceptibles d'être cultivées pour la production du café, par exemple le C. jasminoïdes Welw., que nous avons eu, nous-même, l'occasion de rencontrer au Congo, et le C. Humblotian H. Bn., dont les graines ne contiennent pas trace de caféine'.

En résumé, il résulte des indications relatées ci-dessus, que les espèces utilisables du genre Coffea paraissent toutes originaires de l'Afrique tropicale où elles se trouveraient confinées entre le 15° de Latitude N. et le 15° de Latitude S. Un certain nombre d'autres espèces, d'ailleurs, non cultivées, sont originaires de l'Asie et des îles de la Sonde; mais l'Amérique, pays de prédilection de la culture du caféier, ne possède d'autres espèces que celles qui ont

1. Bertrand, C. R. Ac. Sc., 1900.

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