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Récentes explorations

ethnologiques et archéologiques aux États-Unis

Durant l'année 1900, les particuliers aussi bien que les institutions publiques ont déployé, en Amérique, la plus grande activité dans les diverses parties de l'anthropologie. Les hommes et même les femmes du monde s'intéressent de plus en plus à l'ethnologie et à l'archéologie de leur pays, et, des sommes considérables ont été consacrées aux progrès de ces sciences. Mais personne ne s'est montré plus généreux que M. Morris K. Jesup, de New-York. C'est lui qui a organisé l'expédition du Pacifique septentrional, destinée à enrichir les collections de l'American Museum of Natural History et à étudier les relations existant entre les peuples de l'Asie et de l'Amérique. Ces recherches ont duré plusieurs années, et, quoiqu'elles ne soient pas assez avancées pour autoriser des conclusions définitives, les collections rassemblées fournissent, cependant, de nombreux renseignements sur l'archéologie et l'ethnologie de ces régions. Le D' Franz Boas, curateur du département d'anthropologie de l'American Museum, s'est voué spécialement à l'étude des langues des Indiens de la côte du Pacifique septentrional; il était tout particulièrement digne d'entreprendre cette œuvre. Une grande partie de ces matériaux linguistiques sera publiée sous forme de textes par le Bureau of American Ethnology, de Washington.

M. Harlan Smith s'est occupé de l'archéologie de cette même région, et particulièrement de la Colombie britannique. Il a recueilli de très riches collections. La race qui occupe cette zone était loin d'avoir une culture aussi développée que les tribus plus méridionales; les instruments et autres produits manufacturés ne supportent pas la comparaison avec les objets similaires de cette dernière provenance. Toutefois, l'objet des efforts de M. Smith a été atteint, car nos connaissances sur les constructeurs des cairns et des monceaux de coquilles ont fait des progrès et les collections de l'American Museum se sont enrichies parallèlement.

La difficile exploration de la côte asiatique a été entreprise par plusieurs expéditions. La plus féconde en résultats est celle que dirigeait le Dr Berthold Laufer. Elle avait à étudier les territoires occupés par les Aïnos et les Giliaks dans l'ile Sakhaline; ceux des Giliaks dans la vallée de l'Amour et sur la côte du Liman; ceux des Golds, sur les rives du même fleuve, entre Khabarovsk et Sofisk; la côte de la mer d'Okhotsk, la vallée du Poronaï et les environs de la baie de Patience, qui for

ment le pays des Olchas et des Toungouses; enfin, la rivière Amgoun occupée par quelques-unes des tribus toungouses. Cette vaste région fut explorée par la mission du Dr Laufer en 1898, 1899 et 1900. Les résultats ont été des plus importants, tant au point de vue de l'ethnologie que des collections.

Une autre partie de l'expédition Jesup a continué, cette année, ses opérations dans le nord-est de la Sibérie, sous la direction de MM. Waldemar Jochelson et Waldemar Bogoras. Le territoire dont elle est chargée est situé au nord-est de l'Amour; il s'agit d'étudier les relations des indigènes de cette région avec les habitants du nord-ouest de l'Amérique, et, en même temps, les races déjà visitées par le Dr Laufer et celles qui habitent plus vers l'ouest. On peut espérer que cette exploration donnera la solution de nombreux problèmes ethnologiques, notamment celui, si important, des relations entre les deux continents. Il est heureux que ces recherches aient été entreprises en ce moment, car la découverte des mines d'or près des côtes de la mer de Bering aura pour résultat des modifications rapides et profondes dans les mœurs et le genre de vie des indigènes. Il est possible même que, dans peu d'années, certaines tribus soient entièrement éteintes.

De Vladivostok, l'expédition a atteint, par eau, le nord-est de la mer d'Okhotsk, où elle a dû hiverner. M. Jochelson pense passer cette saison parmi les tribus de la côte, qui appartiennent, en partie, à la grande famille Tungas répandue sur la plus grande partie de la Sibérie, en partie à un groupe ethnique peu connu, qui occupe l'extrémité nord-orientale du continent asiatique. M. Bogoras veut, de son côté, faire un long voyage en traîneau à chiens, à travers le pays situé au nord de la péninsule de Kamtchatka. Il se propose de séjourner parmi les Tchouktchis. M. Bogoras, qui a déjà passé plusieurs années parmi les Tchouktchis occidentaux, était tout indiqué pour cette étude. Ces indigènes sont nomades et vivent des produits de leurs grands troupeaux de rennes. Il y a aussi une petite tribu d'Eskimos sur la côte de Sibérie, M. Bogoras compte la visiter.

Après avoir terminé ses études sur les rives de la mer d'Okhotsk, M. Jochelson se dirigera vers le nord-ouest, et, traversera la haute chaîne côtière par une route que n'a encore parcourue aucun blanc. Il espère atteindre par cette voie le territoire des Youkaghirs. Dans une expédition antérieure, M. Jochelson a visité un rameau occidental de ce peuple auquel il est parvenu, en partant d'Irkoutsk. En raison des difficultés de la route, il ne retournera pas à la côte de la mer d'Okhotsk, mais continuera son voyage vers l'ouest, à travers toute l'Asie, et, reviendra à New-York par Moscou et Saint-Pétersbourg. MM. Jochelson et Bogoras ont fait tous deux une série d'études remarquables sur la Sibérie; elles sont actuellement en cours de publication par les soins de l'Académie des Sciences de Saint-Pétersbourg. Ils ont rassemblé ainsi une masse de documents concernant les coutumes, les langues et le folk-lore des tribus qu'ils ont visitées. On est en droit d'espérer que leur voyage, qui durera deux ans, aura pour résultat d'enrichir les collections du Museum et d'augmenter la somme de nos connaissances sur ces peuples si intéressants.

L'American Museum dirige d'autres expéditions vers les ruines des anciens pueblos du cañon du Chaco, dans le nord-ouest du Nouveau-Mexique. Elles sont conduites par M. George H. Pepper, qui, pendant plusieurs années, a fouillé avec le plus

grand succès, la grande ruine connue sous le nom de pueblo Bonito. Les dépenses sont supportées par MM. Hyde, de New-York; les résultats ont amplement justifié la mise de fonds nécessitée par ces recherches. Les collections de poteries, d'instruments de pierre et d'os, de parures en turquoises ou en coquillages, sont, à bien des points de vue, les plus remarquables qui aient été extraites des ruines situées dans le territoire des États-Unis. On pense que l'American Museum a l'intention de publier une monographie sur ce sujet, dès que les études concernant le pueblo Bonito auront été complétées.

D'autres explorations ont été dirigées, sous les auspices de ce Museum, par M. Marshall H. Saville, qui a reçu pour tâche l'étude de l'ancienne cité de Mitla. Ces ruines fameuses consistent, comme on sait, en un important groupe de bâtiments situés dans l'état mexicain d'Oaxaca. Ils sont construits en adobe et en pierre; quelques-uns sont ornés d'une mosaïque formée de pierres fixées dans le ciment, et de peintures murales. On s'attend à ce que ces recherches jettent une vive lumière sur l'ancienne civilisation des Zapotèques. Les dépenses sont supportées par M. le duc de Loubat, dont le nom est honoré par tous les Américanistes pour l'intérêt qu'il porte à l'archéologie et à la paléographie mexicaines.

Tout aussi importantes sont les études poursuivies depuis neuf ans par M. Adolf F. Bandelier dans les anciennes ruines du Pérou et de la Bolivie. La masse de matériaux, déjà envoyés à l'American Museum par cet explorateur bien connu, a surpris ceux mêmes qui étaient familiers avec ce riche territoire. Lorsqu'elles seront classées, les collections d'antiquités boliviennes et péruviennes du Museum ne seront égalées par aucune autre.

Les expéditions patronnées par cet établissement scientifique sont presque trop nombreuses pour qu'on les mentionne toutes. Il faut cependant encore signaler le voyage fait par M. Roland B. Dixon chez les Maidu et chez d'autres tribus de la Californie septentrionale. Cet explorateur a rapporté une collection d'objets en vannerie. M. A. L. Kroeber a visité la tribu des Arapaho et étudié leurs mœurs et leurs cérémonies.

De nombreuses explorations, rendues possibles par la générosité de plusieurs citoyens de Chicago, ont été dirigées par le département de l'Anthropologie du Field Columbian Museum. Quoique celui-ci n'ait été fondé qu'après l'Exposition de 1893, il occupe, cependant, un rang honorable parmi les institutions similaires de l'Amérique. Les pueblos anciens et modernes de l'Arizona et du Nouveau-Mexique ont fourni un sujet d'études presque inépuisable. En 1899, M. Stanley Mac Cormick a donné 25000 francs pour recueillir des collections chez les Indiens Hopis (autrefois nommés Mokis ou Moquis). Ce don permit d'équiper deux expéditions. L'une sous la direction de M. A. J. A. Burt, près de deux mois, fouilla les ruines préhistoriques du Little Colorado River, et, recueillit environ 300 exemplaires de poteries, de tissus et d'instruments en os, en pierre ou en coquilles. La seconde mission, dirigée par le Dr G. A. Dorsey, curateur du département d'Anthropologie, assisté par M. H. R. Voth, visita six villages hopis et collectionna de nombreux objets. En février de cette année, le curateur-adjoint du département d'Anthropologie visita la réserve indienne de Grand River dans l'Ontario (Canada); il assista à la céré

monie du « Sacrifice du chien blanc » chez les les Iroquois païens, et, acquit une collection des instruments employés dans cette circonstance et vingt masques portés pendant les danses.

Pendant l'été dernier (1900), le Musée d'archéologie de l'Université de Pensylvanie (Philadelphie), dont M. Stewart Culin est curateur, coopéra, avec le Field Columbian Museum, à l'étude des tribus indiennes des États de l'ouest et du nord-ouest. Le Dr Dorsey et M. Culin partirent de Chicago en mai, visitèrent d'abord, les Sauk et les Renards qui habitent l'Iowa, puis, allèrent à Guernsey, dans le Wyoming, où ils explorèrent une carrière indienne de jaspe, et, à la réserve de Wind River où ils étudièrent les Shoshones et les Arapahos. Ils passèrent, ensuite, dans l'Idaho, où ils virent les Bannocks de Fort-Hall, de là, dans l'Utah, où ils étudièrent les Utes de White Rocks et d'Ouray, et, dans le Nevada, où ils visitèrent les Painter de Pyramid Lake. Continuant son voyage vers la Californie, M. Dorsey arriva à Ukiah, puis, au lac Klamath, tandis que M. Culin allait à la vallée de Hupa. Les deux explorateurs se rencontrèrent à Seattle, dans l'État de Washington, où ils passèrent quelques jours parmi les Makahs. Après un voyage à Victoria (Colombie britannique) et à Vancouver, M. Dorsey recueillit des collections parmi les Nez Percés et les Gros-Ventres, tandis que M. Culin se livrait à des observations sur les Yakima et les Umatilla du Washington et de l'Orégon. Au retour, ils s'arrêtèrent dans les grandes réserves des Sioux, dans le Montana, le Dakota septentrional et le Dakota méridional. Les résultats scientifiques de cette expédition sont de la plus haute importance. Il faut noter aussi l'esprit tout amical qui a animé les représentants des deux institutions rivales. Les dépenses afférentes à l'Université de Pensylvanie ont été supportées par M. John Wanamaker, de Philadelphie.

En même temps, le Field Columbian Museum faisait exécuter des fouilles dans les pueblos préhistoriques de Little Colorado River et dans les ruines des pueblos hopis de Sikyatki et d'Old Walpi, situées près des villages actuels de ces noms, dans l'Arizona septentrional. Elles ont été récemment terminées et ont donné d'importants résultats.

Le Peabody Museum de l'Université Harvard (Cambridge. Massachusetts) dirigé par le prof. F. W. Putnam, a continué l'exploration des fameuses ruines de Copan dans le Honduras. Par un traité conclu à Tegucigalpa, en février dernier, il a acquis le droit exclusif de fouiller ces ruines et le terrain environnant pendant une période de dix ans, et, celui d'emporter à Cambridge les objets intéressant l'archéologie qui y seront découverts. M. G. B. Gordon dirige les recherches dans ce domaine si intéressant.

L'été dernier, le Dr Frank Russell a fouillé, pour le Peabody Museum, les pueblos ruinés de l'Arizona; il a, ainsi, enrichi les splendides collections rapportées en 1886-89 par l'expédition Hemenway et exposées maintenant dans cet établissement.

On pourrait supposer que les expéditions patronnées par le département de l'Anthropologie du National Museum de Washington auraient plus d'importance que celles dont les particuliers font les frais. Mais il n'en est rien, car les fonds destinés par le gouvernement central aux recherches anthropologiques sont souvent loin d'atteindre la valeur des dons magnifiques reçus par les établissements non-officiels.

Cependant, grâce à la coopération des départements de l'Intérieur, de la Guerre, et, de la Marine, beaucoup de travaux ont été exécutés et de nombreuses collections réunies presque sans dépenses pour le National Museum. D'ailleurs, les fonds sont suffisants pour permettre au personnel du Museum d'entreprendre des recherches. importantes.

La conquête récente de Porto-Rico a donné un nouvel essor à l'étude de l'archéologie des Antilles. Au commencement de cette année, le major J. W. Powell, directeur du Bureau d'ethnologie américaine, et, le prof. W. H. Holmes, curateur d'anthropologie au Musée national, ont fait une reconnaissance préliminaire de plusieurs de ces îles, avec l'intention de les explorer plus tard avec plus de détails.

Au printemps, M. Holmes a visité les remarquables mines d'obsidienne de Hidalgo (Mexique) et les ruines de l'ancienne ville de Xochicalco, la « colline des Fleurs », dans l'État de Morelos. Les découvertes faites dans les mines d'obsidienne sont du plus haut intérêt, car c'est le gisement le plus considérable qui existe. dans l'Amérique du Nord, et, peut-être, dans le monde entier. Un des tas de débris d'obsidienne n'a pas moins de 8 à 10 000 mètres cubes. Si l'on considère que ce n'est qu'une faible partie des rejets de fabrication, on comprendra l'importance qu'avait chez les Aztèques l'industrie des armes et des instruments en obsidienne. Le Dr Walter Hough, du National Museum, a aussi exploré le Mexique. Parti de la frontière septentrionale, il est descendu jusqu'à la ville de Mexico, en étudiant surtout la botanique dans ses rapports avec l'ethnologie. Il s'est attaché, surtout, à la préparation de la plante nommée Maguey, qui joue un si grand rôle dans la vie domestique des Mexicains. Ceux-ci l'emploient, à la fois, comme aliment et, pour faire des vêtements et des toitures.

En 1901, l'Exposition panaméricaine aura lieu à Buffalo. Il s'y tiendra un Congrès Indien, composé de membres de tribus indigènes, qui y paraîtront dans leurs costumes nationaux, s'y livreront à des danses, et, présenteront des spécimens de leur industrie. Comme d'ordinaire, le gouvernement aura une grande et belle exposition dans un bâtiment spécial. Pour donner une idée des habitants des Philippines, la commission de l'Exposition de Buffalo a fait visiter cet archipel par le colonel F. F. Hilder, du Bureau d'ethnologie. Il a recueilli une remarquable collection d'instruments, de vêtements, de produits alimentaires, de bois indigènes, et, d'armes. Ces dernières comprennent même de l'artillerie fabriquée par les Philippins pour défendre leur indépendance.

La Smithsonian Institution a envoyé le Dr J. Walter Fewkes passer l'hiver de 1899-1900 parmi les Indiens Hopis de l'Arizona. Il a pu observer diverses céré monies de ces indigènes qui n'avaient pas encore été décrites, et, recueillir une série de peintures indigènes représentant les katcinas ou danseurs sacrés, avec leurs costumes et leurs masques. Ces peintures seront publiées par le Bureau of American Ethnology, auquel appartient M. Fewkes. Après avoir étudié les Hopis, ce voyageur a exploré les excavations et les pueblos ruinés, situés près de la ville de Flagstaff, dans l'Arizona. Les premières, des chambres creusées dans la brèche volcanique friable provenant de cratères éteints, ressemblent aux habitations des Guanches des Canaries. Les pueblos examinés, près des Black Falls du Little Colo

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