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la richesse des mines d'or; non seulement sa situation exceptionnelle a servi ses intérêts, car c'est la tête de ligne du chemin de fer de pénétration et le port où débarquent nombre de navires', mais encore l'administration lui a réservé, aussi bien qu'à la région avoisinante, des avantages considérables. Au contraire, les centres miniers, d'où proviennent les ressources du pays, sont beaucoup moins favorisés. Il y a, par suite, une compétition ardente entre les deux catégories de colons. Pour s'assurer la direction des affaires, les habitants des districts côtiers ont obtenu le droit d'élire dix-neuf conseillers du gouvernement sur vingt-quatre, et quarante-cinq membres du parlement sur quarante-huit. Bien plus, comme les côtes seules sont cultivables, on a protégé leurs produits par des droits énormes. Toutes ces circonstances ont amené une tension extrême entre ces deux classes si distinctes d'habitants.

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Les indigènes. Nous avons pu observer les naturels et nous procurer souvent des renseignements, soit en causant avec les pionniers de la première heure, soit par l'intermédiaire d'un catéchiste indigène.

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Armes. La sagaie est lancée à l'aide d'une lame de bois de forme ovale, dont une extrémité est munie d'un rebord qui reçoit l'extrémité postérieure de l'arme de cette façon, on augmente artificiellement la longueur du bras et, par suite, la vitesse au départ. Nous n'avons pas vu les indigènes de cette région se servir du boomerang. Ils emploient parfois, comme bouclier, un fragment du tronc d'un eucalyptus creusé par les fourmis; ils seraient incapables de tailler une pièce de bois dur de cette forme régulièrement convexe. Des fragments semblables servent aussi de couchettes aux petits enfants.

Danses. Les danses semblent avoir ici un caractère symbolique. Les indigènes portent sur le corps des dessins rouge, noir, ou, blanc; ils sautent en cadence, mais à une faible hauteur, en pliant fortement les genoux. Ils font entendre un bruissement intermittent des lèvres qui rappelle le cri de la cigale. Ils sautent ainsi sur un sol qu'ils ont parsemé de cendres encore brûlantes, néanmoins leur expression est joyeuse. Ils sont munis d'un bâton de deux pieds de longueur, pointu aux deux extrémités, qu'ils lancent à quelques pas devant eux, à la façon d'une toupie, et, d'une manière si adroite que le bâton, après avoir touché le sol obliquement, ricoche parfois jusqu'à une hauteur de 10 mètres, sans cesser de tourner en ronflant. Cette manœuvre exige une adresse presque aussi surprenante que celle du boomerang. Cette fète, qui se passe en mai ou juin, se nomme Koroberg.

Tribus. Les limites des tribus sont strictement déterminées et ceux qui les franchissent sans motif sérieux s'exposent à la mort. Toutefois, des rela

1. Le véritable port est Freemantle, à l'embouchure de la Swan River, à quelques kilomètres en aval de Pert!:.

tions existent, sans doute par invitations, ou, à l'époque de fêtes, entre ces tribus dont les territoires sont relativement vastes.

Langage. -Les idiomes parlés par des tribus voisines présentent une analogie très grande; nous avons pu, d'autre part, comparer les dialectes des indigènes du centre et des rivages sud de la mer (depuis Esperance Bay jusqu'à Albany) avec le vocabulaire néo-calédonien et tahitien que nous avons publié dans le Bulletin de la Société de Géographie (1870), et nous n'avons trouvé aucune ressemblance notable entre ces langues'. Ce langage ne permet pas d'exprimer les idées abstraites. Les indigènes ne savent pas compter; mais nous avons été surpris du grand nombre de termes qui leur servent à désigner les différents points de l'horizon; ces mots leur sont, sans doute, très utiles dans un pays dépourvu de toute espèce de points de repère.

Caractères physiques. - Ces indigènes ne m'ont rappelé aucun des types océaniens que j'ai eu l'occasion de voir. Ils ont des caractères tout à fait spéciaux. Les cheveux abondants et ondulés retombent en crinière; l'arcade sourcilière est très saillante, le nez est épaté; le menton est peu développé ; les épaules et le dos des hommes adultes sont souvent couverts de poils assez longs et frisés. Tous ces traits font pour moi, de ces Australiens occidentaux, une race à part, caractérisée également par son langage et ses mœurs. Je serais tenté de croire que leurs ancêtres ont peuplé ce continent, à une époque où la dénudation n'avait pas encore abrasé ses montagnes et tari ses fleuves. Ils constituaient alors une race assez élevée, qui se serait peu à peu dégradée, à mesure que le milieu devenait plus défavorable.

Mours. Ces indigènes n'ont d'autre substance susceptible d'être tressée que les cheveux des femmes, qui, tressés en petites bandes, servent parfois de ceintures aux hommes. Ils manquent presque toujours d'eau. Ils enfouissent le nouveau-né dans des cendres chaudes et le laissent ainsi pendant plusieurs heures.

Toujours errants, les naturels ne s'abritent que si le vent est froid, au moyen d'une grossière palissade en branches mortes; ils passent la nuit accroupis, un petit feu entre les jambes; s'ils se couchent, ils allument des foyers à droite et à gauche; au matin, ils repartent avec leurs chiens, après avoir achevé leurs provisions. Ils n'emportent qu'une branche de « mulga» enflammée et leurs flèches, parfois, un peu d'eau dans un vase en bois. En route, ils se nourrissent de lézards, de fruits sauvages; ils tuent parfois un ému ou un kangourou.

Dans les premiers temps, alors que les troupeaux des blancs arrivaient des bords de la mer, eux et leurs chiens disputaient aux oiseaux de proie les carcasses des bœufs et des chevaux, aussi bien que les cadavres des prospec

1. Nous avons noté le vocabulaire recueilli chez ces indigènes; le défaut de place nous empêche de le publier ici.

teurs'. Quand un indigène meurt, ses compagnons allument au-dessus de sa tombe un feu, afin que les chiens ne puissent retrouver et dévorer le cadavre.

Ils trouvent en route le peu d'eau qu'ils consomment, car ils n'emploient ce précieux liquide que pour se désaltérer. Ils connaissent des cuvettes naturelles dans le granit où les eaux de pluie persistent longtemps; ils agrandissent même parfois ces trous, en creusant la roche avec des cailloux. Les arbres creux constituent aussi des réservoirs d'eau.

Certains arbres, comme le « mallee », ont des racines chargées d'une eau claire et fraîche. On compte plusieurs variétés de ces arbres curieux qui absorbent et retiennent l'eau. Certaines espèces sont reconnaissables, de loin, à leur feuillage d'un vert plus vif: tel est le « corrigong » des natifs; ses racines portent des renflements ovoïdes pleins d'eau et qui sont comestibles.

Les animaux et surtout les oiseaux sont utiles pour indiquer la présence de l'eau ainsi l'oiseau-diamant (Armadina castanotes) se tient toujours dans le voisinage des mares d'eau. Toutes les variétés de pigeon se dirigent le soir vers l'eau; après avoir bu, leur vol est alourdi. En se guidant sur ces données, les naturels finissent par trouver l'abreuvoir. Les perroquets se rencontrent en grand nombre autour des flaques. Ils se réunissaient par troupes autour de nos tentes pour passer la nuit; perchés sur les branches voisines, ils se précipitaient sur notre eau de toilette, si nous nous écartions de quelques pas.

L'ému, le kangourou courent le matin au travers des buissons, en tendant la langue, et, lèchent sur les feuilles l'eau de la rosée; de même, l'homme recueille cette eau, en recherchant certaines feuilles qui, comme celles du sandal, sont plus ou moins en forme de coupe.

Faune.

Le monde des insectes est très abondant ici; puis vient celui des oiseaux; quant aux mammifères, ils sont peu nombreux. Une mouche de petite taille est très gênante. Elle attaque constamment le voyageur dans les yeux et les oreilles. Le moustique est assez rare, sauf après la pluie, mais sa piqûre est parfois mauvaise. Les diverses espèces de fourmis sont très bien représentées ici; elles construisent des demeures solides en sable cimenté avec une résine noire sécrétée par les eucalyptus. La variété blanche dévore les bois secs et durs de la contrée. Les araignées s'abritent sous les écorces et ne semblent pas faire de toiles. Les millepieds se glissent sous les tentes, dans les couchettes; ils font à l'homme une morsure dangereuse. Nous n'avons aperçu qu'un très petit nombre de papillons. Il y a plusieurs variétés de libellules, dont une longue de dix centimètres; en chasse, elle se dresse sur ses quatre pattes postérieures, et, avec les deux antérieures, elle attrape, au passage, les mouches, qu'elle dévore en un instant. Dans l'espace d'une demiheure, nous avons compté trente mouches ainsi capturées.

1. Il s'agit peut-être là d'une de ces calomnies mises en avant par les blancs, pour excuser leur barbarie envers les peuples non civilisés.

Les serpents sont nombreux, dangereux, difficiles à voir, car le sol est plein de trous où ils se réfugient au moindre bruit. Le lézard est d'une abondance étonnante, et, en rapport avec celle des mouches dont il se nourrit. On rencontre un caméléon, à la peau rugueuse, armée de gros tubercules, avec une excroissance sur le cou et de petits yeux. Il vit dans le sable fin, dont sa robe a la couleur grisâtre; s'il place ses deux pattes antérieures dans deux gouttes d'eau, cette eau remonte sur son dos par des rides de la peau et vient humecter des taches assez ternes qui s'y trouvent; celles-ci deviennent alors d'un jaune éclatant. Le lézard iguane abonde; il atteint un mètre de longueur; il grimpe aux arbres, s'il est poursuivi; sa chair est blanche et savoureuse.

Phénomènes atmosphériques. Par suite de l'absence de végétation herbacée, de l'espacement des arbres qui ne donnent pas d'ombrage, le sol sablonneux s'échauffe beaucoup ainsi que les couches inférieures de l'atmosphère; au contraire, les parties supérieures sont relativement froides, lorsque le vent souffle du sud. Ces conditions s'opposent à l'établissement d'un équilibre stable et provoquent la formation continuelle de tourbillons d'air chaud, plus léger, montant dans les régions supérieures. Ce fait est d'autant plus facile à observer que le sol est couvert d'une poussière fine qui s'élève avec l'air. Au niveau où l'équilibre s'établit, la poussière s'étale en un nuage qui devient parfois considérable. Ces tourbillons, les « Willy-Willy » des natifs, varient depuis la colonne de quelques décimètres de diamètre, qui se forme près de vous en air calme et se déplace de quelques mètres par minute, jusqu'à la colonne de plusieurs mètres de diamètre, qui enlève les gros graviers, arrache les arbres, les tentes, les maisons, marche avec une grande vitesse et devient un dangereux fléau. Le 3 mai 1898, par une chaleur extrême, nous observâmes cette superposition de l'air froid sur l'air chaud dans l'ancien désert Victoria. De vrais « nimbus », passèrent sur notre tète, sans nous envoyer une goutte de pluie. Mais, à un moment donné, alors que nous nous trouvions entre le soleil couchant et ces nuages noirs, nous vimes se former, dans les hauteurs atmosphériques, un magnifique arc-en-ciel dont les pieds étaient loin d'arriver jusqu'au sol: il pleuvait donc, en ce moment, au-dessus de nous, mais la couche d'air chaud, tangente au sol, évaporait la pluie avant qu'elle nous arrivât.

Nous terminerons ici cet aperçu de la partie centrale de l'Ouest australien; il est bien court par rapport à l'étendue du sujet, mais nous avons tenu à nous borner aux faits que nous avons pu observer par nous-mêmes.

JULES GARNIER.

Mesure d'un arc de méridien au Spitsberg

Historique général et relation des opérations de la mission russe

Dès la première moitié de ce siècle, fut émis le projet de mesurer un arc de méridien au Spitsberg, afin d'arriver à une connaissance plus exacte de la forme de la terre. Mais, seulement après les célèbres expéditions suédoises faites sous la direction de Torell et de Nordenskiöld, cette idée fit des progrès, lorsque les astronomes Chydenius et Dunér, qui avaient participé à ces explorations, curent déterminé de plus près les conditions nécessaires à la réussite de l'entreprise. On pensa alors qu'il serait possible de mesurer un arc de méridien d'environ quatre degrés et demi, au moyen de réseaux de triangles qui s'étendraient du cap Sud du Spitsberg, le long des deux rives du Storfjord et de l'Hinlopen Strait, jusqu'aux Sept Iles. Seule, la possibilité d'unir le réseau du Storfjord à celui de l'Hinlopen Strait n'était pas encore suffisamment établie.

L'Académie royale des Sciences de Stockholm chargea le professeur Rosén de tracer un plan détaillé de la mensuration d'un arc de méridien. Ce plan été publié sous le titre de Projet de mesure d'un arc de méridien de 4° 20′ au Spitsberg. Mémoire publié par l'Académie royale des Sciences de Suède. Stockholm, 1893.

En 1897, l'Académie de Stockholm proposa à l'Académie impériale de SaintPétersbourg d'exécuter, en commun, cette grande entreprise scientifique. Dans le courant de 1898, l'Empereur Nicolas II choisit, parmi les membres de l'Académie des Sciences, une commission à la présidence de laquelle fut appelé le Grand-Duc Constantin Constantinovitch. De son côté, le Roi Oscar de Suède institua, au sein de l'Académie royale des Sciences de Stockholm, une commission semblable placée sous la présidence du Prince royal. Ces commissions avaient pour objet de préparer cette grande entreprise et d'en diriger en commun l'exécution.

Pendant l'été de 1898, une expédition, dirigée par le professeur Jäderin, et dans laquelle l'Académie impériale des Sciences de Saint-Pétersbourg était représentée par le lieutenant-colonel Schultz, fit la reconnaissance de la partie

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