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M. EGGER termine la seconde lecture de son mémoire « sur les fragments inédits de l'orateur Hypéride. »

ANALYSE.

« Dans la séance du 4 mai dernier, dit M. EGGER, j'ai eu l'hon neur de communiquer à l'Académie un rapide aperçu de la découverte dont je viens de nouveau l'entretenir aujourd'hui. Il s'agit de quelques lambeaux d'un papyrus grec provenant de Thèbes en Egypte, et qui contiennent environ une page inédite du discours contre Démosthène dans l'affaire d'Harpalus. De nombreux fragments de ce papyrus, dont environ dix petites colonnes, de vingt-huit lignes chacune, et à peu près intactes, avaient été acquis en 1847, et publiés à Londres, l'année suivante, en fac-simile, par M. A. C. Harris; dès 1848, M. BECKн et M. Sauppe s'étaient, séparément, exercés à les restituer et à les remettre en ordre. Puis M. Sharpe, en 1849, essayait de les traduire, dans le journal de la Société philologique de Londres; en 1850, M. Babington en publiait une édition luxueuse offrant, avec deux fac-simile du manuscrit, deux textes de tous les fragments, l'un en majuscules typographiques assez voisines des caractères du papyrus, l'autre en caractères courants. Cette édition, imparfaite à beaucoup d'égards et pourtant utile, n'a pas profité des travaux de ВOCKн et de Sauppe, qui sont restés inconnus à M. Babington; d'un autre côté, les rapprochements instructifs qu'elle renferme et quelques bonnes leçons qu'elle fournit pour la restitution du texte sont restés inconnus de M. C. Müller qui donnait, en 1857, dans le second volume des Oratores Attici de la bibliothèque Firmin-Didot, une édition restée jusqu'à ce jour la dernière de ces fragments. Néanmoins, et malgré ce défaut de concert, les efforts successifs de la critique ont réussi à classer et à rétablir, autant qu'il se pouvait, en leur intégrité primitive, tous ces fragments qui ont bien vite attiré l'attention des biographes d'Hypéride. Aussi les renseignements nouveaux qu'ils nous apportent ont trouvé leur juste place dans le grand ouvrage d'Arnold Schæfer sur Démosthène et son . temps (1858), dans les Mémoires de M. Meunier et de M. Jules

Girard sur Hypéride, que l'Académie couronnait en 1862. Malheureusement, les fragments sont si incomplets, et, à cause de cela même, souvent si obscurs qu'on désirait fort qu'un meilleur manuscrit du discours d'Hypéride pût nous être rendu par quelque nouvelle découverte. Ce désir ne sera pas satisfait par l'acquisition des débris qui, des mains d'un propriétaire athénien, viennent de passer à celles de notre confrère, M. MICHEL CHASLES. Quatre fragments principaux et quelques menus débris, qui ne font pas, en tout, quarante lignes de grec, sont un faible surcroît de richesse. Mais rien n'est à dédaigner de ce qui intéresse des personnages tels que Démosthène et Hypéride; d'ailleurs, quelques traits particuliers relèvent un peu l'importance des nouveaux textes que je vais faire connaître; on peut y rattacher certaines questions de critique générale qui seront utilement discutées, dans l'état actuel de nos connaissances en philologie grecque; on y trouve aussi l'occasion de mieux comprendre et de mieux caractériser le monument d'éloquence dont ils faisaient partie. C'est ce qui me justifiera, je pense, d'étendre jusqu'aux proportions d'un mémoire les observations que je me suis proposé d'écrire sur ces courts fragments. »

La première partie du mémoire dont on vient de lire l'introduction contient le texte des fragments nouveaux, accompagné de remarques sur les principales singularités paléographiques que présente le manuscrit; elle se termine par des considérations générales sur la critique des textes dans l'antiquité.

La seconde partie contient la traduction de tous les fragments aujourd'hui connus du discours d'Hypéride contre Démosthène. Ces morceaux sont rangés selon l'ordre le plus probable et rattachés au plan général de l'accusation. L'auteur du mémoire essaye, en même temps, de les apprécier au point de vue politique et littéraire.

M. A. Choisy, ingénieur des ponts et chaussées, lit une note développée sur les résultats des fouilles du théâtre de Bacchus à Athènes, sur les époques diverses de sa construction, ses transformations successives, et les indices fournis par les ruines relativement à la destination de ses différentes parties. Il appuie ses obser

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vations d'un double croquis porté au tableau noir, d'après les dessins sur une grande échelle qu'il a rapportés de son exploration récente.

EXTRAIT.

NOTE SUR LE THÉÂTRE DE BACCHUS A ATHÈNES.

I. Le théâtre de Bacchus, dans les parties voisines de la scène, n'est plus guère qu'un amas de substructions confuses et à demi détruites. Mais, indépendamment de l'intérêt qui s'attache aux détails d'un édifice dont l'histoire est liée à celle de la littérature dramatique des Grecs, les ruines du théâtre de Bacchus appellent l'attention de l'archéologue à des points de vue très-divers : elles fournissent un des rares exemples de dispositions d'arrière-scène vraisemblablement antérieures à l'époque impériale; elles montrent quelles transformations diverses les besoins successifs apportèrent pendant une longue période aux dispositions antiques; enfin elles paraissent jeter quelque jour sur l'état de l'architecture au temps des Antɔrins, et sur les tendances archéologiques qui se manifestèrent dans l'art au 2e siècle de notre ère.

II. L'arrière-scène du théâtre affecte la forme générale d'un rectangle, coupé, parallèlement à sa grande dimension, par une série de fondations très-épaisses, et tellement rapprochées que la surface des vides semble à peine supérieure à celle des massifs de la construction.

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Toutes ces substructions sont-elles l'œuvre d'une même époque, ont-elles pu appartenir à la fois à un même édifice? Telle est la question qui doit évidemment précéder toute recherche sur le théâtre de Bacchus. Or l'hypothèse qui consisterait à regarder tous ces vestiges comme contemporains les uns des autres semblera au moins douteuse si l'on observe qu'une partie des fondations est en pierre blanche du Pirée, une autre en calcaire rouge extrait des collines voisines de l'Acropole : l'emploi de deux espèces de matériaux pour des usages absolument semblables paraît se concilier assez mal avec l'idée de constructions élevées simultanément et sous une direction commune.

Mais une remarque plus décisive vient établir la différence des époques : c'est que très-souvent deux fondations, l'une en calcaire rougeâtre, l'autre en pierre blanche du Pirée, se trouvent immédiatement adossées l'une à l'autre et paraissent indiquer comme deux murs accolés formant, dans l'hypothèse d'un édifice unique, un double emploi étrange et entièrement inadmissible.

Enfin, comme dernière vérification, j'ai levé le plan général des ruines en ayant soin de distinguer, par des différences de teintes, les natures diverses de matériaux. Or, à la seule inspection du dessin, il est possible de lire dans les massifs en calcaire rouge le plan complet d'un théâtre romain, et, dans les fondations en pierre blanche, le plan également complet, quoique plus simple, d'un autre théâtre qui l'a précédé au même lieu, peut-être à plusieurs siècles de distance.

L'hypothèse de la différence des dates ne pouvait plus dès lors laisser de doute l'ensemble comprend comme deux ruines distinctes, superposées sur un même sol; et l'étude comparée de ces ruines résume en quelque sorte l'histoire des besoins nouveaux introduits dans la distribution des théâtres par l'influence de la civilisation romaine.

III. Le plan le plus ancien réduisait le théâtre aux parties absolument nécessaires.

La tribune du pulpitum était longue, étroite, isolée de toutes parts, limitée à sa partie postérieure par un mur bas, percé de larges ouvertures, et qui réfléchissait la voix vers les degrés de la cavea.

En arrière s'étendait une cour de faible profondeur; et, au fond de la cour, un large portique servait à abriter les acteurs.

IV. Rien, dans un tel programme, ne semblait sacrifié à des besoins purement esthétiques; pourtant l'effet, quel que fût le point de vue du spectateur, dut être des plus heureux.

Pour un spectateur siégeant aux rangs inférieurs du théâtre, le portique d'arrière-scène apparaissait à travers les larges portes du mur de fond du pulpitum; et son harmonieuse ordonnance, ainsi entrevue sur un second plan, devait prendre, par l'effet du contraste et par les illusions de la perspective, une profondeur apparente que l'inspection des ruines serait loin de faire soupçonner.

S'élevait-on au contraire sur les degrés de la cavea, la vue, à peine bornée par la faible hauteur du mur de fond, franchissait bientôt les limites de l'enceinte; et, pour le plus grand nombre des spectateurs, les roches d'Egine et les lointains de Sunium étaient la véritable décoration du théâtre.

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V. Toutefois, je me hâte de le dire, le mur de fond de la scène est détruit, et nous ne pouvons juger de sa hauteur que par l'examen des substructions qui subsistent. Mais la conclusion ne demeure pas moins certaine en raison de la faible épaisseur des fondations, on peut, sans crainte d'erreur, affirmer que le mur de fond de la scène dut être très-bas, et ne ressembler en rien à ces énormes et somptueuses murailles dont les théâtres romains portent la trace, et dont le théâtre d'Aspendus fournit le plus complet exemple.

Au reste, à défaut de données positives, le sentiment de l'art grec avait fait pressentir depuis longtemps cette disposition des théâtres antiques. Tous les théâtres fondés aux bonnes époques de l'art ont vue sur de magnifiques paysages. On admettait sans peine que les Grecs eussent fait concourir les richesses de la nature à l'embellissement de leurs fêtes dramatiques ou de leurs réunions nationales. Les ruines du théâtre de Bacchus mettent aujourd'hui hors de doute cette hypothèse.

VI. Aux parties essentielles, dont l'ensemble constituait, à une époque très-ancienne, le théâtre de Bacchus, il convient de rattacher, comme une dépendance obligée de l'édifice, une très-longue cour, où le public trouvait un abri contre la chaleur dans l'intervalle des représentations : cette cour s'étendait parallèlement à la direction générale de l'arrière-scène; elle était située à un niveau plus bas, et une voie publique la séparait du portique des acteurs. Vu sa grande largeur, cette cour semble n'avoir jamais été couverte; et d'ailleurs, comme elle présentait sa moindre dimension dans la direction des rayons solaires, une couverture y eût été superflue, et ses murs, par l'ombre qu'ils projetaient, étaient très-suffisants pour abriter les spectateurs.

Je n'oserais affirmer que cette cour remontât à l'époque des constructions d'arrière-scène : du moins il paraît certain qu'elle préexistait à la restauration des Antonins la nature différente des matériaux, la manière gauche et pénible dont elle se raccorde aux constructions ultérieures, lui assignent une date incontestablement plus ancienne.

VII. Toutes les autres constructions sont de beaucoup postérieures à celles que je viens d'énumérer et paraissent dues (comme tant d'autres

embellissements d'Athènes) à l'époque d'Hadrien. - Les changements qu'elles apportèrent aux dispositions primitives sont quelquefois profonds; mais il est facile d'en suivre l'ordre logique, et de découvrir dans l'insuffisance matérielle de l'ancien plan les principales raisons qui les motivent.

La cour d'arrière-scène, encombrée en partie par les escaliers du pulpitum, parut étroite: on l'agrandit en reculant la colonnade d'une quantité égale au diamètre des colonnes.

L'agrandissement de la cour, ainsi obtenu aux dépens du portique d'arrière-scène, réduisait ce dernier à des dimensions trop restreintes pour les besoins des acteurs on le respecta toutefois par égard à son importance dans l'effet architectural de l'édifice; mais on eut soin de le réduire aux dimensions d'un simple accessoire décoratif, en substituant au mur qui autrefois lui servait de fond un autre mur séparé de la colonnade par un intervalle à peine supérieur à un mètre. De cette manière, lors de la restauration du théâtre, les deux faces opposées du portique se rapprochèrent l'une vers l'autre; et c'est dans les déplacements très-légers qu'elles subirent, qu'il faut chercher l'origine de ces substructions multiples dont j'ai plus haut constaté l'existence.

VIII. Dans toutes les transformations qui viennent d'être décrites, il est facile de voir que le plan primitif se conserve: les dimensions seules des diverses parties subissent des modifications très-légères; et il semble qu'on ait voulu, à l'époque de la restauration, respecter, en le reproduisant dans toutes ses parties essentielles, un monument illustré par le souvenir de grandes luttes dramatiques. Faut-il conclure par analogie que les détails d'architecture de l'ancien édifice aient été également respectés ou reproduits? L'étude seule du style des fragments qui nous restent pourrait fournir la solution de cette question. Je n'entrerai point ici dans la discussion du problème; je me borne à en indiquer quelques éléments.

Tandis que toutes les additions faites à l'ancien plan portent la trace évidente du mauvais goût du temps, toutes les parties qui rappellent par leur plan des dispositions antérieures manifestent, dans les détails de leur décoration, sinon la correction, du moins la sobriété des belles époques de l'art telles sont en particulier la colonnade d'arrière-scène et la tribune du pulpitum (1).

Mais, dans toutes ces parties, la perfection matérielle est bien loin de répondre à la beauté de la composition: tous les fragments du théâtre, quel qu'en soit le style, sont également exécutés de la façon la plus grossière; dans tous on retrouve les mêmes procédés d'exécution; presque tous enfin ont été abandonnés au même instant et dans un même état d'avancement, interrompus sans doute sous l'influence d'une même cause. IX. Toutes ces circonstances rapprochées paraîtraient former comme autant d'arguments à l'appui de l'hypothèse qui consiste à voir dans les parties déjà décrites du théâtre un édifice fort ancien, grossièrement imité par les auteurs de la restauration romaine.

Cet ancien édifice eût été d'un style assez pur et d'une remarquable

(4) Si les moulures du pulpitum peuvent être vraisemblablement regardées comme des imitations de modèles anciens, les reliefs qui les décorent appartiennent évidemment par leur style à l'époque d'Hadrien. On sait d'ailleurs, par une inscription en caractère d'époque romaine, que la décoration de la scène (xaλòv ßñμ¤ 0ɛτpoʊ) est due à un certain Phèdre, fils de Zoïle, gouverneur de l'Attique.

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