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LIVRE I.

Des fondements de la philosophie du catéchisme catholique.

D. Qu'entendez-vous par les fondements de la philosophie du catéchisme catholique ?

R. J'entends des faits tellement lumineux et concluants qu'on ne puisse les examiner sans en reconnaître la certitude, ni en admettre la certitude sans en déduire la vérité de la doctrine catholique.

Je dis des faits lumineux et concluants, et non des idées, des axiomes métaphysiques. L'évidence des axiomes métaphysiques ne frappe qu'un petit nombre d'esprits, et ne les mène jamais loin. En partant des mêmes principes, les philosophes ont abouti aux déductions les plus contradictoires. La vraie religion, qui s'adresse à tous les hommes et se propose de les conduire au même but, devait donc rejeter cette base étroite, vacillante, et s'appuyer sur des faits accessibles à tous les esprits.

D. Quels sont ces faits?

R. Le christianisme embrassant l'histoire du monde depuis son origine jusqu'à nous, et ses dogmes et préceptes n'étant, pour ainsi dire, que le résumé et le corollaire de tout ce que Dieu a fait pour les hommes et de ce que les hommes ont fait pour et contre Dieu, il s'ensuit que les fondements du christianisme renferment la masse énorme des faits de son histoire, à partir d'Adam jusqu'à Jésus-Christ, et de Jésus-Christ jusqu'à nous. Ces faits sont-ils indubitables? Ces faits donnent-ils au christianisme les caractères d'un établissement divin? Telles sont les deux questions

qui appellent l'examen de l'incrédule désireux de s'instruire.

Quoique fort abrégée par les chefs-d'œuvre de critique des apologistes chrétiens, cette discussion n'en est pas moins au-dessus des forces ou de la volonté du grand nombre, les uns trop absorbés par les affaires, les autres trop légers pour se livrer à des lectures longues et réfléchies. Réduire les bases de la philosophie catholique à un petit nombre de faits capitaux; dégager ces faits des nuages entassés par une sophistique ignorante ou menteuse, et les faire resplendir à l'œil du lecteur sans recourir à des démonstrations savantes : voilà ce que je me suis proposé dans ce livre. Aurai-je réussi, et me trouverez-vous trop exigeant, si, pour établir suffisamment la divinité du catholicisme, je ne vous demande que de reconnaître ces quatre faits l'existence de Dieu, l'existence de JésusChrist, l'existence d'une Église catholique, l'existence des hommes ?

D. Non, certes; je crains même que vous ne demandiez pas assez, car la plupart des incrédules ne feront aucune difficulté de vous accorder ces quatre faits.

R. Oui, ils me les accorderont sans en examiner la valeur; car ces éternels prôneurs de la liberté d'examen ont l'habitude de ne rien examiner. Or ce n'est point là ce que j'attends de vous. Je vous demande une conviction éclairée du fait de l'existence de Dieu, du fait de l'existence de JésusChrist, du fait de l'existence d'une Église catholique, du fait de l'existence des hommes, persuadé que de l'examen réfléchi et comparé de ces quatre faits il résultera, pour vous, une démonstration suffisante de la divinité de l'enseignement catholique.

D. Ce plan a du moins le mérite de simplifier beaucoup la question religieuse et d'en faciliter l'examen aux esprits brouillés avec les études savantes.

R. Oui, et vous verrez bientôt, j'espère, que l'incrédulité est vaincue, du moment que l'incrédule se détermine à examiner avec un cœur sincère. Commençons.

PREMIER FAIT.

EXISTENCE DE DIEU.

CHAPITRE I.

[Qu'on ne peut sans aveuglement douter de l'existence de Dieu. Le Palais de cristal.

D. Qu'entendez-vous par Dieu ?

R. Pour écarter les démonstrations trop longues et scientifiques, je considérerai ici Dieu, non comme créateur, mais comme ordonnateur de l'univers, et je le définirai ainsi : Dieu est le grand maître qui a réglé et qui surveille si bien les mouvements de l'immense famille des êtres, que, depuis des milliers d'années que l'esprit humain en contemple la marche, on n'a fait que découvrir de nouvelles preuves de la profonde sagesse de son gouvernement et de la profonde ignorance de ses détracteurs. Or, je vous le demande : êtesvous bien convaincu de l'existence de ce maître, et de la futilité des raisonnements de l'athéisme et du scepticisme?

D. Oui, et voici mon argument contre eux : L'ordre, qui se révèle partout dans l'univers, ne peut s'expliquer sans un ordonnateur, et les désordres que nous croyons y voir, s'expliquent surabondamment par notre ignorance.

R. Votre argument est plein de bon sens et de brièveté; mais comme les preuves les plus courtes, si justes qu'elles soient, ont souvent le malheur de ne produire que des convictions courtes et branlantes, je désire une démonstration de l'existence de Dieu, fondée sur une vue moins vague de l'ordre universel.

Analyse faite de ce que les athées et les sceptiques, anciens et modernes, ont dit et écrit de plus fort, on trouve que toute leur philosophie consiste à expliquer la marche du monde par le hasard, par les lois inconnues, par les

forces occultes et fatales de l'éternelle matière. Et, quand on a fait justice de ce verbiage, ces messieurs ont coutume, les plus spirituels comme les plus sots, de nous jeter cette grossière bouffonnerie : Montrez-nous Dieu, et nous y croirons (1).

Pour couper court à ces déraisons et montrer comment le plus grand des esprits se révèle et se fait, pour ainsi dire, palper à l'esprit des hommes, voici une manière de procéder :

En 1851, des millions de curieux, partis de tous les coins du globe, sont allés contempler un immense palais de cristal, elevé dans un des jardins publics de Londres, et rempli des plus belles productions de l'industrie humaine à tous ses degrés et dans tous les genres. A côté des savantes machines dues aux plus profonds mécaniciens, des tissus merveilleux sortis de dix mille fabriques, des porcelaines de Sèvres et des tapisseries des Gobelins, on voyait les outils, la poterie et les tissus grossiers des sauvages du nouveau monde et de l'Océanie. Le nombre des objets exposés était tel, qu'un examen détaillé, n'eût-on donné qu'une minute à chaque article, n'aurait pas demandé moins de vingt ans.

Maintenant je suppose que, le jour où l'affluence était plus grande, un homme à la voix de Stentor, capable de faire arriver sa parole à cent mille visiteurs, leur eût tenu ce discours :

<< Mesdames et Messieurs, vous êtes dupes d'une monstrueuse mystification! Sur la foi des mauvais plaisants qui vous ont attirés ici, vous croyez avoir sous les yeux des produits de l'industrie humaine : il n'en est rien. Le Palais de cristal lui-même est sorti de terre comme en sortent tant d'autres choses. A la vue de ce champignon d'une forme nouvelle, les Anglais, qui spéculent sur tout et entendent à merveille l'art d'exploiter la crédulité humaine,

(1) V. dans l'Essai sur la vie de Bernardin de Saint-Pierre, par M. Aimé Martin, l'orage que souleva l'auteur des Études de la nature, parmi ses collègues de l'Institut, en 1798, quand il osa y prononcer le nom de Dieu.

ont imaginé de réunir ici les plus bizarres productions de la nature. Dans la pensée qu'un bazar de l'industrie vous intéresserait plus qu'un musée de curiosités naturelles, ils ont fait annoncer, par les journaux à leur solde, l'ouverture d'une Exposition universelle des produits de l'industrie humaine. La supercherie, comme on voit, a obtenu un prodigieux succès. Moi-même, j'ai commencé par être dupe; mais, en y regardant de près, je me suis désabusé. Faites de même, Mesdames et Messieurs; à la foi aveugle substituez un rigoureux examen, et, dans cette énorme collection d'objets, vous n'en trouverez pas un qui décèle les combinaisons et le travail de l'homme. Rien là qui ne s'explique par les forces connues et inconnues de la nature; non, rien, pas même cette machine que vous voyez fonctionner, là à gauche, près de l'entrée principale demander quel est l'homme qui a donné à ce grand assemblage de bois, de fer, d'acier et de cuivre, la propriété de saisir le coton brut et de le convertir en toile après vingt-cinq ou trente procédés assez ingénieux, ce serait chose aussi peu philosophique que de vouloir connaître l'homme qui a donné à l'écorce du quinquina la vertu de couper la fièvre. »

Quel croyez-vous qu'eût été, sur l'immense auditoire, l'effet d'une semblable thèse soutenue assez sérieusement pour écarter toute idée de plaisanterie ?

D. Il n'y aurait eu qu'une voix, je pense, pour demander que cet échappé d'une maison de fous y fût réintégré sur l'heure.

R. Sans doute, par un de ces infaillibles arrêts que le bon sens arrache, avant toute discussion, aux savants et aux ignorants, cet homme eût été jugé le plus aveugle des aveugles ou le plus fou des fous. Eh bien! nous allons voir que l'athée, que le pantheiste, que le sceptique, qui ne voient pas ou prétendent ne pas voir, dans le palais de l'Exposition de l'univers, la preuve d'un génie infiniment supérieur à l'homme, sont des milliards et des milliards de fois plus

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