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au lierre blanc, hederá formosior albá. Théocrite s'était servi de cette image dans son idylle du Cyclope. Ovide, dans la complainte de Polyphème, a pris les comparaisons de Virgile et de Théocrite, et, selon son usage, il a épuisé son sujet, et présenté la même idée sous mille formes. Dans Virgile, Galatée est plus douce que le thym, plus blanche que le cygne, plus belle que le lierre; dans Ovide, le teint de cette nymphe efface la blancheur du troëne; elle est plus brillante qu'une prairie émaillée; sa peau est plus douce que les coquillages que la mer a polis, que le plumage argenté du cygne, et que le lait durci. Les fruits plaisent moins qu'elle ; sa présence est plus agréable que le soleil en hiver, et l'ombre dans l'été ; elle éblouit comme la glace brillante; elle est plus douce que le raisin mûr, plus sauvage que le taureau, plus dure qu'un chêne, plus trompeuse que l'onde, plus flexible que l'osier, plus fière que le paon, plus vive le feu, plus légère que le cerf, etc. etc. Ovide ne s'arrête pas là; il entasse beaucoup d'autres comparaisons, et les idées les plus simples et les plus gracieuses deviennent ainsi sous sa plume des images bizarres et ridicules : écueil ordinaire des poètes qui ont plus d'esprit que de goût, et plus d'imagination que de jugement.

que

4)PAGE 240, VERS 13.

Immò ego Sardois videar tibi amarior herbis,

Horridior rusco....

Théocrite et Virgile emploient souvent ces sortes d'images

qui semblent faire partie de la langue des bergers, et qui ont d'ailleurs l'avantage d'offrir à l'esprit plusieurs objets à la fois. Ces comparaisons ont cependant un inconvénient, c'est de se présenter toujours de la même manière et avec les mêmes formes: tantôt c'est une bergère qui surpasse les autres, autant que le pin s'élève au-dessus de la fougère ; tantôt c'est un berger qui recherche l'objet de ses amours, comme la chèvre recherche le cityse fleuri. Ici Corydon consent à paraître aux yeux de sa bergère, plus hideux le chardon, et plus vil que l'algue marine. Les poètes bucoliques ont répété ces comparaisons jusqu'à satiété, et souvent avec aussi peu de jugement que de retenue. Alors elles dégénèrent en puérilités, comme dans ces vers de Belleau:

J'ai baisé des chevreaux qui ne faisaient que naître,
Le petit veau de lait dont Colin me fit maître,
L'autre jour dans ces prés; mais ce baiser vraiment
Surpasse la douceur de tout ensemblement.

que

Cette comparaison est tirée de Longus; mais elle n'en vaut pas mieux; il est beaucoup de poètes, même dans notre siècle, qui prennent tout ce qu'ils trouvent dans les Latins et les Grecs: s'il leur tombe en mains une bonne pensée, on voit bien qu'elle ne leur est pas propre, « ils » s'en servent, dit Racan, d'aussi mauvaise grâce et avec >> autant de faiblesse, que Patrocle faisait des armes » d'Achille. >>

PAGE 240, VERS 15.

Si mihi non hæc lux toto jam longior anno est.
Ite domum, pasti, si quis pudor, ite, juvenci.

Le premier de ces vers exprime une idée charmante; le dernier est d'une extrême délicatesse : le berger a dit qu'un jour passé loin de celle qu'il aime, lui a paru plus long qu'une année. Il s'adresse ensuite à son troupeau, et recommande à ses boeufs de retourner à l'étable; il veut leur faire honte de rester si long-temps aux pâturages; si quis pudor se rapporte au vers précédent, et montre, de la manière la plus ingénieuse, l'impatience du berger, pour qui un an paraît s'être écoulé depuis le moment où il a conduit son troupeau dans la prairie.

La cinquième églogue de Fontenelle roule tout entière sur cette idée de Virgile:

Éraste entre en courroux contre le jour trop lent.

et plus de soixante vers sont employés à peindre l'impatience du berger; il veut envoyer Tityre dans les champs avant l'aurore:

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Quel siècle jusqu'au soir! Il mesure des yeux
Le tour que le soleil doit faire dans les cieux;
Il faut que sur les monts ce grand astre renaisse,
S'élève lentement et lentement s'abaisse,

Et se perde à la fin derrière ces grands bois :

Il mesure ce tour et frémit mille fois.

C'est affaiblir un sentiment, que de le décrire ainsi ; j'aime mieux ces deux vers de Léonard :

Et le projet de la revoir le soir

Fit souvent le bonheur de toute ma journée.

Laharpe a exprimé dans une romance une idée qui n'est pas moins délicate:

Ah! que ne puis-je encor l'attendre,
Dût-elle encor ne pas venir! etc.

On a dû remarquer ce vers: si mihi non hæc lux toto jam longior anno est. Virgile y a entassé à dessein les monosyllabes, pour en rendre la prononciation plus lente; on peut dire que ce vers est long comme un jour passé loin de celle qu'on aime. Les deux premiers vers du même couplet rendent également la pensée par les sons. Sardois amarior herbis, horridior rusco, produisent un son désagréable, et désignent par une harmonie âpre et dure, des choses qui répugnent au goût délicat du berger.

PAGE 240, VERS 17.

Muscosi fontes, et soinno mollior herba,
Et quæ vos rarâ viridis tegit arbutus umbrâ,
Solstitium pecori defendite : jam venit æstas
Torrida, jam læto turgent in palmite gemmæ.

Les idées de ce couplet sont gracieuses. Pour faire ressortir l'éclat et la fraîcheur du printemps, le poète leur oppose adroitement l'image de l'été qui s'avance avec tous ses feux. L'ombre des bois, le frais gazon des prairies, prennent un nouveau charme dans ces mots : jam venit estas torrida. Ce petit tableau est terminé par une image riante: læto turgent in palmite gemmæ ; comme la nature, la muse du poète semble sourire au lecteur; l'épithète læto caractérise bien le joyeux aspect du printemps.

Dans le couplet suivant, Thyrsis oppose le tableau de l'hiver au tableau de la saison des fleurs; deux vers suffisent à Virgile pour peindre le foyer et les portes noircies par la fumée qui ne cesse de s'élever.

7) PAGE 242, VERS 7.

Stant et juniperi, et castanea hirsutæ ;

Strata jacent passin sua quâque sub arbore poma;

Ces deux vers forment un contraste agréable: d'un côté on voit le genévrier et le châtaigner qui sont debout sur les

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