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plus sage que nous, se seroit donné de garde de détruire ces utiles harmonies de la religion, de la conscience et de la morale. Elle n'auroit point rejeté cette autre opinion, par laquelle il étoit tenu pour certain, que tout homme qui jouit d'une prospérité mal acquise, a fait un pacte avec l'Esprit de Ténèbres, et légué son âme aux enfers.

Enfin, les vents, les pluies, les soleils, les saisons, les cultures, les arts, la naissance, l'enfance, l'hymen, la vieillesse, la mort, tout avoit ses saints et ses images, et jamais peuple ne fut plus environné de divinités amies, que ne l'étoit le peuple chrétien.

Il ne s'agit pas d'examiner rigoureusement ces croyances. Loin de rien ordonner à leur sujet, la religion servoit au contraire à en prévenir l'abus, et à en corriger l'excès. Il s'agit seulement de savoir si leur but est moral, si elles tendent mieux que les lois ellesmêmes à conduire la foule à la vertu. Et quel homme sensé peut en douter? A force de déclamer contre la superstition, on finira par ouvrir la voie à tous les crimes. Ce qu'il y aura d'étonnant pour les sophistes, c'est qu'au milieu des maux qu'ils auront causés, ils n'auront pas même la satisfaction de voir

le peuple plus incrédule. S'il cesse de soumettre son esprit à la religion, il se fera des opinions monstrueuses. Il sera saisi d'une terreur d'autant plus étrange, qu'il n'en connoîtra pas l'objet; il tremblera dans un cimetière où il aura gravé que la mort est un sommeil éternel, et en affectant de mépriser la puissance divine, il ira interroger la bohémienne, ou chercher ses destinées dans les bigarrures d'une carte.

Il faut du merveilleux, un avenir, des espérances à l'homme, parce qu'il se sent fait pour l'immortalité. Les conjurations, la nécromancie, ne sont chez le peuple, que l'instinct de la religion, et une des preuves les plus frappantes de la nécessité d'un culte. On est bien près de tout croire, quand on ne croit rien; on a des devins, quand on n'a plus de prophètes, des sortiléges quand on renonce aux cérémonies religieuses, et l'on ouvre les antres des sorciers, quand on ferme les temples du Seigneur.

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CHAPITRE VII.

Réunion des harmonies physiques et morales.

Nous allons maintenant confondre les harmonies précédentes, et achever de représenter les effets du culte et de la morale évangélique avec nos passions tumultueuses et les scènes paisibles de la nature. Mais, au lieu de donner des préceptes, nous offrirons des exemples; l'auteur se taira pour laisser parler d'autres personnages. Nous dirons d'Atala aux lecteurs, ce que le Dante disoit de ses chants: Si mon langage vous étonne, que la nouveauté m'excuse.

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TROISIÈME PARTIE.

Beaux-Arts et Littérature.

LIVRE SIXIÈME.

Suite des Harmonies de la Religion chrétienne avec les scènes de la nature et les passions du cœur humain.

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La France possédoit autrefois, dans l'Amérique septentrionale, un vaste empire, qui s'étendoit depuis le Labrador jusqu'aux Florides, et depuis les rivages de l'Atlantique jusqu'aux lacs les plus reculés du haut Canada.

Quatre grands fleuves, ayant leurs sources

dans les mêmes montagnes, divisoient ces régions immenses : le fleuve Saint-Laurent, qui se perd à l'Est dans le golfe de son nom; la rivière de l'Ouest, qui porte ses eaux à des mers inconnues; le fleuve Bourbon qui se précipite du midi au nord dans la baie d'Hudson; et le Meschacebé (1), qui tombe, du nord au midi, dans le golfe du Mexique.

Ce dernier fleuve, dans un cours de plus de mille lieues, arrose une délicieuse contrée, que les habitans des Etats-Unis appellent le nouvel Eden, et à laquelle les Français ont laissé le doux nom de Louisiane. Mille autres fleuves, tributaires du Meschacebé, le Missouri, l'Illinois, l'Akanza, l'Ohio, le Wabache, le Tenase, l'engraissent de leur limon, et la fertilisent de leurs eaux. Quand tous ces fleuves se sont gonflés des déluges de l'hiver, quand les tempêtes ont abattu des pans entiers de forêts, les arbres déracinés s'assemblent sur les sources. Bientôt les vases les cimentent, les lianes les enchaînent, et des plantes y prenant racine de toutes parts, achèvent de consolider ces débris. Charriés par les vagues écu

(1) Vrai nom du Mississipi ou Meschassipi.

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