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la vérité dit à l'homme : Celui qui n'est pas avec moi est contre moi. Cet instant, pour tous, âmes pacifiques, cœurs timides ou caractères forts, cet instant est l'instant des résolutions suprêmes, des actes de foi, et fautil le dire, des déchirements.

Je crois qu'on me comprend. On pourra trouver que j'entends mal mon devoir; nul ne se donnera la licence de penser, j'en ai la confiance, que le devoir ici est un prétexte, tandis que le vrai mobile serait je ne sais quel inqualifiable besoin de guerroyer. Toute conscience est respectable, bien plus la conscience qui traîne son esclave au travers des épines de la contradiction.

La nécessité m'oblige, ai-je dit. Oui; les institutions que je combats prennent une extension immense; leurs fondateurs se leurrent eux-mêmes et trompent involontairement le public par d'apparentes concessions faites à l'esprit évangélique qui les condamne; enfin, d'année en année, les rapports des diverses congrégations constatent les victoires gratuitement supposées du principe monastique sur les répugnances des masses, sur l'opposition raisonnée d'Eglises très vivantes et très fidèles aux Ecritures.

Ces trois faits les progrès de l'œuvre, les semblants de réforme qu'elle s'impose, les succès qu'elle pense avoir remportés sur l'opinion qui lui est contraire, ces trois faits ont une gravité telle, qu'en leur présence, se taire lorsqu'on croit avoir pour soi, et la Bible, et la raison; ce serait une lâcheté.

L'œuvre se développe partout, elle couvre de ses rameaux les pays où la critique évangélique ne s'exerçant pas contre elle, personne ne s'est demandé : « Ce que nous faisons est-il conforme, oui ou non, à ce que veut l'Ecriture?» Là, en Allemagne, par exemple, où la lettre de la Bible, où les modèles apostoliques sont tombés dans un discrédit étrange, chaque année voit les maisons de sœurs s'implanter dans de nouvelles provinces et les sœurs elles-mêmes s'emparer de fonctions qu'accomplissaient, que remplissent à la gloire de leur Maître des institutrices, des garde-malade, des femmes dévouées, ou encore de simples chrétiennes, diaconesses à la façon de Phoebé.

Dans les contrées où la lutte s'est déclarée, les progrès sont moins rapides, mais l'entraînement des fondateurs et des partisans de l'institution a cette ardeur fiévreuse que donne la contestation et qui nous rend plus âpre au triomphe.

un peu

Partout l'erreur que je combats agit d'après un mode redoutable, le mode qu'affectionnent les idées qui n'ont pas la Bible pour fondement : l'action et le silence. On parle peu, on discute rarement; si on répond aux attaques, c'est en affirmant qu'on ne les mérite point; on ne prouve rien; de l'Evangile, seul juge en cette affaire, on ne dit pas un mot; on déclare que les préventions sont tombées, on signale une adhésion générale qui n'existe pas, on s'adresse aux Eglises évangéliques comme si les Eglises évangéliques avaient adopté l'institution dont on veut les doter malgré elles; et puis

l'on bâtit des maisons, on met des sœurs à la tête des asiles, des hospices, des écoles, des refuges, on s'écrie: <«< Voyez ! il en faut partout, elles font du bien partout, il y en a partout !» Les gens faibles, les gens qui raisonnent peu, les gens encore qui ont un parti pris de ne jamais regarder au delà du commode et de l'heure présente trouvent que tout va bien, et sans qu'il y paraisse, avec nous, sans nous, contre nous, l'institution s'avance, elle pénètre jusqu'aux moindres fibres du protestantisme, et quand vous voudrez l'arracher il se trouvera que c'est elle qui vous maîtrise

Rarement une erreur se présente sous la forme de principe. Le loup montrait patte blanche; pensez-vous qu'à l'exhibition de sa double mâchoire, les biquets lui eussent ouvert la porte du logis? L'erreur ne commet pas cette imprudence de se résumer en une thèse ; celui qui la lance dans le monde sait la puissance des faits accomplis: des faits donc, encore des faits! le fait éblouit les ignorants, domine les paresseux, assouplit les revêches; des faits partout, et le fait une fois seigneur et maître, il appelle la théorie, il appelle le principe principe faux, théorie pernicieuse, peu importe, car grâce au fait accompli il n'y a plus dans la place que des aveugles ou des esclaves.

Après l'extension de l'œuvre, j'ai signalé les concessions apparentes. Celles-ci sont perfides, non dans l'intention des fondateurs, mais dans la réalité. Elles semblent céder quelque chose à la vérité, elles ne lui abandonnent que de la fumée. Les amis de l'institution

qui croient avoir fait un pas du côté de la Bible tandis qu'ils n'ont pas bougé se disent: Nous marchons, nous dépouillons notre fondation de ce qu'elle avait de suspect, nous voilà sur le bon terrain, bientôt nous serons en règle avec toute l'Ecriture et d'accord avec tous les chrétiens. Le public, celui-là très nombreux qui aime à croire sur parole s'écrie: Ceci est excellent; voici une modification qui ne laisse plus rien à désirer, plus rien à reprendre; enfin la question est résolue, le débat vidé, l'affaire en règle, nous pouvons avoir des sœurs, nous pouvons les soutenir, il n'y a plus à examiner, plus à douter, c'est fini!... et partout on entend un soupir d'aise.

Cette satisfaction m'épouvante; c'est de l'étourdissement, ce n'est pas de la conviction. J'aime mieux les conquêtes à ciel ouvert que la sape et que la mine; celle-ci perdra ceux qui la creusent très innocemment comme ceux qui la sentent sourdement avancer sous leurs pas elle veut être éventée.

Enfin les fondateurs des congrégations monastiques se flattent, ai-je dit, d'avoir étouffé la contradiction.

En cela ils se trompent, et comme cette illusion est funeste, je dois la détruire.

Dans notre temps, le triomphe est un grand conquérant; déclarez que vous êtes vainqueur, faites sonner devant vous les fanfares, tous les genoux ploieront.

Non, les préventions ne sont pas tombées; elles restent debout parce qu'elles relèvent d'un principe impérissable: l'obéissance exacte à ce qui est écrit. Ces pré

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ventions se manifestent de plusieurs manières. Ici ce sont des protestations discrètes mais persévérantes, là c'est une insurmontable difficulté à trouver, au milieu de troupeaux très dévoués, de nouvelles sœurs; ailleurs, partout où vit le respect de la Parole, ce sont des Eglises qui se prononcent contre les diaconesses conventuelles en nommant des diaconesses bibliques, choisies dans leur sein, parmi des femmes de toutes conditions, que n'assujettit aucune règle humaine, que leur vocation n'arrache à l'exercice d'aucun de leurs devoirs naturels. J'effleure en passant des points sur lesquels je reviendrai dans le cours de cet ouvrage, je les signale et je dis, m'appuyant sur les faits : Vous n'avez pas vaincu, Dieu en soit loué; notre noble forteresse protestante ne s'est pas rendue, notre rocher n'a pas croulé; je ne suis pas seul, nous sommes beaucoup, pleins d'amour pour vous, pénétrés de respect pour vos intentions, mais résolus jusqu'à la mort à combattre vos institutions monastiques.

La question est difficile ; je serai sincère tout à fait et je dirai qu'elle est pleine de fiel. Non qu'il y ait en elle rien d'obscur; elle se présente nettement à tout esprit impartial, elle est vite résolue pour quiconque examine avant d'avoir pris parti. Mais elle s'est posée dans le monde sous forme de fait avant de s'être présentée sous forme de principe; mais elle n'a pas permis qu'on la discutât en qualité d'idée avant de s'appliquer aux œuvres chrétiennes protestantes. Les esprits qui, ré

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