Histoire de mes idées (autobiographie): Documents inédits

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Germer-Baillière et cie, 1878 - 356 Seiten
 

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Seite 313 - L'histoire, dans son commencement comme dans sa fin, est le spectacle de la liberté, la protestation du genre humain contre le monde qui l'enchaîne, le triomphe de l'infini sur le fini, l'affranchissement de l'esprit, le règne de l'âme.
Seite 67 - C'était un conventionnel de la Montagne, d'un grand et charmant esprit, compagnon de Saint-Just dans sa mission aux lignes de Wissembourg, Baudot, qui avait découvert Hoche et agrandi la France jusqu'au Rhin. Œil d'aigle, bouche souriante, grand habit noir, bas de soie, il venait chaque jour passer deux heures chez mes parents. Jamais il ne parlait de la Révolution. C'était là aussi un sujet interdit, soit qu'il craignît de ne pas être compris, soit que lui-même fût importuné de ses souvenirs....
Seite 173 - Car je voyais en lui un être tout différent de celui que le monde avait connu. Cette idéologie qu'il avait tant maudite, il devait désormais la servir, puisqu'il n'était plus qu'une idée.
Seite 192 - C'est là, dans ce cachot, que j'ouvris enfin les yeux à la lumière. C'est là que je naquis à l'intelligence, à l'amour des beaux livres, des belles idées immortelles, de tout ce qui n'avait fait jusque-là qu'effleurer ma vie, et qui devait y tenir désormais une si grande place. En regardant mieux à l'extrémité de la -voûte, je vis, ou je crus voir le Rhône; j'en tressaillis de joie.
Seite 191 - C'est dans l'automne de 1817 que j'entrai au collège de Lyon : bâtiments noirs, voûtes ténébreuses, portes verrouillées et grillées, chapelles humides, hautes murailles qui cachaient le soleil.
Seite 166 - Nous composions des discours, des déclamations, des amplifications, des narrations, comme au temps de Sénèque. Dans ces discours, il fallait toujours une prosopopée à la Fabricius ; dans les narrations, toujours un combat de générosité, toujours un père qui dispute à son fils le droit de mourir à sa place dans un naufrage, un incendie, ou sur un échafaud. Nous avions le choix entre ces trois manières de terminer la vie de nos héros, ainsi que la liberté de mettre dans leurs bouches...
Seite 26 - Le barbare ne la comprit que trop; le lendemain, comme nous étions au bois, et qu'il se sentit fatigué, il ôta ses sabots et m'ordonna de m'en charger. J'avais quatre ans; j'obéis. Nous arrivâmes ainsi devant ma mère, moi portant humblement les deux sabots de Gustin (et ils n'étaient pas légers), Gustin, tout fier de me voir essoufflé et rendu sous le faix; et pourtant c'était le plus honnête, le plus doux garçon du village. Ainsi cette première leçon d'égalité n'avait fait que déplacer...
Seite 337 - Par une force qui devient de plus en plus rare, elle a su concilier avec une foi inébranlable dans la foi chrétienne, tout ce que l'esprit cultivé peut comporter de liberté et de hardiesse. Elle s'élevait ainsi à une tolérance admirable, pleine de grandeur, et qui est tout le contraire de l'indifférence ; car elle se sentait près de son Dieu dans toutes les communions chrétiennes.
Seite 82 - El au milieu de ces figures, il n'ya pas une enfant, mais toujours des personnes achevées dans la fleur, sinon dans la maturité de l'âge. Chacune de ces apparitions me renvoie à une apparition plus lointaine. Je vois ainsi comme une procession de ces enchanteresses se tenir par la main, jusqu'au moment où mes yeux s'ouvrent à la lumière du monde; ce qui devrait en conscience m'obliger de croire avec Platon que l'âme s'éveille dans l'Éternel Amour.
Seite 118 - Combien j'étais alors fortement engagé dans la légende! Que ne fallait-il pas pour m'en délier! .Est-ce à moi de m'étonner si les masses ont tant de peine à s'en défaire? S'il m'arrivait jamais de me sentir porté à trop de sévérité pour les idolâtries du peuple, ne devrais-je pas me souvenir que je les ai toutes partagées?

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