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Saint Augustin, évêque d'Hippone et docteur de l'Eglise

ARTICLE Ier.

HISTOIRE DE SA VIE1.

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1. Tagaste, en Afrique, ville de la prode saint Au- vince de Numidie, près de Madaure et d'Hippone", fut le lieu où saint Augustin prit naissance, le treizième de novembre de l'an 354. Cette ville, engagée auparavant tout eutière dans le schisme des donatistes, était revenue depuis peu à l'unité catholique, intimidée par les lois des empereurs. Orose' et Mamert Claudien donnent à saint Augustin le nom d'Aurèle, sous lequel il fut connu plus ordinairement depuis que sa réputation

1 On peut consulter sur ce point les œuvres de saint Augustin, et surtout ses Confessions, ses Rétractations, tom. Ier, et ses Épîtres, tom. II; - la Vie de saint Augustin, par saint Possidius, évêque de Calame, tom. X; de saint Augustin, de l'édition Bénédictine; - les œuvres de saint Jérôme et surtout ses épîtres et ses dialogues contre les Pélagiens; — saint Prosper d'Aquitaine, et surtout sa Chronique; · Gennade, le livre des Écrivains ecclésiastiques, chap. XXXVIII; la Vie de saint Augustin, par les Bénédictins, tom. XI de l'édition de Paris; Cuper et Stilting, Acta Sanctorum, 28 août, tom. XIV d'août; Berti, Commentarius de rebus gestis S. Augustini librisque ab eo conscriptis, Venise, 1756, in-4; Poujoulat, Histoire de saint Augustin, sa vie, ses œuvres, Paris,

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se fut établie dans le monde. Son père, qui se nommait Patrice, était bourgeois de Tagaste. Il avait assez de naissance pour être admis à toutes les charges de la ville, mais peu de biens. Il fut longtemps sans croire en Jésus-Christ, et ne se convertit que sur la fin de sa vie. Monique, sa femme, fut mère de notre Saint, plus encore selon l'esprit que selon la chair. Elle eut encore de Patrice d'autres enfants, puisque saint Augustin 10 parle d'un frère qu'il avait avec lui à Ostie en 388, lorsque sa mère mourut. On croit que c'était Navige, le même qui se trou vait avec lui l'an 386, à la campagne, chez

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Son Edncation. 11 est fait catéchumène.

L'oisiveté ie fait tom

Véréconde', et qui prenait part aux entretiens de philosophie que le Saint y avait avec ses amis, et où l'on écrivait tout ce qui se disait.

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2. Aussitôt après la naissance d'Augustin, Monique, sa mère, eut soin de le faire marquer du signe de la croix et de lui faire goûter ce sel divin et mystérieux, qui est la figure de la vraie sagesse, en le mettant au nombre des catéchumènes. C'est ce qui lui a fait dire qu'avant d'être manichéen, il était chrétien catholique. Comme on s'aperçut bientôt qu'il ne manquait ni d'esprit ni de mémoire, on pensa à l'appliquer à l'étude de l'éloquence, et on l'envoya pour cet effet à Madaure, qui était une ville voisine. Il trouva plus de goût dans cette étude, qu'il n'avait fait dans les premières instructions où l'on apprend à lire, à écrire et à compter, quoique plus utiles; et il prenait plaisir dans l'étude des belles-lettres, à cause des fables et des fictions des poètes dont elles sont remplies. Mais, bien que ces mêmes contes se trouvassent également dans les poètes grecs comme dans les latins, il avait une extrême aversion pour les premiers, par suite de celle qu'il se sentait pour la langue grecque, dont l'étude mêlait comme une espèce d'amertume dans la douceur de ces fables, d'ailleurs si ingénieuses et si charmantes. Il fallut néanmoins vaincre cette répugnance pour le grec: et, à force de menaces et de châtiments, on l'obligea à l'apprendre; mais il avoue qu'il ne le posséda jamais parfaitement, et qu'il n'en savait pas assez pour entendre les livres que les Grecs ont écrits sur la Trinité. Ses progrès dans les autres sciences l'engagèrent insensiblement dans les désordres que produit la vaine gloire; et il avait honte de n'être pas aussi enchanté de l'amour de la vanité et du monde, et aussi perdu que les autres.

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3. Il était âgé d'environ quinze ans lorsber, en 370. qu'il revint de Madaure à Tagaste, où il passa la seizième année de son âge en la maison de son père, c'est-à-dire l'an 370. Occupé de la chasse des oiseaux et de toute autre chose que de ses études, il en inter

August., lib. de B. Vita, num. 7 et 14.- Lib. I Confess., cap. x1, num. 17.

3 August., De Utilit. credendi, cap. 1, num. 2. August., lib. I Confess., cap. IX, num. 14,

et lib. II, cap. II, num. 5.

Lib. I Confess., cap. XIII, num. 20 et 21. 6 Augast., lib. III De Trinit., num. 1.

rompit même le cours jusqu'à ce que l'on eût amassé l'argent nécessaire pour les lui faire continuer à Carthage. Pendant ce temps de vacances, les voluptés commencèrent à le dominer tyranniquement. Il courait dans le précipice avec un tel aveuglement, qu'il commettait le crime non-seulement pour y trouver du plaisir, mais encore pour être loué de l'avoir commis. Cependant il demandait à Dieu la chasteté; mais, ajoutait-il, que ce ne soit pas encore si tôt car il craignait que le Seigneur ne fût trop prompt à l'exaucer, et qu'il ne le guérît plus tôt qu'il ne voulait de la maladie d'impureté, aimant bien mieux le plaisir de la satisfaire, que le bonheur d'en être délivré.

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4. Étant arrivé à Carthage sur la fin de l'an 370, il y étudia la rhétorique sous un et 371 nommé Démocrate, et tint bientôt le premier rang 10 parmi ceux qui étudiaient dans la même école; ce qui lui causait une joie mêlée de présomption, et le rendait tout enflé d'orgueil. A l'ambition d'exceller parmi ceux de son école, se joignirent les feux de l'amour infâme, que le changement de lieu n'avait point éteints. « Je n'aimais pas encore, dit-il, mais je désirais d'aimer. Et je tombai enfin dans les filets où je souhaitais tant d'être pris: je fus aimé, et j'arrivai même à la possession de ce que j'aimais; mais quels effets de votre miséricorde et de votre bonté ne me fites-vous point sentir, ô mon Dieu, par le fiel et par les amertumes que vous répandites sur ces fausses douceurs! Car ces malheureux liens où je m'étais jeté si volontiers, ne servirent qu'à me tenir exposé aux traits ardents de la jalousie, des soupçons, de la crainte, de la colère, des querelles et des démêlés. » Mais, quelque penchant qu'il se sentît pour le plaisir, il mit une espèce de règle " dans ses désordres, car il ne vit qu'une seule femme sous le titre de concubine, et lui garda la fidélité, quoiqu'elle ne lui fût pas jointe par un mariage. légitime. Il en eut un fils nommé Adéodat, doué d'excellentes qualités ".

5. L'année avant la naissance d'Adéodat, c'est-à-dire en 371, saint Augustin, qui était son

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I perd père,

en 371,

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philosophes

commence alors dans la dix-septième année de son âge, Bresse. I perdit son père. Mais sa mère continua à pfire les fournir à ses entretiens, de même que RomaΕντις des nien, le plus considérable des habitants de Tagaste, qui, depuis son séjour à Carthage, lui avait prêté toute sorte de secours. En 373, il arriva, selon l'ordre que l'on tenait ordinairement pour apprendre l'éloquence, à la lecture du livre de Cicéron, intitulé Hortence. Ce livre, qui est une exhortation à la philosophie, le toucha de manière qu'il changea toutes ses affections. Il ne le lisait pas pour polir son style, mais pour nourrir son esprit. Une chose le refroidissait dans l'ardeur qu'il se sentait pour la lecture de ce livre : c'est qu'il n'y voyait point le nom de Jésus-Christ profondément gravé dans son cœur, parce qu'il l'avait sucé avec le lait. Il résolut donc dès-lors de s'appliquer à lire l'Écriture sainte pour en prendre connaissance. Mais il n'était pas encore capable d'entrer dans des secrets impénétrables aux superbes. A l'âge d'environ vingt ans, il lut seul le livre des Catégories d'Aristote, et en comprit tout le sens, aussi bien que ceux qui, pour l'entendre, avaient eu recours aux plus excellents maîtres. Il entendit de même, sans le secours de personne, tous les livres des arts libéraux qui lui tombèrent entre les mains. Enfin il était instruit de l'astrologie judiciaire, et savait ce que les philosophes ont écrit sur cette matière. Mais, au lieu de tirer avantage de ses talents et de ses connaissances', il ne s'en servit que pour se perdre.

Il tombe dans l'héré

374.

6. Accoutumé par les Catégories d'Arise des ma tote à raisonner de Dieu comme des corps, il leas, en le cherchait, non par la lumière de l'esprit, mais par les organes des sens, et ce fut ce qui le retint longtemps dans l'hérésie des manichéens, où il tomba vers l'an 374; ne pouvant concevoir une substance spirituelle, il ne pouvait dissiper les fantômes et toutes les chimères de ces hérétiques. Ce qui le fit tomber dans leurs erreurs, fut la peine où il était de connaître l'origine du mal'. Son esprit, fatigué par les recherches qu'il en faisait, se laissa aller à croire avec eux que

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'Lib. III Confess., cap. vII, num. 7, et lib. II Acad., cap. II, num. 3.

2 Lib. III Confess., cap. IV, num. 7, et lib. VI, cap. XI, num. 18.

Ce livre n'existe plus depuis longtemps. (L'éditeur.) Lib. III Confess., cap. IV, num. 8. Lib. IV Confess., cap. XVI, num. 28.

le mal avait un principe réel et éternel, opposé à Dieu comme au principe du bien. L'avidité 10 qu'il avait de connaître la vérité

par une lumière claire et certaine, servit encore à l'engager dans les rêveries des manichéens car le nom de la vérité était continuellement sur leurs lèvres 11, et ils en parlaient sans cesse, bien qu'elle ne fût point avec eux. Un autre motif 12 le poussa à mépriser la religion qui lui avait été inspirée dès son enfance par ceux dont il tenait la vie, pour suivre les manichéens et les écouter avec tant de soin; dans l'Église catholique, disaient-ils, on effrayait les fidèles par des superstitions, et on leur commandait de croire sans les instruire par la raison; et eux, au contraire, ne pressaient personne de croire, qu'après lui avoir fait connaître la vérité et lui avoir levé tous ses doutes. Les objections que ces hérétiques faisaient contre les généalogies que saint Matthieu et saint Luc font de Jésus-Christ troublèrent également l'esprit de saint Augustin qui, n'ayant encore aucune connaissance des divines Écritures, donnait sans peine dans des sentiments dont il ne pouvait apercevoir la fausseté. C'est ce qu'il confessa depuis avec beaucoup d'humilité dans un discours qu'il fit à son peuple, et où il attribue tous ses égarements à l'orgueil dont il était dominé dans sa jeunesse. « Vous pouvez m'en croire, disait-il 13, lorsque je vous parle du respect avec lequel nous devons recevoir ce que nous apprend la sainte Écriture car je ne vous le dis qu'après avoir été autrefois trompé par les manichéens, lorsqu'étant encore jeune, je voulais examiner les divines Écritures, avant d'en avoir demandé l'intelligence avec piété. Aussi je ne faisais que me fermer moi-même la porte de mon Seigneur par une conduite si déraisonnable. Je devais frapper afin qu'on m'ouvrit, et je me la fermais de plus en plus. J'étais assez hardi de chercher avec orgucil ce que l'humilité seule peut faire trouver. » Après avoir été ainsi trompé, il n'oublia rien pour tromper les autres. Il troubla la simplicité de plusieurs personnes ignorantes par la vaine subtilité de ses question. Il enga

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7 Lib. V Confess., cap. m, -7 Lib. VI Confess., cap. XVI, num. 30. 8 Lib V Confess,, cap. xiv. 9 Lib. III Confess., cap. vii, num. 12. 10 August.. De Utilit. cred., cap. 1, num. 2. 11 Lib. VIII Confess., cap. vi, num. 10.

12 De Utilit. Cred., cap. 1, num. 2.

13 August., Serm. 51, cap. v, num. 6.

com.

mence à se

manichéens

gea même dans ses erreurs Alypius, le plus illustre de ses amis; Romanien, dont il avait reçu tant de bienfaits, et un nommé Honorat, qui n'avait fait jusqu'alors aucune profession du christianisme.

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7. Sa familiarité avec ces hérétiques lui fit défier des bientôt apercevoir qu'ils combattaient avec beaucoup plus d'éloquence les opinions des autres, qu'ils ne prouvaient la leur avec force et avec solidité : ce qui l'empêcha de s'attacher entièrement à eux. Il ne les suivit donc qu'avec précaution et réserve, se contentant d'être du nombre de leurs auditeurs, sans participer à leurs infâmes mystères3. Il voyait aussi avec peine qu'ils ne célébraient la fête de Pâques que peu ou point, sans veilles, sans jeûne extraordinaire, sans aucune solennité, et qu'ils n'en rendaient aucune bonne raison. Enfin le peu d'assurance qu'il trouva parmi eux, et le désir de son avancement dans le monde, ralentirent beaucoup l'ardeur qu'il avait eue pour les écouter. Il n'abandonna néanmoins leur parti qu'après l'avoir suivi pendant neuf ans, c'està-dire depuis l'an 374 jusqu'en 383, qui était la vingt-huitième année de son âge. Il semble même qu'il ne le quitta entièrement qu'en 385, ou même en 386, lorsqu'il se convertit tout-à-fait. Comme sa mère était pénétrée d'une vive douleur de le voir tombé dans une hérésie si détestable, elle priait toutes les personnes qu'elle en croyait capables, de conférer avec lui pour combattre ses erreurs et l'instruire de la vérité. Un saint évêque à qui elle faisait la même prière, refusa d'obtempérer à sa demande en disant que la lecture des livres des manichéens le détromperait. Comme elle ne laissait point de le presser, il lui dit : « Allez, continuez de prier pour lui, car il est impossible qu'un fils pleuré avec tant de larmes périsse ja mais. >>

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est où vous êtes". » En effet, la pieuse mère ayant regardé à côté d'elle, vit son fils sur la même règle où elle se tenait. Saint Augustin, à qui elle raconta ce rêve, prétendait qu'il marquait que sa mère serait un jour de son sentiment; mais elle répondit sur-le-champ: « Cela ne peut être; il ne m'a pas été dit: Vous êtes où il est, mais: Il est où vous êtes o. >>

8. Ce songe consola tellement sa mère, qu'elle lui permit de demeurer avec elle et de manger à sa table, ce qu'elle ne souffrait plus depuis quelque temps, tant elle avait en horreur l'hérésie des manichéens. On met cet événement à Tagaste, environ vers l'an 375. Pendant qu'il enseignait la rhétorique en cette ville, il eut pour auditeur Alypius 10, qui, dans un âge peu avancé, faisait paraître beaucoup d'inclination pour la vertu; ils lièrent entre eux une amitié trèsétroite. Saint Augustin s'unit " aussi étroitement avec un autre jeune homme de son âge, avec lequel il avait été nourri dès l'enfance et fréquenté les écoles; mais à peine y avait-il un an qu'il goûtait la douceur de cette amitié, que Dieu lui enleva son ami et le tira de ce monde. La douleur que cette mort lui causa, l'obligea de quitter son pays et de passer à Carthage, où il enseigna la rhétorique 12, vendant l'art de vaincre l'esprit de l'homme par la parole, et étant luimême vaincu par la passion de l'intérêt et de l'honneur. Pendant son séjour à Carthage, il fit connaissance avec un célèbre médecin nommé Vindicien, qui s'était autrefois appliqué comme lui à l'astrologie judiciaire. C'était un homme âgé, convaincu par la raison et par l'expérience qu'il n'y a point de science humaine capable de prévoir les choses futures. Ce fut 13 de lui dont Dieu se servit pour détromper saint Augustin. Il se persuada enfin que quand les prédictions. des astrologues se trouvent véritables, cela vient, non pas du hasard, comme le disait Vindicien, mais de l'ordre de Dieu même 14 qui, gouvernant tout l'univers avec une justice suprême et une sagesse incomparable, fait, par de secrets mouvements, que, sans

9 Lib. III Confess., cap. XI, num. 19.-10 Lib. VI Confess., cap. VII, num. 11.

11 Lib. IV Confess., cap. iv, num. 7.

12 Possid., in Vita, cap. I, et August., lib. IV Confess., cap. II, num. 2.

18 Lib. IV Confess., cap. III, num. 4 et 5.

1 Lib. VII Confess., cap. vi, num. 8 et 10.

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