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monde, et dans tous les temps. Mais elles n'ont ni la morale qui peut me plaire, ni les preuves qui peuvent m'arrêter. Et ainsi j'aurais refusé également la religion de Mahomet, et celle de la Chine, et celle des anciens Romains, et celle des Égyptiens, par cette seule raison que l'une n'ayant pas plus de marques de vérité que l'autre, ni rien qui déterminât nécessairement, la raison ne peut pencher plutôt vers l'une que vers l'autre1.

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Mais, en considérant ainsi cette inconstante et bizarre variété de mœurs et de créances dans les divers temps, je trouve en un coin du monde un peuple particulier 2, séparé de tous les autres peuples de la terre, le plus ancien de tous, et dont les histoires précèdent de plusieurs siècles les plus anciennes que nous ayons. Je trouve donc ce peuple grand et nombreux, sorti d'un seul homme', qui adore un seul Dieu, et qui se conduit par une loi qu'ils disent tenir de sa main. Ils soutiennent qu'ils sont les seuls du monde auxquels Dieu a révélé ses mystères; que tous les hommes sont corrompus, et dans la disgrâce de Dieu; qu'ils sont tous abandonnés à leur sens et à leur propre esprit; et que de là viennent les étranges égarements et les changements continuels qui arrivent entre eux, et de religions, et de coutumes; au lieu qu'ils demeurent' inébranlables dans leur conduite: mais que Dieu ne laissera pas éternellement les autres peuples dans ces ténèbres; qu'il viendra un libérateur pour tous; qu'ils sont au monde pour l'annoncer; qu'ils sont formés exprès pour être les avant-coureurs et les hérauts de ce grand avénement, et pour

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1 « Vers l'une que vers l'autre. » Il traite cela bien sommairement; mais ces foisons de religions ne lui paraissent pas valoir qu'il se donne plus de peine.

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« Un peuple particulier. » Les Juifs. C'est là ce qu'il annonçait dès la première phrase par ces mots : « Je vois la religion chrétienne fondée sur une religion » précédente. » C'est-à-dire sur la religion juive.

3 « Le plus ancien de tous. » Supprimé par P. R., sans doute comme se retrou. vant plus loin. Voir le fragment qui commence par Dans cette recherche, etc.

4 « De plusieurs siècles. » Pascal, qui ne se suppose pas encore chrétien, ne devrait-il pas d'abord établir que les livres attribués à Moïse sont en effet de lui, et ont été composés dix-sept cents ans avant notre ère?

5 << Sorti d'un seul homme. Supprimé dans P. R. Voir aussi plus loin.

6 « Qui adore un seul Dieu. » Cela ne se voit en effet que chez les seuls Juifs, jusqu'aux temps du christianisme. Le polythéisme pénètre souvent parmi eux, mais la loi et l'opinion le condamnent; c'est le culte des idoles, des dieux étrangers, c'est une aberration religieuse, ce n'est pas la religion.

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7 << Au lieu qu'ils demeurent. » Eux, les Juifs.

<< Et les hérauts. » Cette image prépare bien ce qui suit, et pour appeler tous les peuples.

appeler tous les peuples à s'unir à eux dans l'attente de ce libéra

teur.

La rencontre de ce peuple m'étonne, et me semble digne de l'attention. Je considère cette loi qu'ils se vantent de tenir de Dieu, et je la trouve admirable. C'est la première loi de toutes, et de telle sorte qu'avant même que le mot loi fût en usage parmi les Grecs, il y avait près de mille ans qu'ils l'avaient reçue et observée sans interruption. Ainsi je trouve étrange que la première loi du monde se rencontre aussi la plus parfaite, en sorte que les plus grands législateurs en ont emprunté les leurs, comme il paraît par la loi des XII Tables d'Athènes, qui fut ensuite prise par les Romains, et comme il serait aisé de le montrer, si Josèphe et d'autres n'avaient pas assez traité cette matière.

...

Dans cette recherche 2 le peuple juif attire d'abord mon attention par quantité de choses admirables et singulières qui y parais

sent.

Je vois d'abord que c'est un peuple tout composé de frères: et, au lieu que tous les autres sont formés de l'assemblage d'une infinité de familles, celui-ci, quoique si étrangement abondant, est tout sorti d'un seul homme 3; et, étant ainsi tous une même chair, et membres les uns des autres, ils composent un puissant état d'une seule famille. Cela est unique.

Cette famille, ou ce peuple est le plus ancien qui soit en la connaissance des hommes; ce qui me semble lui attirer une vénération particulière, et principalement dans la recherche que nous faisons;

« La rencontre de ce peuple. » Les éditeurs de P. R. n'ont conservé de cet alinéa, qui fait double emploi avec le fragment suivant, que la première ligne, qui leur sert de transition pour rattacher celui-ci au fragment qui précède, comme si c'était toujours un même morceau.

2. Dans cette recherche. » 297. En titre, Avantages du peuple juif. P. R., ibid. 3 >> D'un seul homme. » D'Abraham, et non pas d'Adam, qui n'est pas plus particulièrement père des Juifs que des autres peuples.

N'êtes-vous pas ici sur la montagne sainte

Où le père des Juifs sur son fils innocent

Leva sans murmurer un bras obéissant! (Athalie, IV, 5.)

« Cela est unique. » Cela est établi par le témoignage de l'Écriture, mais celui qui ne croirait pas encore à l'Écriture, et c'est la supposition où Pascal se place, ne pourrait en être assuré. La tradition reçue chez un peuple n'est pas toujours conforme à la vérité historique.

5 « Le plus ancien. » Cela n'est pas exact d'après l'Écriture même, puisque la nation égyptienne y paraît déjà florissante au temps d'Abraham. Pascal pouvait dire

puisque, si Dieu s'est de tout temps communiqué aux hommes, c'est à ceux-ci qu'il faut recourir pour en savoir la tradition.

Ce peuple n'est pas seulement considérable par son antiquité; mais il est encore singulier en sa durée, qui a toujours continué depuis son origine jusque maintenant : car au lieu que les peuples de Grèce et d'Italie, de Lacédémone, d'Athènes, de Rome, et les autres qui sont venus si longtemps après, ont fini il y a si longtemps, ceux-ci subsistent toujours1; et, malgré les entreprises de tant de puissants rois2 qui ont cent fois essayé de les faire périr, comme les historiens le témoignent, et comme il est aisé de le juger par l'ordre naturel des choses, pendant un si long espace d'années ils ont toujours été conservés néanmoins, et s'étendant depuis les premiers temps jusques aux derniers, leur histoire enferme dans sa durée celle de toutes nos histoires.

La loi par laquelle ce peuple est gouverné est tout ensemble la plus ancienne loi du monde, la plus parfaite, et la seule qui ait toujours été gardée sans interruption dans un État. C'est ce que Josèphe montre admirablement contre Apion', et Philon, juif', en divers lieux, où ils font voir qu'elle est si ancienne, que le nom même de loi n'a été connu des plus anciens que plus de mille ans après; en sorte qu'Homère, qui a traité de l'histoire de tant d'états', ne s'en seulement que le peuple juif prétend remonter, par une généalogie non interrompue, d'Abraham à Sem, et de Sem à Adam, le premier homme. Il est remarquable d'ailleurs que dans tout ce morceau, Pascal ne tient compte que de l'antiquité classique, et ne pense même pas à considérer les peuples de la haute Asie, les Indiens et les Chinois.

1 << Ceux-ci subsistent toujours. » On sent l'effet de cette courte incise après une phrase ample et périodique.

2 << Tant de puissants rois. Les rois d'Assyrie, de Perse, les successeurs d'Alexandre, les capitaines, puis les empereurs romains.

3 « Conservés néanmoins. » Il en est de même des Guèbres ou Parsis dans l'Orient.

4 « Leur histoire enferme dans sa durée. » Phrase magnifique, et qui fait une espèce d'illusion. Car il semble que toutes les histoires, ou du moins nos histoires, les histoires classiques, soient renfermées dans celle des Juifs pour tout le reste aussi bien que pour la durée. Bossuet, dans le Discours sur l'histoire universelle, n'a fait que remplir le plan superbe que Pascal avait tracé dans ces mots.

3 << Contre Apion. » La réponse au grammairien Apion d'Alexandrie est un écrit composé par Josèphe à l'appui de ses livres des Antiquités judaïques. Il y soutient, contre les objections d'Apion, l'antiquité du peuple juif et l'autorité des Écritures.

6 « Et Philon, juif. » Il dit, Philon, juif, sans doute pour le distinguer des autres Philon, et particulièrement de l'historien Philon de Byblos. Voir les OEuvres de Philon (Paris, 4640), au livre II de la Vie de Moïse, particulièrement à la page 656.

« Qui a traité de l'histoire de tant d'états. P. R., qui a parlé de tant de peu

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