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ce des âges, de la fanté, des forces du Corps, & des qualités de l'Efprit, ou de l'Ame; L'autre qu'on peut appeller inégalité morale, ou politique, parce qu'elle dépend d'une forte de convention, & qu'elle eft établie, ou du moins autorifée par le confentement des Hommes. Celle-ci confifte dans les differents Privileges, dont quelquesuns jouiffent, au préjudice des autres, comme d'être plus riches, plus honorés, plus Puiffants qu'eux, ou mêmes de s'en faire obeïr.

On ne peut pas demander quelle eft la fource de l'inégalité Naturelle, parce que la réponse fe trouveroit énoncée dans la fimple définition du mot: On peut encore moins chercher, s'il n'y auroit point quelque liaison effentielle entre les deux inégalités; car ce feroit

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feroit demander, en d'autres termes, fi ceux qui commandent valent nécessairement mieux, que ceux qui obéïffent, & fi la force du Corps ou de l'Efprit, la fageffe ou la vertu, fe trouvent toujours dans les mêmes individus, en proportion de la Puiffance, ou de la Richeffe: Question bonne peut être à agiter entre des Efclaves entendus de leurs Maîtrės, mais qui ne convient pas à des Hommes raisonnables & libres, qui cherchent la vérité.

De quoi s'agit il donc précisement dans ce Discours? De marquer dans le progrés des chofes, le moment où le Droit fuccedant à la Violence, la Nature fut foumise à la Loi; d'expliquer par quel enchaînement de prodiges le fort put fe refoudre à fervir le foible, & le Peuple à acheter un repos en idée,

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idée, au prix d'une felicité réelle.

LES Philofophes qui ont examiné les fondemens de la fociété, ont tous fenti la né ceffité de remonter jufqu'à l'état de Nature, mais aucun d'eux n'y eft arrivé. Les uns n'ont point balancé à fuppofer à l'Homme dans cet état, la notion du Jufte & de l'Injaste, fans se soucier de montrer qu'il dût avoir cette notion, ni même qu'elle lui fût utile: D'autres ont parlé du Droit Naturel que chacun a de conferver ce qui lui appartient, fans expliquer ce qu'ils entendoient par appartenir; D'autres donnant d'abord au plus fort l'autorité fur le plus foible, ont auffitôt fait naître le Gouvernement fans fonger au temps qui dut s'écouler avant que le fens des mots d'autorité, & de gouverne ment pût exister parmi les Hommes: Enfin

tous,

tous, parlant fans ceffe, de befoin, d'avidité, d'oppreffion, de defirs, & d'orgueil, ont

transporté à l'état de Nature, des idées qu'ils avoient prifes dans la fociété; Ils parloient de l'Homme Sauvage, & ils peignoient l'homme Civil. Il n'eft pas même venu dans l'efprit de la plupart des nôtres de douter que l'Etat de Nature eût exifté, tandis qu'il est évident, par la lecture des Livres Sacrés, que le premier Homme ayant reçu immediatement de Dieu des lumieres & des Preceptes, n'étoit point lui-même dans cet état, & qu'en ajoutant aux Ecrits de Moïfe la foi que leur doit tout Philofophe Chrétien, il faut nier que, même avant le Deluge, les Hommes fe foient jamais trouvés dans le pur état de Nature, à moins qu'ils n'y foient retombés par quelque Evenement ex

traor

traordinaire: Paradoxe fort embarraffant à défendre, & tout à fait impoffible à prou

ver.

COMMENÇONS donc par écarter tous les faits, car ils ne touchent point à la queftion. Il ne faut pas prendre les Recherches, dans les quelles on peut entrer fur ce Sujet, pour des verités hiftoriques, mais feulement pour des raifonnemens hypothétiques & conditionnels; plus propres à éclaircir la Nature des chofes, qu'à montrer la veritable origine, & femblables à ceux que font tous les jours nos Phyficiens sur la formation du Monde. La Religion nous ordonne de croire que Dieu lui-même ayant tiré les Hommes de l'état de Nature, font inégaux parce qu'il a voulu qu'ils le fuffent; mais elle ne nous défend pas de for

ils

mer

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