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et l'homme tend à la posséder en Dieu | nous en coûte de nous assujétir à l'é-
et à l'y puiser comme dans sa source.
La loi véritable et première, dit Cice-
ron, est la droite raison de Dieu.

Le culte de la raison, qui est le but unique de notre âme, n'est donc que le culte de Dieu en esprit et en vérité. Ce culte devient une idolâtrie si, à la place de Dieu qui est la seule RAISON, nous divinisons notre raison propre et si nous bornons ainsi à nous-mêmes l'activité morale qui ne nous a été donnée que pour aller à Dieu.

Le complément de notre être n'est pas ici-bas; nous avons reçu des facultés pour le conquérir. Le progrès le plus indéfini est la loi impulsive de notre nature; or l'homme - intelligence ne peut grandir et se développer que par une communication avec l'infinie perfection de Dieu la religion répond donc essentiellement à la première loi du monde intellectuel; nous dérober à l'action perfectionnante de Dieu, pour nous borner à nous-mêmes et aux creatures, c'est nous suicider moralement, puisque nous avons été faits pour être semblables à Dieu, et trouver en lui notre félicité.

Nous ne sommes libres qu'à la condition d'être responsables; l'absolue justice ne s'exerce pas ici-bas, elle gènerait notre liberté, et nous ne pourrions pas devenir semblables à Dieu; mais vient un moment où le bras du Très Haut se raccourcit tout à coup, et où il se fait rendre par l'expiation et la crainte l'hommage que nous lui avons refusé par la volonté et l'amour; il le faut, sans quoi Dieu ne serait pas Dieu. « Ainsi tout en moi, comme autour de moi, proclame la vérité d'une religion « naturelle, d'un culte nécessaire de « tout mon être envers Dieu. - Rapport « d'existence et de dépendance, de « reconnaissance, d'amour, de sacerdoce naturel et d'adoration, de res« semblance et de filiation originelle, de société, de raison et de destinée, << de responsabilité et d'intérêt éter

‹ hel. »

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-

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preuve de la foi et de la vertu : nous voulons avoir le ciel sur la terre, et pour cela nous intervertissons l'usage de toutes nos facultés; nous les pervertissons, et tous nos efforts ne tendent qu'à manquer notre destinée, qu'à nous précipiter loin de notre but. Une femme, qui n'a que trop fait l'expérience de cet égarement de notre nature, a laissé tomber dans un livre infernal une page qui résume éloquemment cette pensée 1.

De la souveraine et unique paternité de Dieu, dérive la fraternité humaine; l'aimer, aimer le prochain, voilà les lois de la religion naturelle; la prière est le moyen par lequel nous rendons à Dieu notre hommage. De l'opposition que l'homme trouve entre ses goûts et

L'amour, Sténio, n'est pas re que vous croyez; ce n'est pas cette violente aspiration de toutes les facultés vers un être créé, c'est l'aspiration sainte de la partie la plus éthérée de notre âme vers l'inconnu. Êtres bornés, nous cherchons sans cesse à donner le change à ces cuisants el insatiables désirs

qui nous consument; nous leur cherchons un but

autour de nous, et, pauvres prodigues que nous sommes, nous parons nos périssables idoles de toutes les beautés immatérielles aperçues daos nos rèves. Les émotions des sens ne nous suffisent pas; la nature n'a rien d'assez recherché dans le trésor de ses joies naïves pour apaiser la soif du bonheur qui est en nous; il nous faut le ciel, et nous ne l'avons

pas. C'est pourquoi nous cherchons le ciel dans une créature semblable à nous, et nous dépensons pour elle toute cette haute énergie qui nous avait ėtė donnée pour un plus noble usage. Nous refusons à Dieu le sentiment de l'adoration, sentiment qui fat mis en nous pour retourner à Dieu seul; nous le reportons sur un être incomplet et faible qui devient le Dieu de notre culte idolâtre. Aujourd'hui, pour les âmes poétiques, le sentiment de l'adoration entre d'une génération avide et impuissante! Aussi, quand jusque dans l'amour physique. Etrange erreur tombe le voile divin, et que la créature se montre chétive et imparfaite, derrière ces nuages d'encens, derrière cette auréole d'amour, nous sommes effrayés de notre illusion, nous en rougissons, nous renversons l'idole et nous la foulons aux pieds. Et puis nous en cherchons une autre! car il nous faut aimer, et nous nous trompons encore souvent, jus

qu'au jour où, désabusés, éclairés, purifiés, nous

abandonnons l'espoir d'une affection durable sur la terre, et nous élevons vers Dieu l'hommage enthou

siaste et pur que nous n'aurions jamais dû adresser qu'à lui seul. (Georges Sand, Lélia, cité dans les Études philosophiques sur le Christianisme, t. I, p. 151.)

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orale; insensiblement les passions furent substituées aux vertus, les sens à l'esprit, la forme à la pensée, l'homme à Dieu; mais au milieu de ce chaos, il

ses devoirs, découle la conséquence | lèrent des erreurs à la transmission que ce mot naturelle, que nous donnons à la religion quand nous la considérons spéculativement, cesse tout à coup de lui convenir dès que nous descendons à la pratique, car elle devient impratica-se trouva partout des sages qui protestèble à moins de secours surnaturels. Cette grande vérité d'expérience est la pierre d'achoppement du déisme et la pierre d'attente du christianisme. Mais nous touchons à un abime où plonge le noeud de notre condition morale, et qu'il n'est pas encore temps de sonder.

rent contre les folies de l'esprit humain,
et qui, pour sauver cette religion cha-
que jour de plus en plus méconnue, fai-
saient à l'athéisme une guerre tout aussi
énergique que celle qu'ils faisaient à la
superstition. Aussi saint Paul
pu dire,
en fulminant contre les païens, qu'ils
étaient inexcusables d'avoir retenu la
vérité captive dans l'injustice.

déclamé, tant intrigué contre le grand dogme de la révélation que la génération qui l'a suivi en a gardé un éloignement de cœur, une obscurité de vue, une disposition enracinée à l'irréflexion, à l'injustice et même à l'irritabilité contre tout ce qui touche à la doctrine de l'intervention surnaturelle de la divinité dans les destinées de l'espèce humaine.

Le consentement universel des peuples vient mettre le sceau à la démonstration de la vérité d'une religion naturelle. La Nécessité d'une révélation primitive, première pierre de toute société a été tel est le titre du chapitre V. Le 18° sièun autel. Un peuple sans Dieu, sans priècle, dit l'auteur en commençant, a tant res, sans serments, sans rites religieux, sans sacrifices, nul n'en vit jamais. Ce fait n'a trouvé de démenti sur aucun point du globe. L'existence de Dieu, l'immortalité de l'âme, sont les premières bases de la religion des sauvages, comme elles l'étaient de celles des peuples anciens; les témoignages de l'antiquité sont à cet égard formels et innombrables; et cela est si constant, que l'auteur du Système de la Nature n'a pu s'empêcher d'en écrire l'aveu, qui proteste si hautement contre son ouvrage9.

La divergence sur la forme du culte accuse l'erreur; l'unanimité sur le principe accuse la vérité. Divisés sur tout le reste, les hommes ne s'entendraient pas sur un point unique, partout et toujours, s'ils n'avaient été réunis en ce point par la force de la vérité; il n'y aurait jamais eu de religions fausses sans la vérité préalable d'une religion. Une religion pure, s'adressant à un seul Dieu, l'honorant par la prière et la vertu, se rencontre seule sur la terre à l'origine de tous les peuples; elle s'appuyait sur l'autorité des ancêtres, et la tradition la faisait remonter jusqu'à un enseignement divin. Par la suite des temps, l'ignorance et les passions mê

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« Depuis quelque temps on revient de cet éloignement, mais cette réaction, comme toutes les autres, ne se signale que par des méprises et des abus. Les révélateurs sont partout, et le vrai révélateur presque nulle part. Son divin esprit n'est qu'un manteau dont se revêtent tour à tour les plus désordonnés systèmes. Si la doctrine est accueillie ce n'est pas au foyer domestique qu'on la fait encore asseoir, ni les actions de la vie civile qu'on lui donne à diriger. Là elle est encore absente. Elle n'est reçue qu'à titre de merveilleux, propre seulement à dorer les caprices des arts et de la mode, à relever, par la sévère pureté de ses contrastes, le jeu des passions, et à leur donner plus d'intensité et plus d'élan en sensualisant les mystiques relations de l'âme avec le ciel, destinées à les réprimer. En cela n'est pas la raison, la vérité, et peu s'en faut même, j'ose le dire, que je ne préfère une hostilité franche contre le christianisme à ces apothéoses de boudoir et d'opéra qu'on lui décerne de nos jours. ›

Nous avons rapporté ce passage parce qu'il date le livre; nous sommes loin

la vérité qu'elle nous transmet? Il est radicalement impossible de le compren dre les premiers hommes qui nous l'ont transmise étant, comme nous, incapables de se la donner à eux-mêmes, il faut nécessairement qu'il y ait eu originairement une société entre les premiers hommes et Dieu, comme il y ena eu depuis entre les hommes, en un mot il faut nécessairement une première RÉVÉLATION.

Les vérités nécessaires, qui portent tout l'édifice de nos connaissances, proviennent toutes en principe, cela est démontré, de notre contact avec la société, où elles sont infuses, où elles

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maintenant des apothéoses de boudoir, et les jours de l'hostilité sont venus. « Quant à nous, poursuit l'auteur, c'est sérieusement que nous voulons aborder ces grands sujets, philosophiquement, sans préjugés comme sans caprice. Il y a bien longtemps que le christianisme ne connaît pas ce genre d'examen, le seul qu'il ne redoute pas, qu'il sollicite même. Que ceux qui sont disposés à le lui accorder nous suivent............ Je ne propose pas plus de sacrifice mais plus d'exercice à votre raison sur le point de la nécessité d'une révélation, que sur ceux de l'existence de Dieu et de la spiritualité de l'âme; si les premières vérités soutiennent celles qui les sui-existent par le fait, et où tout se transmet vent, celles-ci à leur tour réagissent puissamment sur elles, les complètent et les consolident en les objectivant, jusqu'à ce que, parvenu au sommet, on tienne toute la chaîne et on jɔuisse, à la fois d'un seul regard, de l'harmonieux ensemble de tous les points laborieusement parcourus. C'est là, du reste, la condition de toutes les sciences pour l'homme déchu; ce sont des abîmes d'ignorance qu'il lui faut remonter graduellement, en allant du simple au composé, du général au particulier, du connu à l'inconnu, de la synthèse du doute à l'analyse de l'observation, pour atteindre à la synthèse du savoir : acceptons ces conditions pour l'étude de la religion, comme nous sommes forcés de le faire tous les jours pour les autres connaissances; n'ayons pas, en un mot, comme dit Portalis, une philosophie pour les sciences et une autre philosophie pour la religion.

et s'apprend, même la vertu. ‹ Ainsi ce programme de principes que nous appelons la raison, ce code de morale que nous appelons la conscience, la loi naturelle en un mot, n'est telle que par rapport à une révélation postérieure et aux applications positives ‹ que nous en faisons? Mais en elle-mê me, et par rapport à notre nature propre et individuelle, cette loi naturelle ‹ n'est aussi qu'une loi révélée, une loi apprise, une loi transmise, et ce n'est que par réaction que nos facultés, prédisposées à la recevoir, se la font naturelle'. ›

Cette vérité d'une révélation primitive est encore démontrée par l'origine du langage, la science de la parole, que l'homme n'a pu s'apprendre à lui-même; car la pensée, sans le secours de laquelle on ne peut concevoir l'invention de la parole, ne peut se concevoir elle-mème sans le secours d'une parole préexistante ou si l'on veut coexistante.

Par la pensée nous délibérons, mais pour délibérer, pour conclure, pour

Nous n'apportons aucune notion de vérité dans notre esprit en venant au monde, mais seulement des facultés pour recevoir et cultiver toutes les vérités qui nous seront offertes; Newton, . Ce raisonnement à pour lui l'autorité de l'exBossuet, Pascal, privés de tout contact|périence. Combien d'idées qui nous sont devenues avec le genre humain, n'eussent rien naturelles, qui le deviennent de plus en plus, et qui produit et seraient restés avec le vide cependant ne l'étaient pas, tant s'en faut, il y a naturel de leurs grandes facultés vierges. dix-huit cents ans! Je parle de toutes les idées im La société nous fournit l'élément pre- portées dans le monde par le christianisme, et qui mier de la vérité: il se fait une révéla- repoussées d'abord comme anti-naturelles et antition d'elle à nous à mesure que nous pé- bases mêmes de la raison publique et les règles unisociales par la société païenne, sont devenues les nétrons dans son sein; mais où la socié-verselles du sens moral, si bien que nous ne les té, qui n'est qu'une agrégation d'indi- distinguons plus aujourd'hui de la loi natureile. vidus, a-t-elle pris cette connaissance de (Note de l'auteur.)

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réfléchir, pour analyser, pour déduire, | obligatoires qui existent entre cet être

pour penser, en un mot, il faut bien que l'intelligence ait à son service un vocabulaire; il faut qu'elle puisse appeler, différencier et retenir les sujets de ses opérations. La pensée a donc eu besoin d'une parole toute faite, sans laquelle elle n'aurait jamais fait un pas. C'est là ce qui a dicté à M. de Bonald ce célèbre axiome: il faut penser sa parole avant de parler sa pensée, et fait dire à Platon, que la pensée est le discours que l'esprit se tient à lui-même. C'est là aussi ce qui a amené Jean-Jacques Rousseau lui-même, contraint par la force de la logique, toute seule, à confesser que l'origine du langage est inexplicable sans une première révélation.

Enfin dans la langue éminemment ⚫ philosophique de l'Évangile, la pensée é éternelle et par essence, celle d'où dérive la vraie lumière, qui éclaire ⚫ tout homme aux portes de ce monde, ⚫ est appelée la parole, rien que la parole, le verbe, comme si la pensée ⚫ était si essentiellement parlante, que la ⚫ plus haute expression de sa puissance

fût de l'absorber entièrement dans la ✦ parole et d'être plus tôt parole que à pensée.

Le corps, quoiqu'ayant reçu tous les organes propres à servir l'intelligence, serait toujours resté à l'état de cadavre, si l'âme ne lui eût été inspirée par Dieu; l'âme serait de même éternellement restée gisante dans la nuit et l'inactivité intellectuelle, si Dieu ne fût venu allumer en elle la pensée et faire vibrer la parole. Le don du corps et de l'âme nous est transmis par la nature; le don de la parole n'est pas renouvelé à chaque Individu, mais entretenu dans l'espèce seulement, par les traditions de la société ; il en est de même de la vérité, qui devient ainsi un héritage indivisible entre les hommes, ce qui laisse entreVoir le dessein d'unité spirituelle que la Providence se propose, le mode et la Convenance de la seconde révélation qu'elle nous réservait.

Les choses spirituelles ne sont pas dans le domaine des sens; ces vérités, d'un principe immatériel en nous, d'un être souverainement intelligent et partait au-dessus de nous, des rapports

et nous, de l'immortalité de l'âme, et du compte qu'elle devra rendre de l'usage qu'elle aura fait de sa liberté, etc., ces vérités, disons-nous, sont d'un ordre supra-sensible et surnaturel, il n'y a pas d'instrument rationnel qui puisse atteindre jusque-là. Conçoit-on qu'il fût possible à un homme de savoir ce qui se passe dans une planète, sans une révélation partie de celle-ci? De même nos âmes, emprisonnées dans la nature et les sens, ne pourraient rien savoir de ce qui se passe au delà, si une voix d'en haut n'était venue le leur apprendre: s'il y a des vérités surnaturelles, il a fallu une parole surnaturelle pour les enseigner.

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Ceci ne détruit pas la puissance et l'usage légitime de la raison dans le domaine de la vérité religieuse, et loin de retirer de sa juridiction les vérités ‹ que je lui ai déjà soumises, il n'en est aucune de celles qui sont devant nous, à quelque profondeur que vous les portiez dans le sanctuaire de la foi, que je ne me propose de placer sous son regard scrutateur; mais voici le nœud de concordance de ces deux puissances, de la raison et de la foi, si souvent mises en lutte, faute de les comprendre et de les définir.

La raison est comme l'œil de l'esprit et le regard de l'âme, la révélation est comme la lumière qui tombe sur les objets et les rend visibles. L'œil tout seul ne voit pas, il faut qu'il soit averti de l'existence des objets par la lumière. La lumière toute seule ne fait pas voir, si l'œil ne s'ouvre, ne fixe, et ne pénètre les objets de son regard. Voilà l'image de la raison et de la foi. La vérité religieuse étant faite ainsi pour l'âme humaine, toutes les facultés, tous les instincts de celleci, étant prêts à la recevoir..... la ‹ raison, qui ne se doutait de rien auparavant, dès qu'elle est frappée de la vérité, s'écrie tout à coup au dedans d'elle-même : C'est cela... c'est évident...» et les raisonnements fiancent la vérité à l'esprit humain en la rationalisant.

Les savants de l'antiquité, toutes les fortes intelligences ont proclamé la fai

blesse de la raison humaine quand elle veut marcher seule, et la nécessité d'un secours divin pour lui frayer la route des vérités théologiques. La foi à cette vérité se retrouve dans les traditions des différents peuples, et les divers témoignages qu'en recueille l'auteur complètent sa démonstration de la certitude d'une révélation primitive.

Lorsque les hommes, ainsi que le ⚫dit Diodore de Sicile, ne suivirent plus « la doctrine de leurs pères et plongè rent au dedans d'eux-mêmes dans les recherches qu'ils entreprirent, alors les dogmes primitifs venus de Dieu s'ébranlèrent. » Les vapeurs épaisses du doute et du sensualisme formèrent les extravagances de l'idolåtrie et de la philosophie sophistique. Les sages, armés de la tradition, repoussaient l'erreur de la même manière que l'Église catholique confond l'hérésie, en l'accusant de nouveauté..... Quand, après eux, vinrent ces nuées de sophistes qui, pullulant dans Athènes et dans Rome, vivaient de l'art de tout soutenir, alors la nuit se fit sur le monde, la corruption marcha de pair avec les prétentions philosophiques, parce que rien ne dégage le cœur du joug du devoir comme les incertitudes de l'esprit.

Ici M. Auguste Nicolas trace à grands traits l'effrayant tableau des mœurs qui furent introduites par le rationalisme ancien, au sein de l'humanité. Peintre fidèle, il emprunte les pinceaux des peintres antiques pour colorer ces horribles portraits; la dégradation de l'espèce humaine avait atteint jusqu'à sa dernière limité, l'homme opprimait l'homme, les puissants, les maitres du monde versaient en jouant le sang des esclaves; ils prenaient leurs délices dans son effusion, et l'homme esclave subissait ce joug avec une résignation stupide. Ces crimes, et d'autres crimes encore, qui sont l'épouvante de Ja nature, furent autorisés par la loi, et les poëtes satiriques, pour ramener l'homme à lui-même, ne craignaient pas de lui dire que, si la brute était plus morale que lui, c'était parce que la brute ne philosophait pas. La femme était méprisée, délaissée, l'enfance flétrie et souillée; la société, menacée

de s'arrêter, s'émut; elle porta des lois contre le célibat et solda la paternité; mais à ces conditions mêmes elle ne put guérir le mal, et tout ce que l'on put gagner ce fut l'adultère... Rien ne put arrêter le flot toujours montant de ces moeurs immondes: c'est ce dont rend témoignage un saint prêtre, Salvien, que l'on a appelé le Jérémie du 5° siècle. Et comme si tout devait concourir à la mort du genre humain, il était ramassé à un seul corps sous la domination romaine, et la corruption, comme un ulcère, gagnait toutes ses parties avec une effrayante progression; si le flot des barbares qui se pressaient autour du colosse romain comme des bêtes féroces, au lieu d'être saisis par le christianisme, ‹ étaient venus simple

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ment se heurter, s'accoupler à la bar«barie des sociétés caduques du monde • païen, qu'en serait-il résulté?....... L'ima‹gination recule devant cette perspec<tive; et quand l'histoire à la main of <considère tout ce que l'esprit chrétien a opéré de fécondation et de création sur tous ses débris, et que toutes les ⚫ sociétés actuelles, dans tout ce qui les constitue, ont été engendrées, façonnées et portées au point où elles sont ‹ et où elles progressent encore par le « souffle seul de ce divin esprit, on est « entraîné à conclure que sans lui nous ‹ n'existerions pas, et qu'à la place de ces vingt siècles de civilisation et de < progrès, il y aurait eu vingt siècles de dissolution et de barbarie, si ce n'est des déserts et le néant.

Que fallait-il donc pour sauver le monde en ce temps-là? Ce qui l'a sauvé, une seconde RÉVÉLATION; et c'est ce que l'auteur démontre dans le sixième et dernier chapitre de son premier livre.

Le christianisme ne fut pas un progrès de l'esprit humain, mais un fait subit, un jet divin, en opposition directe avec l'esprit philosophique et religieux qui régnait alors; jamais le monde n'avait été plus rationaliste à la fois et plus superstitieux; la terre, ivre de débauche et de sang, était comme plongée dans un sommeil de mort; le Christ la réveilla en sursaut pour lui redonner la vie, en lui prêchant l'humilité, la charité, l'amour de Dieu, la chasteté de

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