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ORAISONS FUNÈBRES

PRÉCÉDÉES D'UNE

NOTICE BIOGRAPHIQUE ET LITTÉRAIRE

SUR BOSSUET

D'UNE ANALYSE ET DE FRAGMENTS DE SES PREMIÈRES ORAISONS FUNÈBRES

Nouvelle édition, collationnée sur les meilleurs textes

ET ACCOMPAGNÉE

DE NOTICES HISTORIQUES, DE SOMMAIRES ANALYTIQUES, DE NOTES
LITTÉRAIRES ET GRAMMATICALES

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ANCIENNE MAISON DEZOBRY, MAGDELEINE ET Cie
CHARLES DELAGRAVE ET Cie, LIBRAIRES-ÉDITEURS
58, RUE DES ÉCOLES, 58

1872

HARVARD

COLLEGE

LIBRARY

BIOGRAPHIQUE ET LITTÉRAIRE

SUR BOSSUET.

On lit dans un écrivain du dix-septième siècle : « Un soir que « M. Arnauld avoit mené le petit Bossuet de Dijon, aujourd'hui « l'abbé Bossuet, qui a de la réputation pour la chaire, pour < donner à Mme la marquise de Rambouillet 1 le divertissement <de le voir prêcher, car il a préchotté dès l'âge de douze ans, « Voiture 2 dit : « Je n'ai jamais vu prêcher de si bonne heure ni << si tard 3. >

2

Ce récit curieux n'est pas parfaitement exact. C'était en 1643. Bossuet, né à Dijon, le 27 septembre 1627, avait seize ans quand il improvisa son premier sermon; il venait de soutenir sa thèse de philosophie au collége de Navarre. L'événement fit grand bruit; il alla jusqu'à la reine régente Anne d'Autriche, dont le petit abbé devait faire l'éloge funèbre, à la fin d'un de ses sermons.

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Mme de Rambouillet (morte le 27 décembre 1665, à 78 ans) réunissait dans son hôtel cette célèbre société d'hommes de cour et de gens de lettres qui étaient en possession de faire et défaire les renommées. En 1672, Fléchier faisant l'oraison funèbre de Mme de Montausier, fille de Mme de Rambouillet, rappelle avec respect à ses auditeurs : « Ces cabinets que l'on regarde encore avec tant de vénération, où l'esprit se purifioit, où la vertu étoit révérée sous le nom de l'incomparable Arthénice, où se rendoient tant de personnes ⚫ de qualité et de mérite, qui composoient une cour choisie, nombreuse sans ⚫ confusion, modeste sans contrainte, savante sans orgueil, polie sans affec«tation. - Ce nom d'Arthénice, anagramme de Catherine, et qu'on avait, après mûre délibération, préféré à deux autres, Eracinthe et Carinthée, montre que le dernier éloge donné par Fléchier à l'hôtel de Rambouillet n'est pas tout à fait juste.

Voiture, poëte et bel esprit trop loué par Boileau, auteur de lettres fort admirées de son temps, et où se trouvent tout l'esprit et toute la prétention des Précieuses. Nous en avons cité une, page 303, note 3, Né en 1598, il mourut en 1648

3 TALLEMENT DES RÉAUX, Mémoires, 11, 297.

Collége de l'Université de Paris. Il fut fondé en 1304, sous le nom de Collège de Champagne, par Jeanne de Navarre, femme de Philippe-le-Bel et comtesse de Champagne. Le roi avait le titre de premier boursier du collége. Cet établissement célèbre était situé rue de la Montagne-Sainte-Geneviève, sur l'emplacement de l'Ecole polytechnique actuelle.

Jacques-Bénigne Bossuetétait le fils de Bénigne Bossuet, avocat au parlement de Bourgogne, puis conseiller et doyen au parlement de Metz. Élevé au collège des Jésuites, qui avaient inutilement essayé de le gagner à la Société, Bossuet était venu à quinze ans à Paris, continuer ses études sous Nicolas Cornet, grand-maître du college de Navarre. Corneille était alors dans toute sa gloire; Bossuet alla plus d'une fois l'entendre, pour étudier au théâtre l'action oratoire, et peut-être aussi la peinture éloquente et poétique de l'histoire et des passions. A vingt ans, le 25 janvier 1648, Bossuet soutenait sa thèse de théologie au collége de Navarre, lorsque Condé, à qui il l'avait dédiée, entre subitement dans la salle. Bossuet, sans hésiter, salue et félicite le vainqueur de Rocroy, qui s'en allait gagner la bataille de Lens. Condé eut, dit-on, la tentation de disputer contre lui.

Prêtre et docteur en 1652, après de profondes études sur l'antiquité tout entière,sur la Bible, sur saint Augustin (legrand homme, l'auteur de prédilection de toute sa vie); guidé d'ailleurs dans ses études philosophiques par la logique et la clarté de Descartes, Bossuet devient l'élève et l'ami de saint Vincent de Paul 1, et rencontre en même temps, dans les concours de théologie, un homme qui, au dix-septième siècle, devait faire revivre la beauté des anciens jours, le célèbre abbé de Rancé 2. Enfin, chanoine de Metz en 1655, il commence par les sermons, les panégyriques, et la réfutation du catéchisme protestant de Paul Ferry, sa prodigieuse vie d'orateur et de théologien. Cette réfutation n'empê cha pas le ministre protestant de rester l'ami de Bossuet. En 1662, l'éloge oublié du père Bourgoing ouvre la série des oraisons funèbres. A cette époque, Bossuet se tient encore loin de la cour, et, malgré toutes les instances qu'on lui fait à Paris, il retourne à ses fonctions du chapitre de Metz. Mais Louis XIV le rapproche de sa personne, et l'appelle fréquemment à prêcher devant lui. C'est la prédication surtout qui remplit cette première période de la vie de Bossuet (1660-1670). Ses sermons furent trop peu remarqués: Mme de Sévigné n'en dit pas un mot. On lui préféra Bourdaloue, qui avait plus d'art apparent, et qui répondait mieux aux idées adoptées sur le genre et la forme du sermon. Il parut en 1669, et l'on ne pensa plus guère aux sermons prononcés avant lui. Bossuet d'ailleurs, à la fin de sa carrière, n'écrivait plus ses discours. Il méditait, jetait sur le papier quelques notes, quelques grands mouvements, puis prêchait d'inspiration. Aussi n'eut-on pas de longtemps l'idée de reconstruire ou de publier les sermons qui existent, admirés pourtant de Turenne et des solitaires de Port-Royal, qui étaient si bons juges en pareille matière, Plus tard,

Fondateur de l'Institution des sœurs de charité (1634), et de l'hospice des Enfants-Trouvés (1648); aumônier général des galères; mort en 1660. • Réformateur de la Trappe. Né en 1626, se retire à la Trappe en 1662; mort en 1700. Voy. page 182, note 2.

quand on l'a fait, on a été tout surpris d'y trouver la plus profonde connaissance des passions et de la vie qui se révèle au prêtre par la confession, et une éloquence originale, saisissante, égale à tout ce que Bossuet a de plus beau.

La même conviction, la même logique éloquente dictaient à Bossuet ses traités de controverse, et les faisaient admirer à côté des ouvrages de Port-Royal. Bossuet fit plus que Port-Royal : l'Exposition de la doctrine catholique convertit Turenne et son neveu le maréchal de Lorge. « Ce dernier (dit Saint-Simon, son <gendre) sentoit qu'il alloit plonger le poignard dans le cœur de << trois personnes qui lui étoient les plus chères, sa mère, sa sœur <et M. de Turenne (son oncle), à qui il devoit tout. Cependant ce < fut par lui qu'il crut devoir commencer. Il lui parla avec toute < la tendresse, la reconnoissance, tout le respect du meilleur fils au meilleur père; et après un préambule dont il sentit tout « l'embarras, il lui fit toute la confidence, et il assaisonna cette <déclaration de tout ce qui en pouvoit adoucir l'amertume. M. de < Turenne l'écouta sans l'interrompre d'un seul mot, puis, l'em< brassant tendrement, lui rendit confidence pour confidence, et << l'assura qu'il avoit d'autant plus de joie de sa résolution que < lui-même en avoit pris une pareille après y avoir travaillé long<temps avec le même prélat que lui. On ne peut exprimer la sur<prise, le soulagement, la joie de M. de Lorge. M. de Meaux lui < avoit fidèlement caché qu'il instruisoit M. de Turenne depuis longtemps, et à M. de Turenne ce qu'il faisoit avec M. de Lorge.» SAINT-SIMON, ch. CXII.

Bossuet prêchait à Meaux, pour une prise d'habit, le 13 septembre 1669, quand il reçut sa nomination à l'évêché de Condom. Déjà commençait son influence sur la Cour. On peut voir dans la biographie de la duchesse d'Orléans (page 48), ses touchantes relations avec cette princesse, qu'il entretenait trois fois la semaine des vérités de la religion. Les oraisons funèbres témoignent mieux encore de cette influence: et cependant il ne voulait pas les faire imprimer. Quelques années, après, envoyant l'oraison funèbre de cette princesse et celle de sa mère à l'abbé de Rancé, il lui écrivait « J'ai laissé ordre de vous faire passer deux oraisons << funèbres qui, parce qu'elles font voir le néant du monde, peu« vent avoir place parmi les livres d'un solitaire, et qu'en tout <cas il peut regarder comme deux têtes de mort assez touchantes (30 octobre 1682.) »

Un an après (13 septembre 1670) la mort d'un protégé du duc de Montausier, le président de Périgny, fit appeler Bossuet à l'éducation du Dauphin. Cette éducation marque une époque importante dans la vie de Bossuet. Appelé à ces fonctions par Louis XIV, il remet son évêché de Condom, en échange des revenus modiques d'une abbaye, et se consacre tout entier à l'éducation du roi à venir (Voy. page 153, note 4). Il refait pour son élève toute son éducation littéraire, et écrit pour lui tout à la fois une grammaire

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