Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

vivre pour l'ordinaire : mais le mien, qui n'est pas ordinaire, vit, je vous asseure, tout à fait sans cela, avec une tres particuliere confiance que j'ay en la grace de nostre Seigneur., Sa main souveraine fera plus pour ce petit Institut, que les hommes ne peuvent penser, et je suis, plus que vous ne sçauriés croire, vostre.

Au reste, que diriés-vous de nos affections domestiques? Ce n'est pas l'aymable belle-sœur de Torens que vous aviés veuë, c'est une seur tout autre que nous avons veu trespasser ces derniers jours. Car dés un an en ça elle estoit tellement perfectionnée, qu'elle n'estoit plus connoissable, mais sur tout depuis sa viduité, qu'elle s'estoit vouée à la Visitation. Aussi, mon Dieu! quelle fin a-elle faite! Certes la plus sainte, la plus suave et la plus aymable qu'il est possible de s'imaginer. Je la cherissois d'un amour infiniment plus que fraternel : mais ainsy qu'il a pleu au Seigneur, ainsi doit-il estre fait; son saint nom soit benit. Amen.

CLXXXI.

LETTRE1

A SON ALTESSE LE DUC DE SAVOIE.

Il le remercie de l'avoir choisi pour accompagner en France le cardinal de Savoie, qui alloit demander en mariage Madame Christine de France, sœur de Louis XIII et fille de Henri IV et de Marie de Médicis, pour VictorAmédée, prince de Piémont, héritier présomptif de la couronne de Savoie.

Monseigneur,

Annecy, 4 janvier 1618.

Je reçois à tres grand honneur le commandement que vostre Altesse me fait, de suivre Monseigneur le Serenissime Car

1 C'est la 420o de la collection-Blaise, et la 54 (al. 45°) du livre Ier des anciennes éditions.

dinal en France; et l'executeray, Dieu áydant, avec tant de subjection et de fidelité, que je ne demeriteray point d'estre advoué à jamais, comme je la supplie tres humblement de faire, Monseigneur, vostre tres humble, tres fidele et tres obeissant orateur et serviteur, etc.

CLXXXII.

LETTRE1

A S. A. VICTOR-AMÉDÉE, PRINCE DU PIÉMONT.

Même sujet que la précédente.

Monseigneur,

Comme V. A. S. pouvoit choisir mille et mille personnes plus capables de servir dignement Monseigneur le Prince Cardinal au voyage de France, aussi ne pouvoit-elle donner le commandement de ce faire à homme qui vive, qui, avec plus de fidelité et de cœur, receust cet honneur, ni qui, avec plus d'affection, se veuille essayer de correspondre par son tres humble service à la faveur et gloire que je sens d'y estre appellée. Et attendant un nouveau commandement pour le jour auquel je me rendray à ce devoir, je demeure, Monseigneur,

Vostre tres humble, tres obeissant et tres fidele

orateur et serviteur,

FRANÇOIS, EV. de Geneve.

1 L'original en est conservé aux Archives de la Cour de Turin, C'est la 227° inédite de la collection-Blaise,

[blocks in formation]

Il lui apprend la mort de messire Philippe Coëx, surnommé M. de SainteCatherine, chanoine et grand pénitencier de l'Eglise de Genève, son confesseur et leur ami.

Ma tres chere Mere,

25 janvier 1618.

Quand on m'a osté d'aupres de vous, ç'a esté pour M. de sainte Catherine; mais je pensois que ce fut un accident comme l'autre fois, et voyla que ç'a esté pour luy faire saintement dire dix ou douze fois Vive Jesus! et protester qu'il avoit toute son esperance en la mort de nostre Seigneur, qu'il a prononcé avec beaucoup de force et de vivacité, et puis s'en est allé où nous avons nos pretentions, sous les auspices du grand saint Paul 3.

Dieu, qui nous l'avoit donné pour son service, nous l'a osté pour sa gloire son saint nom soit benit! Demeurés cependant en paix avec mon cœur au pied de la providence de ce Sauveur pour lequel nous vivons, et auquel, moyennant sa grace, nous mourrons. Dieu reparera cette perte et nous suscitera des ouvriers, en lieu de ces deux qu'il luy a pleu retirer de sa vigne pour les faire asseoir à sa table. Mais tenés vostre cœur en paix, car il le faut; et, comme dit

1 C'est la 427o de la collection-Blaise, et la 61° du livre V des anciennes éditions.

* Allusion au jour de la fête de la conversion de saint Paul, fixée au 25 janvier.

3 Dominus dedit, Dominus abstulit... sit nomen Domini benedictum, Job, XXXI, 21.

l'Escriture, pleurés un peu sur les trespassés1, mais pourtant tenés Dieu en consolation, puisque nostre esperance est vive, Amen.

CLXXXIV.

LETTRE1

A MADAME L'ABBESSE DU PUITS-D'ORBE.

Le Saint lui conseille de ne pas transporter sa communauté hors du diocèse de Langres; il lui désigne les lieux qui étoient propres à cette translation. Il désapprouve les affections de déférence, et la remise des pensions entre les mains des religieuses.

30 janvier 1618.

Dieu, qui a fait vostre cœur pour son Paradis, ma tres chere Fille, luy face la grace d'y bien aspirer! Je vous escris sans loysir, comme je fay presque tousjours, en cette multiplicité d'affaires qui m'accablent.

Je vous ay des-ja escrit qu'il ne falloit nullement penser à transplanter vostre Monastere à Lyon; car à quel propos oster une si noble fondation d'une Province et d'un Diocese, pour le porter en un autre? Ni le Pape, ni l'Evesque, ni le Païs, ni le Parlement, ne le permettront jamais. Demeurés dong ferme en la resolution de le transferer des champs à la ville, mais en une ville de la Province et du Diocese; s'il se pouvoit, à Langres, ou à Chastillon, ou à Dijon; et icy, il seroit mieux et ne faut point craindre que vos parens vous y faschassent; car y vivant en une bonne et sainte reformation, chacun vous y reverra avec un amour nom

1 Modicùm plora suprà mortuum. Eccli., XXII, 11.

2 Tirée des Instructions et Pratiques de piété, dédiées à madame de Maintenon. C'est la 426° de la collection-Blaise.

pareil; et puis il ne faut pas tant regarder à vostre personne particuliere qu'au public et à la posterité. Mais si vous ne pouvés ranger vostre esprit à cet advis, du moins que ce soit à Chastillon 1.

Je n'appreuve nullement que vous separiés vos filles, tenant les unes comme vos affectionnées et partisanes, et les autres comme distraittes de l'affection qu'elles vous doivent, ni qu'on leur remette leurs pensions ou autres particularités. Il ne faut que vostre courage à tout cela; et croyés que si vous estes bien resolue de vivre en charité avec elles, leur monstrant un cœur de douce mere, qui a oublié tout ce qui s'est passé jusques à present, vous les verrés toutes revenir à vous dans bien peu de mois.

Madame la Premiere vous escrira. Je vous prie, escrivés luy en esprit de douceur et d'humilité; et, sans faire compte des choses passées, tesmoignés que vous estes fille de nostre Seigneur crucifié.

Et non seulement à elle, mais escrivés aussi à M. le President et à M. d'Origny ; leur disant qu'apres tant de tourmens que vous avés soufferts, enfin nostre Seigneur et vostre vocation vous convient de les prier de vous assister au dessein qui a tous-jours esté en vostre ame, de reduire vostre Monastere à quelque perfection de la vie religieuse, et qu'és occasions vous les avertirés des moyens requis à cet effet, à ce qu'ilz vous aydent. Car en fin, ma tres chere fille, il faut avoir la paix, et la paix naist de l'humilité. De renvoyer ce point à eux, il n'est pas raysonnable; il faut que ce soit vous qui commenciés.

1 C'est à ce dernier parti que s'arrêta l'abbesse; car la translation de sa communauté se fit à Châtillon-sur-Seine en 1619.

• Madame Brulart, épouse de M. Brulart, premier président au parlement de Bourgogne, et sœur de l'abbesse.

* M. Bourgeois de Crépy, père de l'abbesse, président au parlement de Bourgogne.

♦ M. d'Origny, oncle de la même abbesse.

« ZurückWeiter »