Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

ses premières opinions, et leur protesta qu'il en était parfaitement revenu, comme d'autant d'erreurs essentiellement contraires à la foi. Les ouvrages qu'il nous a transmis attesteront à jamais, et la réalité, et la sincérité de sa déclaration. Le savant père Morin son confrère et son contemporain, sans parler de bien d'autres, n'était pas moins soumis aux décisions du saint siége sur ces matières.

Ceux même qu'avait séduits l'amour de la nouveauté, ne sortirent pas tous de l'oratoire, ou du moins ils y furent bientôt remplacés par des sujets de même croyance. C'est pourquoi la sixième assemblée générale de la congrégation, de concert avec l'archevêque de Paris, où elle se tint au mois de Décembre 1678, résolut de mettre au moins des bornes aux progrès qu'y faisaient les erreurs du temps elle fit un statut formel, pour défendre à tous ses sujets d'enseigner la doctrine de Jansenius. Il fut souscrit par la plupart des Oratoriens. Il y eut des politiques qui s'absentèrent pour un temps; d'autres se retirerent pour toujours; quelques-uns même abandonnèrent le royaume. Le fameux père Quesnel fut du nombre de ces derniers, Averti que l'archevêque se disposait à le poursuivre par les voies canoniques, il se retira d'abord à Bruxelles, Ce qui le révolta, c'est, de son propre aveu (1), que ses supérieurs interdisaient toute doctrine suspecte des sentimens de Jansénius et de Baïus; c'est qu'ils empêchaient d'enseigner que les bonnes actions des infidèles, telles que d'aimer et révérer leurs parens, sont des péchés; qu'ils admettaient des grâces suffisantes que la résistance de la volonté peut rendre inutiles. Une fois retiré de France, il s'abandonna sans gêne à sa passion pour la nouvelle doctrine, et signala tellement à ce sujet la chaleur et l'amertume de son zèle, qu'entre tous les disciples d'Arnaud, il fut trouvé dans la suite le plus digne de lui succéder en qualité de chef du parti.

Le statut de la congrégation de l'Oratoire éprouva

(1) Anatomie de la Sentence, page 31

plus de contradictions encore dans les provinces belgiques qu'au sein de la France. Les pères Bahier et Thorentier, celui-ci assistant, et l'autre secrétaire général, pressèrent long-temps, et toujours en vain, leurs confrères de Mons de se soumettre à un décret si religieux; ils allèrent jusqu'à menacer les indociles de les traiter en hérétiques incorrigibles. Les coupables répondirent, et le père Quesnel leur servit de secrétaire; d'où l'on peut juger de tout ce qu'énonçait la réponse. Elle portait, entr'autres choses, que si on les poussait à bout, on devait s'attendre à voir démembrer la congrégation. Le père Thorentier ne laissa pas de revenir à la charge, et marqua son mécontentement en ces termes au père Piquery, supérieur à Mons: Quoi de plus chagrinant que de vous voir déclamer contre un formulaire de doctrine approuvé par tant de personnages respectables, et reçu de toute notre congrégation, à la réserve de deux ou trois personnes qui, pour se faire un mérite auprès d'un misérable parti, se sont arrachés du sein de l'église leur mère, où l'on peut uniquement trouver le salut! Il leur représente ensuite, et il en prend Dieu à témoin, que ces particuliers ont soulevé contre leur congrégation les évêques et les officiaux, les communautés et les universités ; qu'au grand scandale du public, ils ont fait croire toute la congrégation janséniste, en publiant qu'on n'y suçait pas un autre lait que celuid'Arnaud; qu'un homme intrigant et faux, parvenu à l'office de visiteur avait employé les plus odieuses manoeuvres pour répandre les nouveautés proscrites dans les maisons de l'Oratoire; qu'il avait dressé pour les colléges une formule de doctrine, où l'on défendait en général d'enseigner celle de Jansénius, et l'on prescrivit en détail le crud jansénisme; que ce fourbe audacieux avait combattu lui-même dans plusieurs conférences la grâce suffisante, et réduit la liberté au simple volontaire.

Les Oratoriens flamands ayant encore répondu qu'ils étaient fort éloignés des erreurs que portent les cinq propositions, le père assistant répliqua,

2

qu'en parlant ainsi, l'on se justifiait moins, qu'on ne.. passait condamnation; qu'il n'y avait point de janséniste si outré, qui ne fit très-volontiers ce vague désaveu défaite misérable, ajoutait-il, depuis que ces imposteurs en ont fait leur langage ordinaire afin d'abuser le public. On voit que le père Thorentier connaissait les ruses et toutes les incohérences du parti, En effet, condamner les cinq propositions, sans condamner la doctrine de Jansenius, que l'église y a précisément condamnée, c'est tenir que l'hérésie du jansénisme est un fantôme ; qu'il n'y a point d'hérétiques jansénistes, ou simplement qu'il n'y a point. de jansénistes. Cette manière illusoire de parler devenue la langage ordinaire d'une secte qui n'en eraint que le nom, est la profession la mieux marquée du jansénisme; et par une conséquence évidemment sentie par eux-mêmes, c'est la marque certaine du schisme et de l'hérésie ; c'est un mépris déclaré de l'autorité et de toutes les décisions de l'église. On doit conclure encore des lettres du père Thorentier, qu'au moins les membres gangrenés de l'Oratoire n'en avaient pas infecté les parties nobles; aussi, par rapport aux communautés même. les plus suspectes, ce serait une injustice que d'imputer, soit au corps entier, soit aux supérieurs, les égaremens des particuliers.

Toutes ces remontrances firent peu d'impression sur le père Piquery: mais des motifs humains lui tinrent lieu des principes de la foi et de l'obéissance, Il signa le statut, quoique persuadé qu'il ne le devait pas. Le fait est constant, par une lettre qu'il écrivit au docteur Arnaud, en date du 21 Septembre de cette même année 1678. J'ai signé avec peine, lui marquait-il, et je vous avoue que l'éclat qu'eût fait mon refus, la joie qu'en eussent eu nos ennemis, et la ruine de notre maison, n'ont pas peu contribué à m'aveugler et à m'affaiblir. J'ai du déplaisir de l'avoir fait, et suis tout disposé à révoquer ma signature, si vous croyez que Dieu en soit glorifie. Etait-il donc besoin de conseil? L'oratorien timoré convient qu'il s'était aveuglé par des craintes humaines, qu'il

1

avait signé lâchement une formule contraire aux dogmes de la foi; et il demande s'il est de la gloire de Dieu qu'il révoque cette signature! On ignore quelle fut la décision du docteur; mais il n'est aucun indice que la signature du consultant n'ait pas tenu autant que celle des autres Oratoriens, qui presque tous souscrivirent le statut.

Tandis que les supérieurs ordinaires prémunissaient ainsi leurs sujets propres contre les nouvelles doctrines, le pasteur chargé de surveiller toutes les parties de l'église, apprit qu'en certains diocèses. il s'était introduit, sur des principes tout opposés, différens abus dans l'administration de l'eucharistie., On y avait établi, comme nécessaire, la pratique de communier tous les jours, et le vendredi saint même. On y recevait le plus saint de nos sacremens, non pas seulement dans les églises, mais dans les chapelles privées, dans les habitations communes, et quelquefois dans le lit, sans y être arrêté par une maladie sérieuse. Certains prêtres le portaient secrétement à ces sortes de dévots; d'autres, sans être approuvés, les entendaient à confesse, et leur, donnaient l'absolution, au moins des péchés véniels. Ils leur donnaient aussi, en les communiant, ou plusieurs hosties, ou des hosties plus grandes qu'il n'était d'usage. La sacrée congrégation, interprète. du concile de Trente, porta contre ces dévotions bizarres un décret qui fut expressément approuvé par le souverain pontife; elle ajouta, sur la fréquentation de cet auguste sacrement, des règles si sages, si solides, si éloignées des deux extrémités également vicieuses, qu'on ne peut que nous savoir gré de les rapporter au moins en substance.

On y observe d'abord que les pères et les saints docteurs, quoiqu'ils aient constamment approuvé l'usage de communier souvent, et même tous les jours, n'ont toutefois déterminé aucun jour par mois, ni par semaine, où l'on fût obligé, soit de Participer à la table du Seigneur, soit de s'en abstepir; que le saint concile de Trente n'a pareillement rien prescrit là dessus, et s'est contenté de déclarer

en général, qu'il souhaiterait que tous les fidèles fussent en etat de communier à chaque messe qu'ils entendent; qu'en cela il a usé d'une grande sagesse, parce qu'il y a bien des plis et des replis impénétrables dans les consciences, et que, d'un autre côté, Dieu repand bien des grâces sur les plus faibles. Les yeux des hommes, poursuit-on, ne perçant point dans ces ombres, ils ne sauraient prononcer touchant la pureté de conscience d'un chacun, ni par conséquent décider s'il doit recevoir le pain de vie souvent, ou chaque jour. Cet office regarde les directeurs de conscience, qui doivent prescrire à chaque pénitent ce qu'ils reconnaîtront lui être utile par la pureté de son coeur, et par le fruit qu'il retirera de la communion: telle en doit être la règle et la mesure. On doit donc, non pas interdire généralement à certaines personnes la communion fréquente, ou même quotidienne, ni marquer des jours particuliers où l'on soit tenu de communier, mais s'appliquer à connaître ce qui est expédient à chacun. Les prédicateurs, de leur côté, après avoir exhorté les fidèles à s'approcher souvent de la sainte table, doivent aussitôt leur parler de la préparation nécessaire pour y participer. Ceux qui se sentent de l'attrait pour prendre souvent, ou tous les jours cet aliment sacré, on les avertira de bien considérer, et la dignité de celui qu'ils reçoivent, et leur propre misère, afin que ces deux points de vue les portent à s'approcher avec autant de respect que de confiance de la table où la chair du fils de Dieu devient leur nourriture. Il serait difficile de rien ajouter sagement de plus particulier sur cette matière délicate.

Innocent XI condamna dans la même année 1679, soixante-cinq propositions de morale relâchée, et défendit de jamais les soutenir, sous peine d'excommunication encourue par le seul fait. Elles avaient été dénoncées par les partisans des erreurs courantes, qui avaient plus de besoin que jamais de faire diversion dans l'attaque plus sérieuse qu'alors ils avaient eux-mêmes à soutenir. L'archevêque de

« ZurückWeiter »