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nous, ne regarde nullement les dogmes de la foi, ni les maximes de la morale chrétienne que l'église gallicane conserve avec autant de pureté que l'église romaine; mais simplement quelques points de discipline, laquelle, comme tout le monde le sait, est sujette à prendre des faces diverses.

Qu'y eut-il en effet de contraire à la foi romaine ou catholique, dans la sanction des quatre articles du clergé ? On les peut réduire à deux chefs, dont l'un regarde l'indépendance temporelle des princes non feudataires du saint siége, et l'autre concerne l'autorité spirituelle du souverain pontife. Sur le premier chef, les prélats français déclarèrent que les princes souverains tenant leurs états de Dieu, et non de l'église, aucune puissance ecclésiastique ne pouvait les en dépouiller, ni dispenser leurs sujets de leur obéir; doctrine conforme à la parole de Dieu, à la tradition des pères, et aux exemples des saints. Les fondemens de l'invariable soumission que les sujets doivent à leurs souverains légitimes, se trouvent clairement dans les divines écritures, dans les interprétations des saints docteurs de l'antiquité, et dans la pratique uniforme des fidèles de l'église primitive, Parmi des chrétiens si dignes de servir de modèles à ceux des ages suivans, est-il un seul exemple de révolte contre un empereur idolâtre, sous prétexte de son idolâtrie, où d'une sentence portée contre lui par un des successeurs de saint Pierre ? Les faits contraires et si désastreux des temps postérieurs, font abhorrer l'introduction de la doctrine qui en fut la cause, loin de l'autoriser; ainsi le premier chef de la déclaration gallicane ne souffre point de difficulté pour quiconque n'est pas imbu, jusqu'à l'enivrement, des préventions transalpines.

Ainsi en est-il encore de la maxime qui subordonne l'exercice de la puissance même spirituelle du pontife romain, à l'autorité des canons reçus de l'église universelle, comme ayant été dressés par l'esprit de Dieu. Qui peut même, sans scandale, entendre quelques ultramontains outrés attribuer

au pape une indépendance entière des canons le maniement arbitraire de ces lois sacrées, de telle manière qu'il en dispense quand et comme il lui plaît, et que sa volonté seule en rende la dispense valide?

Quant au pouvoir de prononcer en matière de foi avec une certitude qui oblige tout fidèle à soumettre son jugement s'il ne veut être hérétique, cette prérogative de l'infaillibilité, absolument nécessaire pour la conservation du sacré dépôt, fut indubitablement accordée à l'églisé mais dans le passage de l'évangile qui marque l'infaillibilité avec le plus de précision, le Sauveur la promet à tous les apôtres en commun, et non pas seulement à Pierre leur chef. Allez, dit-il en usant du nombre pluriel, enseignez toutes les nations; voilà que je suis avec vous tous les jours jusqu'à la consommation des siècles: Euntes docete.... ecce ego vobiscum sum. C'est qu'il était nécessaire, pour la conservation de la foi, que l'église fût infaillible, et que cette nécessité n'avait pas lieu pour son chef en particulier : il suffisait que le corps apostolique, ou le corps de l'église enseignante, tant dispersée néanmoins qu'assemblée, fût dirigé tous les jours, jusqu'à la consommation des siècles, par l'oracle nécessairement infaillible de la vérité. Que si l'infaillibilité personnelle n'est pas nécessaire au chef de l'église, d'où présumera-t-on qu'elle lui ait été accordée ? Mais si elle lui est nécessaire, le ciel permettrait-il, depuis dix-huit siècles, qu'elle fût toujours en problème ?

Reste la question si le pape l'emporte en autorité sur le concile, ou le concile sur le pape, et cela hors même les temps de schisme question plus curieuse qu'utile ou usuelle, puisque depuis l'origine de l'église, la nécessité de faire usage d'une pareille décision ne s'est pas encore rencontrée. Toujours les conciles vraiment oecuméniques ont été d'accord avec les papes, et les papes avec les conciles, touchant la foi et les mœurs; et dix-huit siècles écoulés dans cette sainte unanimité du chef

et des membres de l'apostolat ou de l'épiscopat, font sagement présumer qu'elle durera jusqu'à la consommation des siècles. Si toutefois il pouvait arriver qu'un pape soutînt opiniâtrément ce que le concile aurait condamné comme hérétique, ou combattît avec la même opiniâtreté ce que le concile aurait décidé comme un article de foi, à qui des deux faudrait-il en croire ? On peut encore répondre à cette supposition, qui n'est qu'un développement de la question précédente, que l'expérience du passé la fait raisonnablement présumer chimérique. On doit au moins convenir, indépendamment de toute opinion locale, que le pape alors serait tombé dans l'hérésie d'une manière inexcusable et notoire, puisque la multitude des premiers pasteurs, témoins nécessaires de la foi des églises diverses, rendent à la croyance unanime de l'église universelle un témoignage dont la malignité seule pourrait méconnaître la certitude. En effet, tous les ultramontains sensés reconnaissent que si le pape venait sans retour à professer l'hérésie, il en serait de lui comme d'un pape déjà mort, auquel il ne serait plus question que d'en substituer un autre.

Cependant comme l'église n'est pas un corps acéphale, et que c'est à ce corps entier, composé du chef et des membres, que l'infaillibilité fut incontestablement promise, les décisions prononcées contre le pontife qu'on suppose hérétique, devraient être confirmées par celui qu'on aurait mis en sa place; d'où il paraît que le fameux débat entre les partisans de la supériorité du pape et ceux de la supériorité du concile, est une dispute sans objet, au moins pour ce qui regarde l'infaillibilité, puisque cette prérogative ne fut assurée ni au chef de l'église en particulier, ni à ses membres séparés de leur chef, mais à l'église entière, c'est-à-dire, aux suffrages réunis du chef et des membres.

Sans nous étendre davantage sur cette matière, dont la discussion plus approfondie n'appartient pas à l'histoire, nous pouvons conclure que l'infaillibilité du pape et sa supériorité sur le concile, sont

encore des points de doctrine sur lesquels chacun pout opiner en particulier selon ses lumieres. En faire des points de croyance qui excluent jusqu'au doute, c'est s'arroger le pouvoir de former des articles de foi que l'eglise ne connaît point. Les auteurs même qui tiennent cette doctrine, à quelques enthousiastes près, conviennent que ce n'est point un dogme qu'on doive admettre pour être véritablement catholique; pareillement, les défenseurs du sentiment contraire, tout en l'étayant des décrets du concile de Constance, ne le soutiennent que comme fondé sur des preuves plus fortes que celles de leurs contradicteurs. Les premiers prétendent, ou que le concile n'était pas encore œcuménique lorsqu'il fit ces décrets, parce qu'alors il n'était com posé que des prélats de l'obédience de Jean XXIII qu'on y déposa, ou qu'ils ne furent pas confirmés par Martin V qu'on élut en sa place, et même qu'ils avaient été corrompus depuis par les pères schismatiques de Bâle. C'est pourquoi le clergé de France n'a pas donné la doctrine de sa déclaration comme une règle de foi dont il ne fût pas permis de s'écarter; tout ce qu'il dit de plus fort, c'est qu'il s'est déclaré pour ce qu'il a regardé comme le vrai sentiment des catholiques. Du reste, les prélats de l'assemblée dans la lettre qu'ils adressèrent aux autres évêques du royaume, marquent formellement que leur démêlé avec Innocent XI ne concernait point du tout les dogmes de la foi, qui sont les mêmes à Rome et en France. Soit Italien, soit Français, tout catholique s'en tiendra sans doute au concile de Trente: or, est-il que le canon touchant l'autorité du chef de l'église s'y trouvant déjà dressé, on prit le parti 'de le supprimer après une délibération plus mûre, parce qu'il semblait établir l'infaillibilité du pape, et sa supériorité sur les conciles cecuméniques.

Il est donc libre à chacun de penser en son particulier comme il le croit convenable, touchant la question présente; mais chacun doit aussi se conformer extérieurement à la police du lien qu'il habite, et obéir aux édits du prince. Les souverains,

chargés de maintenir la concorde et la tranquillité dans leurs états, ont un droit incontestable d'en bannir, non-seulement les doctrines hétérodoxes et suspectes, mais encore celles qu'ils jugent préju diciables à leur autorité, dès la qu'elles ne font point partie de la créance avérée de l'église.

Dans l'année même où parut la déclaration du clergé, un simple bachelier, frère Malagola, dominicain, en osa combattre le premier et le plus sage article, dans une thèse qu'il soutint à la face de la faculté de Paris. Il leva l'étendard dès le frontispice de la thèse, où, entr'autres choses, on, lisait ces paroles: A celui qui fie et délie tout sur la terre, c'est-à-dire, qui possède éminemment l'une et l'autre puissance. L'auteur ne tarda point à être dénoncé il comparut hardiment, et soutint sans détour, que le pouvoir de lier et délier accordé par Jesus-Christ au prince des apôtres et à ses successeurs, devait s'entendre de la puissance temporelle, aussi-bien que de la spirituelle. C'est le principe dont s'était appuyé le jésuite Santarelli, antrefois condamné par la Sorbonne, qui ne se démentit point en cette dernière rencontre. Après avoir renouvelé son ancienne censure, elle chassa Malagola de l'assemblée, comme un parjure sans pudeur qui foulait publiquement aux pieds le serment qu'il avait prêté dans ses actes précédens, et fit rayer son nom du catalogue des bacheliers. On ignore pour quelle raison le parlement, si vif antrefois contre la même doctrine, demeura tranquille dans le cas d'une première atteinte portée à la déclaration du clergé, qui l'avait proscrite.

Il parut moins indifférent à l'égard de deux pièces qu'on fit peu après passer en France contre la même déclaration; savoir, un décret de l'archevêque de Strigonie qui la condamnait, et une autre sorte d'improbation donnée au même sujet, sous le titre d'examen théologique et juridique. Ces étrangers passant au delà même de leur but, avançaient que le privilége de juger en matière de foi appartenait uniquement au saint siége. Le parlement, à

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