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En 1898 et 1899 un sondage, effectué jusqu'à 42 m. 50 dans le lit même de la Durance et dans l'étroit cañon de Serre-Ponçon, n'atteignit pas la roche en place. Le trépan ramenait de ces profondeurs de l'argile glaciaire dans laquelle nous avons trouvé des galets striés sur toutes leurs faces'.

Ce serait une étude bien complexe, souvent difficile, que de chercher à établir la part qui revient soit aux torrents sous-glaciaires, soit aux rivières qui les ont précédés, dans l'œuvre du creusement des cañons.

En tout cas, nous ne concevons pas comment le torrent sous-glaciaire aurait pu creuser le cañon supplémentaire de la Blache sur 200 mètres de longueur maxima, et cela, à 13 mètres de celui de la Luye et sur la pente de la basse croupe de Capadoce. Le cañon de la Blache n'est, ni d'origine sous-glaciaire, ni d'origine épigénique. Il nous paraît être simplement le lit d'un des bras de la Durance alors que cette rivière divaguait encore sur l'emplacement de Gap. Quoi qu'il en soit, ce cañon et les nombreuses vallées sèches du Gapençais sont une preuve des modifications profondes que les érosions ont produites dans l'hydrographie de la région.

Gap, novembre 1903.

DAVID MARTIN.

1. De là cette intéressante conséquence: si la Durance coulait aujourd'hui sur le fond rocheux de son cañon, les rivières mortes n'auraient plus leur profil d'équilibre et conflueraient par une cascade. En effet, à 500 mètres, en amont de leur confluence, la Luye et l'Avance coulent sur les calcaires du Lias inférieur. Si la Durance préglaciaire avait elle-même approfondi son cañon jusqu'à cette profondeur de 42 m. 50, ces deux affluents auraient, au fur et à mesure de l'affouillement, rectifié leur profil d'équilibre au moins par un rapide prononcé. Il ne paraît pas en avoir été ainsi. Le cañon de la Durance a été évidemment approfondi à 42 m. 50 par le torrent sousglaciaire d'après le sondage effectué à Serre-Pançon, dans le voisinage. Ce chenal sous-glaciaire était alimenté par un glacier occupant une superficie de 4000 kilomètres carrés. Tandis que la partie du glacier dont les eaux de fusion s'écoulaient par l'Avance et par la Luye n'occupait qu'une superficie totale de 200 kilomètres. On conçoit aisément, ce nous semble, combien une pareille différence dans l'alimentation de ces divers torrents, a dû exagérer l'action érosive du chenal durancien, tandis que celle des affluents se trouvait en retard.

Le problème de l'eau à Coolgardie

(Australie occidentale)

I.

Il y a une trentaine d'années, le célèbre écrivain anglais Anthony Throllope, après avoir visité les sept colonies australasiennes, écrivait qu'à son avis la plus jeune et la plus pauvre, l'Australie occidentale, aurait avant peu un grand développement agricole et pastoral. Les faits n'ont pas justifié ces prévisions ce sont les mines d'or qui constituent aujourd'hui la richesse de cette colonie. Pendant longtemps l'or fut exploité sans grand succès dans les districts de Kimberley et de Murchison. Mais en 1892 Bayley et Ford à Coolgardie et en 1894 Hannan à Kalgoorlie découvrirent des filons d'une incroyable richesse; de nombreuses sociétés se fondèrent à la suite des prospecteurs individuels; les exploitations se multiplièrent et le désert de l'intérieur commença à se peupler activement. Aujourd'hui Coolgardie a 4 213 habitants et Kalgoorlie, à 40 kilomètres plus à l'est, en a 6583; l'ensemble du district aurifère (Coolgardie goldfields) possède une population de 41 390 âmes, chiffre considérable par rapport aux 182 553 habitants disséminés sur l'énorme surface de la colonie (2 527 633 kilomètres carrés, cinq fois la France). Sur les 444 millions de francs d'or produits en 1903 par la totalité de l'Australie, l'Australie occidentale en a fourni 182 millions. Depuis 1896 une ligne de chemin de fer relie Coolgardie à la capitale, Perth, et, au port de Fremantle, où font escale les paquebots européens; en 1899 le chemin de fer a été poussé jusqu'à Kalgoorlie.

L'intérieur de l'Australie occidentale (West Australia, Westralia) est un véritable désert, argileux ou sablonneux, partagé entre la brousse à plantes épineuses (scrub à spinifex) et la forêt extrêmement clairsemée d'eucalyptus. On n'y trouve ni rivières, ni lacs permanents. Si, au voisinage de la côte, à Perth, les précipitations atteignent 849 millimètres, à Coolgardie elles ne dépassent pas 177 millimètres. Cette insuffisance dans la quantité de l'eau est encore augmentée par le régime des pluies; il tombe en automne et en hiver quelques violentes averses, mais le printemps et l'été sont presque absolument secs. La question de l'eau est donc pour ces pays le problème essentiel à

résoudre. Il est d'autant plus grave que les mines d'or ne peuvent pas se passer d'eau pour le traitement des minerais.

Quelque temps, on a craint que Coolgardie ne manquât totalement d'eau, ce qui eût été une ruine pour l'industrie. On ne disposait que des mares naturelles, assez abondantes dans les déclivités des protubérances granitiques qui se rencontrent fréquemment dans tout l'ouest australien; mais la quantité d'eau en est tout à fait insuffisante. Cependant Martin Walsh réussit, en creusant des puits, à obtenir de l'eau salée. On trouve, en effet, de nombreux lacs, remplis seulement après les grandes pluies et qui ordinairement sont de simples dépressions sèches, formées de sable jaune et, en raison de la salure du sol, complètement dépourvues de végétation. C'est en creusant le fond de ces mares temporaires qu'on trouve, à une faible profondeur, une nappe d'eau salée. Tout le pays est un ancien fond de mer, dont le sol est imprégné de sels; les pluies, trop peu abondantes, n'ont pu les entraîner. La salinité est quelquefois quadruple de celle de l'océan.

Ces eaux malheureusement reviennent assez cher; on les paye 2 francs l'hectolitre (0 fr. 02 le litre). Mais, s'il est possible de les employer pour le traitement des minerais aurifères, elles sont inutilisables pour les chaudières. Il est vrai qu'au moyen de condensateurs (condensers) on peut, par la distillation, les transformer en eaux douces. Mais alors leur prix est extrêmement élevé; elles reviennent à 6 pence le gallon', soit 0 fr. 15 le litre. Le résultat était que la production de l'or coûtait très cher et que les mines peu riches ne pouvaient pas être exploitées avantageusement. Beaucoup de mines, en effet, donnent 10 dwt d'or à la tonne 2; mais il en aurait coûté 11 pour les extraire. En outre les salaires étaient très élevés (90 à 100 francs par semaine); encore fallait-il fournir l'eau gratuitement aux ouvriers.

En vain on essaya de traiter chimiquement les minerais sans eau; en vain, on tenta de remplacer les moteurs à vapeur par des moteurs à huile minérale, ce qui, en raison des prix de transport, ne procurait qu'une faible économie. Il fallut reconnaître que le développement du pays était absolument lié à la possibilité de se procurer de l'eau douce.

II. C'est alors que des hommes d'initiative conçurent le projet grandiose d'amener à Coolgardie de l'eau depuis la côte. Une telle idée, tout à fait sans précédent en matière de fourniture d'eau, souleva tout d'abord un scepticisme général. Les difficultés en effet étaient énormes. On ne pouvait utiliser la côte méridionale, relativement proche, mais plate et sèche; il fallait donc prendre comme point de départ la côte de l'ouest, distante de Coolgardie

1. Le gallon, mesure anglaise de capacité pour les liquides, vaut 4 lit. 54.

2. Les métaux précieux se mesurent, dans les pays anglais, au moyen d'une unité appelée livre troy qui vaut 373 gr. 2. La livre troy se divise en 12 onces (oz) valant 31 gr. 1. L'once est elle-même partagée en 20 pennyweights (dwl) valant 1 gr. 555. La tonne dont il est ici question est la tonne anglaise de 1 015 kgr. 7056.

d'au moins 540 kilomètres. En outre les champs d'or sont situés sur un plateau de plus de 550 mètres d'altitude; l'emploi de puissantes pompes de refoulement était donc indispensable. Pourtant, grâce à l'énergie de ses promoteurs, le projet finit par triompher de la défiance publique,

Le principal inspirateur de l'entreprise, connue en Australie sous le nom de Coolgardie water scheme, fut le Très Honorable Sir John Forrest, P. C., G. C. M. G., M. P., secrétaire colonial et Premier de West Australia, qui avait déjà réalisé les grands travaux d'aménagement du port de Fremantle. Quand, en février 1901, il fut entré au ministère fédéral, son œuvre fut continuée et menée à bien par ses successeurs, les honorables George Throssell, M. L. A., et George Leake, K. C., M. L. A. Les études techniques furent faites par M. C. Y. O'Connor, C. M. G., ingénieur en chef de la colonie, qui déposa son rapport en 1896. Pour plus de sûreté, trois illustres ingénieurs anglais furent consultés, MM. John Carruthers, George F. Deacon et William Cawthorne Unwin; ils approuvèrent le projet.

Restait la question d'argent. Le gouvernement y pourvut par un emprunt de £ 2 500 000 (63 125 000 fr.), somme énorme, eu égard à la situation financière de la colonie, dont la dette montait au 31 décembre 1900 à £ 12 227 763 (308 751 015 fr.).

Les travaux dirigés par MM. C. Y. O'Connor, ingénieur en chef,. T. C. Hodgson, ingénieur en charge, et W. Leslie, ingénieur résident, furent terminés en 1904.

L'ensemble de l'ouvrage comprend un vaste réservoir d'alimentation à proximité de la côte, un aqueduc formé de conduites métalliques, enfin un réservoir d'emmagasinement et de distribution à Coolgardie.

III. Le réservoir d'alimentation est situé, à 53 kilomètres de Perth, à 56 kilomètres de Fremantle, à 523 kilomètres de Coolgardie, dans les Greenmount Ranges, partie de la chaîne des Darling Ranges qui longe la côte occidentale de l'Australie. Cette région a été choisie en raison de l'abondance relative de ses pluies; les précipitations y atteignent de 529 à 542 millimètres. On l'appelle le réservoir de Greenmount. Il est établi sur la rivière Helena, affluent de la Swan River, en un point nommé Mundaring, à 103 mètres d'altitude. La digue est haute de 6 mètres. Quand il est plein il s'étend sur 11 kilomètres de longueur. Construit sous la direction de l'ingénieur W. Leslie, il a été terminé en 1901. Sa capacité est de 20 884 000 mètres cubes. Jusqu'ici il n'y a rien qui ne rentre dans la catégorie des travaux ordinaires des ingénieurs. L'œuvre originale et vraiment grandiose consiste dans le transport de l'eau, recueillie à 103 mètres d'altitude, jusqu'à 503 mètres, et cela sur un parcours de 523 kilomètres. Il a fallu employer des conduites. d'un type spécial et recourir à l'emploi de puissantes pompes refoulantes.

a été décidée par le gouvernement, à l'effet de fournir 563 kilomètres de tuyaux d'acier. 16 firmes, australiennes, anglaises et américaines concoururent. Les vainqueurs furent MM. G. et C. Hoskins, ingénieurs et fabricants de tuyaux d'acier et de fonte, établis à Sydney et à Melbourne, qui avaient soumissionné sur le prix de £ 1 060 000 (26 765 000 fr.).

Les tuyaux fournis furent au nombre de 65 800. Ils furent transportés par bateaux de Melbourne à Fremantle et de là par des trucks sur le chemin de fer. Chacun d'eux a 8 m. 512 de longueur et 0 m. 75 de diamètre intérieur; l'épaisseur des parois métalliques atteint 0 m. 125. Cette épaisseur considérable a été nécessitée par les pressions que, comme on le verra plus loin, devront subir les tuyaux.

Il a été stipulé que les tuyaux ne seraient pas rivés (riveted pipes), mais que, en vue d'accroître leur force de résistance, ils seraient à barre d'enclenchement (locking bar jointed pipes). Ils sont formés de deux plaques recour- bées en demi-cercle, comportant ainsi deux fentes longitudinales, une en haut, une en bas. Dans chacune d'elles, on engage une queue d'aronde allongée, dont la section a la forme d'un H. Au moyen d'une presse hydraulique, on fait adhérer fortement queues d'aronde et plaques.

Les plaques ont été fabriquées par la Carnegie Company, de Pittsburg. La courbure en demi-cercle, de même que l'opération du fixage des différentes pièces ont été assurées au moyen de machines, inventées par MM. Hoskins et brevetées. On presse hydrauliquement, par le dehors et par le dedans, sous la pression de 250 tonnes anglaises '.

Sur le terrain on procède au revêtement, au dehors et au dedans, en asphalte de la Trinité. C'est également sur le terrain qu'on opère la jointure des tuyaux. Celle-ci se fait au moyen d'anneaux dont les bords sont relevés; l'adhérence est assurée par une soudure au plomb.

L'aqueduc suit le chemin de fer. De la sorte le transport des tuyaux et de la machinerie a été facilité. Il en sera de même plus tard en ce qui concerne l'approvisionnement des stations et les réparations à faire.

Un problème délicat a été celui de savoir si les tuyaux devaient être souterrains ou à l'air libre. Dans le premier système, d'ailleurs plus cher, les conduites risquaient de se détériorer dans la terre saline; la pression du sol pouvait les écraser; il est vrai qu'il était facile de les protéger en les recouvrant de béton; mais alors il devenait difficile de rechercher les fuites, inévitables, en raison de la longueur de l'aqueduc et de la petite quantité d'eau. Il semblait donc préférable de disposer les conduites, soit dans des tranchées ouvertes, soit entièrement à l'air libre; avec ce dernier système les changements de

1. La tonne anglaise représente 2 240 livres anglaises, dites livres-avoir-du-poids, distinctes de la livre troy employée pour les métaux précieux, et valant 453 gr. 44. La tonne anglaise, évaluée en mesures françaises, vaut donc 4 015 kgr. 7056.

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