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Au travers des forêts vierges

de la Guyane hollandaise.

Des efforts sont tentés, depuis quelques années, pour exploiter les territoires si riches, mais encore mal connus et difficilement accessibles de la Guyane hollandaise occidentale. Un laboratoire de culture a été créé; une voie ferrée reliant Paramaribo aux régions intérieures du Lawa est en construction. Le Surinam supérieur notamment a éveillé l'intérêt par la richesse et la variété de ses essences forestières, l'abondance des Balatas, l'existence de l'or. Van Genderen, H. Tyndall, Shunk, Woltz, van Drimmelen, K. Martin avaient, après des voyages rapides, attiré l'attention sur l'extrême variété des essences utiles de la forêt vierge, mais aucune reconnaissance sérieuse des gîtes aurifères n'avait été faite, aucun travail d'ensemble n'avait été publié.

En 1900 une expédition organisée par le ministre des Colonies de Hollande et par les États Généraux, avec l'appui financier de quelques particuliers, fut placée sous la direction de M. van Cappelle, professeur à l'école d'agriculture de Wageningen, qui s'occupa plus spécialement de la géologie. Elle comprenait en outre MM. J. Haenen et Gantzert, chargés des relevés topographiques et des observations astronomiques; Tulleken, botaniste; van Cappelle junior, photographe, et van Drimmelen, commissaire du district de Nickerie, qui avait déjà exploré une partie de ces régions.

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-M. van Cappelle nous fait connaître les principaux résultats de cette mission dans une publication populaire' », ornée de gravures, qui sera suivie de mémoires techniques plus détaillés. Il s'était proposé de remonter le Nickerie en pirogue aussi loin qu'il le pourrait et d'explorer ensuite rapidement la région comprise entre le Nickerie et le Coppename en remontant le Fallawatra, affluent de droite du Nickerie. Ce programme a été à peu près rempli, mais le départ ayant été un peu retardé, l'exploration du Nickerie a dû être écourtée, les basses caux ayant arrêté toute navigation après vingt jours de voyage.

L'expédition partit de Neuw-Nickerie le 3 septembre; elle avança assez

1. Au travers des forêts vierges de la Guyane Hollandaise, par H. van Cappelle, 1 vol. de 198 p., 1 carte, 20 pl., 60 gr. Paris. Librairie polytechnique Ch. Béranger, 1905.

rapidement dans la région connue du Nickerie inférieur que l'on peut remonter, aux hautes eaux, en chaloupe à vapeur, jusqu'au Fallawatra. Dans toute cette partie, soumise aux marées, le fleuve est bordé par des mangliers en arrière desquels se développent des plantations de canne à sucre, de cacaoyer. La forêt vierge apparaît bientôt avec des Maripas (Maximiliana regia), Avicennias, quelques Papayers des bois (Cecropia peltata), les Palmiers pinots (Euterpe oleracea), quelques Mahots rouges (Mora excelsa) dont le bois est recherché pour les constructions navales; puis, des Manis (Moronobea coccinea) qui fournissent à la fois du bois pour la construction des pirogues et une résine pour leur goudronnage, quelques Copaïers (Copaïfera officinalis). Les premiers Tamariniers des bois (Mimosa guyanensis) apparaissent vers Kalebaskreek; le Mahot rouge prédomine au delà de Karapana avec le Couachi (Quassia amara). On entre dès lors dans le territoire des essences dures; les arbres atteignent des dimensions plus considérables; le Courbaril (Hymenea Courbaril) et le bois amadou (Hernandea guyanensis), font leur apparition, de même que le géant de ces régions, le Kankantrie (Eriodendrum anfractuosum). Des orangers, des citronniers, des barbadines s'observent çà et là sur tout le cours inférieur. En approchant d'Arkonniekreek, le Papayer devient plus rare, de même que les Maripas; le Kakaralli (Lecythis ollaria) avec son bois dur qui résiste aux tarets, les ébènes verts (Bignonia leucoxylon) dominent, avec les bois violets (Copaïfera bracteata) qui deviennent de plus en plus abondants.

Dans toute cette partie inférieure les rives alluviales, marécageuses, sont formées par des argiles grasses. Les alluvions montrent bientôt une disposition nette en terrasses, dans lesquelles on peut reconnaître un lit majeur et un lit mineur; la terrasse supérieure atteint en quelques points 8 mètres de largeur avec une hauteur de 1 m. 50. Le cours devient en même temps beaucoup plus sinueux; le contraste entre la rive concave élevée, parcourue par un courant rapide et la rive convexe basse, sablonneuse, est encore accusé par la végétation : la haute futaie, de plus de 40 mètres de hauteur, atteint la berge concave, tandis que les atterrissements de la rive convexe sont recouverts de taillis, de papayers, de pinots, terminalias, de plantes rampantes, de lianes enchevêtrées en un réseau impénétrable. Au delà de Prakékreek plusieurs couches alluviales distinctes apparaissent dans les berges: des bancs de glaise jaune ou rouge alternent avec des couches d'argile bleu clair, plus grasse. Un premier monticule de 10 mètres de hauteur, formé de terre à porcelaine blanche recouverte par les glaises jaunes, s'observe au delà de Zonnevisch-kreek. Une nouvelle formation intervient alors; ce sont des bancs de grès ferrugineux bruns, résultant de l'agglutination des sables par l'hydroxyde de fer.

Les glaises légères qui forment ici le sol sont le terrain de prédilection des essences dures Ébène vert, Bois violet, Bois de fer (Siderodendron

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triflorum), le Wacapou (Wacapoua americana), le Monbin (Spondias lutea), le Cèdre (Cedrela odorata), le Tamarinier des bois. M. van Cappelle indique que l'exploitation de ces richesses végétales comporterait d'assez grandes diffi

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cultés

par suite de la dissémination des individus d'une même espèce, souvent très éloignés les uns des autres; une reconnaissance détaillée de la forêt devrait précéder l'exploitation.

La région des chutes d'eau commence un peu avant le confluent du

FIG. 19. BLOCS DE GRANITE A BIGI-SANTI (HAUTE NICKERIE). Reproduction d'une photographie de M. van Cappelle jun.

verts d'une croûte noire désagrégée provenant, comme celle qui a été étudiée sur les rochers des cataractes du Nil par MM. Lortet et Hougounenq, puis par M. Lucas, de la dissolution des éléments solubles de la roche par les eaux météoriques et fluviales et de la concentration, à la surface, des oxydes de fer et de manganèse insolubles. Des barrages successifs et rapprochés coupent ensuite le Nickerie à Stone dansi; ils sont formés par des amas de blocs de granite, décomposés en écailles concentriques, arrondis par l'eau, percés de trous et creusés de cannelures parallèles au courant, sous l'action des matériaux grossiers entraînés par le fleuve, au moment des crues. Des bancs rocheux de gneiss à sillimanite dirigés nord-sud apparaissent en outre çà et là. Les terrains humides portent, pour la première fois des Comous (Enocarpus Bacaba), palmiers dont les feuilles sont utilisées pour la construction des cases et dont le fruit renferme un liquide à saveur de chocolat.

Le confluent du Fallawatra et du Nickerie est marqué d'atterrissements qui montrent que la première rivière avait autrefois une largeur plus grande, tandis que le Nickerie a augmenté. Le sol rocailleux, recouvert d'un palmierrotang (Aouara), est jonché de petits fragments de latérite rouge-brique, provenant, comme dans toutes les régions tropicales, de la désagrégation des roches sous l'action de la grande chaleur, de l'humidité de l'air et de la végétation. Des roches inaltérées, des gneiss, forment un barrage dans le Fallawatra près de son embouchure et se prolongent de chaque côté de la rivière. M. van Casselle pense que ce barrage est le résultat d'un pli anticlinal dont le noyau, formé de roches plus dures, est resté en saillie.

Au delà du Fallawatra la région était à peu près inconnue et n'avait été parcourue que par les exploitants de Balatas. Les parois de glaise de la rive concave deviennent de plus en plus élevées, les bancs de sable micacé et quartzeux blanc, avec oxydes de fer et de manganèse, sont plus étendus, sur la rive convexe. De gigantesques blocs de granite arrondis d'une manière très régulière par la désagrégation et l'érosion émergent de plus en plus nombreux (fig. 19). Pendant les crues, la rivière se creuse un lit majeur dans la rive concave et envahit les atterrissements de sable de la rive opposée qui se transforment en marécages.

Au sud d'Antoniuskreek apparaissent, au milieu des schistes et des granites, les premières roches basiques intrusives; ce sont des gabbros à hypersthène de couleur foncée, latérisés superficiellement. Le lit de la rivière est occupé par des grès ferrugineux résultant de l'agglutination, à l'époque actuelle, des sables par des hydroxydes de fer. Les graviers deviennent de plus en plus grossiers, les galets de quartz et de roches basiques noires ferrugineuses atteignent 2 centimètres de diamètre. Le cours est assez sinueux par suite de la présence de rochers de granite qui obligent parfois le fleuve à décrire les trois quarts d'un cercle, comme à Baas Bari (fig. 20). Un barrage de granite

de 5 mètres de hauteur, arrondi par l'érosion, traversé de filons de quartz gris bleuâtre, détermine des chutes dans la même localité.

Le Papayer des bois tend à être remplacé sur la rive basse par le Goyavier (Psidium aromaticum) et des palmiers épineux. La forêt est formée surtout d'Ébènes verts, de Bois violets, de Tamariniers des bois, de Manis, de Wapas huileux (Eperua falcata) dont le bois résistant conviendrait pour les traverses de chemin de fer, de Kakaralli, d'Anacardier (Anacardium occidentale), etc. Entre Zwampkreek et Mimiekreek, les assises rocheuses abandonnent leur direction nord-sud habituelle et se dirigent

vers le nord-est jusqu'à Paradijskreek, où la direction s'accuse un peu plus vers l'est. Une masse de gneiss plus dure, orientée N. 10° 0., détermine les chutes de Lombok. Des filons de roches intrusives basiques de couleur sombre, rappelant l'andésite, traversent le gneiss. La surface de ces roches basiques se désagrège en petits cubes, tandis que les granites conservent des contours arrondis et que les gneiss se terminent par des arêtes vives, plus aiguës. Vers Leguanenkreek le sol est formé par un gneiss clair à muscovite et biotite, se décomposant en polygones d'un bel effet. Deux nouvelles espèces apparaissent dans la forêt : l'Acuyuri (Astrocaryum aculeatum) et le Genipa qui donne une teinture sombre utilisée pour les poteries indiennes.

FIG. 20.
SINUOSITÉ DU NICKE-
RIE, A BAAS-BARIE, DÉTERMINÉE
PAR LA PRÉSENCE DE ROCHERS DE
GRANITE.

Des barrages coupent le lit de la rivière à Drogekreek avec une direction nord-est, puis, au delà, avec une direction nord-ouest. Des roches pyroxéniques ou amphiboliques, décomposées en polygones, traversées de filons de quartz, apparaissant au milieu de gneiss, de schistes et de granite, déterminent les chutes de Zesvoethoog, de 1 m. 80 de hauteur. Les granites présentent fréquemment des filons nord-ouest de diorites à hypersthène. Une chaîne de montagnes nord-ouest se voit à l'horizon. Près de la rivière s'élèvent des collines de 30 mètres de hauteur. Aux environs des chutes Blanche-Marie le sol est formé de schistes avec filons de granite lardés de roches noires (pyroxénites, gabbros, diorites à hypersthène); les filons plus durs restent en saillie, créant un véritable dédale dans le lit du fleuve. La cascade Blanche-Marie forme trois étages dont la hauteur totale est de 29 m. 80; les étages inférieur et supérieur sont des schistes ou des gneiss à pyroxène, l'étage moyen est constitué par des roches intrusives noires ou bleuâtres, grenues ou non (diorite à hypersthène passant au gabbro); ce dyke se continue de part et d'autre de la rivière où il s'élève en collines de plus de 30 mètres de hauteur.

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