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D'ailleurs, si les formes de dépôt produites par les courants sont assez fixes, ou plus exactement si elles varient seulement avec les variations de la vitesse, et, somme toute, de la force vive, il ne faudrait pas en conclure que le « domaine du vent » fût, moins que le « domaine des eaux courantes », le théâtre d'attaques et d'usures violentes. L'érosion éolienne est très puissante (p. 217), et l'action de surface exercée par le vent, à l'aide des grains de sable en mouvement qui sont ses outils, est d'autant plus vive que ces matériaux ne s'élèvent que peu au-dessus du sol; ils sont plutôt traînés et roulés qu'emportés, ou proprement transportés. « Le courant chargé de particules rocheuses ou de sable, dit M. F. Foureau, reste à la partie la plus basse qui possède ainsi le pouvoir d'érosion le plus considérable; ce courant actif, si je puis employer cette expression suit naturellement une direction parallèle à celle du sol et dans son voisinage immédiat1. >>

De là résultent l'usure et la sculpture de toutes les parties résistantes du sol; M. F. Foureau, à son tour, a examiné quelques-unes des formes les plus fréquentes de cette usure superficielle.

Certaines des observations de M. Foureau ont porté sur le mécanisme des phénomènes élémentaires, et à ce titre deux surtout méritent d'êtres rapportées ici et jointes au dossier du présent article.

«Il est facile de voir se produire mécaniquement le phénomène de l'érosion éolienne si le hasard vous fait stationner sur une grande dune après une pluie un peu importante, alors que la masse des sables est imbibée d'humidité et pour un moment quasi solidifiée. A cet instant, si le vent survient, on observe sur le sommet de la dune la formation rapide de dentelures capricieuses, à mesure que le vent assèche le sol, et en enlève sans arrêt des particules ténues qu'il transporte au loin. On assiste ainsi à la fabrication sur place d'une dentelle très analogue, sinon identique, à celle que crée une longue série de vents chargés de sable, sur des grès ou sur des calcaires très tendres. Cette dentelle de sable disparaît du reste aussitôt que la superficie de la dune rongée par le vent a complètement évaporé son humidité; les golfes se comblent alors, et la crête a vite fait de reprendre sa forme primitive,

laire à la direction générale des bandes de dunes, et si l'on calculait sur la coupe ainsi faite la hauteur de sable accumulé aux différents points, la somme totale du sable accumulé resterait à peu près constante pour toutes les lignes et coupes qu'on pourrait ainsi faire. Le vent agit par compensation; là où il élève un petit massif plus considérable, ce massif est une protection plus efficace pour la zone qui est au delà; et il est d'ordinaire suivi d'un creux ou d'une dépression en rapport avec ses propres dimensions; là, au contraire, où se trouve une dépression, le vent se précipitant comme dans un couloir emporte le sable qui va se déposer plus loin pour édifier un massif qui sera en rapport avec la quantité de sable qui aura pu aisément franchir la partie basse d'amont. Et, de même après les zones de dunes actives les plus hautes, comme celles de la région d'Ourmés (Bou-Ourmés), viennent précisément les surfaces planes ou les couloirs les plus larges, comme la plaine occupée maintenant par les oasis du Souf, et qu'on peut légitimement appeler l'Oued-Souf. Plus au sud, les dunes sont aussi plus hautes, et les couloirs régulièrement plus larges. » Est-ce un fait général dans tout l'Erg? Je le demande moi-même à celui qui le connaît si bien.

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1. Documents scientifiques de la Mission saharienne, I, p. 216.

2. Voir I, p. 217, et planches XVIII et XIX. Voir aussi sur cette question notre mémoire : Érosion tourbillonnaire éolienne, contribution à l'étude de la morphologie désertique, in Mem. della Pont. Accad. Rom. dei Nuovi Lincei, XXXI, 1903, p. 129-148, et H. Schirmer, Nouvelles études de morphologie désertique, in La Géographie, VIII, 1903, p. 221-224.

en s'enveloppant d'un panache de poussière blonde composée de sable très fin soulevé, même par un vent de moyenne vitesse1»).

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Empreintes déterminées en différents sens par les remous des courants de l'embouchure de la Seine, sur un sol composé de matériaux de densité différente sables purs, coquilliers et vasards.

(Reproduction d'une photographie de M. Jules Girard.)

Et voici un cas typique de creusement tourbillonnaire :

« J'ai vu, de mes yeux, le phénomène se produire et faire, en une seule journée

de vent violent, d'abord sous le vent de l'obstacle (qui dans l'occurrence était ma tente), une excavation en forme de demi-lune, de près de 80 centimètres de profondeur, alors qu'à l'orientation opposée, c'est-à-dire au vent, s'élevait une petite dune de 40 à 50 centimètres, allant se terminer en pointe à 4 ou 5 mètres en arrière; à droite et à gauche de l'obstacle, par rapport à la direction du vent, on voyait en même temps se creuser deux sillons. Il est superflu d'indiquer que, l'obstacle enlevé, comme nous nous trouvions sur une plaine de sable, il a suffi d'une demi-journée de vent pour remettre toutes choses en place, ce qui n'aurait pu se produire si l'obstacle avait présenté un caractère permanent. Dans ce dernier cas, en effet, l'obstacle aurait donné naissance à une nouvelle dune stable qui, en peu de temps, eût escaladé son sommet et pris la forme ordinaire de ses voisines 1».

1

Retenons surtout le fait du creusement si rapide d'un trou de 80 centimètres de profondeur par la « tactique» si puissante du mouvement tourbillonnaire. Beaucoup des « creux » des régions de dunes, beaucoup de ces creux situés à l'aval ne s'expliquent, en effet, que par les tourbillons proprement dits ou par des mouvements du même type, plus complexes, que nous appellerons d'un mot moins précis, les remous.

Nous remercions M. F. Foureau et ses habiles et obligeants éditeurs, MM. Masson et Cie, de nous permettre de reproduire ici une des figures des Documents scientifiques de la Mission saharienne, qui montre très bien sur la droite un exemplaire de ces <<< creux » (voir fig. 30).

Et, pour illustrer avec encore plus de détail l'enregistrement par les sables des moindres courants décomposés d'un fort courant atmosphérique, je joins à cet article la reproduction encore inédite d'une très belle photographie saharienne qui m'a été obligeamment communiquée par son auteur, le RP. Huguenot, des Pères Blancs, à El Goléa (voir fig. 31).

Au même titre que les volumes de Foureau, nous devons indiquer la superbe publication des Résultats scientifiques de l'expédition Sven Hedin 2. Cette œuvre, éditée aux frais du parlement suédois, comprendra, lorsqu'elle sera complète, un atlas de cartes en deux volumes et six volumes de texte in-4. Dans le vol. I et dans le vol. II déjà parus, il convient de signaler quelques chapitres qui sont d'une souveraine importance pour l'étude des sables désertiques :

Le vol. I: The Tarim River, contient beaucoup de faits dignes d'examen, surtout dans la 3o partie : The Tschertschen Desert (de la p. 311 à la fin), et surtout dans le chapitre XXII de cette 3o partie: On Dune-Formation and Sandy Thresholds (p. 349-369). La Géographie a déjà eu l'occasion de parler des dunes du Tarim et des dépressions allongées qui les séparent, dépressions dites «bajirs ». — Puisque nous venons de traiter des mouvements tourbillonnaires, notons ici la figure de la page 321 qui représente les modes de déviation des courants au

1. Documents scientifiques de la Mission saharienne, I, p. 223.

2. Sven Hedin, Scientific Results of a Journey in Central Asia, 1899-1902. Stockholm, Londres et Leipzig.

3. A. de Lapparent, Le dernier voyage de Sven Hedin, in La Géographie, 1904, X, p. 195-200.

milieu des sables et les mouvements tourbillonnaires engendrés par ces déviations. Le vol. II est encore plus riche et plus fourni en documents se rapportant au sujet qui nous occupe. Il n'y a pas moins de cinq chapitres qui sont à lire d'un bout

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Vallonnements et cuvettes creusés par le mouvement tourbillonnaire provenant de la rencontre du courant littoral avec la houle.
(Reproduction d'une photographie de M. Jules Girard.)

à l'autre Chap. XXVI, The Deserts of Ordos, Kum-Tagh, Kaschgaria and Ab-Bel-Kum, 379-385. Chap. XXVII, Altitude of Dunes, Movement of Dune-Masses, p. 396-409.

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très suggestif qui demanderait à lui seul une exposition et une discussion propres). Chap. XXIX, Sand-Currents Ripple-Marks Waves and Dunes, p. 426-440 (chapitre capital pour les faits ici discutés; p. 428 et 429, reproductions très curieuses de types divers de rides de sable). Chap. xxx, Origin of Sand in the Tarim Basin: Disintegration Products, p. 441-461 (au point de vue géographique, la planche 51, face à la p. 458, figure d'une manière très parlante le transport des produits de démolition dans toute la partie orientale du bassin du Tarim: on constate comment la cuvette tend à se combler par les apports du vent et de l'eau, du vent qui transporte les sables de l'ouest vers l'est (flèches rouges) et de l'eau qui ruisselle et ravine sur tout le pourtour de la grande dépression (flèches bleues).

En dehors même de l'atlas, le texte de l'œuvre de Sven Hedin est accompagné de figurations cartographiques' et d'un très grand nombre de belles planches hors texte en photocollographie.

D'après l'auteur, le désert de Takla Makan, par son étendue, par sa continuité ininterrompue et par le volume de sable qu'il contient, l'emporte sur tous les autres déserts asiatiques et même sur tous les autres déserts de sable de l'univers. C'est là que Sven Hedin a observé et exactement mesuré des dunes de 89 m. 5 de hauteur: et si d'autres explorateurs ont donné des hauteurs de dunes beaucoup plus considérables (Loczy et Largeau, 500 m.; Obrutschev, 200 m., etc.), ces évaluations n'ont jamais été qu'approximatives, et ont été même faites quelquefois par rapport au sol rocheux qui est censé supporter tout le sable.

On comprend qu'ayant pu relever et colliger de très nombreuses observations en de semblables domaines, le voyageur suédois nous ait apporté d'utiles contributions aux problèmes confus et complexes de la formation des dunes, de leur déformation, de leur marche, etc. Quelle que soit l'opinion que l'on ait et quelle que soit la conclusion à laquelle on croit devoir aboutir, on ne peut pas négliger des informations précises comme celles que résume, par exemple, la figure de la p. 409 du vol. II : Relations entre la longueur, la hauteur et les pentes des dunes dans la partie occidentale du désert de Takla-Makan. De même la figure de la p. 438 est faite des trois croquis très démonstratifs mettant bien en lumière la loi fondamentale du déplacement des dunes, ou plus exactement des petites dunes, des dunes les plus petites, et parce qu'elles sont les plus petites : une dune qui avance avec une certaine vitesse parce que sa masse reste à peu près constante; une dune qui avance de plus en plus lentement parce que sa masse s'accroît; une dune qui avance vite parce que sa masse décroit.

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Ce sont les idées essentielles qui nous permettent de comprendre ces formes si curieuses de dunes, ces formes en croissant dites barkhanes; et ce sont les faits qu'on doit avoir présents à l'esprit pour aborder une discussion comme celle qui s'est produite au congrès des géographes allemands de Danzig.

1. Voir encore dans le vol. II, face la p. 398, la planche 44 a, qui est une carte (sans échelle) des déserts de sable du bassin du Tarim, et la planche 44 b, qui porte deux très intéressantes figurations (sans échelle) des zones de désert de sable de l'Asie centrale et des zones de désert de sable de tout l'ancien continent (Asie et Afrique). Voir dans le même vol. II, face à la p. 578, les planches 61 et 61 a, très curieuses comme représentations par courbes de la topographie des dunes si régulières du désert du Lob-Nor (échelles 4: 160 000 et 1 : 37 000).

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