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ment des vallées a pour cause unique la régression des glaciers; cette conception trop absolue peut conduire à des résultats erronés qu'il importe d'éviter. Si l'on admet, en effet, que, concurremment avec le jeu des glaciations successives et sans liaison nécessaire avec elles, une cause agissant de l'aval vers l'amont, telle, par exemple, que les oscillations du niveau de base, récemment mis en évidence d'une façon si remarquable par les travaux de M. de Lamothe, déterminaït une série d'approfondissements successifs des vallées, on conçoit que la disposition des dépôts réalisée par cette double série de phénomènes soit exactement celle que nous observons et que M. Penck a si magistralement décrite aux abords de la chaîne alpine.

En effet, l'érosion régressive périodique agissant dans une région parcourue par les oscillations d'un front glaciaire, produit nécessairement, et lors même

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F.BORREMANS del.

FIG. 45. SCHÉMA MONTRANT LA DISPOSITION PRODUITE PAR L'INTERFERENCE DES RÉCURRENCES GLACIAIRES ET DE L'ÉROSION RÉGRESSIVE CAUSÉE PAR LES DÉPLACEMENTS DU NIVEAU DE BASE (B, B1). AB, Ancien talweg; AB', Talweg après le creusement provoqué par l'abaissement du niveau de base; T', Terrasses fluvio-glaciaires anciennes (hautes terrasses); Gl', Moraines anciennes; 7, Terrasses fluvio-glaciaires postérieures au creusement (basses terrasses); G, Moraines récentes (postérieures au creusement).

que les phases de creusement ne coïncident pas avec les maxima de recul ou d'avancée des glaciers, un emboîtement des moraines et des terrasses qui en dérivent, dans les talwegs successifs créés par cette érosion. Les moraines frontales les plus récentes occuperont le fond des talwegs les plus profonds, et les plus anciennes seront localisées en contre-haut de ces dernières; néanmoins, dans les parties amont, rien ne s'opposera à ce que des moraines récentes soient venues se superposer indifféremment à des systèmes fluvioglaciaires de divers âges (voir la fig. 45).

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Au cours des glaciations successives les glaciers ont pu envahir périodiquement les grandes vallées d'érosion, y déposer des moraines et, en avant de leur région frontale, édifier un « cône de transition » passant, vers l'aval, à des terrasses de matériaux roulés. Il est important de faire remarquer que

1. C'est bien ce qu'on observe souvent dans les pays préalpins, par exemple dans le Bas-Dauphiné où l'on voit fréquemment des formations morainiques superposées à des cailloutis de terrasses plus anciennes et correspondant à une glaciation antérieure, sans qu'il y ait passage des uns aux autres; c'est ainsi, par exemple, que les alluvions (a) Rissiennes des environs de Lyon supportent fréquemment des dépôts glaciaires de la glaciation Würmienne (Champier, Saint-Jeande-Bournay, etc.). Il en est de même pour des terrasses et des moraines plus récentes entre Rives

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dans le cas d'un approfondissement périodique des vallées progressant de l'aval vers l'amont, la nécessité pour les cônes de transitions glaciaires de se raccorder (voir la fig. 45) avec les alluvions des nouveaux talwegs' est suffisante pour donner lieu à une série de terrasses étagées s'abaissant doucement vers l'aval (comme il s'en présente par exemple dans la vallée de l'Isère entre Grenoble et Romans), mais distinctes des terrasses de remblaiement du bassin inférieur du fleuve, ces dernières étant en rapport direct avec les oscillations du niveau de base et se raccordant entre elles vers l'amont.

Le creusement n'est pas forcément dû à la même cause que le remblaiement, le premier peut, dans beaucoup de cas, être motivé par une oscillation de la mer, alors que le second est produit par les apports glaciaires et fluvio-glaciaires. I importe d'ajouter encore que, si le creusement paraît imputable surtout aux oscillations du niveau de base, ainsi que cela a été constaté d'une façon précise par le général de Lamothe; il peut, dans certains cas, être causé par le déplacement rapide3 du point d'origine du cours d'eau, c'est-à-dire du front du glacier.

Ce que nous venons de dire a pour but de montrer combien est artificielle et provisoire toute théorie qui ne fait pas la part exacte de chacun de ces facteurs dans l'explication des phénomènes qui ont réglé la disposition des terrasses et des dépôts morainiques dans les grandes vallées descendant des Alpes vers les plaines maritimes.

W. KILIAN,

Professeur de géologie à l'université de Grenoble.

1. Il est extrêmement frappant, par exemple, de voir aux environs de Bourg-Saint-Maurice (Savoie) une série de « banquettes morainiques» situées à diverses hauteurs (Vulmis-Bon-Conseil, la Thuille, les Chapelles), s'abaisser rapidement vers l'aval pour se raccorder tour à tour avec les alluvions anciennes d'une Isère interglaciaire qui a laissé ses dépôts près de Villette et du Ciex à 3) ou 40 mètres au-dessus du talweg actuel.

2. Theilfelder (Penck).

3. Ce processus se réalise, du reste, actuellement avec une remarquable activité entre la Romanche, près de la Grave, et les chalets de Chalvachère, au pied du glacier de la Meige, ou l'ancien talweg du glacier est entamé à quelques centaines de mètres en avant du front actuel de la glace, par la gorge que se creuse dans le granite le ruisseau issu de ce glacier, et dont la source le suit dans sa rapide retraite.

MOUVEMENT GÉOGRAPHIQUE

EUROPE

Si on a de

Effets d'un tremblement de terre dans la chaîne du Mont-Blanc. nombreuses observations sur les effets des tremblements de terre dans les régions basses ou de moyenne altitude, on n'en possède guère sur les actions que ces phénomènes exercent dans les hautes régions. Aussi bien, le récit publié dans La Montagne par M. Jean Lecarme, collaborateur de MM. Henri et Joseph Vallot, sur la secousse sismique qu'il a ressentie, le 13 août 1905, à l'altitude de 3321 mètres sur des aiguilles au nord du col du Tour (vallée de Chamonix), nous semble-t-il du plus haut intérêt.

A 10 h. 15 du matin, M. Lecarme avait mis en état son photo-tachéomètre sur le point culminant de l'aiguille formé « de deux lames de granite très étroites >>, lorsque un quart d'heure plus tard « un très fort craquement se fit entendre en même temps que l'aiguille tout entière se soulevait verticalement de 0 m. 10 environ et lentement ». « En même temps nous avons observé, ajoute M. Lecarme, un glissement très net des lames de granite sur lesquelles nous étions accrochés et qui ne se sont soulevées que l'une après l'autre. Puis, une forte oscillation vers l'ouest beaucoup plus brutale que le soulèvement vertical, donnant lieu à un déplacement d'air assez fort sur la paroi abrupte de l'aiguille du côté du glacier du Tour, nous fit perdre à tous l'équilibre. La durée totale de la secousse fut environ de 3 à 4 secondes, puis tout revint en place à tel point que l'appareil que nous avions maintenu solidement fixé au sol, dès le premier mouvement, ne fut pas sensibleblement déréglé. »

« Après un calme absolu de quelques secondes », ce fut de tous côtés un tonnerre d'avalanches. Secouées par le sisme, toutes les portions de crêtes qui n'étaient pas d'une solidité absolue venaient en bas. « D'énormes rochers, rapporte M. Lecarme, faisaient des bonds immenses sur les parois des aiguilles voisines du Tour, de la Grande Fourche et les avalanches de séracs et de neige couvraient entièrement la face visible du Chardonnet et de l'aiguille d'Argentière. »

Toute la journée ensuite sans répit le fracas d'éboulements résonna.

«Tout est bouleversé, constate M. Lecarme en regagnant son campement situé près de l'extrémité inférieure du glacier du Tour, de gros blocs nouvellement tombés

1. La Montagne, Revue mensuelle du Club alpin français, 2o année, n° 9, 20 sept. 1906, p. 421. Paris.

se rencontrent à chaque instant, ainsi que des sillons profonds dus au passage de rochers énormes. >>

Sur la moraine est du glacier du Tour les gros blocs de granite « qui reposent là depuis un temps immémorial » ont disparu. «Seule la place qu'ils occupaient reste profondément marquée, ainsi que la trace qu'ils ont produite dans leur course folle. » La moraine elle-même est fendue dans sa largeur par une étroite crevasse. Au delà le terrain avait été si profondément modifié que la caravane qui en avait une très grande pratique éprouva un instant d'hésitation sur la direction à suivre. Et toujours les avalanches roulaient, et cela plus de six heures après la secousse. Au passage d'un couloir, M. Lecarme et ses compagnons faillirent ètre assommés par une chute de blocs.

D'Argentière, où la caravane arriva le soir et où le sisme avait déterminé la chute d'une partie de la voûte de l'église, on avait également vu des avalanches partir des cimes en vue de l'aiguille Sans Nom et du Petit Dru.

Il est intéressant de rapprocher le récit très complèt de M. Lecarme d'une information recueillie par Charles Grad sur le tremblement de terre qui se produisit en 1855 dans les Alpes valaisanes. Notre regretté collègue signale, lui aussi, l'abondance des avalanches de pierres déterminées par la secousse, et cela même dans les vallées.

Ainsi du fait d'un tremblement de terre de faible intensité le glacier du Tour a reçu une masse importante de produits d'éboulement; en second lieu, des blocs, précédemment déposés par cet appareil, ont été transportés à une grande distance des gisements qu'ils occupaient primitivement, et, des masses considérables de gros éboulis sont arrivés dans des localités qui en étaient dépourvues ou se sont mélangés à des matériaux d'autre origine dont il sera difficile de les distinguer. De là deux conclusions : les partisans de l'érosion glaciaire ne pourront plus considérer les moraines du glacier du Tour comme représentant le cube de l'érosion produite par cet appareil; de plus, désormais il sera impossible de reconstituer les dimensions du glacier à une époque antérieure au moyen des blocs dits erratiques, par l'excellente raison que l'on ne pourra distinguer ceux d'origine fraîchement glaciaire des produits des éboulements déterminés par le sisme.

A l'erratique des avalanches et des éboulements ordinaires, à celui des débâcles glaciaires, au fluvio-glaciaire, bref à tous les produits de désagrégation des cimes qui se rencontrent dans les vallées montagneuses, il faut ajouter une nouvelle espèce d'erratique, l'erratique sismique, pourrait-on dire, et en raison de la fréquence des tremblements de terre dans les Alpes il est certainement abondant. De ce fait la distinction des formations d'origine véritablement glaciaire se trouve encore compliquée et devient de plus en plus incertaine dans la haute montagne, c'est-à-dire au-dessus de 2 000 mètres. CHARLES RABOT.

La destruction des loups en France'. Pendant la période quinquennale 1902-1903 il a été tué en France 512 loups, dont 306 louveteaux. Dans cette

1. Charles Grad, Observations sur les glaciers de la Viège et le massif de Monte-Rosa, en juillet et août 1866, in Annales des Voyages. Année 1868, 2° vol., p. 279.

2. Revue des Eaux et Forêts, XLV, no 14, 15 juillet 1906, p. 440.

statistique les départements qui arrivent en tête sont la Haute-Vienne avec un total de 100 loups et louveteaux, la Dordogne (80), la Charente (66), la Meuse (58). Pendant cette période les prises se répartissent ainsi par années :

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Comme terme de comparaison, signalons que de 1818 à 1829, soit en douze ans, il fut tué par les lieutenants de louveterie 18707 loups, soit une moyenne annuelle de 1 559. Et dans ce nombre ne sont pas compris tous les individus, sans doute nombreux, tués par les chasseurs ordinaires. De même dans le département des Vosges, de 1817 à 1842, il a été détruit, en moyenne, 64 loups par an, tandis que de 1901 à 1905 il n'en a été abattu en moyenne que 35.

Le loup est donc en voie d'extinction; dans un avenir rapproché on peut même prévoir sa disparition. CH. R.

La sécheresse dans le Jura en 19061. - Jamais, de mémoires d'homme, le haut Jura n'a été aussi complètement privé d'eau que pendant la sécheresse de l'été et de l'automne derniers. Cette sécheresse persistante de cinq mois, qui a tari les rivières du centre et de l'est de la France, avait été précédée par celles des étés 1904 et 1905, et après avoir rappelé celles de 1870 et de 1893, dont les vieux de la campagne avaient gardé le souvenir légendaire, elle en a dépassé les effets, puisque nos sources n'avaient pas connu depuis 1643 pareille détresse (on le sait par l'émergence de repères placés à cette date dans la Fontaine de Vaucluse). Les calcaires fissurés des hauts plateaux du Jura (ce qu'on appelait jadis la « moyenne montagne »), qui alimen tent les sources vauclusiennes situées en contre-bas (Loue, Lison, Cuisance, Dard), ont été d'autant plus éprouvés qu'ils n'ont d'autres sources que l'eau fournie par les courts chainons qui en accidentent la surface. De là la disposition des villages sur le pourtour de ces chainons, à proximité des points d'eau, et cette épithète de «< Fontaine Pierrefontaine, Passon fontaine, Combeaufontaine, qui rappelle que la question de l'eau est pour eux la première. Dès le milieu de l'été, les réservoirs d'eau des gares P.-L.-M., à Valdahon, sur la ligne Besançon le Locle, à Boujailles (Mouchard-Pontarlier) étaient à sec, et pour alimenter ce dernier, après avoir essayé de pomper à Pontarlier l'eau du Doubs, on dut aller chercher l'eau en bas, dans la plaine, à l'aide de wagons-citernes, d'abord dans la Loue, à Mouchard, puis dans le Doubs à Dôle, à 90 kilomètres de là, et 600 mètres plus bas!

C'est que le Doubs à Pontarlier tarissait à son tour! Malgré les lacs de Remoray et de Saint-Point qui lui servent de régulateurs, il était tombé, à la fin d'octobre, à un débit de 400 litres par seconde, étiage extrême qu'on ne lui avait jamais connu,

1. Voir sur les effets de la sécheresse dans d'autres régions: Charles Rabot, La Géographie, XIII, 5, 15 mai 1906, p. 370-374, et Albert Demangeon, ibid., XII, 2, 15 février 1906, p. 136-139.

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