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graphique alpin', de l'érosion régressive dont l'action a nécessairement débuté avant celle des glaciers, puis alterné plusieurs fois avec les phénomènes purement glaciaires, et de son extrême importance, et d'avoir indiqué le rôle que ce phénomène, périodiquement renforcé par les oscillations du niveau des mers, paraît avoir joué dans le « surcreusement » des vallées et dans la formation des systèmes fluvio-glaciaires si admirablement décrits par M. Penck et son école. Le modelé alpin actuel est constitué par les restes d'une série de topographies successives, les unes purement glaciaires, les autres d'origine torrentielle et fluviatile qui sont actuellement combinées par suite de l'interférence des deux sortes de phénomènes à diverses époques et dont il est parfois malaisé de faire exactement la part dans l'extrême complexité des formes que nous avons sous les yeux.

II

On a émis l'opinion que les divers stades d'approfondissement et de remblaiement des vallées, et les terrasses qui sont les témoins de ces stades, sont attribuables à des changements du niveau de base résultant des variations générales (eustatiques) du niveau des mers. Une école opposée explique ces stades, dans les vallées alpines, par des variations de la glaciation, en rapport avec les vicissitudes les plus importantes des glaciers, c'est-à-dire par des phénomènes d'amont, au lieu d'invoquer une cause agissant en aval.

Il serait désirable qu'on apportât des observations précises, qui permissent de discerner la part qu'ont eue, dans l'histoire des vallées alpines, ces deux ordres de phénomènes et de déterminer en particulier si les phases de creusement qui ont produit « l'emboîtement » des différents systèmes fluvio-glaciaires sont une conséquence directe du retrait des glaciers, ou si, malgré leur coïncidence apparente avec les phases interglaciaires alpines, elles sont déterminées par un changement du niveau des mers. Il serait également du plus grand intérêt de rechercher dans quelle mesure se maintient ou se modifie, dans les grandes vallées des Alpes et dans la portion extra-alpine des mèmes vallées, la différence de niveau (signalée par diverses observations dans les basses vallées) qui sépare entre elles les diverses terrasses, s'il n'y a pas, d'autre part, fusion, vers l'aval, de terrasses fluvio-glaciaires emboîtées vers l'amont, et, de l'autre, fusion vers l'amont de terrasses fluviatiles distinctes dans les basses vallées; si dans le profil en long de ces vallées, il n'y a pas à distinguer des paliers occasionnant des tronçons distincts dans chacun desquels le phénomène des terrasses (remblaiement) pourrait avoir des causes différentes,

1. D'après une communication de M. Charles Rabot, l'étude des vallées pyrénéennes, de la

ou si des terrasses des différentes sections se correspondent entre elles et sont attribuables à une cause unique.

Quelques réflexions nous paraissent s'imposer à cet égard

Il semble qu'on ait trop souvent perdu de vue que l'existence des << terrasses » de nos vallées a pour origine deux ordres de phénomènes distincts et que rien n'empêche de concevoir indépendants l'un de l'autre quant à leur cause, à savoir:

1o Des creusements ou approfondissements successifs du talweg.

2o Un remblaiement de ce talweg par des matériaux fluviatiles ou fluvioglaciaires.

Dans une même vallée fluviale, quelle que soit la cause qui produise ses approfondissements successifs, il peut en outre y avoir théoriquement deux sortes de terrasses :

1o Des terrasses de la partie aval, dues à un remblaiement provoqué par l'état stationnaire ou la surélévation progressive du niveau de base 1. Ces terrasses sont celles auxquelles M. de Lamothe a spécialement consacré son attention (vallées de Isser, du Rhône, du Rhin, et qui ont été décrites, dans le bassin du Danube, par MM. Schaffer, Sevastos, etc. Elles ont une tendance à se raccorder vers l'amont.

2o Des terrasses de la partie amont dues au remblaiement glaciaire (terrasses fluvio-glaciaires); ces dernières n'existent pas dans les vallées non alpines (Isser par exemple); elles peuvent avoir, en raison des oscillations du front glaciaire qui les alimente, des pentes plus ou moins fortes et se raccorder entre elles vers l'aval.

L'existence à l'époque pléistocène, d'une série de glaciations séparées par des phases interglaciaires a été mise en évidence par les travaux mémorables de MM. Penck, du Pasquier et Brückner; les détails des formations fluvioglaciaires qu'ont laissés ces épisodes dans les régions alpine, subalpine et préalpine ont été étudiés dans une œuvre vaste et monumentale (Die Alpen im Eiszeitalter) par laquelle MM. Penck et Brückner ont largement mérité la reconnaissance de tous ceux qu'intéresse l'histoire de la période pléistocène et la genèse des formes topographiques alpines. On peut néanmoins se demander si, dans cette admirable synthèse, le rôle des déplacements du niveau de base et des creusements purement fluviatiles n'a pas été trop complètement négligé. L'emboîtement des systèmes fluvio-glaciaires en contre-bas les uns des autres ne prouve pas, à notre avis, nécessairement que le creuse

1. Un exemple suggestif est fourni par la région du Royans (Isère) située en dehors du domaine de la grande extension glaciaire et dans laquelle (Saint-Jean-en-Royans, Sainte-Eulalie, etc.) on observe une série (3) de terrasses étagées qui n'ont pu être produites que par l'érosion régressive agissant par paroxysmes séparés par des phases de remblaiement. Dans la vallée du Doux, dans le Vivarais, il existe également, bien qu'aucune trace d'anciens glaciers n'y ait été signalée, des lambeaux de terrasses analogues; il en est de même pour d'autres vallées affluentes de la rive droite du Rhône, notamment aux environs du Teil, de Villeneuve-de-Berg et d'Aubenas.

ment des vallées a pour cause unique la régression des glaciers; cette conception trop absolue peut conduire à des résultats erronés qu'il importe d'éviter. Si l'on admet, en effet, que, concurremment avec le jeu des glaciations successives et sans liaison nécessaire avec elles, une cause agissant de l'aval vers l'amont, telle, par exemple, que les oscillations du niveau de base, récemment mis en évidence d'une façon si remarquable par les travaux de M. de Lamothe, déterminaït une série d'approfondissements successifs des vallées, on conçoit que la disposition des dépôts réalisée par cette double série de phénomènes soit exactement celle que nous observons et que M. Penck a si magistralement décrite aux abords de la chaîne alpine.

En effet, l'érosion régressive périodique agissant dans une région parcourue par les oscillations d'un front glaciaire, produit nécessairement, et lors même

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F.BORREMANS del.

FIG. 45. SCHÉMA MONTRANT LA DISPOSITION PRODUITE PAR L'INTERFERENCE DES RÉCURRENCES GLACIAIRES ET DE L'ÉROSION RÉGRESSIVE CAUSÉE PAR LES DÉPLACEMENTS DU NIVEAU DE BASE (B, B1). AB, Ancien talweg; AB', Talweg après le creusement provoqué par l'abaissement du niveau de base; T', Terrasses fluvio-glaciaires anciennes (hautes terrasses); Gl', Moraines anciennes; 7, Terrasses fluvio-glaciaires postérieures au creusement (basses terrasses); G, Moraines récentes (postérieures au creusement).

que les phases de creusement ne coïncident pas avec les maxima de recul ou d'avancée des glaciers, un emboîtement des moraines et des terrasses qui en dérivent, dans les talwegs successifs créés par cette érosion. Les moraines frontales les plus récentes occuperont le fond des talwegs les plus profonds, et les plus anciennes seront localisées en contre-haut de ces dernières; néanmoins, dans les parties amont, rien ne s'opposera à ce que des moraines récentes soient venues se superposer indifféremment à des systèmes fluvioglaciaires de divers âges (voir la fig. 45).

1

Au cours des glaciations successives les glaciers ont pu envahir périodiquement les grandes vallées d'érosion, y déposer des moraines et, en avant de leur région frontale, édifier un « cône de transition » passant, vers l'aval, à des terrasses de matériaux roulés. Il est important de faire remarquer que

1. C'est bien ce qu'on observe souvent dans les pays préalpins, par exemple dans le Bas-Dauphiné où l'on voit fréquemment des formations morainiques superposées à des cailloutis de terrasses plus anciennes et correspondant à une glaciation antérieure, sans qu'il y ait passage des uns aux autres; c'est ainsi, par exemple, que les alluvions (a) Rissiennes des environs de Lyon supportent fréquemment des dépôts glaciaires de la glaciation Würmienne (Champier, Saint-Jeande-Bournay, etc.). Il en est de même pour des terrasses et des moraines plus récentes entre Rives

2

dans le cas d'un approfondissement périodique des vallées progressant de l'aval vers l'amont, la nécessité pour les cônes de transitions glaciaires de se raccorder (voir la fig. 45) avec les alluvions des nouveaux talwegs' est suffisante pour donner lieu à une série de terrasses étagées s'abaissant doucement vers l'aval (comme il s'en présente par exemple dans la vallée de l'Isère entre Grenoble et Romans), mais distinctes des terrasses de remblaiement du bassin inférieur du fleuve, ces dernières étant en rapport direct avec les oscillations du niveau de base et se raccordant entre elles vers l'amont.

Le creusement n'est pas forcément dû à la même cause que le remblaiement, le premier peut, dans beaucoup de cas, être motivé par une oscillation de la mer, alors que le second est produit par les apports glaciaires et fluvio-glaciaires. I importe d'ajouter encore que, si le creusement paraît imputable surtout aux oscillations du niveau de base, ainsi que cela a été constaté d'une façon précise par le général de Lamothe; il peut, dans certains cas, être causé par le déplacement rapide3 du point d'origine du cours d'eau, c'est-à-dire du front du glacier.

Ce que nous venons de dire a pour but de montrer combien est artificielle et provisoire toute théorie qui ne fait pas la part exacte de chacun de ces facteurs dans l'explication des phénomènes qui ont réglé la disposition des terrasses et des dépôts morainiques dans les grandes vallées descendant des Alpes vers les plaines maritimes.

W. KILIAN,

Professeur de géologie à l'université de Grenoble.

1. Il est extrêmement frappant, par exemple, de voir aux environs de Bourg-Saint-Maurice (Savoie) une série de « banquettes morainiques» situées à diverses hauteurs (Vulmis-Bon-Conseil, la Thuille, les Chapelles), s'abaisser rapidement vers l'aval pour se raccorder tour à tour avec les alluvions anciennes d'une Isère interglaciaire qui a laissé ses dépôts près de Villette et du Ciex à 3) ou 40 mètres au-dessus du talweg actuel.

2. Theilfelder (Penck).

3. Ce processus se réalise, du reste, actuellement avec une remarquable activité entre la Romanche, près de la Grave, et les chalets de Chalvachère, au pied du glacier de la Meige, ou l'ancien talweg du glacier est entamé à quelques centaines de mètres en avant du front actuel de la glace, par la gorge que se creuse dans le granite le ruisseau issu de ce glacier, et dont la source le suit dans sa rapide retraite.

MOUVEMENT GÉOGRAPHIQUE

EUROPE

Si on a de

Effets d'un tremblement de terre dans la chaîne du Mont-Blanc. nombreuses observations sur les effets des tremblements de terre dans les régions basses ou de moyenne altitude, on n'en possède guère sur les actions que ces phénomènes exercent dans les hautes régions. Aussi bien, le récit publié dans La Montagne par M. Jean Lecarme, collaborateur de MM. Henri et Joseph Vallot, sur la secousse sismique qu'il a ressentie, le 13 août 1905, à l'altitude de 3321 mètres sur des aiguilles au nord du col du Tour (vallée de Chamonix), nous semble-t-il du plus haut intérêt.

A 10 h. 15 du matin, M. Lecarme avait mis en état son photo-tachéomètre sur le point culminant de l'aiguille formé « de deux lames de granite très étroites >>, lorsque un quart d'heure plus tard « un très fort craquement se fit entendre en même temps que l'aiguille tout entière se soulevait verticalement de 0 m. 10 environ et lentement ». « En même temps nous avons observé, ajoute M. Lecarme, un glissement très net des lames de granite sur lesquelles nous étions accrochés et qui ne se sont soulevées que l'une après l'autre. Puis, une forte oscillation vers l'ouest beaucoup plus brutale que le soulèvement vertical, donnant lieu à un déplacement d'air assez fort sur la paroi abrupte de l'aiguille du côté du glacier du Tour, nous fit perdre à tous l'équilibre. La durée totale de la secousse fut environ de 3 à 4 secondes, puis tout revint en place à tel point que l'appareil que nous avions maintenu solidement fixé au sol, dès le premier mouvement, ne fut pas sensibleblement déréglé. »

« Après un calme absolu de quelques secondes », ce fut de tous côtés un tonnerre d'avalanches. Secouées par le sisme, toutes les portions de crêtes qui n'étaient pas d'une solidité absolue venaient en bas. « D'énormes rochers, rapporte M. Lecarme, faisaient des bonds immenses sur les parois des aiguilles voisines du Tour, de la Grande Fourche et les avalanches de séracs et de neige couvraient entièrement la face visible du Chardonnet et de l'aiguille d'Argentière. »

Toute la journée ensuite sans répit le fracas d'éboulements résonna.

«Tout est bouleversé, constate M. Lecarme en regagnant son campement situé près de l'extrémité inférieure du glacier du Tour, de gros blocs nouvellement tombés

1. La Montagne, Revue mensuelle du Club alpin français, 2o année, n° 9, 20 sept. 1906, p. 421. Paris.

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