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riante province du Ferghana, puis à Och, d'où il se lança dans la région des hautes montagnes du Pamir.

La petite ville d'Och est le point d'organisation et de départ des caravanes, qui, allant à Kachgar et en revenant, relient le Turkestan russe et le Turkestan chinois. C'est de là aussi que part la route du Pamir (si l'on peut appeler route une piste souvent à peine muletière), qu'emprunta d'abord notre voyageur.

En quittant Och, on doit voyager en caravane : les hommes à cheval, le campement et les bagages portés par des chevaux de bât; c'est dans cet équipage que le commandant de Lacoste se mit en route le 27 juin.

Franchissant les cols du Taldik (3 530 m.), du Kizil Art (4 150 m.) et de l'Ak Baïtal (4 590 m.), visitant les grands lacs du Kara-Koul et du Rang-Koul, perchés à 3 800 mètres d'altitude, il arrivait le 18 juillet au Pamirski-Post, ce poste frontière perdu dans la montagne (alt. 3 650 m.), où il recevait des officiers russes un excellent accueil.

De là, il remontait la grande vallée de l'Ak-Sou, franchissait au col du Béïk (4 800 m.) la frontière russo-chinoise, et redescendait dans la vallée du Sarikol ou Tagdumbach, pour remonter au col de l'Illi-Sou, qui devait le conduire au grand fleuve Raskem-Daria ; son intention était d'aller, le long de ce fleuve, rejoindre, à 250 kilomètres plus à l'est, vers Ak Tag, la route conduisant de Yarkend aux Indes par la passe du Karakorum.

Mais, si tels étaient ses projets, autre chose fut leur réalisation; il fallut compter avec les difficultés et les obstacles: la vallée du Raskem est impraticable avant la fin de septembre, car tous les affluents du fleuve et le fleuve lui-même, fortement grossis par la fonte des neiges, sont infranchissables par les caravanes. Ces difficultés matérielles se traduisirent, dès l'arrivée au pied de l'Illi-Sou, par des instances pressantes et réitérées du mandarin chinois de Tach-Kourgan, pour amener le commandant de Lacoste à modifier son itinéraire, et, chose plus grave et difficulté insurmontable, par le refus formel des caravaniers d'aller plus avant dans cette direction.

Abandonnant donc forcément son itinéraire projeté, la petite caravane redescendait la vallée du Sarikol jusqu'à la ville chinoise de Tach-Kourgan, cité minuscule, mais véritable poste frontière international, quoiqu'en terre chinoise, puisque les Anglais y ont un agent politique hindou, et les Russes un poste de Cosaques.

Enfin, par une marche de neuf jours, dans la grande montagne, par des passages souvent difficiles et des cols, dont quelques-uns atteignent encore plus de 4000 mètres d'altitude, elle redescendait sur le haut plateau du Turkestan chinois, et arrivait le 7 août dans la grande ville de Yarkend.

Ce long itinéraire se déroule dans un chaos de montagnes arides et désolées, où l'on ne rencontre pas un arbre, et où souvent même on n'arrive pas à découvrir le peu d'herbe rare et maigre, qui est la nourriture habituelle des chevaux de la caravane.

Les grandes et larges vallées, où parfois coulent de belles rivières comme l'Ak-Sou ou le Sarikol, d'autres fois complètement desséchées, sont à une altitude variant de 3 000 à 4 000 mètres; les massifs montagneux qui les séparent, et qui présentent parfois de magnifiques panoramas de sommets neigeux et de glaciers, atteignent par endroits près de 8 000 mètres d'altitude; ils sont franchissables par des cols de 4 000 à 4 800 mètres, souvent d'un assez difficile accès.

Quant à la population, elle est des plus clairsemées; à peine rencontre-t-on çà et là, dans les parties un peu moins arides, quelques campements de Kirghises, menant une existence des plus nomades, et vivant à peu près exclusivement de leurs troupeaux. Ils fournissent pour toute ressource au voyageur, des moutons, un peu de laitage, et un abri pour la nuit dans une de leurs yourtes, qu'ils lui cèdent assez volontiers.

A Yarkend, le commandant de Lacoste a dù organiser une nouvelle caravane pour se diriger vers les Indes par la passe du Karakorum.

Nous avons appris, par une communication télégraphique, qu'il était arrivé à Leh le 21 septembre, mais nous n'avons encore aucun détail sur cette nouvelle partie de son voyage.

Le 13 octobre, M. de Lacoste nous expédiait de Srinagar le télégramme suivant : « Parfaitement arrivé Srinagar; continue sur Quetta. » Son programme s'accomplit donc conformément à ses prévisions dans des contrées qui ne sont pas moins intéressantes au point de vue géographique qu'au point de vue politique.

NÉCROLOGIE

Himly (Louis-Auguste), membre de l'Académie des Sciences morales et politiques, doven honoraire de la faculté des lettres de l'université de Paris, ancien président de la Société de Géographie, grand-officier de la Légion d'honneur, est mort à Sèvres le 6 octobre, dans sa quatre-vingt-quatrième année. Au cimetière Montparnasse plusieurs discours ont été prononcés, notamment par M. Gebhart au nom de l'Institut et par M. Alfred Croiset au nom de la faculté des lettres. Né à Strasbourg, le 28 mars 1823, Auguste Himly y fit ses classes et de bonne heure étudia dans les universités allemandes. En 1846 nous le trouvons à l'École des Chartes, dont il sortit en 1849 avec le diplôme d'archiviste-paléographe. Entre temps «< il avait fort allègrement marché contre les insurgés pendant la révolution de 1848 ». Docteur ès lettres et agrégé de l'Université, il fut, de 1846 à 1862, professeur d'histoire et de géographie au collège Rollin. Sa carrière l'orienta vers la géographie historique, qu'il enseigna à la Sorbonne pendant une cinquantaine d'années. Son œuvre capitale, l'Histoire de la formation territoriale des États de [Europe centrale, lui ouvrit en 1876 les portes de l'Institut. Longtemps doyen de la faculté des lettres, il y apporta, avec le dévouement au devoir et un large savoir, cette bonhomie fine, piquante et bienveillante à la fois qui l'ont rendu si populaire parmi les étudiants. Ami de la jeunesse et s'y consacrant, il eut, dans son décanat à accomplir des réformes qui ont préparé la création des universités. « Lui qui avait enseigné pendant vingt ans dans des conditions si différentes, dit M. Croiset, n'en fut ni surpris, ni embarrassé. Il s'adapta aux changements avec une souplesse et une bonne humeur qui prouvaient la vigueur toujours jeune de son intelligence. Son esprit d'ordre, sa connaissance impeccable de l'ensemble et des détails de ce vaste organisme, son bon sens lucide et précis suffisaient à tout. »

Il était doyen quand M. Marcel Dubois institua à la Sorbonne la « Section de Géographie » et le don que nous fimes d'une collection d'ouvrages à l'institution naissante fut pour M. Himly l'occasion de faire ressortir les titres que notre société s'était acquis à la reconnaissance de la jeunesse laborieuse. Très attaché, d'ailleurs à la Société de Géographie, à laquelle il appartenait depuis 1839 et qu'il présida en 1894, il s'intéressa activement à ses progrès.

Ceux qui ont entendu les allocutions, si remplies d'humour et de finesse, par lesquelles ce patriote éclairé et profondément attaché à sa chère Alsace, ouvrait nos séances en garderont le souvenir. Son intimité était charmante; sa haute valeur morale imposait le respect comme sa bonté attirait l'affection.

Carpinetty, capitaine de l'artillerie coloniale, chevalier de la Légion d'honneur, professeur à l'Ecole de l'artillerie et du génie, a succombé en juillet dernier des suites d'une chute de cheval. Né à Draguignan en novembre 1870, il fit des études au lycée de Nice, puis à celui de Marseille, s'engagea au 141° d'infanterie à la fin de 1891 et fut reçu en 1893 à l'École polytechnique. Sous-lieutenant d'artillerie de marine en 1895, il partit en 1898 pour le Tonkin. Pendant quatorze mois il commanda une section détachee à Lao-Kay. Capitaine le 1er septembre 1900, il revint à Brest, qu'il quitta presque aussitôt sur sa demande pour se rendre en Cochinchine; mais rapatrié en 1901 pour

riante province du Ferghana, puis à Och, d'où il se lança dans la région des hautes montagnes du Pamir.

La petite ville d'Och est le point d'organisation et de départ des caravanes, qui, allant à Kachgar et en revenant, relient le Turkestan russe et le Turkestan chinois. C'est de là aussi que part la route du Pamir (si l'on peut appeler route une piste souvent à peine muletière), qu'emprunta d'abord notre voyageur.

En quittant Och, on doit voyager en caravane : les hommes à cheval, le campement et les bagages portés par des chevaux de bât; c'est dans cet équipage que le commandant de Lacoste se mit en route le 27 juin.

Franchissant les cols du Taldik (3 530 m.), du Kizil Art (4 150 m.) et de l'Ak Baïtal (4 590 m.), visitant les grands lacs du Kara-Koul et du Rang-Koul, perchés à 3 800 mètres d'altitude, il arrivait le 18 juillet au Pamirski-Post, ce poste frontière perdu dans la montagne (alt. 3 650 m.), où il recevait des officiers russes un excellent accueil.

De là, il remontait la grande vallée de l'Ak-Sou, franchissait au col du Béïk (4 800 m.) la frontière russo-chinoise, et redescendait dans la vallée du Sarikol ou Tagdumbach, pour remonter au col de l'Illi-Sou, qui devait le conduire au grand fleuve Raskem-Daria ; son intention était d'aller, le long de ce fleuve, rejoindre, à 250 kilomètres plus à l'est, vers Ak Tag, la route conduisant de Yarkend aux Indes par la passe du Karakorum.

Mais, si tels étaient ses projets, autre chose fut leur réalisation; il fallut compter avec les difficultés et les obstacles: la vallée du Raskem est impraticable avant la fin de septembre, car tous les affluents du fleuve et le fleuve lui-même, fortement grossis par la fonte des neiges, sont infranchissables par les caravanes. Ces difficultés matérielles se traduisirent, dès l'arrivée au pied de l'Illi-Sou, par des instances pressantes et réitérées du mandarin chinois de Tach-Kourgan, pour amener le commandant de Lacoste à modifier son itinéraire, et, chose plus grave et difficulté insurmontable, par le refus formel des caravaniers d'aller plus avant dans cette direction.

Abandonnant donc forcément son itinéraire projeté, la petite caravane redescendait la vallée du Sarikol jusqu'à la ville chinoise de Tach-Kourgan, cité minuscule, mais véritable poste frontière international, quoiqu'en terre chinoise, puisque les Anglais y ont un agent politique hindou, et les Russes un poste de Cosaques.

Enfin, par une marche de neuf jours, dans la grande montagne, par des passages souvent difficiles et des cols, dont quelques-uns atteignent encore plus de 4000 mètres d'altitude, elle redescendait sur le haut plateau du Turkestan chinois, et arrivait le 7 août dans la grande ville de Yarkend.

Ce long itinéraire se déroule dans un chaos de montagnes arides et désolées, où l'on ne rencontre pas un arbre, et où souvent même on n'arrive pas à découvrir le peu d'herbe rare et maigre, qui est la nourriture habituelle des chevaux de la caravane.

Les grandes et larges vallées, où parfois coulent de belles rivières comme l'Ak-Sou ou le Sarikol, d'autres fois complètement desséchées, sont à une altitude variant de 3 000 à 4 000 mètres; les massifs montagneux qui les séparent, et qui présentent parfois de magnifiques panoramas de sommets neigeux et de glaciers, atteignent par endroits près de 8 000 mètres d'altitude; ils sont franchissables par des cols de 4 000 à 4 800 mètres, souvent d'un assez difficile accès.

Quant à la population, elle est des plus clairsemées; à peine rencontre-t-on çà et là, dans les parties un peu moins arides, quelques campements de Kirghises, menant une existence des plus nomades, et vivant à peu près exclusivement de leurs troupeaux. Ils fournissent pour toute ressource au voyageur, des moutons, un peu de laitage, et un abri pour la nuit dans une de leurs yourtes, qu'ils lui cèdent assez volontiers.

A Yarkend, le commandant de Lacoste a dû organiser une nouvelle caravane pour se diriger vers les Indes par la passe du Karakorum.

Nous avons appris, par une communication télégraphique, qu'il était arrivé à Leh le 21 septembre, mais nous n'avons encore aucun détail sur cette nouvelle partie de son voyage.

Le 13 octobre, M. de Lacoste nous expédiait de Srinagar le télégramme suivant : «< Parfaitement arrivé Srinagar; continue sur Quetta. » Son programme s'accomplit donc conformément à ses prévisions dans des contrées qui ne sont pas moins intéressantes au point de vue géographique qu'au point de vue politique.

NÉCROLOGIE

Himly (Louis-Auguste), membre de l'Académie des Sciences morales et politiques, doyen honoraire de la faculté des lettres de l'université de Paris, ancien président de la Société de Géographie, grand-officier de la Légion d'honneur, est mort à Sèvres le 6 octobre, dans sa quatre-vingt-quatrième année. Au cimetière Montparnasse plusieurs discours ont été prononcés, notamment par M. Gebhart au nom de l'Institut et par M. Alfred Croiset au nom de la faculté des lettres. Né à Strasbourg, le 28 mars 1823, Auguste Himly y fit ses classes et de bonne heure étudia dans les universités allemandes. En 1846 nous le trouvons à l'École des Chartes, dont il sortit en 1849 avec le diplôme d'archiviste-paléographe. Entre temps «< il avait fort allègrement marché contre les insurgés pendant la révolution de 1848 ». Docteur ès lettres et agrégé de l'Université, il fut, de 1846 à 1862, professeur d'histoire et de géographie au collège Rollin. Sa carrière l'orienta vers la géographie historique, qu'il enseigna à la Sorbonne pendant une cinquantaine d'années. Son œuvre capitale, l'Histoire de la formation territoriale des États de l'Europe centrale, lui ouvrit en 1876 les portes de l'Institut. Longtemps doyen de la faculté des lettres, il y apporta, avec le dévouement au devoir et un large savoir, cette bonhomie fine, piquante et bienveillante à la fois qui l'ont rendu si populaire parmi les étudiants. Ami de la jeunesse et s'y consacrant, il eut, dans son décanat à accomplir des réformes qui ont préparé la création des universités. « Lui qui avait enseigné pendant vingt ans dans des conditions si différentes, dit M. Croiset, n'en fut ni surpris, ni embarrassé. Il s'adapta aux changements avec une souplesse et une bonne humeur qui prouvaient la vigueur toujours jeune de son intelligence. Son esprit d'ordre, sa connaissance impeccable de l'ensemble et des détails de ce vaste organisme, son bon sens lucide et précis suffisaient à tout. »

Il était doyen quand M. Marcel Dubois institua à la Sorbonne la « Section de Géographie » et le don que nous fimes d'une collection d'ouvrages à l'institution naissante fut pour M. Himly l'occasion de faire ressortir les titres que notre société s'était acquis à la reconnaissance de la jeunesse laborieuse. Très attaché, d'ailleurs à la Société de Géographie, à laquelle il appartenait depuis 1859 et qu'il présida en 1894, il s'intéressa activement à ses progrès.

Ceux qui ont entendu les allocutions, si remplies d'humour et de finesse, par lesquelles ce patriote éclairé et profondément attaché à sa chère Alsace, ouvrait nos séances en garderont le souvenir. Son intimité était charmante; sa haute valeur morale imposait le respect comme sa bonté attirait l'affection.

Carpinetty, capitaine de l'artillerie coloniale, chevalier de la Légion d'honneur, professeur à l'École de l'artillerie et du génie, a succombé en juillet dernier des suites d'une chute de cheval. Né à Draguignan en novembre 1870, il fit des études au lycée de Nice, puis à celui de Marseille, s'engagea au 141° d'infanterie à la fin de 1891 et fut reçu en 1893 à l'École polytechnique. Sous-lieutenant d'artillerie de marine en 1895, il partit en 1898 pour le Tonkin. Pendant quatorze mois il commanda une section détachée à Lao-Kay. Capitaine le 1er septembre 1900, il revint à Brest, qu'il quitta presque aussitôt sur sa demande pour se rendre en Cochinchine; mais rapatrié en 1901 pour

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