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j'ose espérer une récompense plus positive pour le remarquable exemple de sang-froid et d'énergie que donnèrent les trois sous-officiers européens, les sergents Ribbe, Dufour et Mille1.

Les résultats principaux de cette longue randonnée pacifique sont : la reconnaissance des régions inconnues de Taodéni et la jonction des troupes algériennes et soudanaises, jonction symétrique de celle qui avait eu lieu beaucoup plus à l'est, en 1904, entre le commandant Lapérrine et le capitaine Théveniaut au nord de l'Adrar nigritien.

Depuis plusieurs années déjà les pillages annuels des Doui-Ménia et des Ouled-Djerir contre les tribus bérabiches soumises avaient attiré l'attention du gouvernement de l'Afrique Occidentale. Mais les moyens manquaient pour protéger les azalaïs jusqu'à Taodéni, et les pillards, forts de l'impunité, affirmaient que jamais les Français ne pourraient atteindre ce centre. Ils le considéraient donc comme une sorte de terrain neutre où toutes les attaques leur étaient permises.

Or, non seulement les Français venaient d'atteindre Taodéni de deux côtés à la fois; mais ils l'avaient fait avec des forces suffisantes pour résister à n'importe quel rezzou. Ainsi ils affermissaient la soumission des Bérabiches et des Kountas, en leur montrant que les méharistes pouvaient, jusque dans cette région, protéger leurs caravanes et leurs transactions et qu'ils étaient prêts à y faire une police effective vis-à-vis des pillards du nord.

La reconnaissance, d'autre part, avait parcuru près de 2000 kilomètres. J'avais été chargé de lever l'itinéraire; malheureusement le départ imprévu ne m'avait pas permis de me munir des instruments nécessaires. Tout l'itinéraire dut être levé avec une simple boussole à alidade et les marches de nuit constantes ont rendu le levé incertain. Cependant, par suite peut-être de compensations fortuites, l'erreur de fermeture du grand polygone Araouan-TaodéniInichaïg-Bou-Djebeha ne dépassa pas 40 kilomètres. Un baromètre anéroïde fournit enfin quelques indications que l'absence de baromètre à mercure à Tombouctou ne permit pas de vérifier. Cependant les constatations suivantes purent être faites. La position de Taodéni, indiquée par Lenz semble trop méridionale; d'après les observations du colonel Lapérrine, Taodéni est situé par 22° 40′19′′ de Lat. N. . — Sur la carte de l'explorateur autrichien le puits d'Ounan, est beaucoup trop rapproché d'Araouan.

1. Les sergents Ribbe, Dufour, Mille, ce dernier à titre commémoratif, ont été proposés pour la médaille militaire.

2. Les observations de la colonne Lapérrine qui furent effectuées par le lieutenant Niéger avec un très grand soin, ont été soumises à l'examen de M. Trépied, directeur de l'observatoire d'Alger. M. Trépied a bien voulu nous communiquer la latitude de Taodéni corrigée et nous tenons à le remercier de son obligeance, ainsi que M. le lieutenant Niéger, auteur de la détermination de ce point important. (Note de la Rédaction.)

Entre Taodéni et Tombouctou trois zones doivent être distinguées dans le désert. D'abord la dépression de Taodéni, puis la zone comprise entre le Lernachich au nord et la ligne Araouan-Guir-El Mraheti au sud, zone de sables où les dunes, sans cesse modifiées par les vents, ont leur pente abrupte vers le sud; enfin, la région de l'Azaouad, entre cette même ligne Araouan-GuirEl Mraheti au nord, et le Niger au sud, zone de sables fixés par la végétation où les dunes arrondies ont leurs pentes abruptes vers le nord.

Il s'ensuit que la direction dominante des vents dans l'Azaouad est sudnord, et, que dans la zone intermédiaire leur direction est nord-sud. Ne faudrait-il pas voir là l'effet d'un centre de dépression barométrique que nous n'avons pas été à même de constater pendant notre voyage, mais qui existerait au moment de l'hivernage et des grands vents dans la région Araouan Bou-Djebeha? Là, l'air s'élevant vers les hautes régions de l'atmosphère créerait un appel du nord et du sud; mais, tandis que du désert septentrional ne viendraient que des vents secs, impropres à l'extension de la végétation, l'afflux du sud serait formé par des vents qui se seraient chargés d'humidité dans la boucle du Niger et qui seraient ainsi la cause de la végétation progressante de l'Azaouad.

L'avenir économique des régions que nous avons parcourues est des plus problématiques. Les cultures y sont impossibles et le sel de Taodéni même souffre à Tombouctou de la concurrence du sel de France.

Ces pays sont, cependant, utiles à connaître dans le désert, pour n'être point tracées, les routes jalonnées par les puits, n'en sont que plus fixes. En occupant temporairement certains points d'eau, un très petit effectif peut barrer le chemin aux rezzous du nord, et quelques postes préparés et prévus au nord de l'Azaouad peuvent y empêcher tout pillage ou toute razzia.

Dans ce but il serait important de dresser une carte assez précise de la région pour que les puits puissent y être retrouvés sans guide. Il ne faut point songer à des repères visibles de très loin; il serait à désirer seulement que tous les puits soient repérés astronomiquement. Une carte ainsi faite rendrait d'importants services aux détachements de méharistes chargés de la police du pays et serait un important et utile complément aux travaux déjà si avancés du colonel Lapérrine et de M. Villatte.

Lieutenant CORTIER.

Note sur un fragment de manuscrit arabe

copié à Araouan par le lieutenent Cortier

Pendant son séjour à Arouâne, le lieutenant Cortier a fait copier un passage d'un manuscrit arabe que lui avait montré le chef de ce village, le grand marabout Araouta.

C'est un prétendu fragment historique sur la conquête du Sahara par Okba ben Nafi (au 1° siècle de l'hégire) le fondateur de la Mosquée de Kaïrowân, etc. Le conquérant, poussant sa marche au sud jusqu'à l'Adrâr, aurait bàti une ville nommée Souk aujourd'hui ruinée et sur l'emplacement de laquelle s'élève la ville (?) actuelle de Arawân. Il y aurait laissé une colonie de pieux musulmans dont plusieurs avaient pris part aux expéditions militaires du prophète et qui seraient les ancêtres des habitants actuels. Tout cela est de pure fantaisie, jamais le chef arabe n'a pénétré aussi loin dans le Sahara, et il ne faut voir dans ce fragment apocryphe qu'une de ces tentatives fréquentes au Soudan, de rattacher les populations musulmanes qui l'habitent aux plus anciens souvenirs de la conquête arabe. C'est ainsi qu'au Wadaï on a fabriqué des chroniques du même genre pour démontrer une filiation directe avec les Omeyyades de Syrie, aux deux premiers siècles de l'hégire.

La pièce en question n'offre pas d'autre intérêt que celui-là. Elle est d'ailleurs mal rédigée et déparée par de nombreuses fautes d'orthographe. Elle est pourtant écrite par un indigène, contrairement à ce que dit la suscription du verso.

A. BARBIER DE MEYNARD.

Membre de l'Institut.

Les Philippines sous la

domination des
des Etats-Unis '

Par l'une des clauses du traité de Paris (janvier 1899) l'Espagne dut céder l'archipel des Philippines aux États-Unis. Mais les Américains se virent contraints de reconquérir pour ainsi dire à nouveau ces iles, agitées depuis de longues années déjà par un mouvement séparatiste persistant. Ayant débuté en 1872 par l'insurrection de Cavite, entretenue ensuite par le parti autonomiste dont le littérateur et savant Jose Rizal fut l'âme, cette agitation aboutit à une véritable révolution qui, depuis 1896 jusqu'à la destruction de la flotte espagnole par les Américains en 1898, a gagné une grande partie de la colonie.

Le passage des Philippines sous la domination des États-Unis ne fit pas cesser ce mouvement insurrectionnel. Son chef, Aguinaldo, rêvait l'expulsion

1. Census of the Philippine Islands, taken und. the Direction of the Philippine Commission in the year 1903. Director, Gen. J. P. Sanger; Assist. directors, H. Gannett [and]. V. H. Olmsted. Compil. a. published by the U. S. Bureau of the Census, Washington, 1905, 4 vol., 24 cm. av., nombr. pl. et cartes. T. I, Geography, History, and Population, 619 p.; t. II, Population, 1048 p.; t. III, Mortality, Defective classes, Education, Families, and Dwellings, 840 p.; t. IV, Agriculture, Social and Industrial statistics, 637 p. [chaque vol. est muni d'un index]. Fifth Annual Report of the Philippine Commission, 1904. Bureau of Insular Affaires, War Department. Washington (Governm. print. Office), 1905, 3 vol., 23,5 cm.; av., nombr. pl. - T. (Part) 1, Rapports de la commission, du gouverneur général, des gouverneurs des provinces, 884 p.; t. II, Rapport du secrétaire du dép. de l'Intérieur. Rapport du gouverneur de la prov. des Mores, 746 p.; t. III, Rapport des secrétaires des dép. du Commerce et Police et des Finances et Justice, Rapport du secrétaire du dép. de l'Instruction Publique. Rapport du chef de bureau des Affaires insulaires. Index pour les 3 volumes), 1 080 p. Ethnological Survey Publications (Depart. of Interior): vol. I, A. E. Jenks, The Bontoc Igorot, Manila (Bur. of publ. print.), 1905, 266 p., av. 155 pl. ou cartes et 9 fig.; 26 cm.: vol. II, part I, W. A. Reed, Negritos of Zambales, Manila (Bur. of publ. print.), 1904, 90 p., av. 62 pl. ou cartes et 2 fig.; 26 cm.; vol. IV, part I, Najeeb M. Saleeby, Studies in Moro History, Law, and Religion, Manila, 1905, 108 p., av. nombr. pl.; 26 cm. A. E. Jenks, Bontoc Igorot Clothing, in American Anthropologist, n. s., t. IV, no 5, p. 695 (oct.-dec. 1904), Washington. - Census of the Philippine islands, 1903; Bulletin 1; Population of the Philippines [Manilla] (Bur. of the Census), 1904, 100 p., 23 cm. H. Gannett, The Philippine Islands and their People, in The National Geographic Magazine, t. XV, no 3 (mars 1904), p. 90. Col. Clarence R. Edwards, Governing the Philippines Islands, in Ibid., n° 7 (juillet 1904), p. 273. A Revelation of the Philipinos (sic!) (résumé, assez incomplet, du Census), in The Nation. Geogr. Magazine, t. XVI, no 4 (avril 1905), p. 139, av. pl. Hon. William H. Taft, The Philippines, in Ibid., no 8 (août 1905), p. 362, av. 1 grande carte. - Diplomatic and Consular Reports, no 3512, Ann. ser. United States. Trade of the Philippine Islands for the year 1904. [London]. Foreign Office, october 1905, 53 p. avec carte. Ibid. for the year 1905, n° 3731, [Londres], Foreign Office, nov. 1906, 30 p.

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2. On peut dire que la publication Noli me tangere et de El Flibusterismo par ce romancier de race tagale fut le signal de la révolution de 1888.,

des Américains et l'établissement d'une république indépendante. Aussi les nouveaux occupants eurent-ils à soutenir contre lui une véritable guerre, avant de pouvoir installer, en 1901, un gouvernement civil qui réorganisa ces îles. En décembre de la même année, les indigènes instituèrent un « fédéral », en vue de coopérer, de concert avec la « Commission civile » américaine, que présidait M. W. H. Taft, à l'apaisement des esprit et au rétablissement de l'ordre social.

parti

A part les îles de Mindanao et de Jolo ou Soulou, qui n'ont jamais été entièrement soumises à l'Espagne et dans lesquelles l'insurrection des « Moros » musulmans a duré jusqu'à ces dernières années, on peut dire qu'à partir de l'année 1902 les îles Philippines sont entrées dans une phase de développement régulier et progressif.

Il n'est pas inutile d'indiquer brièvement quelle fut la première organisation établie par les États-Unis aux îles Philippines. La loi organique approuvée par le Congrès, à Washington, le 1er juillet 1902, leur accorde un régime d'autonomie qui, dans son esprit, était susceptible d'être peu à peu développé. Le pouvoir législatif est confié à un corps dénommé la « Commission des Philippines », et composé de huit membres, dont cinq Américains et trois Philippins; ce corps est aussi chargé de la surveillance générale du gouvernement des îles. Le gouverneur civil, chef du pouvoir exécutif, est président de droit de cette commission. Il est assisté par un vice-gouverneur et par les directeurs des quatre départements Intérieur, Commerce et Police, Finances et Justice, Instruction Publique. Ces directeurs, sortes de ministres, font, .de droit, partie de la commission. La loi du 1er juillet 1902 accorde aux Philippins les mêmes droits qu'aux citoyens américains, sauf qu'ils ne peuvent porter les armes et qu'ils ne bénéficient pas de l'institution de jury'.

:

Cette organisation n'est que provisoire. Elle sera bientôt remplacée par une autre, dans laquelle un corps élu, une chambre basse, constituéra, avec la Commission, une assemblée législative des Philippines. Les membres de cette chambre au nombre de 50 à 100, seront élus librement par tous ceux qui ont actuellement le droit de vote dans les élections municipales. D'après une proclamation du gouverneur, lancée avant les dernières opérations de recensement, cette nouvelle organisation sera mise en vigueur deux ans après la publication des résultats du recensement ou « Census ».

On voit par là que la publication du Census de 1903, faite en 1905, est une date historique pour les Philippines: elle indique l'époque où leur indépen

:

1. Il existe, toutefois, un correctif à cette restriction les juges des différentes instances peuvent exiger la présence de deux assesseurs indigènes; en outre le recours est toujours possible devant la cour suprême, qui est composée de quatre Américains et de trois Philippins.

2. Est aujourd'hui électeur municipal: tout homme ayant plus de vingt-trois ans au moins, six mois de résidence, et payant une taxe de 30 pesos (75 fr.), ou possédant une propriété de 500 pesos (1 250 fr.), ou bien ayant occupé une situation officielle sous le gouvernement espagnol, ou enfin sachant simplement parler, lire et écrire l'espagnol ou l'anglais.

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