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Si au lieu de suivre le cours de l'Ogooué on emprunte celui de l'Okano, les difficultés seront de même nature, mais on accéderait plus tôt à des plateaux riches et peuplés, aux ondulations lentes, et qui créent jusqu'à l'Ivindo un véritable palier, où les cubes de terrassements et de maçonnerie donneront un chiffre bien inférieur à celui qu'imposeront les travaux sur la rive droite de l'Ogooué. Le parcours sera un peu augmenté, en sorte que les dépenses totales resteront sensiblement les mêmes.

Après l'Ivindo la mission d'études a procédé à la reconnaissance d'un tracé qui atteint Makoua après 430 kilomètres de parcours.

Dans cette région on chemine sur des plateaux ceinturés de marécages encombrés par la végétation. Les formes tourmentées, les accidents brusques, les pentes raides de la vallée de l'Ogooué ont cessé en quittant son cours.

Les deux crêtes qui barrent l'itinéraire suivi et forment la ligne de séparation des eaux du bassin de l'Ogooué et du bassin du Congo, n'offrent aucune difficulté pour déboucher dans la vallée de la Likouala-Mossaka. Aucun ouvrage d'art important n'est à prévoir. La dépense est évaluée par comparaison avec la première section à 116000 francs le kilomètre, en tenant compte d'une augmentation de 4000 francs pour les transports de matériel, soit pour 430 kilomètres : 50 millions environ.

En résumé, la dépense totale s'élèverait à 107 millions pour un développement de voie ferrée de 830 kilomètres, soit une moyenne de 125 000 francs par kilomètre. Ce prix ne diffère pas sensiblement des prix moyens de la construction des principales autres lignes tropicales.

L'établissement des 199 kilomètres de la ligne de Lagos à Abeokouta dans la Nigéria a coûté 1 million de livres sterling. Les 1 000 kilomètres de voie ferrée de l'Ouganda ont absorbé 140 millions. Le chemin de fer portugais de Saint-Paul-de-Loanda à Ambaca est revenu à 145 000 francs le kilomètre. La ligne de Matadi à Léopoldville, longue de 400 kilomètres, a coûté plus de 75 millions de francs. Enfin, dans nos domaines de l'Afrique occidentale où la construction rencontrait des facilités plus grandes, le chemin de fer du Dahomey revient à 80 000 francs le kilomètre, celui de la Guinée à près de 100 000 francs, le Dakar-Saint-Louis à un prix un peu supérieur.

Quant à la constitution géologique de la région étudiée, elle est favorable à la construction d'un chemin de fer.

Dans la zone littorale, en dehors des formations saumâtres actuelles, une argile ferrugineuse recouvre des masses concrétionnées de minerai de fer.

En quelques points on trouve des marnes et des calcaires. A l'intérieur, et surtout dans la vallée de l'Ogooué, une argile rougeâtre et quelquefois jaunâtre recouvre des schistes, excepté dans l'Okanda où cette même argile recouvre un granite et même des quartzites. Enfin dans le bassin de la Likouala-Mossaka on ne trouve que des grès friables, une argile sablonneuse et même des sables.

En résumé, le substratum, qui se manifeste particulièrement au fond des cours d'eau et par les escarpements rocheux qui bordent l'Ogooué, est une roche friable de nature schisteuse qui se laisse facilement entamer par les tranchées de quelque profondeur.

On peut affirmer que celles-ci y seront faciles à entretenir ou à consolider, et il en sera de même des remblais qu'elle fournira. Dans la région de l'Ogooué particulièrement, le sol est presque partout rocheux, et sous la couche d'humus plus ou moins profonde qui le recouvre, les entailles seront faites dans des schistes et les talus pourront certainement être tenus à une inclinaison très rapprochée de la verticale, surtout si en arrière de la crête des talus du côté amont on creuse des fossés de protection.

La main-d'œuvre se trouvera en quantité suffisante au Congo; mais en l'état actuel de la pénétration, elle ne pourra être recrutée en totalité immédiatement chez les Pahouins, populations nombreuses, mais peu soumises, qui ont envahi le bas Ogooué, et le moyen Ogooué, venues du haut Oubangui, poussées par la conquête musulmane, et qui s'avancent vers le littoral à travers la forêt, tant par infiltration que par suppression des races autochtones.

Le Pahouin n'a pas le mépris du travail, et il a des besoins, mais il aime à travailler à sa guise, aux moments qui lui plaisent, et il est fort peu soucieux d'une règle, d'une méthode; il n'accepte pas facilement une direction éclairée. Quant aux Loangos, ils diminuent beaucoup, cette race est très affaiblie par le portage. Il sera donc indispensable, au début, de former un noyau de travailleurs, constitué au moyen de Sénégalais, de Dahoméens ou autres, en attendant que le Pahouin se soit rendu compte de la manière dont il sera traité: C'est encore dans nos autres colonies qu'il faudra recruter les surveillants, les maçons noirs, etc.

L'exemple du Congo belge recrutant jusqu'à 6 000 indigènes dans nos colonies de la côte d'Afrique autorise à espérer que nous trouverons un nombre suffisant de travailleurs dès le début.

Le système de la construction par la colonie est à notre avis le seul préférable. En outre des exemples d'entreprises de cette nature qui n'ont pas abouti dans nos autres colonies, il est à remarquer que le pays n'est pas suffisamment pénétré, et par suite. qu'il est encore dépourvu des éléments essentiels de la civilisation.

Quoi qu'il en soit, ce chemin de fer est une nécessité, il est la base d'une politique de pénétration à laquelle il faut se décider aujourd'hui. Si l'on tardait encore, l'on se trouverait exposé à voir le trafic du Congo français drainé par deux voies étrangères, au sud, celle de Matadi, ou voie belge en pleine exploitation, au nord, celle du Cameroun allemand en projet.

En tout cas, si la construction est décidée, elle doit être exécutée dans les conditions les plus économiques et le matériel roulant d'une manière particulièrement robuste et souple. Les travaux exigeront un rude combat à livrer à la nature. L'œuvre sera laborieuse et demandera de l'esprit de suite en haut, de l'expérience et de la ténacité en bas. Mais la victoire donnera au Congo français la place qui lui revient dans le marché mondial.

La seconde partie de la conférence de M. le capitaine Cambier a été consacrée à la situation économique et financière du Congo. La place dont nous disposons ne nous permet pas de reproduire ce très instructif exposé, au cours duquel le chef de mission a rendu en partie hommage aux efforts des compagnies concessionnaires.

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Depuis leur installation, c'est-à-dire depuis 1900, le mouvement commercial de la colonie s'est accru, de leur fait, de 31 p. 100. »

Les principaux produits à l'exportation sont le caoutchouc et l'ivoire. L'impôt indigène, qui n'est que de 3 francs par tête pour les hommes adultes et qui n'oblige le noir qu'à deux journées de travail, constitue une ressource très appréciable.

L'exercice 1904 accusait 800 000 francs d'excédent de recettes. Sur le budget de 1905 le commissaire général a pu annoncer que la prospérité du Congo lui permettait de faire face à ses besoins, avec ses ressources propres et de remettre au budget de la métropole le crédit de 700 000 francs que celle-ci lui alloue à titre de subvention. Cette colonie est done autorisée par l'heureuse administration de ses finances à demander à l'État son concours. « La création d'une voie ferrée au Congo, conclut M. Cambier, est une question d'être ou de ne pas être pour cette colonie. Son salut est à ce prix. >>

H.

Cette savante conférence, établie sur des données économiques nombreuses et précises, illustrée par de fort belles projections photographiques, a vivement intéressé les auditeurs. M. le président s'est fait leur interprète en remerciant le capitaine Cambier qui ne compte pas moins de huit campagnes, dont trois à Madagascar, deux au Dahomey, deux en Chine et une au Congo. Il a loué, en outre, la précision et la valeur de ses recherches géographiques et géologiques qui démontrent si éloquemment la possibilité d'un travail que les richesses

rera. Assurément la colonie et son éminent commissaire général, M. Gentil, sont en droit de compter sur le concours du gouvernement justement soucieux des véritables intérêts du pays.

Chez le prétendant au Maroc; par M. René Moulin. M. le président a donné ensuite la parole à M. René Moulin, rédacteur en chef de la Revue hebdomadaire qui, avec une grande distinction de parole et beaucoup d'humour, a conté ses diverses visites au prétendant marocain.

De Tlemcem à la Kasbah de Selouen. Pour se rendre à la Kasbah de Selouen, M. René Moulin choisit la route de terre, quoique de beaucoup la plus difficile, parce que plus intéressante il part de Tlemcem, arrive à Lalla-Maghnia, franchit la frontière marocaine à l'oued Kiss, longe les derniers contreforts septentrionaux des Beni-Snassen, et après avoir passé la Moulouya, entre dans la région montagneuse des Kebdanas, à l'orée de laquelle se trouvait alors le camp du prétendant.

Les visites au prétendant. · Au cours des différents entretiens que le conférencier put avoir avec le prétendant, les sujets les plus divers furent traités; ce dernier insista souvent sur l'état lamentable des finances du sultan, le dénûment de ses troupes et sur les troubles qui allaient constamment en augmentant. Il affirma qu'une fois devenu le maître, il se chargerait bien vite de rétablir l'ordre et de faire en sorte « que chacun pût se coucher et dormir sur le bord des routes sans qu'une main fût levée sur le dormeur ». Il consentirait cependant à accepter l'aide de la France dans cette tâche de la police, car il avait pour notre pays des sentiments de sincère amitié; malheureusement les Français ignoraient les meilleurs moyens de répression, tels que le pétrole pour brûler les coupables, la noyade dans des sacs, la décapitation encore plus expéditive. Quant à la prétention d'implanter des réformes économiques, le prétendant la regardait comme une pure absurdité, car le pays ne les accepterait certainement pas.

L'identité du prétendant. Enfin, après bien des hésitations, M. René Moulin se décida à aborder l'épineuse question de l'identité du prétendant. On sait, en effet, qu'il se donne pour le frère aîné d'Abd el Aziz, jeté dans un cachot par son frère et miraculeusement échappé à la mort. Mais, d'après les déclarations formelles faites à M. René Moulin par le colonel Schlumberger, ancien chef de mission militaire auprès de Mouley Hassan, père du sultan actuel, et qui eut l'occasion de voir à plusieurs reprises le vrai Mouley Mohamed, celui-ci était borgne, alors que le prétendant actuel a seulement une légère taie sur l'œil, accident d'ailleurs assez fréquent chez les Arabes. Mouley Mohammed et le prétendant sont donc deux hommes bien distincts. M. René Moulin n'eut garde de laisser paraître son impression à cet égard, mais il insinua respectueusement qu'en France on semblait douter qu'il fût le véritable Mouley Mohammed, que certains déclaraient même avoir vu ce dernier à Fez où il vivait, et qu'il souhaiterait d'avoir un moyen de convaincre ses compatriotes comme il était convaincu lui-même. A cette invite, qui le piquait au vif, le prétendant répliqua avec le plus grand sang-froid que le fait de l'avoir vu fort loin de son camp n'était pas surprenant, attendu qu'il avait le pouvoir de paraître et de disparaître à volonté dans des endroits bien différents. Ainsi on pourrait affirmer l'avoir vu presque en même temps à Fez, à Paris, à Saint-Pétersbourg, sans jamais pouvoir le saisir.

En résumé, des entretiens que le conférencier a eus avec le prétendant, il a emporté l'impression d'avoir eu affaire à un homme énergique et intelligent certes, mais quelque peu« tartarin ».

Les forces du prétendant. M. René Moulin alla voir aussi le ministre de la Guerre du prétendant qui lui fit d'intéressantes déclarations. C'est ainsi qu'il apprit que l'effectif des troupes régulières ne dépassait pas 2 000 hommes, mais qu'il fallait y ajouter les contingents fournis par les tribus des territoires sur lesquels est établi le camp du prétendant. Ces contingents forment la plus grande partie de l'armée en campagne, puisque leur nombre peut

atteindre de 10 000 à 15 000 hommes. Ce chiffre est toutefois variable suivant que le prétendant attaque ou reste sur la défensive, et la raison en est très simple. Si le prétendant est attaqué, les tribus, en même temps que leur fidélité leur commande de le secourir, sont obligées de protéger leurs familles et leurs biens, que mettrait en péril une victoire du sultan; si, au contraire, le prétendant prend l'offensive, elles ne lui fourniront plus que des contingents dérisoires, car il leur faudra abandonner leurs femmes, leurs enfants, leurs tentes, leurs terres livrés pendant leur absence aux pillages et aux déprédations des tribus voisines. Conclusion. Les mêmes raisons s'appliquent aux troupes du sultan, de telle sorte que l'on peut établir en règle générale que le belligérant qui est attaqué a toujours pour lui l'avantage considérable du nombre, et par suite la certitude du succès. Ces intéressantes déclarations du ministre de la Guerre jettent, suivant l'avis de M. René Moulin, un jour nouveau sur les règles qui régissent les combats au Maroc. Elles permettent d'expliquer pourquoi s'éternise cette lutte entre sultan et roghi, sans résultat depuis cinq ans déjà, et pourquoi les combats sont aussi rares, chacun des deux belligérants préférant attendre son adversaire que d'engager un combat désavantageux.

En terminant sa conférence, M. René Moulin a adressé un affectueux salut à tous ses compagnons de voyage et notamment à son ami, M. Soulard, au dévouement et à l'initiative duquel il a reporté l'honneur que venait de lui faire la Société de Géographie.

FRÉDÉRIC LEMOINE.

Cette curieuse et piquante conférence s'est terminée par un pittoresque défilé de projections photographiques montrant le pays parcouru et le camp du roghi. Après l'avoir félicité sur ses qualités d'orateur, M. le président a fait ressortir l'initiative et l'audace qu'a déployées le jeune explorateur en s'aventurant au milieu des rebelles marocains.

Candidats présentés.

Mme Roy née RENAUD (Marie-Louise-Eugénie), professeur au lycée de jeunes filles d'Amiens, présentée par MM. Paul DUPUY et Louis RAVENEAU.

MM. ROUSSEAU (Robert-Pierre-Victor), présenté par MM. VIDAL DE LA BLACHE et Henri
SCHIRMER.

GILBERT DE VOISINS (comte), présenté par MM. Louis BINGER et LE MYRE DE VILERS.
SYMONET (Jean-Henri-Albert), présenté par MM. le baron J. de WITTE et J. COLLARD.
DECOCK (Philippe), ingénieur des arts et manufactures, présenté par MM. Georges
BLONDEL et le baron HULOT.

DYÉ (Léon), docteur, présenté par MM. Guillaume GRANDIDIER et le lieutenant de
vaisseau Alfred DyÉ.

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La Société a perdu MM. J. Cottin, Léon Guérin, Louis Lefebvre de Viefville, Alexandre Lesouef, Paul Larrouy, Paul Duchesne-Fournet.

Larrouy Paul, né en 1847, est mort ministre de France en Argentine. Dans nos rapports avec le gouvernement argentin nous eûmes à recourir à sa grande obligeance et nous gardons le souvenir des services qu'il rendit à l'expédition antarctique française du docteur Charcot. Chancelier au Japon, consul à Messine puis à Dublin, résident général à Madagascar, il mit à profit dans ces différents postes sa connaissance des langues, parlant indifféremment l'anglais, l'italien, le japonais ou le malgache. Son goût si marqué pour la philologie put encore se donner libre carrière lors de son inspection des consulats français des deux Amériques.

Duchesne-Fournet (Paul), ancien manufacturier, sénateur et membre du conseil général du Calvados, chevalier de la Légion d'honneur, est mort le 30 novembre dans sa soixantedeuxième année. Ses obsèques, d'une simplicité voulue, eurent lieu à Lisieux, où se rendit M. Le Myre de Vilers, qui, en qualité du plus vieil ami de la famille, prononça une courte mais poignante allocution, rappelant ainsi ce que fut Duchesne-Fournet : « Je l'ai vu naître, j'ai assisté à ses débuts. J'ai applaudi à ses premiers succès. Tous, vous connaissez les qualités maîtresses dont il a fait preuve pendant vingt-sept ans au conseil général, pendant seize ans à la Chambre et au Sénat la fermeté du caractère, la sûreté des relations, la fidélité à tenir ses engagements, la persévérance dans ses résolutions. Sous un aspect un peu rude, il était plein de cœur et de générosité; s'inspirant des traditions de ses parents, dont les libéralités se comptent par millions, il ne refusait jamais son appui et son aide aux déshérités de la fortune : j'en parle en connaissance de cause, ayant souvent fait appel à son concours. C'est là un des côtés de sa vie d'autant plus ignoré qu'il s'efforçait de dissimuler sa bonté. » Puis, M. Le Myre de Vilers évoque le souvenir de ceux qui ont précédé son ami dans la tombe, et surtout de son fils Jean, victime des fatigues subies au cours de son exploration en Abyssinie.

Après une allusion aux deux enfants qui sauront honorer son nom et qui entourent de leur affection Mme Herbet «qui trouve sa consolation dans l'exercice d'une charité inlassable » il adresse un suprême adieu à Duchesne-Fournet.

La donation faite à la Société de Géographie par M. Duchesne-Fournet et ses deux enfants date du 29 juin 1904. Elle alimente un prix de 6 000 francs décerné tous les deux ans à un explorateur français ayant le plus contribué soit à notre expansion coloniale ou au développement de l'influence française, soit à la mise en valeur du domaine colonial au point de vue économique ou au point de vue du développement de nos relations commerciales. Cette donation prévoit le cas où le prix Jean Duchesne-Fournet ne serait pas décerné. Il y aurait lieu alors d'utiliser ces fonds soit pour une bourse de voyage soit pour la publication des résultats d'une exploration répondant aux conditions cidessus énumérées.

Nous avons tenu à reproduire ici les dispositions essentielles de la fondation établie 'sur l'initiative de M. Duchesne-Fournet, ce qui est encore honorer sa mémoire. Le secrétaire général de la Société de Géographie.

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