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jurassiques et des calcaires bajociens, tandis que la région sud-est des calcaires marneux du Bajocien et du Lias présente une topographie accidentée de vallées profondes avec barres escarpées et cluses étroites.

Ainsi, sur le versant sud-est de Saint-Mens, un large talweg tronçonné semble marquer le parcours d'une rivière débutant brusquement entre la bifurcation de la Luye et de l'Avance, par le vallon de Saint-Roman. Ce talweg se poursuit à l'ouest par les vallonnements de Lara, de la Moutouse, les marais de la Pallud, Trèschâtel, et, après un parcours de 10 kilomètres, conflue avec la Luye par la cluse de Riotors, avec un dénivellement marqué par une série de cascatelles à seuils rocheux.

Plus au sud-est, est une autre « vallée sèche » de 10 à 11 kilomètres de

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FIG. 3.

COUPE GÉNÉRALE EN TRAVERS DES VALLÉES DU GAPENÇAIS DRESSÉE PAR M. DAVID MARTIN 1. c, Crétacé; j, Jurassique supérieur; o, call. oxf, b, Bajocien; l, Lias; s, mélaphyres: e, e, éboulis; g, g, glaciaire; n, cañon probable; Y, Z, horizontale à 575 mètres. Hauteur 40 000; Longueur : 80 000*.

longueur. Elle débute par le seuil plus élevé de La Bâtie-Vieille, se poursuit par Rambaud, Bellevue, les deux cluses de l'Ollagnier, et rejoint la Luye, à l'aval de la profonde cluse de Cristaïs, par le cañon de Colombis avec un parfait profil d'équilibre.

Ces deux « vallées sèches » de Trèschâtel et de Colombis suivent la base sud de falaises calcaires escarpées, tandis que leurs flancs de la rive gauche ont la pente adoucie des assises rocheuses qui les constituent. Des coupures transversales très curieuses établissent des relations entre ces deux vallées et avec la Luye.

Plus au sud-est encore est la remarquable vallée de l'Avance qui n'est, comme le Buech et la Luye elle-même, qu'une rivière morte dont nous parlerons tout à l'heure.

Entre ces diverses vallées décapitées et à peu près parallèles, se trouvent encore, soit à l'amont, soit à l'aval de Gap, nombre d'autres tronçons de talwegs qui indiquent dans le passé une extraordinaire puissance dans les phénomènes de ruissellement.

1. Cette coupe ne contient pas les vallées mortes du Buech et de Bayard établies perpendicu

Origine du cañon de la Blache et des vallées sèches du Gapençais.

Examinons un instant à quelle cause et à quelle époque on peut rapporter le creusement de ces anciennes vallées.

On a parfois singulièrement exagéré la puissance érosive des glaciers. On est même allé, avec Tyndal, jusqu'à leur attribuer le creusement des vallées. Mais un examen tant soit peu attentif des pays morainiques permet bientôt de constater que les glaciers quaternaires épousèrent une topographie peu différente de celle d'aujourd'hui.

Cela résulte avec une parfaite évidence de la position respective du fond rocheux des vallées préglaciaires et des dépôts morainiques'.

L'action érosive des glaciers nous semble plutôt s'être employée à déblayer leur vallée des éboulis et de leurs parties instables et à moutonner, polir, strier les parois et le fond de leur lit.

Nous ne pensons pas non plus que les cañons du Gapençais aient été creusés pendant les phases d'oscillations glaciaires; car il n'existe entre Chorges et Gap (distance 17 km. ; différence d'alt.: 865-733 = 132 m., soit une pente moyenne de 0 m. 77 p. 100), ni moraine frontale, ni accident topographique ayant pu déterminer un stationnement du glacier suffisant pour permettre, à son torrent émissaire, de creuser les cañons de l'aval.

Il n'est pas non plus admissible que l'insignifiante rivière de la Luye ait pu produire des érosions aussi considérables. La Luye, en effet, n'a pas de bassin d'alimentation. Elle débute humblement dans les minuscules marais de La Bâtie à l'altitude de 858 mètres et se meut dans un talweg beaucoup trop grand pour son importance. Ce large talweg s'ouvre, à l'amont, sur la vallée de l'Avance par un dénivellement de 119 m.

L'Avance, qui se jette dans la Durance après un parcours de 19 kilomètres, n'a pas non plus de bassin d'alimentation et prend sa source dans le petit marais de Chorges établi dans un large talweg s'ouvrant à l'amont (alt. 865 m.) sur la vallée de la Durance, par un dénivellement de 172 mètres.

Le Buech de la Freyssinouse est également un large lit de rivière décapitée, puisqu'il s'ouvre, à son amont, à 315 mètres au-dessus du bassin de Gap et à 405 mètres au-dessus du lit actuel de la Durance.

Le Buech, la Luye, l'Avance, s'ouvrant les unes sur les autres et en définitive sur la Durance, sont donc des « vallées mortes >> qui furent successivement creusées, puis abandonnées, à un certain moment, par la Durance.

1. Les recherches à ce sujet, sont merveilleusement facilitées dans la haute Durance, par le climat sec et excessif dont souffre cette région. Les décapages produits par les érosions y montrent à souhait tous les détails de la constitution des dépôts quaternaires. Tandis que dans les vallées humides comme le Pô, l'Isère, le Rhône, etc., le manteau de la végétation est si puissant, si continu, que, seules, les tranchées des travaux d'art et quelque récent, mais rare décapage des cours d'eau, permettent d'examiner, comme par un trou de serrure, la nature du sous-sol.

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La démonstration de cette proposition nous paraît facile.

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Anciens lits de la Durance. Dès l'époque aquitanienne, c'est-à-dire au moment où le massif alpin émergea des mers du Flysch, il y eut une Durance dont une des branches empruntait déjà la vallée du Buech en passant pardessus le bassin actuel de Gap. Elle édifia alors la nagelfluh' à galets impressionnés dont les importants lambeaux jalonnent une coupe transversale de la vallée depuis Montmaur (vallée du Buech), jusqu'au sommet de la montagne de Curban par Furmeyer et Châtillon-le-Désert. Ces dépôts se montrent entre les altitudes de 900 et de 1 300 mètres et paraissent transgressifs aux grès et schiste du Flysch 2 (arête séparative des gorges du Laus et de l'Uscla, sur le territoire de Curban).

Dans ces cailloutis aquitaniens, nous avons constaté in situ la présence de galets de variolites et d'euphotides du Chenaillet.

Au Miocène la Durance véhicula ces variolites du Chenaillet jusque dans la molasse de Cabrières, près de Cucuron3 (Vaucluse).

Les dépôts de ces époques reculées indiquent manifestement que cette rivière coulait à Gap vers l'altitude de 1 200 mètres, c'est-à-dire au niveau du col Bayard.

Il paraît donc très vraisemblable que les variolites typiques que, d'après la découverte de M. H. Müller, signale', dans une formation miocène (Burdigalien) à la Monta, près de Grenoble, notre éminent et aimé confrère, M. Kilian, proviennent du mont Genèvre et qu'elles ont été véhiculées jusqu'à la Monta, à travers le col Bayard, et la vallée du Drac, par un bras de la Durance.

Au Pliocène supérieur, la Durance passait encore par la vallée du Bucch. Elle édifia, à cette époque, la longue série de terrasses caillouteuses à protogines, diorites du Pelvoux, variolites, et euphotides du mont Genèvre. Cette formation caillouteuse débute aux rampes du mont Genèvre et se poursuit, jusqu'à la Crau d'Arles et à la mer, par des lambeaux ayant encore ensemble une étendue de 120 kilomètres.

Ces dépôts importants occupent encore, au col de la Freyssinouse (vallée du Buech), malgré l'ablation des glaciers, l'altitude de 1 100 mètres et dominent la Durance actuelle de 530 mètres.

Cette période de dépôts caillouteux imposants fut suivie d'une ère plus tranquille, mais pendant laquelle la haute Durance, encore puissante, employa son activité à creuser son lit dans ses propres dépôts et jusque bien avant dans la roche en place.

1. Carte géol. de la France. Feuille de Die.

2. D'après nos propres observations.

3. Renseignement oral de notre excellent confrère, M. Deydier, notaire à Cucuron, qui voulut bien nous remettre quelques-uns de ces galets qu'il avait recueillis en faisant des fouilles paléontologiques à Cabrières.

La Durance abandonna ensuite la vallée du Buech; puis elle délaissa successivement les autres bras qu'elle projetait à travers le Gapençais et se fixa définitivement entre Savines, Tallard et Sisteron.

Les facteurs qui contribuèrent à produire ces déplacements successifs sont sans doute multiples, comme la nature des roches, l'orientation des assises, etc. Mais il semble que le facteur principal aurait été la plus courte distance. Sans doute parce que, en diminuant ainsi son parcours, la rivière acquérait plus de pente et plus de vitesse, par suite une puissance érosive supérieure. Ainsi, en abandonnant ses anciennes directions pour s'établir par Savines, Tallard et Sisteron, la Durance y trouvait un parcours plus court de 30 kilomètres que par le Buech, de 8 kilomètres que par Gap et de près de 4 kilomètres sur celui de l'Avance 1.

Divers détails des formes du relief du terrain dont la discussion serait ici trop longue, semblent indiquer que les vallées de la Luye et de l'Avance furent creusées par la Durance jusque vers leur niveau actuel. Mais nous ne saurions dire jusqu'à quelle profondeur elle avait affouillé les vallées intermédiaires qu'elle n'avait peut-être même qu'ébauchées; car il nous paraît difficile d'admettre qu'elle ait pu opérer à la fois, par ses divers bras, le creusement total de toutes les vallées mortes du Gapençais quelle que fût l'importance de son débit.

Nous sommes donc amené à cette conclusion, que nous avions entrevue il y a de longues amées déjà, et qui n'a, ce nous semble, rien d'invraisemblable : Les torrents sous-glaciaires doivent avoir contribué, dans une certaine mesure, au creusement des vallées et surtout à l'approfondissement des cañons.

1. Il est facile de concevoir pourquoi la Durance ne fit qu'ébaucher les vallées mortes de Rambaud, à Colombis, et, de Saint-Roman, à Riotors, car dans la région il existe des collines dont les assises ont une orientation perpendiculaire à la stratification de l'ensemble du massif. Aussi ces accidents ont-ils provoqué des phénomènes de capture par la formation de cluses latérales qui mettent en communication la première vallée avec la seconde, et celle-ci avec la Luye.

Mais, si on considère la constitution géologique des diverses vallées du Gapençais, qui furent occupées par la Durance, on ne peut s'empêcher de trouver étrange que cette rivière ait abandonné les vallées du Buech et de Gap qui toutes deux ont leur talweg établi sur les schistes friables du Jurassique moyen, tandis que la vallée de l'Avance et celle de la Durance actuelle sont totalement excavées dans les calcaires marneux du Lias beaucoup plus résistants aux érosions.

Il est cependant possible d'entrevoir des causes qui ont pu déterminer l'élection de ces deux derniers emplacements: De Saint-Étienne à Avançon, dans l'Avance, et d'Upaix à Espinasse, dans la vallée de la Durance, les deux flancs présentent, depuis le bas talweg, jusque vers 250 mètres au-dessus des rivières, de nombreux et importants gisements de gypses qui sont plaqués contre la tranche des assises liasiques. Dans le village d'Espinasse ces gypses présentent d'énormes marmites des géants de plus de 20 mètres de profondeur que remblaient des cailloutis glaciaires. Sous Nérac (Remollon), il se forme, de temps en temps, sur le large lit de la Durance, des entonnoirs de 10 à 250 mètres de diamètre et qui demeurent visibles plusieurs années malgré les remblaiements de la rivière. La formation de ces entonnoirs est certainement due à l'existence de masses de gypses dans la profondeur.

Avant les formidables érosions de la Durance et de la période glaciaire, les amas de gypses, bien plus considérables qu'aujourd'hui, devaient combler ces vallées. Et il est permis de supposer que la Durance a pu s'établir, à son emplacement actuel, grâce à la présence de ces roches instables, les plus aisément solubles et les plus faciles à éroder.

Action probable des torrents sous-glaciaires dans l'approfondissement des canons.

Quand toute la masse d'un glacier entre en lubréfaction, les eaux de fusion descendent, d'après les expériences d'Agassis sur le glacier de l'Aar, dans la profondeur par le réseau des fissures capillaires. Ces eaux de filtration doivent atteindre le fond du glacier et l'ancien lit de la rivière. C'est évidemment sur ce fond de la vallée sous-glaciaire que les eaux de filtration arrivent à leur maximum de pression hydrostatique, pression proportionnée à la puissance du glacier, c'est-à-dire égale, pour la vallée de la Durance, pendant la phase glaciaire moyenne, à une colonne d'eau de 500 à 600 mètres de hauteur. Avec cette énorme pression, l'eau devait être capable de s'ouvrir de proche en proche et de l'aval à l'amont, un conduit sous-glaciaire en rapport avec son débit. Et de fait, les torrents émissaires sortent des glaciers par une voùte de glace, quand le front du glacier n'est pas barré, comme celui du glacier d'Arsine par exemple, par une colossale moraine caillouteuse continue.

D'autre part, les torrents affluents d'un glacier se précipitent, à l'époque de fusion, dans la crevasse marginale et disparaissent sous le glacier. Les mille filets et ruisseaux qui circulent à la surface des glaciers disparaissent généralement, après un petit parcours dans les crevasses et les moulins pour aller rejoindre le chenal sous-glaciaire.

Les torrents sous-glaciaires sont donc une réalité et ils doivent se poursuivre sous toute la longueur des glaciers jusqu'à l'altitude où le fond demeure perpétuellement au-dessous de zéro.

Or, au moment des grandes chaleurs, les glaciers émettent d'énormes torrents chargés de troubles. Par leur volume, leur grande vitesse et les matériaux qu'elles entraînaient, ces eaux étaient certainement capables d'excaver, sous les glaciers quaternaires, des galeries incomparablement supérieures à celles que nous ont révélées les audacieuses explorations souterraines de M. Martel.

Les cañons sont nombreux dans les régions alpines et cependant leur réelle profondeur nous échappe souvent, ainsi que cela résulte des faits suivants :

En 1887 un puits de sonde, poussé à 14 mètres de profondeur sur le talweg de l'Avance, à Chorges, ne rencontra que des argiles.

La même année, un puits foré près de la Luye, jusqu'à 22 mètres audessous du lit de cette rivière, ne rencontra également que des argiles analogues à celles trouvées à Chorges; ces argiles mélées d'éclats de schistes et identiques à celles des moraines profondes du voisinage, provenaient du raclage opéré par le fond du glacier sur les schistes calloviens du talweg

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