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tation s'étend dans la Lozère, le Cantal, l'Aveyron, le Gard et l'Hérault et qui soigne en moyenne 35 à 40 personnes par jour. Pierrounet fait la fortune de Nasbinals; un hôtel est tenu par « le fils Pierrounet », un autre par « le gendre Pierrounet ». Des inscriptions en lettres énormes sur les omnibus, qui font le service de la gare d'Aumont à Nasbinals, signalent ces particularités aux éclopés qui viennent confier leurs membres au fameux rhabilleur; ils peuvent ainsi trouver l'hospitalité chez le fils ou le gendre du médicastre. Tout se passe en famille à Nasbinals.

A 1500 mètres de Nasbinals, s'élève le pic de la Sentinelle (1 270 m. d'alt.) qui supporte une statue colossale de la Vierge en fonte, érigée en 1884 et reposant sur un piédestal en granite de forme octogonale. De tous les points du plateau, on s'y rend en foule en pèlerinage le dimanche qui

suit le 24 mai.

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A 13 kilomètres de Nasbinals, les bains de la Chaldette, sur la rive droite du Bès, à 997 mètres d'altitude, entourés de grands bois et de sites pittoresques et variés, attirent aussi les baigneurs qui recherchent une villégiature tranquille, un air pur et vif; les eaux thermales bicarbonatées mixtes sont employées contre les affections d'origine catarrhale, les maladies des muqueuses et les rhumatismes.

Sur la route de Nasbinals à Marvejols, Marchastel occupe la place d'une ancienne forteresse romaine (Marcii castellum) sur un dôme basaltique de 80 mètres de hauteur (1 267 mètres d'alt.). Sa proximité du point où l'ancienne voie romaine franchissait le Bès, en faisait une position très forte et permettait aux barons de Marchastel de rançonner les voyageurs. A 2 kilomètres de Marchastel, le moulin de Boukinkan (Buckingham), sur la rive droite du Bès, rappelle le souvenir des incursions des Anglais sur le plateau pendant la guerre de Cent ans. A sept kilomètres à l'est, dans un très joli site, entouré de bois et d'étangs, le château de la Baume, à 1116 mètres d'altitude, est rempli des souvenirs de Marie-Angélique de Scoraille, qui y fut recueillie en 1677 par son oncle César-Artorg de Peyre et partit de là pour la cour où elle devait devenir célèbre sous le nom de duchesse de Fontanges.

.*.

Grâce à la nature de son sol frais et léger, à la persistance de la neige pendant de longs mois d'hiver, à la durée remarquable de l'insolation et à son intensité, la région d'Aubrac se prête merveilleusement à la culture pastorale. Aussi l'usage de conduire les troupeaux sur les montagnes d'Aubrac remonte-t-il à une époque très reculée. Il est fort possible que le fromage

(1 310 m. d'alt.), jouit pendant l'été d'une température relativement élevée, en raison de son exposition favorable et de la présence de sommets qui le garantissent contre les vents du nord, y attire depuis une dizaine d'années tous les étés deux à trois mille personnes qui viennent y faire une cure d'air et de petit-lait. Il faut se garder de croire qu'Aubrac offre aux personnes habituées à la vie compliquée des stations balnéaires les distractions. nombreuses et le confortable auxquels elles tiennent tant: Tout y est primitif. Dans le patois du pays on donne aux buveurs du petit-lait le nom de gaspijeyros; ce sont généralement des Parisiens, originaires du Cantal ou de l'Aveyron.

Les environs d'Aubrac peuvent offrir au touriste d'agréables excursions. En dehors des promenades aux bois de l'Adrech et de Gandilloc, dont nous avons parlé plus haut, il lui est facile de se rendre en moins d'une heure sur les Puys de Régambal, des Mossous et de Gudette, d'où l'œil embrasse Nasbinals, la vallée du Bès, l'ensemble du plateau d'Aubrac avec ses immenses pâturages et ses innombrables troupeaux. Du pic de las Truques, l'horizon s'étend des cimes aiguës du Sancy et du Cantal à la terrasse de l'Aigoual, des monts de la Margeride aux sommets arrondis des Palanges et du Levezou; par un temps très clair, on découvre au loin la chaîne des Pyrénées et ses pics neigeux. Si le touriste est bon marcheur, il peut pousser jusqu'au Mailhebiau et aux lacs de la Lozère, ce qui demande une bonne journée de marche.

D'Aubrac à Laguiole, le trajet est un perpétuel enchantement, à travers les pâturages ou les hêtraies verdoyantes; la route ne s'éloigne guère de la ligne de faîte, ce qui permet au voyageur d'avoir presque constamment une vue très étendue à droite et à gauche, sur les pâturages sans fin ou sur les gorges aux flancs boisés.

Laguiole, chef-lieu de canton de 1 890 habitants, est la vraie capitale de la montagne. Elle est bâtie en amphithéâtre, au confluent de la Selves et du ruisseau de Vayssaire, sur le penchant d'une butte de basalte que couronne l'église et d'où le regard s'étend fort loin. Laguiole est le centre d'un commerce important de fromages et de coutellerie.

A 22 kilomètres à l'ouest, sur le plateau de la Viadène, le bourg de SainteGeneviève est, comme Laguiole, le rendez-vous, pendant l'été, de nombreux étrangers qui viennent y chercher l'air pur et la fraîcheur ou s'y livrer au plaisir de la pêche.

Dans la partie lozérienne du plateau, Nasbinals, village de 1300 habitants, batie à 1155 mètres d'altitude sur un affluent du Bès, est aussi fréquentée pendant la belle saison par les amateurs de villégiature que n'effraient pas ses ruelles malpropres et ses maisons sordides. Nasbinals est, avec Laguiole, l'entrepôt des fromages fabriqués sur le plateau. C'est aussi la résidence d'un rebouteur, Pierre Brioude, dit Pierrounet, d'une réelle habileté, dont la répu

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tation s'étend dans la Lozère, le Cantal, l'Aveyron, le Gard et l'Hérault et qui soigne en moyenne 35 à 40 personnes par jour. Pierrounet fait la fortune de Nasbinals; un hôtel est tenu par « le fils Pierrounet », un autre par « le gendre Pierrounet ». Des inscriptions en lettres énormes sur les omnibus, qui font le service de la gare d'Aumont à Nasbinals, signalent ces particularités aux éclopés qui viennent confier leurs membres au fameux rhabilleur; ils peuvent ainsi trouver l'hospitalité chez le fils ou le gendre du médicastre. Tout se passe en famille à Nasbinals.

A 1500 mètres de Nasbinals, s'élève le pic de la Sentinelle (1 270 m. d'alt.) qui supporte une statue colossale de la Vierge en fonte, érigée en 1884 et reposant sur un piedestal en granite de forme octogonale. De tous les points du plateau, on s'y rend en foule en pèlerinage le dimanche qui suit le 24 mai.

A 13 kilomètres de Nasbinals, les bains de la Chaldette, sur la rive droite du Bès, à 997 mètres d'altitude, entourés de grands bois et de sites pittoresques et variés, attirent aussi les baigneurs qui recherchent une villégiature tranquille, un air pur et vif; les eaux thermales bicarbonatées mixtes sont employées contre les affections d'origine catarrhale, les maladies des muqueuses et les rhumatismes.

Sur la route de Nasbinals à Marvejols, Marchastel occupe la place d'une ancienne forteresse romaine (Marcii castellum) sur un dôme basaltique de 80 mètres de hauteur (1 267 mètres d'alt.). Sa proximité du point où l'ancienne voie romaine franchissait le Bès, en faisait une position très forte et permettait aux barons de Marchastel de rançonner les voyageurs. A 2 kilomètres de Marchastel, le moulin de Boukinkan (Buckingham), sur la rive droite du Bès, rappelle le souvenir des incursions des Anglais sur le plateau pendant la guerre de Cent ans. A sept kilomètres à l'est, dans un très joli site, entouré de bois et d'étangs, le château de la Baume, à 1 116 mètres d'altitude, est rempli des souvenirs de Marie-Angélique de Scoraille, qui y fut recueillie en 1677 par son oncle César-Artorg de Peyre et partit de là pour la cour où elle devait devenir célèbre sous le nom de duchesse de Fontanges.

Grâce à la nature de son sol frais et léger, à la persistance de la neige pendant de longs mois d'hiver, à la durée remarquable de l'insolation et à son intensité, la région d'Aubrac se prête merveilleusement à la culture pastorale. Aussi l'usage de conduire les troupeaux sur les montagnes d'Aubrac remonte-t-il à une époque très reculée. Il est fort possible que le fromage

et qui était, de son temps, un des plus estimés à Rome'. Aux termes des coutumes, usages, libertés et franchises de la ville de Saint-Geniez (Aveyron), confirmés le 21 novembre 1345 par Pierre de Bourbon, comte de Clermont, <<< les habitants de Quercy, qui conduisent leurs vaches ou brebis aux montagnes d'Aubrac, s'ils ne font que passer à Saint-Geniez ne payent rien; s'ils sont obligés d'y coucher, ils payent cinq sols rodanais par troupeau ». Des lettres de Louis XII concédant au dom d'Aubrac la permission d'ériger des piloris, fourches patibulaires et autres signes de justice, données à Valence le 21 juillet 1511, constatent que en temps d'esté sont amenés ez dites montaignes plusieurs grandes quantités de bestail par plusieurs bergiers de plusieurs et divers païs qui y séjournent jour et nuit ».

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Un péage établi au profit des comtes de Rodez frappait également les troupeaux de moutons transhumants, venant du Bas-Languedoc et du Quercy, qui traversaient le Causse du Comtal, en suivant les drayes, grands chemins établis généralement sur l'emplacement d'anciennes voies romaines.

Actuellement la transhumance des bêtes ovines n'existe plus dans la région, mais plus de 14 000 bêtes à cornes viennent estiver pendant la belle saison dans les pâturages du pays d'Aubrac. Ces animaux séjournent en hiver dans le domaine des Causses du Ségala ou dans les vallées les plus basses du plateau, où ils sont entassés dans des étables assez mal construites et nourris avec des fourrages secs; ils sont amenés dans les hauts pâturages vers le 25 mai et y restent jusqu'au 13 octobre.

« Le 25 mai, par n'importe quel temps, dit M. Marre dans un ouvrage très intéressant sur la race d'Aubrac, les troupeaux d'élevage partent pour la montagne où ils passent l'été. Le spectacle d'une vacherie, cheminant lentement vers les pâturages d'été est chose curieuse. Les vaches ornées de grosses clochettes, de plumets et de drapeaux, accompagnées de taureaux reproducteurs, à raison de cinq environ par cent vaches, marchent pêle-mêle sous la conduite du cantalès (maître-vacher) et de ses aides. Les veaux guidés par une ou deux vaches se mettent généralement en marche quelques heures avant le départ de la vacherie.

« Une jardinière portant la provision de lard, de sel et autres accessoires nécessaires à la nourriture et à l'entretien des gardiens ferme la marche. Ce véhicule sert aussi, parfois, de voiture d'ambulance; on y met les jeunes veaux qui, trop éprouvés par la route, ne peuvent plus marcher3 ».

1. Laus caseo Romae ubi omnium gentium bona cominùs judicantur, e provinciis Nemansensis praecipua, Lesurae Gabalicique pagi : sed brevis, ac musteo tantum commendatiso. (Pline l'Ancien, Nat. Hist., XI, 97). Grégoire de Tours dit aussi que, de temps immémorial, les paysans jetaient, dans un lac du Gévaudan (le lac des Salhiens), des formes de fromage (formas casei), des gâteaux de cire et d'autres objets pour se concilier les faveurs des dieux (Greg. Tur., De glor. beat. Confess., II); cet usage existait encore, il y a quarante ans.

2. Deltour, loc. cit., p. 114, 255.

3. E. Marre, La race d'Aubrac et le fromage de Laguiole, 2o édit., 1904, Rodez. E. Carrère, petit in-4, avec 86 gravures.

Le plateau d'Aubrac comprend environ 350 pâturages en montagnes appartenant à des propriétaires différents, dont l'étendue varie de 20 à 200 et 300 hectares. Les « montagnes » sont généralement séparées les unes des autres par de petits murs formés de blocs de granite ou de basalte assemblés plus ou moins grossièrement sans mortier. Au milieu de chacune d'elles, on trouve le mazuc, cabane en pierres sèches qui l'été sert d'abri au berger, et, le buron, construction un peu moins primitive, composée d'un rez-de-chaussée et d'un grenier, et qui sert à la fabrication du fromage. Le grenier contient le lit des buronniers et le foin destiné aux veaux. Au rez-de-chaussée se trouve une pièce où se fait le fromage et qui renferme les ustensiles nécessaires à cette industrie spéciale : farrats, gerles, faisselles, selles, moules, presses à fromage, etc.; à côté la cave servant à la maturation du fromage et l'écurie où sont logés les porcs qu'on engraisse avec le petit-lait.

«

Les jeunes veaux sont séparés de leurs mères, dès leur arrivée sur la <<< montagne ». Ils sont enfermés la nuit dans des parcs fermés de claies mobiles; le jours ils paissent sous la garde du bédelier, tandis que les vaches font le tour de la montagne, en suivant une sorte de piste circulaire sous la surveillance du pastré.

Cette grande palissade que l'on aperçoit de loin nous désigne un parc à veaux qu'il faut abriter de la bise, de la terrible cantalèso; car tout couche ici en plein air pendant l'été. Nous sommes au matin. Le berger, que l'on nomme ordinairement cantalès, appelle par leur nom avec un accent spécial', les vaches une par une pour les traire. Généralement elles accourent vite. On leur livre leur veau; mais plus rapidement que le jeune animal, le cantalès retire le lait à la vache. Pour aller plus vite, beaucoup de ces hommes ont attaché une petite sellette ou pied en bois à la partic postérieure de leur pantalon. Ils s'assoient dessus pour traire commodément le lait et ne pas perdre de temps. »

On trait les vaches deux fois par jour le matin à l'aube et le soir à trois ou quatre heures. Pendant la traite le veau est attaché par le cou à la jambe antérieure gauche de la vache; il est ensuite détaché et cherche à avaler le lait qui reste dans la mamelle de sa mère. La traite terminée, les veaux sont ramenés à leur pâturage ou à leur parc.

de «

Le fromage fabriqué sur les montagnes d'Aubrac est connu sous le nom fromage de Laguiole » ou plus simplement « Laguiole ». Le cantalès3 et

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1. Ces noms se rapportent généralement à une nuance particulière du pelage (roùsso, bloùndo, dourado, orangé, etc). Ce sont aussi des noms de femelles d'animaux : lèbré (lièvre), taïsso (blaireau), rato, béleto, furéto, d'oiseaux caillé, ogasse (pie), foùbélo (fauvette), de villes ou de pays : frànço, giroùndo, bayoùno, ou des noms tendres: gentille, charmante. Chaque veau reçoit le nom de sa mère transformé au moyen du diminutif ou : lebrou, taïssou, etc. (V.-E. Marre, loc. cit., p. 46.)

2. L. de Malafosse.

1. Le cantales, appelé aussi buronnier, a la direction générale de l'exploitation; il est le repré

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