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deux firent partie notamment de la commission chargée, au point de vue commercial, « de surveiller la levée des plans des ports du département, de préparer, de concert avec les ingénieurs, les devis des ouvrages à faire et de rédiger ensuite des procèsverbaux au sujet de ces divers travaux. »

Tout en faisant partie de l'Administration départementale, Le Roux ne perdait pas de vue la liquidation de son ancienne charge de procureur, et les registres du Directoire du district de Lannion en font foi, à la date du 23 août 1791:

... Vu la requête de Le Roux, ci-devant procureur fiscal des regaires du ci-devant évêché de Tréguier avec les mémoires et une liasse au soutien.

...Le Directoire arrête qu'il se pourvoira au tribunal du district pour être, par devant le commissaire qui sera nommé par ledit tribunal et contradictoirement avec le procureur syndic, procédé à l'examen, règlement et liquidation de ses mémoires, etc... (1).

En même temps, il prenait des précautions pour l'avenir, en se faisant élire juge au tribunal de district de Lannion, où il ne devait pas faire un long séjour (2). En effet, le 13 septembre 1792, un arrêté du Directoire des Côtes-du-Nord le désigna pour faire

(1) Plusieurs années devaient se passer avant que cette liquidation fût terminée, et l'on voit aux registres du département et du district de Lannion se succéder nombre de réclamations « pour paiement de vacations et avances (souvent importantes) faites par lui comme procureur fiscal du cy-devant évêché de Tréguier. » (Dist. de Lannion: Reg. des délib., 2 sept. 1791). Reg. des dépôts de pétitions, 29 mars, 26 sept. 1793. Administration départementale. Domaines nationaux, 26 prairial an II, 14 juin 1794). Ailleurs, le Directoire du département lui décerne acte du dépôt de comptes, pièces et numéraire qu'il a reçus de la ci-devant commission diocésaine de Tréguier, et arrête qu'il versera les sommes dans la caisse du district. (Adm. centrale, Délib. 17 décembre 1791). Enfin, une délibération du Département du 12 ventôse an III (2 mars 1795), mit fin à cette laborieuse liquidation, considérant, y est-il dit, que la République, aujourd'hui aux droits du cy-devant chapitre et évêché de Tréguier doit en acquitter les dettes, arrête qu'une reconnaissance de liquidation définitive de la somme de 312 livres sera délivrée au citoyen Le Roux...

(2) A plusieurs occasions Le Roux fut envoyé à Lannion comme commissaire par le Département, mais nous n'avons que très rarement rencontré son nom avec la qualification de juge de district. (Voir pourtant: Dist. de Lannion, Reg. des dépôts de pétitions, 26 août et 17 octobre 1791. — Administration centrale : Délibération 3 mars 1791).

partie du tribunal criminel, qui tenait ses séances à SaintBrieuc (1). Ce choix et celui de deux autres juges était motivé par plusieurs vacances à combler, dont l'une amenée par la nomination à la Convention, le 7 septembre, du juge-président, Palasne de Champeaux, dernier sénéchal de Saint-Brieuc et ancien membre de l'Assemblée Constituante.

Le Roux demeura administrateur et juge jusqu'au décret du 14 juin 1793, qui décida qu'il y aurait désormais incompatibilité entre ces deux fonctions. Aussi, à la séance du Conseil général du 12 juillet suivant, le voit-on démissionner en même temps que neuf autres de ses collègues, faisant partie comme lui du tribunal criminel des Côtes-du-Nord.

(1) Le tribunal criminel du département, inauguré le 2 janvier 1792, tint d'abord ses audiences dans l'ancienne chapelle Saint-Gilles, près de la rue de la Préfecture actuelle, et ce ne fut qu'en l'an VII qu'il fut transféré à la maison dite du Calvaire, c'est-à-dire rue Saint-Benoît dans la partie ancienne des locaux aujourd'hui occupée par les Dames du Sacré-Cœur.

Voici quelle était la composition de ce tribunal Un juge-président, un accusateur public (ou son substitut), un greffier (ou un secrétaire-greffier), tous trois permanents. Puis trois juges (et dans quelques circonstances quatre) empruntés aux tribunaux des neuf districts. Ces derniers furent désignés par le Directoire du département jusqu'à la loi du 2 nivôse an II (22 décembre 1793), qui décida dans son article 40, qu'ils seraient nommés directement par chaque district, appelé à tour de rôle à procéder à ce choix. C'est pour cela que l'on voit figurer au tribunal criminel non seulement des juges de district comme Digaultray, père du député à la Législative, Loncle qui devait siéger à la Convention, mais d'autres personnages habitant parfois aux extrémités du département. On peut s'en rendre compte par la liste suivante, qui reproduit les noms et les districts de tous les juges qui siégèrent au tribunal criminel en l'an II et en l'an III (22 septembre 1793-23 septembre 1795), c'est-à-dire pendant la période la plus agitée de la Révolution :

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III

Au tribunal criminel Le Roux siégea, comme juge, jusqu'au jour (16 décembre) où il en fut nommé président par l'Assemblée des électeurs du département. Il fut installé dès le lendemain dans ces nouvelles fonctions.

C'est pendant qu'il présidait ce tribunal, qui ne paraît pas avoir laissé de souvenirs bien sanguinaires, qu'il eut à juger à Lannion deux prêtres sujets à la déportation, arrêtés à Tréguier en même temps que la personne qui les avait recélés. Cette affaire, une des plus curieuses, mais aussi la plus lamentable de celles qui eurent lieu dans les Côtes-du-Nord pendant la Révolution, a été racontée maintes fois, mais toujours avec des détails plus ou moins inexacts. Il nous est d'autant plus indispensable de nous y arrêter, que c'est elle qui a donné évidemment naissance à «< la légende de Chef-du-Bois. »

Toutefois, avant de la résumer, d'après toutes les pièces du dossier que nous avons sous les yeux (1), il nous paraît utile de nous rendre compte de la nouvelle et triste situation qui était faite à la ville de Tréguier.

De toutes les villes de Bretagne, et peut-être de France, Tréguier était celle qui avait été le plus maltraitée par la Révolution, qui n'avait même pas daigné en faire un chef-lieu de district (2).

Quelle tristesse pour Tréguier, ancienne ville de juridiction royale, qui avait naguère possédé la juridiction des Traites et celle de l'Amirauté, dont elle avait été dépouillée au profit de Morlaix, de se voir enlever à présent ses autres juridictions, et

(1) Ce dossier du tribunal criminel, numéroté 246, contient seulement dix pièces qui mériteraient d'être reproduites in extenso.

(2) Les continuateurs du Dictionnaire d'Ogée (II, 927) disent à tort que Tréguier fut chef-lieu de district en 1790.

transférer les tribunaux réorganisés à Lannion, qui, jusqu'alors, n'avait été qu'une juridiction seigneuriale!

Quel amoindrissement pour la ville ecclésiastique par excellence que la perte de son évêché, qui allait entraîner par contrecoup celle de son chapitre et de son séminaire !

Ces suppressions successives avaient porté à Tréguier un coup fatal, en causant un préjudice incalculable à ses négociants, à ses boutiquiers, à ses marins pêcheurs, à ses tisseurs, en un mot, à tous les gens vivant d'un métier ou louant leurs services.

Ce n'est pas tout. Peu à peu les familles nobles, les plus riches, avaient pris le chemin de l'émigration. Le collège, florissant la veille, après s'être dégarni de professeurs et d'élèves, avait dû fermer ses portes (1). Les congrégations religieuses avaient été dissoutes, et le nombreux clergé, qui formait le principal élément de la prospérité et même de la vie de la cité cléricale, de «< ce nid de prêtres et de moines (2), » avait préféré s'en aller plutôt que de prêter le serment constitutionnel. Les uns, très nombreux, avaient fui à l'étranger; les autres commençaient déjà à peupler les prisons et les maisons d'arrêt. Mais il en était aussi qui, demeurés en communication très régulière avec leur ancien évêque, persistaient à errer dans les communes rurales des environs, criant au schisme et à la persécution, prêchant ouvertement la révolte et la désobéissance aux décrets

(1) Le 30 octobre 1791, le district de Lannion, qui souhaite vivement le maintien du collège de Tréguier, écrit au département que le nombre des élèves diminue et qu'il n'est pas possible de trouver de professeurs de logique et de rhétorique. Il propose en conséquence, comme mesure transitoire, de supprimer ces deux cours, tout en conservant les autres classes. L'agonie du collège ne devait guère se prolonger, car, le 22 brumaire an III (12 novembre 1794), la Commission exécutive de l'Instruction publique ayant adressé un questionnaire à la Commission administrative provisoire de Lannion (qui remplaçait le district mis en accusation), celle-ci, à cette demande Quels sont, dans les villes de votre district, les établissements d'instruction publique en activité? ne put faire que la réponse suivante : Aucun autre que les écoles primaires; il existait avant la Révolution un collège à Tréguier, mais qui est tombé par l'émigration des professeurs et le deffaut d'élèves (District de Lannion, Reg. des délib. du directoire et Reg. de corresp. synoptique du département et du district). (2) RENAN Souvenirs d'enfance et de jeunesse, p. 6.

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de l'Assemblée nationale. Combien il est facile de se faire idée de l'influence de pareilles excitations sur une population qui avait déjà tant de sujets sérieux de regret et de mécontentement!

Aussi, dès le commencement de la Révolution, en octobre 1789, la ville de Tréguier était-elle le théâtre d'une rébellion ouverte. Là, comme à Lannion, où la conduite indigne de la populace venait d'exciter l'indignation sur tous les points de la Bretagne, les fournisseurs chargés, dans un but de défense nationale, du ravitaillement du port de Brest, avaient failli être massacrés. Pour embarquer les grains, il avait fallu l'intervention de sept ou huit cents gardes nationaux, venus de Brest, Morlaix, Landerneau, qui, arrivant à l'improviste, s'emparèrent d'une vingtaine des plus mutins, qu'ils garrottèrent, puis amenèrent à Brest, où plusieurs furent condamnés aux travaux forcés (1).

Le 16 juillet 1790, le Département avait été obligé d'envoyer à Tréguier trois de ses membres pour tâcher d'y ramener le bon ordre et la tranquillité. Ces commissaires, après y avoir fait un long séjour, après y avoir récolté force réclamations, pétitions et protestations des habitants, avaient déposé à leur retour, sur le bureau du Conseil général, à la séance du 10 novembre, un rapport où ils exposaient les difficultés de la situation présente et les dangers de l'avenir(2).

L'orage fut conjuré, mais, hélas! pas pour longtemps, car chaque année devait amener dans Tréguier au moins un soulèvement ou une émeute, ce qui permettait au Département

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(1) Arch. des Côtes-du-Nord, Délib. et Corresp. du départ. LE MAOUT, Annales arm., 284.

(2) Du 16 juillet 1790. L'Administration départementale nomme trois commissaires dans son sein, Simon, Corvaisier et Georgelin « pour prendre connaissance de l'affaire de Tréguier, et les autorise à se faire représenter par les officiers municipaux en exercice les registres de la nouvelle et de l'ancienne municipalité, ceux du Comité permanent, etc... et à prendre tous renseignemens et faire toute information qu'ils jugeront convenable. »>

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