Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

FABLE VIII.

LES VAUTOURS ET LES PIGEONS.

Abstemius, fab. 96, de Accipitribus inter se inimicis, quos Columbæ pacaverant, P. Candidus, fab. 136, Accipitrum paz. - Haudent, 2o partie, fab. 153, des Coulombz et des Espreuiers.

[ocr errors]

Mythologia sopica Neveleti, p. 574.

Dans la fable de Phèdre qui a pour titre Milvus et Columba (livre I, fab. 31, Nevelet, p. 408), la pensée est différente. Les Colombes ont pris le Milan pour roi, croyant se faire un protecteur d'un ennemi; le Milan, devenu leur maître, les gobe à son plaisir : ce qui prouve, comme le dit le poëte en commençant, que « se mettre sous la protection d'un méchant, c'est courir à sa perte en cherchant du secours » :

Qui se committit homini tutandum improbo,
Auxilia dum requirit, exitium invenit.

- La fable 2 du livre II de Romulus, Columbæ et Milvus; la fable 22 de l'Anonyme de Nevelet (p. 502), de Accipitre et Columbis, la fable 25 de Neckam, de Niso et Columbis (édition du Méril, p. 196 et 197), la fable 21 d'Ysopet 1, citée par Robert (tome II, p. 83 et 84), des Colons et de l'Escoufle, et la fable 18 de Corrozet, des Colombes et de l'Espreuier, se rapprochent beaucoup de celle de Phèdre les Pigeons, en guerre avec un oiseau de proie, prennent pour roi un autre oiseau de proie, et reçoivent plus de dommage de leur souverain qu'ils ne faisaient de leur ennemi'.

M. Taine (p. 316 et 317) fait remarquer que cette fable est, chez notre auteur, une de celles qui « prouvent que le mètre uniforme eût fait tort à la pensée poétique, et que le génie ne peut

1. La fable les Colombes et le Vautour, des Fables d'Ésope ou Ésope à la ville de Boursault (acte IV, scène v, 1690), est, comme nous l'avons dit plus haut (p. 38), une imitation, non des Vautours et les Pigeons, mais du Soleil et les Grenouilles (livre VI, fable x11).

2. Il cite en outre, comme exemples à l'appui, Jupiter et les Tonnerres (livre VIII, fable xx), et le Rat de ville et le Rat des champs

rien contre la nature des choses. Qu'on réserve l'alexandrin, ajoute M. Taine, pour le drame et la tragédie, à la bonne heure : les personnages parlent d'un ton sérieux et soutenu. Qu'on garde les petits vers pour la poésie légère : la poésie vole alors aussi légèrement qu'eux. Mais dans les fables, où les pensées sérieuses et gaies, tendres et plaisantes, à chaque instant se mêlent, nous voulons des vers de mesures différentes et des rimes croisées. >>

3

Mars autrefois mit tout l'air en émute'.

Certain sujet fit naître la dispute

Chez les oiseaux, non ceux que le Printemps
Mène à sa cour, et qui, sous la feuillée,

Par leur exemple et leurs sons éclatants,

5

(livre I, fable 1x), la dernière, croyons-nous, plus justement que les deux autres et surtout que celle-ci.

3. Le Dieu de la guerre, pour « la guerre, une guerre. » C'est le ton de l'épopée que la Fontaine sait prendre avec tant d'art quand il veut relever ce qu'il dit. Il le soutient ici, jusqu'à la chute qui détonne et surprend :

Pour un chien mort...;

mais, du reste, sans qu'avant cette chute il y mêle des contrastes plaisants et le tourne en badinage comme au début de la fable x du livre II, au vers 1 de la fable xvi du livre VI, et ailleurs.

4. Le même mot se retrouve sous cette forme au livre X, fable 1, vers 19. « Émute, dit Boissonade, dans la lettre que nous avons déjà citée (ci-dessus, p. 117, note 13), est quelque prononciation de province. Nos vieux auteurs mêlaient souvent les dialectes; Ronsard en avait donné l'exemple. » Littré, dans son Dictionnaire, explique comment la prononciation primitive, gardée ici par la Fontaine, s'est altérée : « Le participe, écrit émeu, se prononçait ému; le substantif émeute (qui en dérive) se prononçait émute. Puis l'écriture a pris le dessus; et on a prononcé ce qui était écrit, non ce qui était dans la tradition. >>

5. Personnification et « tournure poétique, dit Chamfort, qui a l'avantage de mettre en contraste, dans l'espace de dix vers, les idées charmantes que réveillent le printemps, les oiseaux de Vénus, etc., et les couleurs opposées dans la description du peuple

vautour. >>

La gent maudite aussitôt poursuivit
Tous les Pigeons, en fit ample carnage,
En dépeupla les bourgades, les champs.
Peu de prudence eurent les pauvres gens
D'accommoder un peuple si sauvage.

Tenez toujours divisés les méchants 16:
La sûreté du reste de la terre
Dépend de là. Semez entre eux la guerre,
Ou vous n'aurez avec eux nulle paix.
Ceci soit dit en passant je me tais.

40

45

à grands coups, engager la mêlée, sens où le verbe, non plus que le nom chamaillis (combat de chevaliers ou joute en champ clos), n'a pas toujours été familier, où il était noble et même épique :

Nous irons bien armés; et si quelqu'un nous gronde,

Nous nous chamaillerons....

-Moi, chamailler, bon Dieu! Suis-je un Roland, mon maître,
Ou quelque Ferragu?

(MOLIÈRE, Dépit amoureux, acte V, scène 1, vers 1482-1486; allusion au combat de Ferragus et de Roland dans le xir chant du Roland furieux.)

16. « Ceci n'est pas, à la vérité, une règle de morale: ce n'est qu'un conseil de prudence, mais il ne répugne pas à la morale. » (CHAMFORT.) Ce vers rappelle la fameuse maxime : Divide ut imperes, << divise pour régner, pour être le maître; » la Fontaine, du moins, veut qu'on ne l'applique qu'aux méchants.

FABLE IX.

LE COCHE ET LA MOUCHE.

1ο Ésope, fab. 213, Κώνωψ καὶ Βοῦς, Κώνωψ καὶ Ταῦρος (Coray, p. 138, sous trois formes, et p. 139).

[merged small][ocr errors]

Babrius, fab. 84, Kúvwy Romulus, livre IV, fab. 18, Pulex et Camelus : elle

a été mise en vers dans l'Appendice des fables ésopiques de Burmann (no 31). Ysopet II, fab. 35, ung Tahon qui s'assist sur ung Mulet (Robert, tome II, p. 87 et 88). P. Candidus, fab. 71, Taurus et Culex.

2o Phèdre, livre III, fab. 6, Musca et Mula. -Romulus, livre II, fab. 17, même titre. Anonyme de Nevelet, fab. 37, de Mula et Ysopet 1, fab. 35, d'un Muletier et d'une Mule (Robert, tome II, p. 86 et 87).

Musca.

[ocr errors]

Hau

3° Abstemius, fab. 16, de Musca quæ, quadrigis insidens, pulverem se excitasse dicebat. - Faërne, fab. 45, Musca et Quadriga. dent, 2o partie, fab. 77, d'une Mouche excitante pouldre. Mythologia sopica Neveleti, p. 262, p. 358, p. 419, p. 513, p. 541.

Voyez aussi le Recueil déjà cité de Daniel de la Feuille, 2o partie, p. 5, et les Chansons choisies de M. de Coulanges, p. 64.

Cette fable fut publiée pour la première fois dans le volume intitulé Fables nouvelles et autres poésies de M. de la Fontaine, 1671; elle est la seconde des huit fables contenues dans ce recueil, et se trouve à la page 4. Mme de Sévigné et son fils y ont fait plusieurs fois allusion dans les années 1676, 1677, 1679 : voyez tome IV des Lettres, p. 365; tome V, p. 187, 189, 195, 209-210; et tome VI, p. 122, 151-152.

1o Dans les fables d'Ésope, la Mouche se pose sur la corne du Bœuf, et lui dit que, si elle le fatigue, elle se retirera; le Bœuf lui répond qu'il ne s'est pas aperçu de son arrivée, et qu'il ne s'apercevra pas davantage de son départ. La fable de Babrius, la première fable citée de Romulus (d'où dérivent la 36o de Neckam et la 70o de Marie de France), celle de P. Candidus, et la fable 35 d'Ysopet 11, ung Tahon qui s'assist sur ung Mulet, traitent à peu près le

même sujet que celle d'Ésope. 2o Les apologues de Phèdre, de
Romulus et de l'Anonyme de Nevelet, et la fable 35 d'Ysopet 1, d'un
Muletier et d'une Mule, représentent la Mouche blâmant une Mule de
sa lenteur, et la menaçant de la piquer; la Mule répond qu'elle ne
craint rien de la Mouche, mais tout de son conducteur armé du
fouet c'est là surtout, ce semble, que, dans les deux fables, de
lui connues, de Phèdre et de l'Anonyme, la Fontaine a dû trouver
le germe de la sienne. 3o Dans les fables d'Abstemius et de Faërne
(Haudent leur a emprunté la sienne), la Mouche, voyant la pous-
sière que soulève un char à quatre chevaux sur lequel elle s'est
posée, s'écrie: Oh! que je fais de poudre! C'est ainsi du moins que
le dernier trait était rendu dans une traduction ou une imitation
que Mme de Grignan envoya à Mme de Sévigné en 1677, et la mère
et la fille en ont fait de nombreuses applications2. - C'est encore
ainsi
que le sujet est conçu dans une fable intitulée : le Moucheron
ou la folle vanterie, qui est la 7o de l'Ésope du temps, par Desmay,
publié en 1677; dans la fable 32 de le Noble, de la Mouche et du
Chariot ou le Craqueur; et dans le quatrain xxxi de Benserade, où se
trouve, comme dans la Fontaine, le mot sablonneux :

Un chariot tiré par six chevaux fougueux
Rouloit sur un chemin aride et sablonneux;

Une mouche étoit là, présomptueuse et fière,

Qui dit en bourdonnant : « Que je fais de poussière ! >>

Saint-Marc Girardin (vire leçon, tome I, p. 222–224) cite la fable d'Ysopet II que nous avons mentionnée, et en rapproche

1. Chez Abstemius:

Quam magnam vim pulveris excitavi!

Chez Faërne (vers 6 et 7):

Di magni, ait,

Quantam profundi vim excitavi pulveris!

2. Voyez aux pages citées du tome V des Lettres de Mme de Sévigné. Peut-être, d'elle-même, Mme de Grignan avait-elle dégagé le bref et vrai mot de la fable d'Abstemius et de Faërne de ces trois médiocres vers de Desmay, qui avait précisément, comme il va être dit, publié ses fables en 1677:

Il commence un hymne à sa gloire

Ayant pour son refrain qu'il a fait seul voler
Le tourbillon de poudre en l'air.

« ZurückWeiter »