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Jetant des deux côtés la griffe en même temps,

Mit les plaideurs d'accord en croquant l'un et l'autre 28. 45

Ceci ressemble fort aux débats qu'ont parfois
Les petits souverains se rapportants 29 aux rois3.

vers 36; et dans le conte v de la II° partie, vers 234. Racine l'avait employée dans les Plaideurs (1668), acte I, scène 1, vers 7.

28. Les paroles du Chat et tout ce dénouement sont empruntés au Livre des lumières, p. 253 : « Le Chat, faisant le discret, écoute le plaidoyer de l'autre Oiseau; puis s'adressant à la Perdrix : «Ô belle fille, lui dit-il, je suis vieux, et je n'entends pas de loin; << approchez-vous, et haussez votre voix, afin que je vous entende « mieux. » Ils s'approchèrent tout près, sans s'en méfier, le voyant si dévot; mais aussitôt que cet hypocrite les vit auprès de lui, il se jeta sur eux, et fit un bon repas de tous les deux. » Même texte, avec quelques variantes, dans les Fables de Pilpay de 1698, p. 30g. 29. Telle est la leçon des éditions originales. Au sujet de cet accord, voyez les Introductions grammaticales des divers Lexiques de la collection.

30. Cette moralité, où le fabuliste revient sur le danger que fait courir aux petites puissances l'intervention des grandes dans leurs querelles, a quelque analogie avec celle qui termine la fable x111 du livre I, les Voleurs et l'Ane.

FABLE XVII.

LA TÊTE ET LA QUEUE DU SERPENT.

Esope, fab. 260, Oùpà xat Méλn "Opɛws (Coray, p. 172). Gilberti Cognati Narrationum sylva, p. 57, de Serpente.

Mythologia asopica Neveleti, p. 299.

elle

Plutarque a ainsi raconté la fable dans la Vie d'Agis et de Cléomène (traduction d'Amyot, fol. 550 vo et 551 ro de l'édition de 1565): « ....Phocion respondit une fois à Antipater lequel lui vouloit faire faire quelque chose qui n'estoit point honorable : « Tu ne sçau<< rois, lui dit-il, avoir Phocion pour ami et pour flatteur ensemble. » Ainsi ne pouvez-vous avoir un qui vous soit maistre et valet, ne qui vous commande et vous obéisse ensemble: autrement il est force qu'il advienne l'inconvénient qui est en la fable du Serpent, duquel la Queue vint un jour à quereller contre la Teste, disant qu'elle vouloit à son tour aller devant, non pas tousjours demourer derrière : ce qui lui estant ottroyé par la Teste, s'en trouva très-mal elle-mesme, ne sachant pas comment ne par où il falloit cheminer, et si fut encore cause que la Teste fut toute dechirée, estant contrainte de suivre contre nature une partie qui n'avoit ni vue ni ouïe pour se pouvoir conduire. Nous voyons le mesme estre advenu à plusieurs qui, au gouvernement de la chose publique, ont voulu faire toutes choses au gré de la multitude; car s'estant une fois attachés à ce joug de servitude de vouloir en tout et par tout agréer à la commune 1, qui bien souvent s'esmeut témérairement et sans raison quelconque, ils n'ont sçu puis après retirer, ni retenir et arrester la fureur et témérité du peuple. »

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Le même sujet est traité dans l'apologue XL des Avadánas, tome I, p. 152-154 de la traduction de Stanislas Julien. On peut rapprocher de la Tête et la Queue du Serpent la fable II du livre III, les Membres et l'Estomac; des deux côtés le fond est le même c'est toujours la révolte des petits contre les grands, de ceux qui sont derrière contre ceux qui sont devant, en un mot, de

1. Voyez le vers 34 des Membres et l'Estomac, tome I, p. 209.

la Queue contre la Tête. — Chamfort trouve que cette fable « n'est pas d'une grande application dans nos mœurs; mais elle en avait beaucoup, dit-il, dans les anciennes démocraties. » Si Chamfort avait écrit un peu plus tard, il n'eût pas cru sans doute devoir faire cette distinction. Est-il besoin de faire remarquer au lecteur que la donnée de la fable repose sur une erreur longtemps accréditée? Les anciens savaient, comme nous, que les serpents mordent, que leur venin sort des glandes de la bouche. Aristote (Histoire des animaux, livre VIII, chapitre xxIx), Pline (Histoire naturelle, livre XI, chapitre LXII) se servent, en parlant d'eux, des mots δήγματα et morsus. Mais, au seizième siècle, des naturalistes enseignaient encore qu'ils portaient leur poison dans la queue (la Fontaine n'en dit pas plus) et que de là il montait à la bouche, dans une vésicule qui se brisait quand ils mordaient. Pline, à l'endroit cité, paraît croire aussi, d'après des auteurs qu'il nomme « très diligents », que le venin part de loin, que c'est le fiel, qui « parvient à la bouche par des veines sous l'épine ».

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La Tête avoit toujours marché devant la Queue.
La Queue au Ciel se plaignit,

Et lui dit :

« Je fais mainte et mainte lieue

Comme il plaît à celle-ci :

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2. Ses notes sur la Fontaine ne parurent, partiellement, qu'en 1796, dans les Trois fabulistes, mais avaient été probablement composées vers l'époque où Chamfort écrivait son Éloge de la Fontaine, publié en 1774.

3. Gesner, Histoire des animaux, livre V (compilé par Carron), p. 3 de l'édition de Francfort, 1621; la 1o est de 1587.

J. DE LA FONTAINE, II

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Croit-elle que toujours j'en veuille user ainsi?

Je suis son humble servante".

On m'a faite, Dieu merci,
Sa sœur et non sa suivante.
Toutes deux de même sang,
Traitez-nous de même sorte :
Aussi bien qu'elle je porte
Un poison prompt et puissant.
Enfin voilà ma requête :

C'est à vous de commander,
Qu'on me laisse précéder

A mon tour ma sœur la Tête.
Je la conduirai si bien

Qu'on ne se plaindra de rien. »
Le Ciel eut pour ces vœux une bonté cruelle.
Souvent sa complaisance a de méchants effets.
Il devroit être sourd aux aveugles souhaits.

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4. Ironiquement, comme on dit : Je suis votre serviteur (ou Serviteur, tout court, ci-après, livre VIII, fable xxi, vers 12), pour exprimer un refus. Ainsi dans le Misanthrope (acte IV, scène 1, vers 1151, tome V, p. 514):

Mais pour louer ses vers, je suis son serviteur.

Voyez aussi George Dandin, acte II, scènes I et II (tome VI, p. 544 et 548); et, même pièce, acte III, scène vi (p. 584), avec valet au lieu de serviteur, aux deux derniers endroits, et servante au premier. 5. Voyez, ci-dessus, à la fin de la notice. Tacite, en parlant de l'empoisonnement de Britannicus, applique successivement au poison, par une rencontre toute naturelle et qu'explique leur justesse même, les deux adjectifs de même sens : validum et rapidum (Annales, livre XIII, chapitre xv).

6. Ou faire comme le Jupiter de Lucien : « Quand il trouvait les prières équitables, il les laissait monter jusqu'à lui par l'ouverture de la trappe, les plaçant à sa droite; mais les demandes injustes, il les renvoyait sans effet, et soufflait dessus pour les empêcher d'approcher du Ciel. » (Icaroménippe, chapitre xxv, traduction de M. Talbot, tome II, p. 148.)- Comparez les fables Iv du livre VI, Jupiter et le Métayer, et vi du livre VII, les Souhaits.

Il ne le fut pas lors'; et la guide nouvelle,
Qui ne voyoit, au grand jour,

Pas plus clair que dans un four',
Donnoit tantôt contre un marbre,
Contre un passant, contre un arbre :

Droit aux ondes du Styx elle mena sa sœur.

Malheureux les États tombés dans son erreur 10!

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7. Lors pour alors, était vieux déjà du temps de la Fontaine, comme le remarque Richelet en 1680.

8. D'après le même Dictionnaire de Richelet, ce mot pouvait prendre les deux genres, selon qu'il se rapportait à un nom masculin ou à un féminin. Quelques années après cependant (1694), l'Académie le fait exclusivement masculin, excepté, comme aujourd'hui encore, quand il signifie « une rêne, une longe qui est attachée à la bride d'un cheval, etc. », et dans certains titres de livres : la Guide des pécheurs (au vers 37 du Sganarelle de Molière, tome II, p. 166, comme au vers 20 de la satire xIII de Mathurin Regnier), la Guide des chemins, etc.

9. Littré, à l'Historique du mot FOUR, cite de cette comparaison un exemple du quinzième siècle.

10. Ce vers nous ramène à l'application que fait Plutarque de cet apologue: voyez le passage cité à la notice, p. 192.

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