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Serviteur, disoit-il; votre appât est grossier: On ne m'y tient pas, et pour cause. » Cependant un Faucon sur sa perche' voyoit

Notre Manceau qui s'enfuyoit.

Les chapons ont en nous fort peu de confiance,
Soit instinct, soit expérience'.

Celui-ci, qui ne fut qu'avec peine attrapé,
Devoit, le lendemain, être d'un grand soupé,
Fort à l'aise en un plat, honneur dont la volaille
Se seroit passée aisément.

L'Oiseau chasseur lui dit : « Ton peu d'entendement
Me rend tout étonné. Vous n'êtes que racaille",
Gens grossiers, sans esprit, à qui l'on n'apprend rien.
Pour moi, je sais chasser, et revenir au maître.

Le vois-tu pas à la fenêtre ?

Il t'attend: es-tu sourd? Je n'entends

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que trop bien. Repartit le Chapon; mais que me veut-il dire? Et ce beau cuisinier armé d'un grand couteau?

cette note, p. 544 du même tome III. Quant au tour, fort expressif, c'est le même que dans la locution: A fripon, fripon et demi.

7. C'est, avec ellipse, la même locution qu'au vers 15 de la fable xvII du livre VII: voyez ci-dessus, p. 194 et note 4.

8. Mêmes mots, dans l'ordre inverse: « Sur la perche un faucon,» au conte v de la III° partie, vers 93.

9. Pour avoir vu le traitement subi par plus d'un de ses pareils: voyez ci-après les vers 34-36. - « Cela est plaisant, dit Chamfort au sujet de ce vers et du 19°; et le Chapon qui

Devoit, le lendemain, être d'un grand soupé ! »>

10. « Le discours de l'Oiseau chasseur, remarque Nodier, est du ton superbe qui convient à l'ami du maître, et la vanité d'une demi-éducation est exprimée avec une vérité incomparable. »>> y Dans Ysopet I (voyez la notice), l'Autour exprime, mais avec politesse, le même étonnement.

11. Ce mot exprime, dit Littré, un degré au-dessous de canaille. Il est appliqué dans le livre IV, fable vi, vers 33, à la plèbe des Rats.

J. DE LA FONTAINE. II

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Reviendrois-tu pour cet appeau

Laisse-moi fuir; cesse de rire

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De l'indocilité qui me fait envoler 13
Lorsque d'un ton si doux on s'en vient m'appeler.
Si tu voyois mettre à la broche
Tous les jours autant de faucons

Que j'y vois mettre de chapons",

Tu ne me ferois pas un semblable reproche. »

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12. Appeau désigne proprement soit un engin servant à imiter le cri des oiseaux, soit un oiseau même dressé pour attirer les autres. Prendre le mot dans son sens primitif d'appel s'accommoderait parfaitement au sens de ce passage: voyez le dernier exemple cité par Littré à l'Historique de son article APPEAU.

13. Pour cette ellipse de me devant un infinitif réfléchi dépendant de faire, voyez les divers Lexiques de la Collection, à l'article ELLIPSE dans l'Introduction grammaticale.

14. Dans Ysopet I, le même motif est allégué, mais avec compassion :

Le Chapon dit : « l'ai grant angoigne (angoisse)
Quant vois de mes freres la poigne (peine). »

Dans la fable analysée par Benfey, à l'endroit cité dans la notice: « Je n'ai pas encore vu rôtir de faucon, dit la Poule (substituée dans cette version au Chapon), ni à la broche, ni dans la poêle. »

FABLE XXII.

LE CHAT ET LE RAT.

A la page 608 du Specimen sapientiæ Indorum veterum du P. Poussines (Rome, 1666: voyez ci-dessus, p. 146 et 184), on lit, dans la vIII dissertation, l'apologue du Chat et le Rat. C'est probablement là que la Fontaine l'a pris, comme plusieurs autres (livre X, fables xi, xii et xv; voyez en outre les notices des fables x et xvi du livre VII). La fable est aussi dans la traduction grecque par Siméon Seth, publiée, avec version latine, à Berlin, en 1697, par Stark, et mentionnée plus haut, p. 183, note 2 (Specimen sapientiæ Indorum veterum, id est, Liber ethico-politicus pervetustus, etc., p. 383393). Elle est donnée également par Cardonne, continuateur de Galland, dans les Contes et fables indiennes de Bidpaï et de Lokman, 1778, tome III, p. 62-91, sous ce titre : Histoire du Rat et du Chat; par Doni, la Filosofia morale (Trente, 1594), fol. 143; et par Malespini, livre II, nouvelle 91, Discorso gustevole di un Topo ed un Gattone selvatico. M. Loiseleur Deslongchamps (p. 66, note 1) fait observer que l'existence du Specimen sapientiæ (de 1666) a pu être révélée à notre fabuliste par les détails que le docte évêque Huet, dans sa Lettre sur l'origine des romans, donne sur la version grecque de Siméon Seth et sur la traduction latine du P. Poussines. Dans les Deux livres de Filosofie fabuleuse de Pierre de la Rivey (Paris, 1577) se trouvent les mêmes fables que dans le Specimen; « mais, ajoute Loiseleur Deslongchamps, l'examen de cet ouvrage m'a convaincu que la Fontaine n'y a pas puisé. » — Une autre source orientale où il n'a pu puiser non plus (elle était alors inconnue de l'Europe), mais curieuse à signaler, c'est le vaste poëme sanscrit le Mahabharata, où le même sujet est traité (au livre XII, stances 4930 et suivantes) de la manière la plus raffinée, comme dit M. Albrecht Weber (Indische Studien, tome III, p. 346-347), par un subtil et madré politique indien.

« Le résultat de cette fable n'est pas une leçon de morale, remarque Chamfort, mais elle est un conseil de prudence, et cette

prudence n'a rien dont la morale soit blessée. Ainsi l'apologue est très-beau. >> Quelques traits, quelques pieuses et mielleuses paroles du Chat rappellent à divers commentateurs le Tartuffe de Molière, et en outre, à M. Taine (p. 129), le Joseph Surface de Sheridan (voyez, ci-après, les notes 9, 11, 15, 17).

Quatre animaux divers, le Chat Grippe-fromage,
Triste-oiseau le Hibou, Ronge-maille le Rat1,
Dame Belette au long corsage',

Toutes gens d'esprit scélérat,

Hantoient le tronc pourri d'un pin vieux et sauvage. 5 Tant y furent, qu'un soir à l'entour de ce pin L'Homme tendit ses rets. Le Chat, de grand matin, Sort pour aller chercher sa proie.

Les derniers traits de l'ombre empêchent qu'il ne voie Le filet*: il y tombe, en danger de mourir;

Et mon Chat de crier; et le Rat d'accourir,

ΙΟ

1. Ce sont là de vraies épithètes à la façon d'Homère, comme le remarque M. Taine (p. 303-304), et particulièrement, ajouterons-nous, de Ronsard, qui en cela imite Homère. La troisième revient comme nom propre, au vers 39, et cinq fois dans la fable xv du livre XII, aux vers 102, 105, 117, 125, 131, dont le premier est : Rongemaille (le Rat eut à bon droit ce nom).

A tous ces vers, Rongemaille, sans trait d'union, dans les textes originaux. « Le triste oiseau » désigne déjà le Hibou, non comme nom propre, au vers 6 de la fable xvIII du livre V.

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2. Voyez ci-dessus, p. 186, note 12. Pour le mot corsage, comparez le conte Iv de la III partie, vers 285, le vir de la IV partie, vers 37, et le vers 2 de l'Épitre au Roi pour Lulli. Malherbe a dit, dans l'Ode à Monsieur le grand écuyer de France :

Achille étoit haut de corsage;

et Ménage, à propos de ce vers, fait cette remarque: « Ce mot est vieux, mais il est beau, et je ne sais pourquoi on ne s'en sert plus. » 3. A remarquer, devant le mot gens, ce féminin, conforme au reste à la règle, d'un adjectif qui n'exprime pas qualité, mais nombre. 4. « Ce rejet, dit très-justement Geruzez, dérobe, pour ainsi dire, le filet, comme les derniers traits de l'ombre qui le couvre. » 5. Voyez la note sur le vers 36 de la fable x du livre VIII.

L'un plein de désespoir, et l'autre plein de joie;
Il voyoit dans les lacs son mortel ennemi.

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Le pauvre Chat dit : « Cher ami,
Les marques de ta bienveillance
Sont communes en mon endroit7;
Viens m'aider à sortir du piége où l'ignorance
M'a fait tomber. C'est à bon droit

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Que, seul entre les tiens, par amour singulière",
Je t'ai toujours choyé, t'aimant comme mes yeux
Je n'en ai point regret, et j'en rends grâce aux Dieux.
J'allois leur faire ma prière,

Comme tout dévot Chat en use les matins 11.

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6. Las, dans les deux textes de 1678, dans ceux de 1682 et de 1688; lags, dans celui de 1708; même orthographe, las, aux vers 39, 41, 46 de la fable 1 du livre IX. Dans d'autres fables, les éditions originales ont soit lacs, soit laqs.

7. A mon égard. « Remarquons qu'il feint d'avoir déjà reçu du Rat plusieurs services. Il sait qu'on est porté à faire du bien à ceux auxquels on en a déjà fait. » (CHAMFORT.)

8. Comparez la plupart des Lexiques de la Collection.

9. « On ne saurait peindre avec plus de naturel l'hypocrisie du Tartuffe, dit l'abbé Guillon. Comme l'intérêt le rend affectueux et tendre! Ce n'est pas assez dire qu'il l'ait aimé : « Je t'ai toujours a choyé. » L'expression.... a quelque chose de plus naïf; elle indique un soin plus délicat, plus recherché. Voyez au conte xvi

de la II partie, vers 187.

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10. Pour cette locution familière, si expressive, voyez l'exemple de Voltaire que Littré joint au nôtre, à l'article OEIL, 1o. C'est une comparaison bien voisine de celle qui se lit plusieurs fois dans la Bible, avec l'idée de « garder », custodire, servare, par exemple au psaume XVI, verset 8: A resistentibus dexteræ tuæ custodi me, ut pupillam oculi.

11. Ici encore, ne semble-t-il pas, selon la remarque de Nodier, qu'on entende Tartuffe faisant montre de sa charité, comme le Chat de sa dévotion :

Si l'on vient pour me voir, je vais aux prisonniers
Des aumônes que j'ai partager les deniers?

(Acte III, scène 11, vers 855-856.)

Voyez ci-dessus, p. 188, la note 20 de la fable xvi du livre VII.

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