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rieux du troupeau. Il sort de sa retraite, bâtie auprès de la demeure des morts, dont il surveille la cendre. Il est établi dans son presbytère comme une garde avancée aux frontières de la vie, pour recevoir ceux qui entrent et ceux qui sortent de ce royaume des douleurs. Un puits, des peupliers, une vigne autour de sa fenêtre, quelques colombes composent l'héritage de ce Roi des sacrifices.

Cependant l'apôtre de l'Évangile, revêtu d'un simple surplis, assemble ses ouailles devant la grande porte de l'église ; il leur fait un discours, fort beau sans doute, à en juger par les larmes de l'assistance. On lui entend souvent répéter: Mes enfants, mes chers enfants, et c'est là tout le secret de l'éloquence du Chrysostôme champêtre.

Après l'exhortation, l'assemblée commence à marcher en chantant : « Vous sortirez avec plaisir, et vous serez reçu avec joie; les collines bondiront et vous entendront avec joie. » L'étendard des saints, antique bannière des temps chevaleresques, ouvre la carrière au troupeau, qui suit pêle-mêle avec son pasteur. On entre dans des chemins ombragés et coupés profondément par la roue des chars rustiques; on franchit de hautes barrières, formées d'un seul tronc de chêne; on voyage le long d'une haie d'aubépine

où bourdonne l'abeille, et où sifflent les bouvreuils et les merles. Les arbres sont couverts de leurs fleurs, ou parés d'un naissant feuillage. Les bois, les vallons, les rivières, les rochers entendent tour à tour les hymnes des laboureurs. Étonnés de ces cantiques, les hôtes des champs sortent des blés nouveaux, et s'arrêtent à quelque distance, pour voir passer la pompe villageoise.

La procession rentre enfin au hameau. Chacun retourne à son ouvrage : la religion n'a pas voulu que le jour où l'on demande à Dieu les biens de la terre fût un jour d'oisiveté. Avec quelle espérance on enfonce le soc dans le sillon, après avoir imploré celui qui dirige le soleil, et qui garde dans ses trésors les vents du midi et les tièdes ondées ! Pour bien achever un jour si saintement commencé, les anciens du village viennent, à l'entrée de la nuit, converser avec le curé, qui prend son repas du soir sous les peupliers de sa cour. La lune répand alors les dernières harmonies sur cette fête que ramènent chaque année le mois le plus doux, et le cours de l'astre le plus mystérieux. On croit entendre de toutes parts les blés germer dans la terre, et les plantes croître et se développer des voix inconnues s'élèvent dans le silence des bois, comme le choeur des anges

champêtres dont on a imploré le secours et les soupirs du rossignol parviennent à l'oreille des vieillards, assis non loin des tombeaux 1.

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CHAPITRE IX.

DE QUELQUES FÊTES CHRÉTIENNES

LES ROIS, NOEL, etc.

EUX qui n'ont jamais reporté leurs cœurs vers ces temps de foi, où un acte

de religion étoit une fête de famille, et qui méprisent des plaisirs qui n'ont pour eux que leur innocence; ceux-là, sans mentir, sont bien à plaindre. Du moins, en nous privant de ces simples amusements, nous donneront-ils quelque chose? Hélas, ils l'ont essayé. La Convention eut ses jours sacrés: alors la famine étoit appelée sainte, et l'Hozannah étoit changé dans le cri de vive la mort! Chose étrange! des hommes puissants, parlant au nom de l'égalité et des passions, n'ont jamais pu fonder une fête, et le saint le plus obscur qui n'avoit jamais prêché que pauvreté, obéissance, renoncement

aux biens de la terre, avoit sa solennité au moment même où la pratique de son culte exposoit la vie. Apprenons par là que toute fête qui se rallie à la religion et à la mémoire des bienfaits, est la seule qui soit durable. Il ne suffit pas de dire aux hommes, Réjouissez-vous, pour qu'ils se réjouissent; on ne crée pas des jours de plaisir comme des jours de deuil, et l'on ne commande pas les ris aussi facilement qu'on peut faire couler les larmes.

Tandis que la statue de Marat remplaçoit celle de saint Vincent de Paul, tandis qu'on célébroit ces pompes dont les anniversaires seront marqués dans nos fastes comme des jours d'éternelle douleur, quelque pieuse famille chômoit en secret une fête chrétienne, et la religion mêloit encore un peu de joie à tant de tristesse. Les cœurs simples ne se rappellent point sans attendrissement ces heures d'épanchement où les familles se rassembloient autour des gâteaux qui retraçoient les présents des Mages. L'aïeul, retiré pendant le reste de l'année au fond de son appartement, reparoissoit dans ce jour comme la divinité du foyer paternel. Ses petitsenfants, qui depuis long-temps ne rêvoient que la fête attendue, entouroient ses genoux, et le rajeunissoient de leur jeunesse. Les fronts respiroient la gaieté, les cœurs étoient épanouis :

TOME XIII.

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