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pudeur, en colorant vos joues, vous rend excellemment belles. Retirées loin de la vue des hommes, comme des roses solitaires, vos grâces ne sont point soumises à leurs faux jugements; toutefois vous descendez aussi dans la lice pour disputer le prix de la beauté, non de celle du corps, mais de celle de la vertu beauté qu'aucune maladie n'altère, qu'aucun âge ne fane, et que la mort même ne peut ravir. Dieu seul s'établit juge de cette lutte des vierges; car il aime les belles âmes, même dans les corps hideux.... Une vierge ne connaît ni les inconvénients de la grossesse ni les douleurs de l'enfantement. Elle est le don du ciel et la joie de ses proches. Elle exerce dans la maison paternelle le sacerdoce de la chasteté : c'est une victime qui s'immole chaque jour pour sa mère. »

Dans l'homme, la virginité prend un caractère sublime. Troublée par les orages du cœur, si elle résiste, elle devient céleste. « Une âme chaste, dit saint Bernard, est par vertu ce que l'ange est par nature. Il y a plus de bonheur dans la chasteté de l'ange, mais il y a plus de courage dans celle de l'homme. » Chez les religieux, elle se transforme en humanité, témoin ces Pères de la Rédemption et tous ces Ordres hospitaliers consacrés au soulagement de nos douleurs. Elle se change en étude chez le savant; elle devient méditation dans le solitaire: caractère essentiel de l'àme et de la force mentale, il n'y a point d'homme qui n'en ait senti l'avantage pour se livrer aux travaux de l'esprit; elle est donc la première des qualités, puisqu'elle donne une nouvelle vigueur à l'âme, et que l'àme est la plus belle partie de nous-mêmes.

Mais si la chasteté est nécessaire quelque part, c'est dans le service de la Divinité. « Dieu, dit Platon, est la véritable mesure des choses et nous devons faire tous nos efforts pour lui ressembler1. » L'homme qui s'est dévoué à ses autels y est plus obligé qu'un autre. « Il ne s'agit pas ici, dit saint Chrysostôme, du gouvernement d'un empire ou du commandement des soldats, mais d'une fonction

1 Resp,

qui demande une vertu évangélique. L'âme d'un prêtre doit être plus pure que les rayons du soleil1. »-« Le ministre chrétien, dit encore saint Jérôme, est le truchement entre Dieu et l'homme. » Il faut donc qu'un prêtre soit un personnage divin: il faut qu'autour de lui règnent la vertu et le mystère; retiré dans les saintes ténèbres du temple, qu'on l'entende sans l'apercevoir; que sa voix solennelle, grave et religieuse, prononce des paroles prophétiques, ou chante des hymnes de paix dans les sacrées profondeurs du tabernacle; que ses apparitions soient courtes parmi les hommes, qu'il ne se montre au milieu du siècle que pour faire du bien aux malheureux : c'est à ce prix qu'on accorde au prêtre le respect et la confiance. Il perdra bientôt l'un et l'autre, si on le trouve à la porte des grands, s'il est embarrassé d'une épouse, si l'on se familiarise avec lui, s'il a tous les vices qu'on reproche au monde, et si l'on peut un moment le soupçonner homme comme les autres hommes.

Enfin le vieillard chaste est une sorte de divinité: Priam, vieux comme le mont Ida, et blanchi comme le chêne du Gargare, Priam dans son palais, au milieu de ses cinquante fils, offre le spectacle le plus auguste de la paternité; mais Platon sans épouse et sans famille, assis au pied d'un temple sur la pointe d'un cap battu des flots, Platon enseignant l'existence de Dieu à ses disciples, est un être bien plus divin: il ne tient point à la terre; il semble appartenir à ces démons, à ces intelligences supérieures dont il nous parle dans ses écrits.

Ainsi la virginité, remontant depuis le dernier anneau de la chaîne des êtres jusqu'à l'homme, passe bientôt de l'homme aux anges, et des anges à Dieu, où elle se perd. Dieu brille à jamais unique dans les espaces de l'éternité, comme le soleil, son image, dans le temps.

Concluons que les poëtes et les hommes du goût le plus délicat ne peuvent objecter rien de raisonnable contre le célibat du

Lib. VI, de Sacerd.

prêtre, puisque la virginité fait partie du souvenir dans les choses antiques, des charmes dans l'amitié, du mystère dans la tombe, de l'innocence dans le berceau, de l'enchantement dans la jeunesse, de l'humanité dans le religieux, de la sainteté dans le prêtre et dans le vieillard, et de la divinité dans les anges et dans Dieu même.

CHAPITRE X.

SUITE DES PRÉCÉDENTS.

Le Mariage.

L'Europe doit encore à l'Église le petit nombre de bonnes lois qu'elle possède. Il n'y a peut-être point de circonstance en matière civile qui n'ait été prévue par le droit canonique, fruit de l'expérience de quinze siècles et du génie des Innocent et des Grégoire. Les empereurs et les rois les plus sages, tels que Charlemagne et Alfred le Grand, ont cru ne pouvoir mieux faire que de recevoir dans le code civil une partie de ce code ecclésiastique où viennent se fondre la loi lévitique, l'Évangile et le droit romain. Quel vaisseau pourtant que cette Église! qu'il est vaste, qu'il est miraculeux!

En élevant le mariage à la dignité de sacrement, Jésus-Christ nous a montré d'abord la grande figure de son union avec l'Église. Quand on songe que le mariage est le pivot sur lequel roule l'économie sociale, peut-on supposer qu'il soit jamais assez saint! On ne saurait trop admirer la sagesse de celui qui l'a marqué du sceau de la religion.

L'Eglise a multiplié ses soins pour un si grand acte de la vie. Elle a déterminé les degrés de parenté où l'union de deux époux serait

permise. Le droit canonique, reconnaissant les générations simples, en partant de la souche, a rejeté jusqu'à laquatrième le mariage1 que le droit civil, en comptant les branches doubles, fixait à la seconde : ainsi le voulait la loi d'Arcade, insérée dansles Institutes de Justinien2. Mais l'Église, avec sa sagesse accoutumée, a suivi dans ce règlement le changement progressif des mœurs 3. Dans les premiers siècles du christianisme, la prohibition de mariage s'étendait jusqu'au septième degré; quelques conciles même, tels que celui de Tolède, dans le sixième siècle, défendaient, d'une manière illimitée, toute union entre les membres d'une même famille.

L'esprit qui a dicté ces lois est digne de la pureté de notre religion. Les païens sont restés bien au-dessous de cette chasteté chrétienne. A Rome, le mariage entre cousins germains était permis; et Claude, pour épouser Agrippine, fit porter une loi à la faveur de laquelle l'oncle pouvait s'unir à la nièce 5. Solon avait laissé au frère la liberté d'épouser sa sœur utérine 6.

L'Église n'a pas borné là ses précautions. Après avoir suivi quelque temps le Lévitique, touchant les Affins, elle a fini par déclarer empêchements dirimants de mariage tous les degrés d'affinité correspondants aux degrés de parenté où le mariage est défendu 7. Enfinelle

1 Conc. Lat., an 1205.

2 Inst. JUST., de Nup., tit. X.

3 Concil. Duziac., an 814. La loi canonique a dû varier selon les mœurs des peuples goth, vandale, anglais, franc, bourguignon, qui entraient tour à tour dans le sein de l'Eglise.

* Conc. Tol., can. v.

5 SUET., in Claud. A la vérité, cette loi ne fut pas étendue, comme on l'apprend par les fragments d'Ulpien, tit. v et VI, et elle fut abrogée par le Code Théodose, ainsi que celle qui concernait les cousins germains. Observons que, dans le christianisme, le pape a le droit de dispenser de la loi canonique, selon les circonstances. Comme une loi ne peut jamais être assez générale pour embrasser tous les cas, cette ressource des dispenses et des exceptions était imaginée avec beaucoup de prudence. Au reste, les mariages entre frères et sœurs dans l'Ancien Testament tenaient à cette loi générale de population, abolie, comme nous l'avons dit, à l'avènement de Jésus-Christ, lors du complément des races.

PLUT., in Solon. ? Conc, Lat,

a prévu un cas qui avait échappé à tous les jurisconsultes: ce cas est celui dans lequel un homme aurait entretenu un commerce illicite avec une femme. L'Église déclare qu'il ne peut choisir une épouse dans la famille de cette femme au-dessus du second degré1. Cette loi, connue très-anciennement dans l'Église 2, mais fixée par le concile de Trente, a été trouvée si belle, que le Code français, en rejetant la totalité du concile, n'a pas laissé de recevoir le canon.

Au reste, les empêchements de mariage de parent à parent, si multipliés par l'Église, outre leurs raisons morales et spirituelles, tendent politiquement à diviser les propriétés, et à empêcher qu'à la longue tous les biens de l'État ne s'accumulent sur quelques têtes.

L'Église a conservé les fiançailles, qui remontent à une grande antiquité. Aulu-Gelle nous apprend qu'elles furent connues du peuple du Latium 3; les Romains les adoptèrent 4; les Grecs les ont suivies; elles étaient en honneur sous l'ancienne alliance; et, dans la nouvelle, Joseph fut fiancé à Marie. L'intention de cette coutume est de laisser aux deux époux le temps de se connaître avant de s'unir 5.

Dans nos campagnes, les fiançailles se montraient encore avec leurs grâces antiques. Par une belle matinée du mois d'août, un jeune paysan venait chercher sa prétendue à la ferme de son futur beau-père. Deux ménétriers, rappelant nos anciens minstrels, ouvraient la pompe en jouant sur leur violon des romances du temps de la chevalerie, ou des cantiques des pèlerins. Les siècles, sortis de leurs tombeaux gothiques, semblaient accompagner cette jeunesse avec leurs vieilles mœurs et leurs vieux souvenirs. L'épousée recevait du curé la bénédiction des fiançailles, et déposait sur l'autel une

Conc. Lat., cap. IV, sess. 24.

2 Conc. Anc., cap. ult., an 304. 3 Noct. Att., lib. IV, cap. IV.

L. 2. ff., de Spons.

5 SAINT AUGUSTIN en rapporte une raison aimable Constitutum est, ut jam pactæ sponsæ non statim tradantur, ne vilem habeat maritus dalam, quam non suspiraverit sponsus dilatam.

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