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leur effet, sans qu'il en résulte d'ailleurs de plus graves inconvénients.

529. Enfin, il faut avertir un pénitent lorsque son ignorance, quelle qu'elle soit, peut devenir pour lui une occasion de quelque péché mortel, ou un sujet de scandale, soit pour ses enfants ou ses domestiques, soit pour ses subordonnés, soit pour les fidèles en général. Si donc un pénitent a contracté des liaisons vraiment dangereuses, dont cependant il ne voit pas le danger, on doit l'avertir; sa bonne foi ne le mettrait point à l'abri du péché auquel il s'est imprudemment exposé. On doit également avertir les pères et mères qui, par ignorance ou par insouciance, ne pensent point à faire instruire leurs enfants sur les vérités de la religion, ni à leur faire remplir les devoirs du chrétien. Il faut en dire autant des maîtres à l'égard de leurs domestiques, des chefs d'établissements et d'ateliers à l'égard de leurs employés et de leurs ouvriers. C'est un devoir pour le confesseur de les avertir et de les reprendre, s'ils n'interdisent pas à leurs subordonnés les discours obscènes, les fréquentations ou les assiduités entre personnes de différent sexe; s'ils les empêchent d'assister à la messe les dimanches et fêtes de commandement, d'entendre la parole de Dieu. Le confesseur est encore obligé d'avertir, et le prêtre qui, au scandale des fidèles, célèbre les saints mystères avec trop de précipitation, celui qui, par exemple, met moins d'un quart d'heure pour dire la messe, et le curé qui néglige la prédication, l'instruction des enfants, la visite des malades.

530. A part les différents cas dont on vient de parler, on ne doit point, suivant le sentiment le plus commun, tirer de la bonne foi le pénitent dont l'erreur est invincible, si on n'espère pas qu'il se rende aux avis qu'on lui donnerait; si on prévoit ou si on juge prudemment que ces avis lui seraient plus nuisibles qu'utiles. Ni la prudence ni la charité ne permettent de l'avertir : de deux maux il faut choisir le moindre; or, c'est un moindre mal de laisser ce pénitent commettre un péché matériel, que de l'exposer au danger de commettre un péché formel, et de se rendre coupable devant Dieu (1). On doit même garder le silence en matière de restitution, lorsqu'on a lieu de craindre que l'avertissement ne demeure sans résultat : « Ubi non speratur fructus, omittenda est monitio etiam

(1) Voyez ce que nous avons dit au tome 1er, no 60. — Voyez aussi S. Alphonse de Liguori, lib. vi. no 610; Navarre, Suarez, Bonacina, Sanchez, Laymann, la Croix, de Lugo, Holzmann, etc., etc.

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<< de restitutione facienda. Ratio est, quia confessarius, cum præ« videt quod monendo de restitutione, pœnitens non parebit et in << peccatum formale incidet, magis præcavere debet ejus spirituale « damnum quam damnum alterius temporale. Bene tamen adver<< tunt Viva et Roncaglia non facile judicandum quod pœnitens, « cognita veritate, monitioni non obtemperabit (1). » Il en est de même lorsqu'il s'agit d'un mariage contracté avec un empêchement dirimant: il faut laisser le pénitent dans la bonne foi, à moins qu'on n'ait lieu de croire qu'il n'y aura pas de difficulté pour la revalidation de ce mariage. Encore, dans ce dernier cas, ne faudrait-il avertir le pénitent qu'après avoir fait lever l'empêchement par une dispense. Nous reviendrons sur cet article dans le Traité du sacrement de Mariage.

CHAPITRE IX.

Des Devoirs du Confesseur au sujet de l'Absolution.

531. Nous l'avons dit: le prêtre n'est pas le maître des sacrements; il ne peut en disposer à volonté. Ministre et mandataire de Jésus-Christ, dispensateur de ses dons, il ne peut lier ni délier qu'en suivant l'ordre établi de Dieu, qu'en observant les règles de l'Église, fidèle interprete de l'Écriture et de la tradition : « Non << potest ligare et solvere ad arbitrium, sed tantum sicut a Deo præ« scriptum est (2). » Il n'est pas permis à un confesseur, ni d'accorder l'absolution à celui qu'il juge prudemment dépourvu des sentiments d'une véritable attrition, ni de la refuser à celui qu'il juge prudemment animé de ces sentiments, ni de la différer, si ce n'est dans le cas où il juge prudemment que ce délai sera vraiment utile au pénitent.

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532. Premièrement, il n'est pas permis d'absoudre ceux qu'on juge prudemment incapables ou indignes de l'absolution: Tels sont, dit le Rituel romain, ceux qui ne donnent aucun signe de douleur; qui refusent de déposer les haines et les inimitiés, ou de restituer le bien d'autrui, lorsqu'ils le peuvent; ou de quitter une

(1) S. Alphonse, lib. vi. n° 614; de Lugo, Laymann, Viva, Roncaglia, Sanchez, Ledesma, Suarez, Henno, Sporer, Elbel, Holzmann, etc. - Voyez le tome 1o, no 967.. (2) Sum. part. 3. quæst. 18, art. 3 et 4.

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occasion prochaine de péché ou de renoncer au péché de toute autre manière, et de changer de vie : tels sont encore ceux qui ont donné quelque scandale public, à moins qu'ils ne fassent cesser ce scandale par une satisfaction exemplaire: Videat diligenter sacerdos, quando et quibus conferenda, vel neganda, vel differenda « sit absolutio, ne absolvat eos, qui talis beneficii sunt incapaces: « quales sunt qui nulla dant signa doloris; qui odia et inimicitias « deponere, aut aliena, si possunt restituere, aut proximam pec⚫ candi occasionem deserere, aut alio modo peccata derelinquere, « et vitam in melius emendare nolunt; aut qui publicum scandalum << dederunt, nisi publice satisfaciant, et scandalum tollant (1). » Aussi, le cardinal Bellarmin s'élève avec force contre certains ministres, plus communs de son temps qu'aujourd'hui, qui, oubliant leur caractère, leur dignité, et la responsabilité qui pèse sur le confesseur, donnent l'absolution à tous avec une facilité extrême, summa facilitate omnibus manum imponunt, sans discerner entre ceux qui sont bien disposés et ceux qui ne montrent aucune disposition. Puis il ajoute : « Non esset hodie tanta facilitas pec«< candi, si non esset tanta facilitas absolvendi. Veniunt homines « onusti peccatis, et qui millies in eadem ceciderunt, et veniunt « sæpe sine ullo signo doloris, vel pridie, vel ipso die summæ ce«lebritatis, et statim absolvi, et ad sanctam communionem acce« dere volunt. Et nos, judices inconsiderati, dispensatores infi« deles, manum imponimus, omnibus dicimus: Ego te absolvo, a vade in pace. Sed væ nobis, cum Dominus rationem ponet cum « servis (2)! » Saint Thomas de Villeneuve n'est pas moins énergique contre le relâchement des confesseurs qui délient sans discernement aucun tous ceux qui se présentent : « Duas tibi claves « Dominus dedit, absolvendi scilicet et ligandi, et tu sine discus« sionis examine neminem ligas, omnes absolvis; una tantum clave, neque integra quidem uteris..... O medice, cur cui abso«lutionis beneficium exhibeas, non discernis (3)? » Les prêtres dont parlent ces docteurs sont des prêtres sans zèle pour la gloire de Dieu, sans zèle pour le salut des âmes. Ce sont des pasteurs qui égorgent le troupeau de leur maître, des médecins qui tuent les

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533. Secondement, on ne doit point refuser l'absolution à ceux qu'on juge prudemment dignes de ce bienfait. Le prêtre peut et

(1) Rituale romanum, de sacramento Pœnitentiæ. —(2) Conc. VIII. Dom. IV. adventus. (3) Serm. in feria vi. post Dominicam IV. Quadragesimæ.

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doit, comme l'enseigne Richard de Saint-Victor, absoudre ceux qui sont vraiment pénitents: « Valent et debent sacerdotes vere << pœnitentium et debitam satisfactionem suscipientium peccata re<< mittere, et a debito damnationis absolvere (1). >> Si on doit craindre d'absoudre un pénitent qui n'a pas les dispositions convenables, on doit craindre également de refuser l'absolution à celui qui est suffisamment préparé. Généralement, lorsqu'on juge prudemment et probablement que le pénitent apporte les dispositions requises au sacrement, et qu'il tient à le recevoir, on est tenu, en justice, de lui donner l'absolution: « Confessarius, dit Billuart, « tenetur ex justitia absolvere pœnitentem rite confessum et legi« time dispositum, nisi adsit justa ratio aliquandiu differendi ab« solutionem; quia pœnitens rite confessus et legitime dispositus « habet jus ad absolutionem vi cujusdam contractus innominati, « facio ut facias, quo jure in re gravissima, sine gravissima in« juria privari non potest (2). »

534. Nous avons dit, lorsqu'on juge prudemment et probablement; car, ordinairement, on ne doit absoudre un pénitent qu'autant que, d'après une probabilité prudente, on le juge suffisamment disposé, suffisamment contrit. Celui qui ne donne aucun signe, aucune marque de contrition, ne fût-il coupable que de péchés véniels, ne peut être absous. Mais il suffit d'avoir une probabilité prudente des dispositions du pénitent, une probabilité forte et prépondérante. La certitude morale proprement dite n'est point nécessaire: «Non requiritur in confessario moralis certitudo, dit "Antoine de Goritia, sed prudens judicium, quod pœnitens hic et « nunc habeat verum dolorem, efficax propositum (3). » Saint Alphonse est exprès: « Sufficit quod confessarius habeat prudentem probabilitatem de dispositione pœnitentis, et non obstet ex alia parte prudens suspicio indispositionis; alias vix ullus posset ab« solvi, dum quæque signa pœnitentium non præstant nisi probaabilitatem dispositionis, ut recte docet Suarez, ubi ait quod « oportet et sufficit, ut confessarius prudenter et probabiliter ju« dicet pœnitentem esse dispositum (4). »

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535. Mais à quelle marque reconnaîtra-t-on les dispositions du pénitent? Règle générale : lorsqu'un pénitent vient de lui-même à confesse, qu'il s'accuse franchement de ses péchés, qu'il dit en

(1) De potestate ligandi et solvendi, cap. 9.—(2) De sacramento Pœnitentiæ, dissert. vi. art. 10. § 4.-(3) Epitome Theologiæ moralis, etc. Lugduni, 1831. — (4) Lib. vi. no 460 ; et Praxis confessarii. n° 75.

avoir la douleur avec le ferme propos, qu'il accepte la pénitence qu'on lui impose, et reçoit avec docilité les avis qu'on lui donne, on doit le croire suffisamment disposé; sa confession est un signe de contrition, à moins qu'il n'y ait quelque présomption positive du contraire: « Spontanea confessio est signum contritionis, nisi « obstet aliqua positiva præsumptio in contrarium; omnes enim «< conveniunt quod dolor per confessionem manifestatur (1). » Un simple soupçon sur la sincérité du pénitent, la crainte qu'il ne retombe dans le péché, ne sont pas des raisons suffisantes de lui refuser l'absolution. Si, la confession étant faite, les dispositions du pénitent paraissent douteuses, c'est un devoir pour le confesseur de l'instruire, de l'exhorter, et de l'exciter à la contrition : après quoi, si le pénitent se montre touché, et déclare avoir la douleur de ses péchés, si d'ailleurs il n'est pas dans une occasion prochaine et volontaire de péché mortel, on l'absoudra. Nous ne pouvons guère juger des dispositions actuelles du pénitent que par ce qu'il nous dit lui-même de son intérieur. C'est pourquoi, comme le dit Suarez, s'il n'offre pas d'abord des signes de douleur suffisants, le confesseur doit lui demander s'il déteste sincèrement ses péchés; et s'il répond affirmativement, on est obligé de s'en rapporter à sa parole: « Quando non habet sufficientia signa doloris, potest et « debet interrogare pœnitentem, an ex animo detestetur peccatum, « cui affirmanti credere tenetur (2). » Le P. Valère Renaud, dans son livre de la Prudence du confesseur, qui est, au jugement de saint François de Sales, grandement utile à ceux qui exercent le saint ministère, s'exprime comme Suarez: « Debet confessarius ob«< servare, ut si, audita confessione, et cum opus esse judicaverit, « cohortatione aliqua adhibita, non habeat sufficientia signa præ<< sentis doloris in pœnitente, interroget ipsum an de peccatis suis doleat ex animo: cui serio affirmanti credere tenetur (3). » Nous trouvons la même disposition dans les Statuts synodaux publiés par le cardinal de la Baume, archevêque de Besançon : « Postulabit «< sacerdos, ante absolutionem, an pœniteat eum de peccatis, et an proponat abstinere, cum gratia Dei, ab iis quæ confessus est, et << ab alio omni peccato mortali: si affirmet, absolvetur (4). » De là cette maxime de saint Thomas et de saint Antonin: Au tribunal

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(1) S. Alphonse, lib. vi. n° 459.- (2) De Pœnitentia, disput. xxx.—(3) De Prudentia et cæteris in confessario requisitis, auctore P. Valerio Reginaldo Burgundo Usiensi, cap. 21. Il était d'Usiers, en Franche-Comté. — (4) Statuta Synodalia Bisontinæ ecclesiæ metropolitanæ, Lugduni, 1575. — Voyez aussi Concilia Germaniæ, par Schanat, etc.

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M. II.

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