Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

« dum formæ, res autem sensibiles per modum materiæ, » dit saint Thomas (1). Ainsi, dans le Baptême, l'eau est la matière du sacrement, et les paroles, Ego te baptizo in nomine Patris, et Filii, et Spiritus Sancti, en sont la forme. On remarquera que les choses qui ne peuvent être aperçues par les sens, ne deviennent matière sacramentelle que quand elles sont jointes à quelque signe extérieur qui les rend sensibles. C'est ainsi, par exemple, que la contrition ne peut concourir au sacrement de Pénitence qu'autant qu'elle se manifeste extérieurement par la confession ou par quelque signe sensible.

"

7. Chaque sacrement a une matière et une forme qui lui sont propres. « Omnia sacramenta, dit le pape Eugène IV, tribus perficiuntur; videlicet, rebus tanquam materia, verbis tanquam for« ma, et persona ministri cum intentione faciendi quod facit Ec⚫ clesia: quorum si aliquod desit, non perficitur sacramentum (2). » Mais quoique la personne du ministre soit nécessaire pour la confection d'un sacrement, elle doit plutôt en être regardée comme la cause efficiente, que comme faisant partie de son essence; car l'essence d'un sacrement consiste dans la matière et dans la forme, qui en sont les seules parties constitutives: Materia et forma sacramenti essentia perficitur, dit le concile de Trente (3); ce qui s'accorde parfaitement avec cette maxime de saint Augustin: Accedit verbum ad elementum, et fit sacramentum (4).

8. Tous les sacrements étant d'institution divine, il est certain que la matière et la forme qui en font la substance ont été déterminées par Jésus-Christ. On convient également qu'il a déterminé, non-seulement en général, mais en particulier et dans leur espèce, la matière et la forme du Baptême et de l'Eucharistie. Mais en estil de même pour les autres sacrements? C'est une question controversée parmi les théologiens. Les uns pensent que Notre-Seigneur n'a déterminé qu'en général la matière et la forme de plusieurs sacrements, laissant à ses apôtres le soin de déterminer eux-mèmes, d'une manière plus particulière, les signes qu'ils jugeraient plus propres à exprimer les effets de ces mêmes sacrements. Les autres, en plus grand nombre, enseignent que Jésus-Christ a déterminé lui-même, sans recourir à ses disciples, la matière et la forme de tous les sacrements. Nous adoptons ce second sentiment, comme

(1) Sum. part. 3. quæst. 60. art. 7.— (2) Decret. ad Armenos. — (3) Sess. xvi. cap. 2. (4) Tract. Lxxx in Joannem.

[ocr errors]
[ocr errors]

nous paraissant beaucoup plus probable que le premier, par cela même qu'il est plus conforme à la dignité des sacrements et à l'unité du culte catholique. On conçoit difficilement que Jésus-Christ ait laissé à ses disciples le soin d'assigner à quelques sacrements la matière et la forme qui leur sont propres. On ne peut objecter la diversité des rites qu'on remarque chez les Grecs et les Latins, car elle n'est pas essentielle; autrement, on ne pourrait l'attribuer vraisemblablement même aux apôtres. Quoi qu'il en soit, les Latins et les Grecs doivent, dans la pratique, observer exactement les rites qui leur sont prescrits pour l'administration des sacrements. 9. Le sacrement étant un tout moral, il est nécessaire que les parties qui le constituent soient unies ensemble; ni l'une ni l'autre de ces parties, prise isolément, ne suffit pour un sacrement. Si donc on prononce ces paroles, Je te baptise, etc., sans verser de l'eau sur l'enfant ; ou si l'on verse de l'eau sans prononcer ces paroles, il n'y aura point de sacrement : « Detrahe verbum, quid «< est aqua, nisi aqua? Accedit verbum, et fit sacramentum, dit saint Augustin (1).

10. L'union de la matière et de la forme sacramentelle doit être telle que, eu égard à la nature de chaque sacrement, ces deux parties soient censées, selon la manière commune de voir et d'agir, ne faire qu'un tout moral, qu'un seul et même acte, qu'une seule et même cérémonie. Nous avons dit, eu égard à la nature de chaque sacrement; car l'union entre la matière et la forme sacramentelle doit être plus étroite en certains sacrements que dans les autres; elle doit même être physique pour l'Eucharistie, comme l'indiquent les paroles de la consécration, Hoc est enim corpus meum, hic est, etc. Hoc, HIC, supposent la matière présente au moment où l'on prononce les paroles sacrées. Dans le Baptême, la Confirmation, l'Extrême-Onction, on doit faire en sorte que les paroles, du moins en partie, soient prononcées pendant l'action ou l'application de la matière. Celui qui, par exemple, réciterait ces paroles, Ego te baptizo in nomine Patris, et Filii, et Spiritus Sancti, avant de commencer de verser de l'eau, ou qui verserait l'eau tout entière avant de prononcer aucune de ces paroles, ne mettrait pas le sacrement en sûreté. Mais il n'est pas nécessaire que le discours qui exprime la forme sacramentelle, et l'action qui applique la matière, commencent et finissent absolument au même instant (2). Pour ce qui regarde le sacrement de Pénitence, il n'exige pas que

(1) Tract, Lxxx in Joannem. (2) S. Alphonse de Liguori, lib. vi. no 9.

la forme soit appliquée aussitôt que la matière est préparée; il peut y avoir quelque intervalle entre la confession du pénitent et l'absolution du prêtre. De même, pour le Mariage, il suffit que l'une des parties donne son consentement, tandis que le consentement de l'autre partie persévère moralement. Et si on suppose que le prêtre soit ministre de ce sacrement, la forme peut également s'appliquer au consentement mutuel des parties, quoique antérieurement exprimé, pourvu qu'il y ait union morale entre l'acte qui exprime ce consentement et les parties sacramentelles. Au reste, quand on administre un sacrement, on doit toujours, autant que possible, agir de manière à ne laisser aucun doute sur sa validité, surtout pour ce qui concerne le Baptême et les Ordres sacrés.

11. Il n'est pas permis de faire aucun changement, ni dans la matière ni dans la forme des sacrements. On distingue le changement substantiel et le changement accidentel: le premier porte atteinte à la substance et par là même à la validité du sacrement; le second laisse subsister ce qui est essentiel au sacrement, ne tombant que sur l'accessoire. Le changement substantiel, dans la matière, a lieu toutes les fois que la chose qu'on emploie pour faire un sacrement est, suivant le commun jugement des hommes, d'une espèce différente de celle qui a été prescrite par Jésus-Christ; ce qui arriverait, par exemple, si pour baptiser on prenait toute autre matière que de l'eau naturelle, ou si on se servait d'une eau tellement corrompue, qu'elle fût censée n'avoir plus conservé sa nature. Le changement n'est qu'accidentel, quand la matière, quoique altérée, demeure substantiellement la même; comme si, par exemple, on ne mettait que quelques gouttes de vin ou d'une autre liqueur étrangère dans l'eau baptismale.

12. Le changement, dans la forme sacramentelle, est substantiel ou accidentel, suivant qu'il ôte ou qu'il laisse aux paroles sacrées le sens qu'elles doivent avoir d'après l'institution de Jésus-Christ. Ce changement peut se faire par addition, par omission, par transposition, par interruption ou par corruption.

Par addition : Toute addition qui détruit le véritable sens des paroles sacramentelles devient un changement substantiel, et entraîne la nullité du sacrement. Exemple: Ego te baptizo in nomine Patris majoris, et Filii minoris, et Spiritus Sancti. Les mots majoris et minoris sont manifestement contraires au dogme catholique de la consubstantialité du Verbe. Il en serait autrement, si le dogme et le vrai sens des paroles étaient conservés; ainsi, on regarderait comme valable le Baptême suivant: Ego te baptizo in

nomine Patris æterni, et Filii increati, et Spiritus Sancti ab utroque procedentis; car, en baptisant de la sorte, on baptise réellement au nom des trois personnes de la sainte Trinité.

13. Par omission: Elle est substantielle et annule le sacrement, quand on supprime une ou plusieurs des paroles qui sont regardées comme essentielles. Ainsi, par exemple, celui qui, en baptisant, omettrait le verbe baptizo, ou le nom d'une des trois personnes divines, ne conférerait point le sacrement de Baptême. Il en serait probablement de même s'il supprimait le pronom te, sans le remplacer par un terme équivalent. Mais le retranchement de la particule ego, qui se trouve dans la formule du sacrement de Baptême, ne peut nuire à la validité du sacrement. Il faut en dire autant de la particule enim, qui entre dans la forme de l'Eucharistie.

Par transposition: Si elle ne porte point atteinte au dogme de l'Église ni au sens des paroles sacramentelles, elle laisse subsister le sacrement. Exemple: In nomine Patris, et Filii, et Spiritus Sancti, ego te baptizo; dans ce cas, le sacrement serait certainement valable. Mais il ne le serait pas dans le cas suivant, ou il serait au moins douteux, savoir: Filii, ego le baptizo in nomine Patris, et Spiritus Sancti. Il faudrait le réitérer sous condition.

14. Par interruption: Le changement par interruption est regardé comme substantiel, quand l'interruption dans la prononciation des paroles est si considérable, qu'elles ne paraissent plus, au jugement d'un homme prudent, faire une même proposition, une même suite de discours; comme si entre les paroles il s'écoulait plusieurs minutes, ou que l'on récitât quelque prière, l'Oraison dominicale, la Salutation angélique, ou une prière même plus courte. Mais si on ne faisait qu'une petite pause entre les paroles sacramentelles, comme pour respirer, tousser, cracher, éternuer, ou si on ne disait qu'un mot aux assistants, silence, taisez-vous, l'interruption ne serait que physique et non morale; elle ne serait point par conséquent un changement substantiel, capable de nuire au

sacrement.

15. Par corruption: Le changement par corruption a lieu, 1o quand on se sert d'une autre langue que celle qui est en usage dans l'Église. Quoique ce changement ne soit qu'accidentel, il n'est permis que lorsqu'on administre le Baptême dans un cas de nécessité, sans les cérémonies du rituel; 2o quand on change les paroles ordinaires de la forme sacramentelle en d'autres termes synonymes de la langue consacrée par l'Église. Si les synonymes ont le même sens que les paroles ordinaires, le changement n'est qu'ac

cidentel. Celui donc qui, par exemple, dirait: Ego te tingo, lavo, abluo, etc., baptiserait aussi validement que celui qui dirait: Ego te baptizo, etc. Il n'en serait pas de même si on disait : Ego te mundo, purgo, refrigero; parce que l'effet du Baptême, qui est de nous purifier du péché, doit être exprimé par des termes qui indiquent la manière spéciale dont nous sommes purifiés par ce sacrement; c'est-à-dire, l'action même que signifie le verbe baptizare. Le changement serait encore substantiel, si on baptisait au nom de la sainte Trinité, sans exprimer la distinction des trois personnes divines la forme prescrite par Notre-Seigneur pour le sacrement de Baptême, renferme l'invocation expresse et distinctive du Père, du Fils et du Saint-Esprit. On ne peut baptiser non plus en changeant le mot nomine en celui de nominibus, parce que ce dernier mot n'exprimerait pas assez clairement l'unité de la nature divine, dont l'expression est aussi nécessaire pour la validité du Baptême que celle de la trinité des personnes. Mais le changement ne serait qu'accessoire, si, par exemple, au lieu de dire: Ego te baptizo, ego signo te, ego te absolvo, on disait: Ego vos baptizo, nos te baptizamus; ego signo vos, nos signamus te; ego vos absolvo, nos te absolvimus, etc. 3o Quand on prononce mal les paroles du sacrement, par ignorance, ou par inadvertance, ou par un défaut d'organe, comme il arrive à ceux qui sont bègues. Si cette corruption tombe sur le commencement d'un mot de la formule sacramentelle, elle est plus sujette à causer un changement substantiel que lorsqu'elle tombe sur la fin du mot; car, dans le premier cas, le sens des paroles s'altère plus facilement que dans le second. Ainsi, par exemple, le Baptême serait nul, si, au lieu de dire Patris, on disait Matris; tandis qu'il y aurait sacrement dans le cas suivant, où, par ignorance, on dirait : Ego te baptizo in nomine Patria, et Filia, et Spiritua Sancta. Il en est de cette manière de parler, relativement à la langue latine, comme de notre patois, relativement à la langue française; elle imprime dans l'esprit de ceux qui entendent le même sens que si elle était correcte. Ce cas, ou certain cas semblable, pourrait encore arriver à certains fidèles de la campagne qui ne pourraient baptiser qu'en patois. Le sacrement serait encore valable, si, par exemple, on prononçait: E-Ego te ba-baptizo, baptuzo, battizo, paptizo, pour baptizo. Le défaut de prononciation ne peut évidemment porter atteinte à la validité du sacrement.

16. Il y a péché mortel à changer substantiellement la matière ou ia forme d'un sacrement; c'est un sacrilége, et un sacrilége qui n'ad

« ZurückWeiter »