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SERMON I.

LE CHRÉTIEN SEMBLABLE A L'ENFANT.

SERMON SUR LUC XVIII, 17:

Je vous dis en vérité que quiconque ne recevra pas le royaume de Dieu avec les dispositions d'un enfant n'y entrera point.

POUR UNE RÉCEPTION DE CATÉCHUMÈNES.

Dans une circonstance si intéressante pour l'Eglise, je ne consacrerai point ce discours, catéchumènes, à vous entretenir de la force et de l'étendue des vœux par lesquels vous allez vous lier. Notre liturgie vous les retracera bientôt par ma bouche d'une manière imposante et solennelle. Ces engagements sont, je m'assure, présents à votre pensée, et vous vous promettez de les remplir; mais je crois devoir vous apprendre quelles dispositions vous sont nécessaires pour demeurer fidèles, quelles dispositions peuvent vous rendre facile et naturelle l'observation des devoirs du chrétien.

Ces dispositions, je les trouve exprimées d'une manière à la fois précise, simple et frappante, dans les paroles de mon texte. Jésus les prononça, ces paroles, dans une circonstance qui a quelque rapport avec celle qui nous rassemble.

Des parents religieux conduisaient leurs enfants à ses pieds. Tout occupés du soin de ménager le repos de leur Maître sans cesse assiégé par la foule qui se pressait autour de lui, les Apôtres cherchaient à les éloigner. Laissez venir à moi ces petits enfants, dit le Sauveur avec cette bonté touchante qui le caractérisait. Il les embrasse, il les bénit; puis, ce divin Maître, qui faisait servir tous les évé

nements de la vie à instruire les hommes dans la science du salut, saisit cette occasion de donner une grande leçon à ses disciples, et, dans leur personne, à tous les membres de l'Eglise. Le royaume des cieux, ajoute-t-il, appartient à tous ceux qui ressemblent à ces enfants, et je vous le dis en vérité, quiconque ne le reçoit pas avec les dispositions d'un enfant n'y entrera pas.

Développons la pensée du Sauveur. Cet examen nous intéresse tous, mes frères; nous faisons tous profession d'être chrétiens; nous aspirons tous à être reçus un jour dans les demeures célestes. Cette parole, cette terrible parole: Il n'y entrera point, doit nous glacer de crainte. Elle s'applique à tous ceux qui ne trouveraient pas en euxmêmes les dispositions que demande le Sauveur.

Cet examen vous intéresse particulièrement, vous qui venez aujourd'hui choisir Jésus pour maître et vous dévouer à son service. Ecoutez ce qu'il attend, ce qu'il exige de yous. Veuille l'ESPRIT-SAINT, dont nous implorons le secours, vous donner un juste et profond sentiment de ce que vous devez être pour que le Fils de Dieu daigne agréer vos vœux, pour qu'il vous bénisse et vous introduise un jour dans sa gloire. Ainsi soit-il.

I. Le royaume des cieux est pris dans nos saints livres tantôt pour la prédication de la parole, pour l'Evangile luimême destiné à rétablir sur la terre l'empire du vrai Dieu; tantôt pour l'Eglise, cette société d'hommes qui doit former la nation sainte, le peuple que Dieu s'est acquis (1); tantôt pour cet heureux période, pour cet heureux séjour du bonheur où Dieu régnera plus parfaitement encore sur les élus. Quelquefois, comme dans notre texte, cette expression doit se prendre sous tous ces rapports ensemble. Quiconque ne reçoit pas l'Evangile avec les dispositions d'un enfant ne sera membre de l'Eglise qu'en apparence : il n'aura point de part à l'héritage céleste promis aux fidèles. Tel est le sens des paroles du Sauveur.

(1) Pier. 11, 9.

Ainsi, mes frères, les dispositions de l'enfant doivent préparer et former le chrétien ; et par là vous devez entendre, non celles qu'on trouve chez tous les enfants; hélas ! le principe de corruption qu'ils portent dans leur cœur et notre pernicieux exemple n'altèrent que trop tôt leur aimable caractère; mais les vertus qui nous paraissent appartenir en propre à leur âge, et que l'on trouve en effet chez ceux qui sont ce qu'ils doivent être.

Qu'y a-t-il donc dans cet âge qui nous émeut d'une manière si puissante? D'où vient ce charme qui fait que nous ne pouvons considérer un enfant sans intérêt, et que nous trouvons tant de douceur et d'attrait dans les souvenirs de nos premières années? Quels sont les traits qui composent le caractère intéressant dont Jésus fait un si bel éloge?

Je crois pouvoir les réduire à quatre principaux : la simplicité du cœur, l'humilité, la pureté ou l'innocence, la sensibilité.

Je dis d'abord la simplicité du cœur. Aimable simplicité! il est plus aisé de sentir ce qu'elle est que de la définir. C'est un composé de docilité, de droiture, de candeur. Voyez cet enfant ingénu; les yeux fixés sur ceux qui l'instruisent, son cœur s'ouvre à leurs leçons; il ne dispute point avec eux; l'instinct précieux du bien et du mal, du vrai et du faux n'est point altéré chez lui par l'art funeste des sophismes et des subterfuges. Dès qu'on lui montre la vérité, il la reconnaît; il en est frappé, il se soumet à elle. Il ne cherche point à se déguiser à lui-même ni aux autres: sans savoir même ce que c'est que la sincérité, ses regards, ses discours vous font lire au fond de son cœur.

L'humilité est une deuxième disposition qui s'allie parfaitement avec la simplicité, qui en est même inséparable; car, hélas ! c'est de l'orgueil que naissent les illusions, les artifices, les détours. C'est l'orgueil qui fait que l'homme se considère et se présente à autrui sous des traits qui ne sont pas les siens; c'est l'orgueil qui ferme ses yeux à la vérité qui le condamne, et fait qu'il s'érige en juge même

des lois les plus sacrées. L'enfant, que tout rappelle au sentiment de sa dépendance et de ses besoins, est naturellement porté à l'humilité. Il regarde tout ce qui l'entoure comme lui étant supérieur : il a la conscience de sa faiblesse; et voilà le grand principe de l'humilité. Tandis qu'il n'est pas rare de voir à un autre âge la fierté, au regard superbe, siéger sur un front déshonoré par l'empreinte du vice, le souvenir d'une faute légère suffit pour couvrir de rougeur le visage de l'enfant; il en fait l'aveu d'un air confus et les yeux baissés; il ne lui en coûte point de prendre la plus humble posture pour en implorer le pardon.

Une troisième disposition qui semble être son apanage, c'est la pureté. On donne à l'enfance le beau nom d'âge de l'innocence. Heureux temps où l'homme ne connaît pas même le mal, où il n'y a pas encore en lui la volonté raisonnée de s'y livrer, où il peut sans danger laisser errer ses désirs et ses pensées! Temps heureux où l'on croit voir l'innocence dans l'imagination, dans le cœur, dans toute la vie! Alors l'âme est comme une eau limpide que ne trouble point encore le limon qu'elle recèle. C'est le calme d'un beau matin où les vents n'agitent point encore les airs.

Ajoutez enfin à ces traits la sensibilité, qui ne se trouve entière et pure que dans l'enfance. Je n'entends point par là, vous le comprenez assez, cette sensibilité exagérée dont on fait parade et dont l'affectation trahit la fausseté ; j'entends moins encore cette exaltation dangereuse qui favorise les passions. Non, ce n'est point là la sensibilité véritable qui fut destinée par le Créateur à nous rendre nos devoirs plus chers en les embellissant: elle nous en détourne au contraire; en traçant une fausse route à nos penchants, elle nous éloigne souvent de nos proches et nous les fait négliger; elle dessèche notre âme dans les relations les plus saintes. La sensibilité de l'enfant est naturelle et vraie ; il ne montre que ce qu'il sent et n'aime que ce qu'il doit aimer ses affections sont dirigées par la reconnaissance. C'est la mère qui l'a mis au jour, c'est le père qui le nour

rit, qui en sont les premiers objets. Il les aime avec une affection entière; il s'attache à leurs pas; il ne peut supporter leur colère, leur absence. S'il est un moment délaissé par eux, il se croit isolé dans l'univers. Que les premières impressions de l'amitié ont pour lui de charme et de puissance! La main froide de l'égoïsme n'a pas encore flétri son cœur. Il n'a pas encore appris à se préférer à tout, du moins à calculer ce qu'il fait pour autrui, à mesurer les sacrifices que l'intérêt de ses frères lui demande; il se livre sans réserve; il se donne à ceux qu'il aime. Voyez combien sa compassion est vive et touchante; elle n'est point affaiblie par des soupçons injurieux ou des jugements sévères; dans l'élan de son cœur il sacrifierait tout ce qu'il possède pour soulager le malheureux qu'il voit souffrir. Tous les mouvements de son âme ont un aimable abandon qu'on retrouve bien rarement dans l'âge mur. Eh! quelle sensibilité plus vive, plus animée que celle d'un jeune cœur qui n'a point encore été trompé dans ses attachements; qui ne connaît ni l'injustice, ni l'ingratitude; qui commence à sentir le besoin d'aimer; chez qui l'énergie et la pureté première nourrissent la chaleur du sentiment!

Telles sont les vertus caractéristiques de l'enfance, quand elle n'est point corrompue. Ces mêmes traits brillèrent jadis chez le premier homme. Créé dans la droiture et l'innocence, docile à la voix du souverain, sensible à ses bienfaits, Adam était en quelque sorte un enfant d'une nature sublime. Tel il fut avant sa chute, lorsqu'il habitait encore cet Eden dont le souvenir est celui de la jeunesse de la terre. Jésus, qui est venu nous rappeler à notre première destination, devait sans doute nous redemander ces dispositions heureuses, ou plutôt il devait nous les rendre; elles sont indispensables pour former le chrétien. Il est aisé de vous en assurer, catéchumènes.

Et d'abord sans la simplicité du cœur comment pourriezvous appartenir à Jésus? Insuffisante pour diriger l'homme, la raison n'avait pu le préserver de l'erreur et du vice.

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