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institutions, une patrie. En se déclarant les uns pour l'empereur, les autres pour le pape, Gibelins et Guelfes se firent les soutiens ou les instruments de deux pouvoirs extérieurs et cosmopolites dont la faiblesse pratique se dissimulait sous l'appareil de doctrines absolues et de prétentions hautaines. L'autorité que les Gibelins demandaient aux empereurs allemands ne pouvait s'exercer en Italie ni avec régularité ni avec suite; la liberté que les Guelfes plaçaient sous le patronage intéressé des papes était une liberté locale, tumultueuse, qui, tout en se mettant en lutte avec les lois fondamentales de la société du temps, ne s'en dégageait pas assez complétement pour édifier une société nouvelle. L'Italie du moyen-âge conquit rapidement toutes les libertés civiles et politiques, tous les moyens de s'administrer, de s'associer, de se grouper en vue de l'intérêt général, mais elle ne sut pas resserrer les liens qui auraient dû tenir perpétuellement unies les cités devenues indépendantes.

La démocratie partout dominante depuis l'abaissement de l'Empire et de la papauté, finit par abdiquer entre les mains de despotes cruels et perfides. Pour un bien long temps on vit ce peuple italien intelligent, créateur et à de certains égards héroïque, payer la rançon de son génie par l'abandon de ses droits politiques et s'endormir dans une commune servitude après avoir compromis la liberté dans de stériles agitations.

M. D'Hervé de Saint-Denys lit, en communication, un Mémoire sur le SI-SAO, recueil de poésies chinoises remontant au 3° siècle.

M. Lenormant continue la lecture, en communication, de son Mémoire sur l'époque éthiopienne dans l'histoire d'Egypte et sur l'avénement de la 26° dynastie.

Séance du vendredi 27.

PRÉSIDENCE DE M. RENAN.

Le procès-verbal de la séance précédente est lu et la rédaction en est adoptée.

ANNÉE 1870.

10

Il n'y a pas de correspondance officielle.

Sont présentés à l'Académie les ouvrages suivants :

4o Exploration archéologique de la Galatie et de la Bithynie, etc., par M. G. Perrot: 23e livr. in-fo formée des feuilles 67 à 73 et des pl. 24, 22, 23 et 31, l'avant-dernière de ce grand travail, « l'un des plus considérables en son genre, des plus neufs et des plus utiles aux sciences historiques et philologiques, qui aient été exécutés à notre époque, et, il faut ajouter, dans une période de temps qui fait autant d'honneur à l'activité qu'aux recherches et aux talents divers des auteurs. >>

2o L'assistance médicale chez les Romains, par M. le Dr René Briau, tirage à part, offert par l'auteur, d'un mémoire lu devant l'Académie et dont l'impression dans la re série du Recueil des savants étrangers (t. VIII, 2e partie) a été ordonnée.

3o Par une lettre du 10 mai, M. Lecoq-Kerneven adresse six exemplaires d'un opuscule intitulé: Leçons de numismatique, en réponse à un compte-rendu de son Traité (admis au concours de numismatique de 1870) sur la composition et la lecture de toutes inscriptions monétaires et depuis l'époque mérovingienne jusqu'à l'apparition des armoiries (Rennes, 1870, br. in-8°). Ces exemplaires seront distribués, suivant les intentions de l'auteur, aux membres de la commission et du bureau.

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4o Défense des Études sur l'origine des Basques, par M. Bladé (Paris, 1870, br. in-8°).

5o Archéologie ou description de la tour Sainte- Magdeleine de la ville de Verneuil (Eure), par Paul Duchêne (1869, in-8°).

6o Annales de philosophie chrétienne : mars 1870.

70 Un exposé ou programme intitulé Langage numérique ou universel, par M. Boucher de Boucherville à Québec (3 feuilles in-f° sans destination indiquée).

8° M. le PRÉSIDENT fait hommage à l'Académie, au nom de l'auteur, de l'ouvrage intitulé « Recueil d'inscriptions libyco-berbères» avec 25 pl. et une carte de la Cheffia, par M. le Dr Reboud, qui a déjà fait de ces monuments, encore un peu énigmatiques, mainte communication (1 vol. in-4° extrait des Mémoires de la Société française de numismatique et d'archéologie, laquelle adresse, par l'intermédiaire du directeur de ses publications, M. Léouzon le Duc, un second exemplaire du même ouvrage). Ce qui n'est pas moins important, c'est le don

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fait à l'Académie, pour le cabinet de la commission des inscriptions sémitiques, par M. le Dr Reboud, de l'ensemble des estampages et copies des monuments originaux dont se compose son recueil.

9o M. le PRÉSIDENT offre en même temps, de la part de M. Judas, les deux opuscules suivants : I. Nouvelle analyse de l'inscription libyco-punique de Thugga en Afrique, suivie de nouvelles observations sur plusieurs épitaphes libyques dans le but exprès de faciliter en Algérie l'étude des langues phénicienne et libyco-berbère (Paris, 1869, br. in-8°). II. Sur quelques épitaphes libyques et latino-libyques, etc. (Paris, 1870, in-8°).

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M. EGGER fait hommage, au nom de M. le comte Sclopis, de l'Académie des sciences de Turin, de la Notice (en italien) sur la vie et les travaux de feu M. Amédée Peyron, qui fut l'une des lumières de la savante société dont M. Sclopis est le président actuel, et le doyen des associés étrangers de l'Académie.

M. DELISLE lit, en communication, une Notice sur le poète Primat.

ANALYSE.

<< Il n'est peut-être pas un poète latin du moyen-âge sur lequel les chroniqueurs nous aient transmis autant de renseignements que sur Primat. Il n'en est cependant pas dont la vie soit entourée de plus d'obscurité. Quel était le véritable nom de cet auteur? A quelle époque a-t-il vécu? Quelles écoles a-t-il fréquentées? Voilà tout autant de questions qui s'agitent depuis un certain nombre d'années, sans qu'on y ait encore apporté de réponses satisfaisantes. » L'auteur ne prétend pas éclairer complétement ce point d'histoire littéraire. Il veut seulement produire un témoignage nouveau, qui, en circonscrivant les données du problème, pourra en préparer la solution. Fra Salimbene de Parme, dans un passage de sa chronique écrit en 1283, après avoir parlé de plusieurs dominicains et cordeliers qui faisaient beaucoup de bruit en Italie vers l'année 1233, continue son récit dans les termes suivants : « A cette époque vécut Primat, chanoine de Cologne, grand truand et grand farceur, et surtout grand versificateur et grand improvisateur, etc. »

M. DELISLE s'attache pour le moment à une seule des circonstances de ce récit et démontre que la date de 1233 énoncée par Fra Salimbene est absolument inadmissible, qu'elle ne se concilie ni avec le témoignage de Thomas de Capoue, auteur du commencement du XIIIe siècle, qui parle de Primat comme d'un écrivain relativement ancien, ni avec l'attestation formelle du chroniqueur italien Fr. Pippino, que Primat jouissait d'une grande vogue vers l'année 1285, ni surtout avec une très-curieuse mention de Primat empruntée au texte le plus complet que l'on ait de la chronique de Richard de Poitiers, moine de Cluny. Ce chroniqueur, après avoir enregistré la mort de Pierre Abélard et celle de Foulques, roi de Jérusalem, poursuit en ces termes: «Dans ce même temps (1142) brillait à Paris un écolier nommé Hugues, et que ses condisciples avaient surnommé Primat. C'était un personnage d'une assez basse condition et d'un extérieur disgracieux. Adonné dès sa jeunesse aux lettres mondaines, il se fit dans plusieurs provinces une grande réputation comme plaisant et comme littérateur. Son talent d'improvisateur était célèbre, et, comme exemple, on citait les vers qu'il composa pour se moquer d'un prélat qui lui avait donné un mauvais manteau, et qu'on ne pouvait regarder sans éclater de rire. » Or Richard de Poitiers vivait du temps de Pierre le Vénérable; sa chronique s'arrête à l'année 1153 dans un manuscrit, à l'année 1161 dans deux ou trois autres, et à l'année 1171 dans celui que cite l'auteur de la communication.

« Voilà donc, ajoute M. DELISLE, un témoignage authentique, consigné par écrit au milieu du XIIe siècle, d'où il résulte que la renommée de Primat était dès lors parfaitement établie. Et c'est au plus tard dans la première moitié du XIIe siècle qu'il faut placer la vie de Primat.» Toutefois cette notion si importante n'est pas la seule à tirer du passage de Richard de Poitiers. Nous y voyons que le poète si fameux par ses vers et ses plaisanteries avait reçu de ses camarades le sobriquet de Primat, mais que son véritable nom était Hugues, ce qui confirme le distique adressé par Primat au prieur de Saint-Martin des Champs et déjà cité dans une précédente communication de

M. DELISLE (1). En dehors de ces trois points, que notre poète a vécu au plus tard dans la première moitié du XIIe siècle, qu'il s'appelait Hugues et qu'il avait reçu de ses camarades le surnom de Primat, sous lequel il est généralement connu, M. DELISLE ne voit rien de certain sur la vie de Primat. Il ajoute que de très-bonne heure ce poète devint un personnage légendaire, à qui les étudiants faisaient honneur de tous les bons mots qui se répétaient dans les écoles et des poésies goliardiques qui obtenaient le plus de succès. « Les traditions, dit-il, se modifiaient et se développaient suivant les temps et suivant les pays. Au dire de Richard de Poitiers et de Boccace, Paris aurait été le théâtre des exploits de Primat. Fra Salimbene en fait un chanoine de Cologne qui aurait étudié à Pavie et fréquenté la cour de Rome. Fr. Pippino nous le montre également au milieu des cardinaux, mais il le qualifie de chanoine d'Orléans. C'est également à Orléans que se passe une des anecdotes consignées dans un manuscrit de la bibliothèque de Tours et dont Primat est le héros; Richard de Fournival, mentionnant un poème de Primat, donne à cet auteur le surnom d'Orléanais; enfin le trouvère Henri d'Andeli, dans la Bataille des sept arts, met l'arrière-ban de l'armée de grammaire sous les ordres de PRIMAT D'ORLIENS. » Cette dernière expression autorisait M. DELISLE à changer la leçon Aureliacensi en Aurelianensi dans le titre mis en tête des vers de Primat rapportés par Richard de Poitiers dans la copie de Duchesne conservée à la Bibliothèque impériale. Qu'on n'aille pas conclure cependant de tous ces textes que Paris, Orléans, Cologne, Pavie et Rome ont droit de revendiquer pour leurs annales littéraires une portion de la vie de Primat. « Quand les conteurs, dit en finissant M. DELISLE, quand les conteurs qui récitaient les hauts faits de Primat nommaient une école plutôt qu'une autre, ils obéissaient tout simplement au caprice du moment, ou bien encore ils voulaient flatter le goût de leur auditoire. De même il ne

(1) Comptes-rendus des séances de l'Académie des inscriptions et belleslettres, 2 série, t. IV (1868), p. 405.

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