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velles du massacre à Blain, où son aîné, Henri de Rohan, avec le reste de l'église, put bien avoir sa part de la peur et de la douleur, mais non pas de la désolation et dissipation où les autres se virent réduits. » La plupart des églises de Bretagne restèrent saus ministres à la suite du massacre, mais l'église de Blain échappa aux conséquences de la terreur générale.

Pontivy prit en 1574, à la suite de la mort de son frère Jean, le nom de Frontenay et c'est sous ce nom qu'il acquit un grand renom dans la première guerre civile du règne d'Henri III. Les édits de pacification n'étaient que des trêves : il y avait eu quatre guerres et autant d'édits sous Charles IX; il y en eut un nombre égal sous Henri III et sous Henri IV. A peine Charles IX avait-il rendu le dernier soupir, les deux partis commencèrent à remuer. Cinq cents cadets bretons prirent le harnais pour aller batailler en Poitou contre les religionnaires. Frontenay les surprit, les attaqua et les mit en fuite.

La guerre commencée, Frontenay soutint glorieusement le siège de Lusignan, avec cent gentilshommes et six cents soldats contre les troupes du duc de Montpensier. « Frontenai donc, écrit d'Aubigné (1), se voyant dans Luzignan cent six gentilshommes, partagea cela en quatre brigades, à l'une desquelles il voulut commander, pour prendre sa part des périls et labeurs, donna l'autre à SaintGelais qui en avait mené au siège plusieurs, les autres deux furent pour Seré et Chouppes, gouverneur. » L'historien huguenot donne tout le détail du siège. Frontenay y fit devoir de chef et de soldat. Tout finit par manquer aux assiégés; mais au premier conseil tenu devant Frontenay, « ceux qui lui avoient dit appart qu'ils estoient réduits au dernier point furent ceux-là mesmes, qui devant plusieurs tesmoins dirent qu'ils avoient encore des bottes à manger, et qu'il ne falloit point céder aux Sancerrois en vertu. » Le duc de Montpensier, touché de l'héroïsme des assiégés, leur accorda les articles les plus honorables. Il permit à Frontenay et aux gentilshommes de sortir avec armes et bagages; quant aux soldats, avec leurs arquebuses, les mèches éteintes et les drapeaux pliés dans des coffres. Les ministres et leurs familles purent se retirer à La Rochelle. « Ainsi finit le siège de Lusignan, qui dura trois mois et vingt et un jours, qui coûta près de 8,000 canonnades, 800 hommes de pied, 2 mestres de camp, quelque 100 que gentilshommes que capitaines. Dedans moururent quelque 30 gentilshommes choisis ou capitaines et 200 soldats, et le château de fond en comble rasé. »>

(1) Histoire universelle, tome II, liv. II, page 148.

II.

René de Rohan s'éprit d'une jeune veuve qui porte un nom célèbre dans les annales des religionnaires. Catherine de Parthenay, héritière de la maison de Lusignan, fille de Jean de Parthenay-L'Archevêque, seigneur de Soubise et d'Antoinette d'Aubeterre, était née le 22 mars 1554, au château de Parc-Soubise en Poitou. Jean L'Archevêque, cinquième du nom, seigneur de Soubise, avait épousé Michelle de Saubonne (1), dame d'atours de la reine Anne et gouvernante de Renée de France, depuis duchesse de Ferrare. Il en avait eu trois filles et un fils.

Ce fils, Jean de Parthenay-L'Archevêque, sixième et dernier du nom, seigneur de Soubise, a pris place dans l'histoire avec les Coligny et les La Noue. Il avait épousé en 1553 Antoinette Bouchard d'Aubeterre, « dame tenue pour un mirouer de chasteté entre celles de son temps. » Il en eut un fils qui mourut jeune et une fille, Catherine de Parthenay, née le 22 mars 1554, au Parc, en BasPoitou. Jean L'Archevêque, l'aïeul maternel du célèbre duc de Rohan, mérite de nous occuper quelque temps. M. Jules Bonnet, à qui l'histoire du protestantisme français est déjà si redevable, a tout récemment publié les Mémoires de sa vie (2), qui, suivant toute apparence, ont été rédigés par le mathématicien François Viète, qui fut le précepteur et l'ami de Catherine de Parthenay, la mère de Rohan.

Soubise, c'est ainsi que nous l'appellerons, naquit quelques mois seulement après la mort de son père; sa mère, quelque temps gouvernante de Renée de France, encore enfant, se retira ensuite. de la cour et s'en vint avec ses trois filles et son jeune fils à sa maison du Parc-Soubise (3). Elle y éleva ses enfans, leur fit apprendre les langues grecque et latine et les instruisit dans la nouvelle religion.

Mme de Soubise resta au Parc jusqu'au moment du mariage de Renée de France avec Hercule d'Este, duc de Ferrare. La princesse voulut qu'on lui rendît sa première gouvernante et lui demanda de la suivre en Italie. Mme de Soubise emmena à Ferrare deux de ses filles et son jeune fils. Elle demeura huit ans dans cette ville.

(1) Elle fut femme fort estimée, tant pour sa sagesse que pour son enten dement et grande conduite en affaires; Budoes lui rend ce témoignage. Elle avait dès lors cognoissance de la vraye religion et y instruisit tous ses enfans.» (Mémoire généalogique, rédigé par Catherine de Parthenay, 16 pages in-folio. Collection de M. Benjamin Fillon.)

(2) Mémoires de la vie de Jean de Parthenay-L'Archevêque, sieur de Soubise, avec une préface et des notes, par Jules Bonnet. Paris, 1879.

(3) En Vendée, commune de Monchamp; le Parc-Soubise n'est plus qu'une ruine.

velles du massacre à Blain, où son aîné, Henri de Rohan, avec le reste de l'église, put bien avoir sa part de la peur et de la douleur, mais non pas de la désolation et dissipation où les autres se virent réduits. » La plupart des églises de Bretagne restèrent saus ministres à la suite du massacre, mais l'église de Blain échappa aux conséquences de la terreur générale.

Pontivy prit en 1574, à la suite de la mort de son frère Jean, le nom de Frontenay et c'est sous ce nom qu'il acquit un grand renom dans la première guerre civile du règne d'Henri III. Les édits de pacification n'étaient que des trêves : il y avait eu quatre guerres et autant d'édits sous Charles IX; il y en eut un nombre égal sous Henri III et sous Henri IV. A peine Charles IX avait-il rendu le dernier soupir, les deux partis commencèrent à remuer. Cinq cents cadets bretons prirent le harnais pour aller batailler en Poitou contre les religionnaires. Frontenay les surprit, les attaqua et les mit en fuite.

La guerre commencée, Frontenay soutint glorieusement le siège de Lusignan, avec cent gentilshommes et six cents soldats contre les troupes du duc de Montpensier. « Frontenai donc, écrit d'Aubigné (1), se voyant dans Luzignan cent six gentilshommes, partagea cela en quatre brigades, à l'une desquelles il voulut commander, pour prendre sa part des périls et labeurs, donna l'autre à SaintGelais qui en avait mené au siège plusieurs, les autres deux furent pour Seré et Chouppes, gouverneur. » L'historien huguenot donne tout le détail du siège. Frontenay y fit devoir de chef et de soldat. Tout finit par manquer aux assiégés; mais au premier conseil tenu devant Frontenay, «< ceux qui lui avoient dit appart qu'ils estoient réduits au dernier point furent ceux-là mesmes, qui devant plusieurs tesmoins dirent qu'ils avoient encore des bottes à manger, et qu'il ne falloit point céder aux Sancerrois en vertu. » Le duc de Montpensier, touché de l'héroïsme des assiégés, leur accorda les articles les plus honorables. Il permit à Frontenay et aux gentilshommes de sortir avec armes et bagages; quant aux soldats, avec leurs arquebuses, les mèches éteintes et les drapeaux pliés dans des coffres. Les ministres et leurs familles purent se retirer à La Rochelle. « Ainsi finit le siège de Lusignan, qui dura trois mois et vingt et un jours, qui coûta près de 8,000 canonnades, 800 hommes de pied, 2 mestres de camp, quelque 100 que gentilshommes que capitaines. Dedans moururent quelque 30 gentilshommes choisis ou capitaines et 200 soldats, et le château de fond en comble rasé. »>

(1) Histoire universelle, tome II, liv. II, page 148.

II.

René de Rohan s'éprit d'une jeune veuve qui porte un nom célèbre dans les annales des religionnaires. Catherine de Parthenay, héritière de la maison de Lusignan, fille de Jean de Parthenay-L'Archevêque, seigneur de Soubise et d'Antoinette d'Aubeterre, était née le 22 mars 1554, au château de Parc-Soubise en Poitou. Jean L'Archevêque, cinquième du nom, seigneur de Soubise, avait épousé Michelle de Saubonne (1), dame d'atours de la reine Anne et gouvernante de Renée de France, depuis duchesse de Ferrare. Il en avait eu trois filles et un fils.

Ce fils, Jean de Parthenay-L'Archevêque, sixième et dernier du nom, seigneur de Soubise, a pris place dans l'histoire avec les Coligny et les La Noue. Il avait épousé en 1553 Antoinette Bouchard d'Aubeterre, « dame tenue pour un mirouer de chasteté entre celles de son temps. » Il en eut un fils qui mourut jeune et une fille, Catherine de Parthenay, née le 22 mars 1554, au Parc, en BasPoitou. Jean L'Archevêque, l'aïeul maternel du célèbre duc de Rohan, mérite de nous occuper quelque temps. M. Jules Bonnet, à qui l'histoire du protestantisme français est déjà si redevable, a tout récemment publié les Mémoires de sa vie (2), qui, suivant toute apparence, ont été rédigés par le mathématicien François Viète, qui fut le précepteur et l'ami de Catherine de Parthenay, la mère de Rohan.

Soubise, c'est ainsi que nous l'appellerons, naquit quelques mois seulement après la mort de son père; sa mère, quelque temps gouvernante de Renée de France, encore enfant, se retira ensuite de la cour et s'en vint avec ses trois filles et son jeune fils à sa maison du Parc-Soubise (3). Elle y éleva ses enfans, leur fit apprendre les langues grecque et latine et les instruisit dans la nouvelle religion.

Mine de Soubise resta au Parc jusqu'au moment du mariage de Renée de France avec Hercule d'Este, duc de Ferrare. La princesse voulut qu'on lui rendît sa première gouvernante et lui demanda de la suivre en Italie. Mme de Soubise emmena à Ferrare deux de ses filles et son jeune fils. Elle demeura huit ans dans cette ville.

(1) Elle fut femme fort estimée, tant pour sa sagesse que pour son entendement et grande conduite en affaires; Budoes lui rend ce témoignage. Elle avait dès lors cognoissance de la vraye religion et y instruisit tous ses enfans. » (Mémoire généalogique, rédigé par Catherine de Parthenay, 16 pages in-folio. Collection de M. Benjamin Fillon.)

(2) Mémoires de la vie de Jean de Parthenay-L'Archevêque, sieur de Soubise, avec une préface et des notes, par Jules Bonnet. Paris, 1879.

(3) En Vendée, commune de Monchamp; le Parc-Soubise n'est plus qu'une ruine.

Soubise retourna à la cour de France à l'âge de dix-huit ans et se donna, comme on faisait alors, à Monsieur d'Orléans (le troisième fils du roi François). Sa mère mourut en 1549, en professant la nouvelle religion; elle avait toujours eu le prêche sur ses terres, et les édits du roi protégeaient encore les ministres.

Soubise suivit dès ses plus jeunes années la profession des armes: il fut un an prisonnier dans les Flandres; il se trouva à toutes les guerres de son temps. Quand les discordes civiles éclatèrent, il prit parti contre les Guise et s'attacha aux Chastillon, « desquels il fut toujours intime amy, tellement que tous trois le tenaient comme pour leur quatrième frère, nommément monsieur l'admiral (1). » Il fut aussi l'ami du maréchal Strozzi, « luy et ledit sieur de Soubise estant au siège de Calais, de la prise duquel ils furent tous deux, par leur labeur et diligence, la principale cause, comme ils logeassent tousjours ensemble et couchassent en même chambre, passant une grande partie des nuits à discourir tous deux, le maréchal Strozzi luy disait souvent: Sommes-nous pas bien misérables de nous hazarder tous les jours et prendre tant de peine pour agrandir et faire cueillir l'honneur de nostre labeur à celuy qui nous voudrait avoir ruynez et qui sera un jour cause de la ruyne de la France? - Disant cela du sieur de Guise qui commandait audit siège. — Il est vray, répondit le sieur de Soubise, mais puisque nostre honneur, nostre debvoir et le service de nostre roy le nous commande, il le fault faire (2). »

Soubise fut au siège de Metz sans y avoir de commandement; c'est après ce siège fameux qu'il se maria (le 9 mai 1553), à l'âge de quarante ans, avec Antoinette d'Aubeterre, une fille de la reine mère, qu'il avait instruite d'abord dans la religion. A peine marié, il dut aller en Picardie prendre part à la campagne malheureuse qui finit par la perte de Thérouanne et d'Hesdin. L'année suivante, nouvelle campagne où Soubise monta à l'assaut de Denain et faillit perdre la vie. Les Guise, pour l'éloigner, le firent envoyer en mission à Parme, où il contribua à tenir le duc dans la neutralité. Mais il eut la douleur de ne pouvoir rien faire pour empêcher la capitulation de Montluc à Sienne. Il revint sans avoir pu relever les affaires de la France en Italie; on le retrouve à la sanglante défaite de Saint-Quentin, et quelques mois après à la prise de Calais.

Soubise avait connaissance de la nouvelle religion: il s'y sentait porté, sans en faire encore publiquement profession. L'entreprise d'Amboise fut le coup qui le détermina. La France était profondément remuée par les idées de la réforme : elle se divisait en deux camps, et la politique hâtait cette division. Les Guise étaient devenus les

(1) Mémoires de Jean de Parthenay-L'Archevêque, page 19. (2) Ibid., page 21.

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