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Cette déviation des vents vers le sud-est, qui existe pendant la saison estivale l'après-midi, est donc générale sur toute la côte des Landes, depuis Cordouan jusqu'à Biarritz. D'autre part, les graphiques de Biarritz ont montré l'air des hauts sommets s'écoulant vers la mer ou vers la plaine, à la suite des refroidissements nocturnes; cette action est plus marquée pendant l'hiver que pendant l'été.

Ces déviations locales des mouvements généraux de l'atmosphère agissent d'autant plus dans le fond du golfe de Gascogne que cette région est plus éloignée du passage ordinaire des tourbillons cycloniques de l'Atlantique nord.

On a souvent remarqué que dans la région landaise le baromètre est moins vigilant que dans le nord de la France et qu'en Angleterre; c'est qu'ici nous sommes sur le bord extérieur de l'entonnoir barométrique, et que nous ressentons les modifications qu'amènent les dépressions, pluies, vents, orages, sans que le baromètre local ait été fortement influencé.

Ces déviations locales dues à la topographie de la région des Landes, se reproduisent également dans toutes les régions montagneuses, où elles sont plus accentuées le matin que dans l'après-midi, l'hiver que l'été. C'est ce qui arrive dans le golfe du Lions, où le cirque montagneux des Alpes, des Cévennes et des Pyrénées qui entourent le Bas-Languedoc et la Provence, donne naissance à des vents qui, le matin et surtout pendant l'hiver, s'écoulent de ces sommets glacés en convergeant vers le centre du golfe, et qui pendant les mois chauds de l'été déviés à leur tour par les plaines surchauffées, prennent la direction du nord-ouest vers le sud-est, sous le nom local de Mistral ou de Tramontane.

Aux environs d'Alger, les montagnes du Djurjura et de la Kabylie produisent les mêmes effets, l'air froid s'écoulant vers la mer, du sud vers le nord. Ces effets de déviation locale sont naturellement d'autant plus sensibles qu'on s'éloigne davantage du trajet ordinaire du grand mouvement giratoire circumpolaire.

(A suivre.)

A. HAUTREUX.

Le cours inférieur de la Likouala aux Herbes

Jusqu'ici les indigènes Basangas, qui habitent les bords de la Sangha, sous le 1o de Lat. N., étaient, en général, mal disposés à l'égard des blancs. Leur ignorance feinte, comme leur refus de guider les voyageurs, avait découragé les tentatives de pénétration dans la région boisée comprise entre la Sangha et l'Oubanghi; et, la Likouala aux Herbes était toujours figurée en pointillé sur les cartes. Au commencement de 1900, des représentants de maisons de commerce françaises, aussi habiles que patients, parvinrent à apaiser cette hostilité et à éveiller chez ces naturels le désir d'entrer en relations. commerciales. Dans cette conquête d'un nouveau genre, un des moyens d'action les plus efficaces fut la galanterie française; elle réussit toujours, même auprès d'horribles négresses. En échange de quelques compliments, de quelques cadeaux, nos vieux Africains, s'attachèrent ainsi de fidèles auxiliaires, grâce auxquels ils surent bientôt tout ce qu'on leur cachait, et acquirent peu à peu une véritable autorité sur cette population d'abord hostile. C'est ainsi qu'en mars 1900, M. Picard était devenu l'enfant chéri du gros village de Pembé.

A la même époque, une mission topographique dirigée par le commandant Gendron, de l'Artillerie, opérait dans le Congo français, divisée en deux brigades. L'une, placée sous la direction immédiate du chef de la mission, avait pour champ d'opérations les environs de Brazzavelle, la seconde, sous mon commandement, la région comprise entre la côte et le bassin de l'Alima.

Après que la deuxième brigade eut achevé l'exploration des bassins du N'gounié, de la Nyanga et de la haute Louété, je fus détaché pour effectuer la délimitation entre le Cameroun et le Congo français, dans la région SanghaN'joko. Au retour de cette opération, mettant à profit l'influence de M. Picard, je réussis à traverser la région comprise entre le cours inférieur de la Sangha et celui de la Likouala aux Herbes, et à descendre, ensuite, cette rivière. J'ai, ainsi, reconnu cet important cours d'eau, sur une distance de deux degrés de latitude.

Le 11 mars 1900, accompagné de l'adjudant Gibouleau et de six miliciens,

je quittai Pembé, pour atteindre la Likouala aux Herbes. Nous dûmes, d'abord, traverser la forêt tropicale qui couvre les bords de la Sangha, en formant, sur chaque rive, un épais rideau de verdure; vers l'est, la forêt s'étend sur 80 kilomètres. Pendant les huit premiers kilomètres, le terrain, élevé de 25 mètres au-dessus de la Sangha, est sec; par suite, le sentier aisé et fréquenté. Les habitants de cette zone vivent dans l'abondance, se nourrissant de bananes, de poules, de cabris, et, des produits de leur chasse : buffles, sangliers, canards. Plus loin, la marche devient singulièrement difficile : on rencontre un chapelet d'étangs remplis d'une nappe de boue liquide, profonde d'un mètre en saison sèche, et qui demeure stagnante sous le couvert de la forêt. Les noirs, aux pieds larges et aux reins souples, avancent aisément sur ce nouvel élément, ni eau ni terre; l'Européen et le porteur loango sont obligés, pour ne pas rester enlisés, d'exécuter de véritables tours de force d'équilibre, en passant, de racine en racine, et de tertre en tertre, sur des nervures de palmier qu'ils jettent devant eux. On franchit environ 1300 mètres en trois heures. De temps en temps, le sol se relève d'un à deux mètres, et le sentier redevient praticable.

Cette forêt marécageuse est très riche en lianes à caoutchouc (Landolphia Florida) et en Ficus de 0 m. 30 à 0 m. 60 de diamètre. Des villages d'une centaine d'habitants sont établis sur des buttes, hautes de 20 à 30 mètres, qui émergent au-dessus du marais. La population en est hospitalière, assez riche en vivres et en ivoire. Déjà les traitants noirs de nos maisons de commerce ont pris pied dans ces villages et y font d'excellentes affaires.

C'est dans cette région, près du village d'Ebemba, que nous passâmes insensiblement du bassin de la Sangha dans celui de la Likouala aux Herbes. Au delà de Malanga, encore habité par la même race que celle établie sur la Sangha, un vaste marais large de 15 kilom., qui s'écoule vers la Likouala, marque la fin du pays Basanga. Passé ce marécage, l'aspect du pays change brusquement. La forêt s'arrête devant une immense plaine, couverte d'herbes hautes d'un mètre, rayée de lignes sinueuses tracées par les rideaux d'arbres qui bordent les cours d'eau. Au milieu de la journée, la température s'élève brusquement de + 28°, à + 35° et même + 40°. Quelques mares rappellent, seules, qu'à deux kilomètres de là, le marais étend indéfiniment vers le sud sa fange noirâtre.

Entre la plaine et le marais de Malanga coule une rivière qui draine ce dernier, la Bailly, affluent de la Likouala. Elle mesure 30 mètres de large sur 0 m. 60 de profondeur, et n'a presque point de courant. Son cours tortueux conduit, vers le sud-est, à M' Poko, le premier village des Balingos, population curieuse et entièrement distincte des races voisines.

Là, nouveau contraste : cent hommes hauts de 1 m. 80 en moyenne, vigoureux, bien musclés, presque nus, portant seulement par devant un carré de

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chose rare

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joncs tressés suspendu à une ceinture, arrivent, en troupe bien ordonnée, à notre rencontre. Chacun d'eux tient à la main un paquet de quatre à cinq longues lances, à grand et large fer attaché à la hampe par une cordelette tressée. Le chef marche en avant, et semble jouir d'une réelle autorité. On échange des poignées de main, des « malamou »> (bonjour); mais, du geste, le chef fait signe qu'il nous interdit l'accès de son village. Les lances se dressent menaçantes, dès nos premières tentatives pour forcer cette consigne. Et, pendant la halte que nous faisons à 100 mètres du

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CAPTURE D'UN JEUNE HIPPOPOTAME SUR LES BORDS DE LA LIKOUALA. Reproduction d'une photographie du capitaine Jobit.

village, une garde armée ne nous quitte pas, rangée en un croissant offensif qui nous barre le sentier.

Cette concession une fois obtenue, les Balingos se montrent très prévenants. Ils nous apportent des vivres (bananes et poules), sans presque vouloir de paiement. Malheureusement leur langue est incompréhensible aussi bien pour les Basangas que pour les Loangos, et même pour les miliciens qui ont voyagé chez les Bangalas dans l'Oubanghi et dans la haute Sangha.

Ces indigènes ne manifestent aucune envie des marchandises ordinaires de traite sel, tabac, étoffes. Ils ne désirent que des fers de lances, haches, machettes en fer, et du fil de laiton. Mais leur souhait le plus vif est, évidemment, de nous voir déguerpir; sur leurs instances, la marche en avant est reprise, sous la conduite de vingt lanciers qui nous servent de guides, sans demander la moindre rétribution.

La suite du voyage a montré que cette attitude était inspirée par la crainte beaucoup plus que par l'hostilité. Cédant à leur curiosité naturelle, les femmes

nous épièrent, en effet, pendant la halte, en se dissimulant derrière les bananiers. Elles sont plus petites que les hommes, de moins belle anatomie, et semblent un peu plus vêtues chez elles, le carré de jonc tressé fait tout le tour des reins.

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A Mogouma, le second village des Balingos, nous pûmes forcer l'entrée, en faisant marcher nos six miliciens baïonnette au canon. Les cases sont disposées autrement que dans le reste du Congo. Au lieu de former une seule rue plus ou moins longue, elles sont isolées au milieu de touffes de bananiers, à 25 ou 30 mètres les unes des autres, éparses, et, sans direction constante, comme les villas d'une de nos villes d'hiver. Chacune d'elles est longue de 15 mètres et large de 6, couverte d'un toit en forme de berceau renversé dont le faîte est à une hauteur de 3 ou 4 mètres. Les parois, formant pignon, sont à 2 mètres en retrait du bord du toit, laissant, en avant et en arrière de la case, une sorte de marquise où l'on fait le feu, et où on entasse la provision de bois, coupée avec soin, en prévision des inondations. L'intérieur de chaque case est divisé par des cloisons en huit petites chambres communiquant par un couloir central. La couverture est en chaume d'herbes, la charpente en bois dur, et les parois en nervures et feuilles de palmier. L'ordre et la propreté règnent dans ces cases où doivent se dissimuler des réserves d'ivoire.

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Les Balingos dédaignent les fusils, qu'ils connaissent, cependant, pour en avoir pris aux villages qu'ils ont combattus. Ils n'ont pas d'arcs et semblent peu chasseurs les canards et pintades abondent, en effet, près de leurs villages et se laissent facilement approcher. La principale industrie de ces indigènes est la pêche. Ils capturent le poisson au moyen de claies et de nasses et savent le fumer. Les bananes constituent le fond de leur nourriture; ici le manioc est inconnu.

Les piroques des Balingos, qui ressemblent à celles des Bondjos, sont à fond rond, étroites, cylindriques, prolongées, à l'avant et à l'arrière, par une plate-forme rectangulaire longue de 1 mètre formant pont volant quand on accoste. Les indigènes possèdent un grand nombre de ces embarcations, qu'ils taillent dans des bois durs et plus lourds que l'eau; à notre arrivée, ils s'empressèrent de les cacher en les coulant. Cependant, pour un prix raisonnable en machettes et en cuivre, je réussis à acquérir six de ces pirogues sur lesquelles ma colonne descendit la Bailly.

Cette rivière est navigable à partir du village de Mogouma. Large de 30 à 50 mètres, profonde de 1 à 3 mètres aux basses eaux, ayant un faible courant, elle constitue une voie de pénétration facile pour de petits vapeurs. Son lit est formé de sable mélangé de débris végétaux; l'accès de ses rives est défendu par des bancs épais d'herbes palustres. Les méandres décrits par la Bailly dans la plaine triplent et même quadruplent la longueur de son cours.

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