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graphies, des mathématiques chinoises; et, pour qu'il ne manquât rien à la singularité de cette mission, le père Ricci écrivit des livres de morale dans la langue de Confucius, et passe encore pour un auteur élégant à Pékin. Si la Chine nous est aujourd'hui fermée, si nous ne disputons pas aux Anglais l'empire des Indes, ce n'est pas la faute des Jésuites, qui ont été sur le point de nous ouvrir ces belles régions. « Ils avoient réussi en Amérique, dit Voltaire, en enseignant à des Sauvages les arts nécessaires; ils réussirent à la Chine, en enseignant les arts les plus relevés à une nation spirituelle (1). »

L'utilité dont ils étoient à leur patrie, dans les Echelles du Levant, n'est pas moins avérée. En veut-on une preuve authentique? Voici un certificat dont les signatures sont assez belles.

Brevet du Roi.

« Aujourd'hui, septième de juin mil six cent soixante-dix-neuf, le roi étant à SaintGermain-en-Laye, voulant gratifier et favo

(1) Essai sur les Missions chrétiennes, chap. 195.

rablement traiter les pères Jesuites Français, missionnaires au Levant, en considération de leur zèle pour la religion, et des avantages que ses sujets, qui résident et qui trafiquent dans toutes les Echelles, reçoivent de leurs instructions, sa majesté les a retenus et retient pour ses chapelains dans l'église et chapelle consulaire de la ville d'Alep en Syrie, etc. >>

Signé LOUIS.

Et plus bas, COLBERT. (1)

C'est à ces mêmes missionnaires que nous devons l'amour que les Sauvages portent encore au nom français dans les forêts de l'Amérique. Un mouchoir blanc suffit pour passeren sûreté à travers les hordes ennemies, et pour recevoir partout l'hospitalité. C'étoient les Jésuites du Canada et de la Louisiane, qui avoient dirigé l'industrie des colons vers la culture, et découvert de nouveaux objets de commerce pour les teintures et les remèdes. En naturalisant sur notre sol, des insectes, des oiseaux et des arbres étrangers (*), ils ont ajouté des richesses à

(1) Lettres édif. tom. 1, p. 129, édit. 1780. (*) Voyez la note N à la fin du volume.

nos manufactures, des délicatesses à nos tables, et des ombrages à nos bois.

Ce sont eux qui ont écrit les annales élégantes ou naïves de nos colonies. Quelle excellente histoire que celle des Antilles par le père Dutertre, ou celle de la NouvelleFrance par Charlevoix ! Les ouvrages de ces hommes pieux sont pleins de toutes sortes de sciences: dissertations savantes, peintures de mœurs, plans d'amélioration pour nos établissemens, objets utiles, réflexions morales, aventures intéressantes, tout s'y trouve; l'histoire d'un acacia ou d'un saule de la Chine, s'y mêle à l'histoire d'un grand empereur réduit à se poignarder; et le récit de la conversion d'un Pariah, à un traité sur les mathématiques des Brames. Le style de ces relations, quelquefois sublime, est souvent admirable par sa simplicité. Enfin, les missions fournissoient chaque année à l'astronomie. et surtout à la géographie, de nouvelles lumières. Un Jésuite rencontra en Tartarie une femme Huronne qu'il avoit connue au Canada: il conclut de cette étrange aventure, que le continent de l'Amérique se rapproche au nord-ouest du continent de l'Asie, et il devina ainsi l'exis

tence du détroit, qui, long-temps après a fait la gloire de Beringh et de Cook Une grande partie du Canada, et toute la Louisiane avoient été découvertes par nos missionnaires. En appelant au christianisme les Sauvages de l'Acadie, ils nous avoient livré ces côtes où s'enrichissoit notre commerce, et se formoient nos marins : telle est une foible partie des services que ces hommes, aujourd'hui si méprisés, savoient rendre à leur pays.

CHAPITRE II.

Missions du Levant.

CHAQUE mission avoit un caractère qui lui étoit propre, et un genre de souffrances particulier. Celles du Levant présentoient un spectacle bien philosophique. Combien elle étoit puissante cette voix chrétienne qui s'élevoit des tombeaux d'Argos et des ruines de Sparte et d'Athènes! Dans les îles de Naxos et de Salamine d'où partoient ces brillantes théories qui charmoient et enivroient la Grèce, un pauvre prêtre catho

lique, déguisé en Turc, se jette dans un esquif, aborde à quelque méchant réduit pratiqué sous des tronçons de colonnes, console sur la paille le descendant des vainqueurs de Xerxès, distribue des aumônes au nom de Jésus-Christ, et, faisant le bien comme on fait le mal, en se cachant dans l'ombre, retourne secrètement au désert.

Le savant qui va mesurer les restes de l'antiquité, dans les solitudes de l'Afrique et de l'Asie, a sans doute des droits à notre admiration; mais nous voyons une chose encore plus admirable et plus belle c'est quelque Bossuet inconnu, expliquant la parole des prophètes, sur les débris de Tyr et de Babylone.

Dieu permettoit que les moissons fussent abondantes dans un sol si riche; une pareille poussière ne pouvoit être stérile. « Nous sortîmes de Serpho, dit le père Xavier, plus consolés que je ne puis vous l'exprimer ici, le peuple nous comblantde bénédictions, et remerciant Dieu mille fois de nous avoir inspiré le dessein de venir les chercher au milieu de leurs rochers (1). »

(1) Lettres éd. tom. I, p. 15.

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