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furent des ministres de paix pour les Indiens, et s'efforcèrent toujours d'arracher la verge de fer des mains de leurs oppresseurs. C'est à leur puissante médiation que les Américains durent tous les règlemens qui tendoient à adoucir la rigueur de leur sort. Les Indiens regardent encore les ecclésiastiques, tant séculiers que réguliers, dans les établissemens Espagnols, comme leurs défenseurs naturels, et c'est à eux qu'ils ont recours, pour repousser les exactions et les violences auxquelles ils sont encore exposés (1). »

Le passage est formel, et d'autant plus décisif, qu'avant d'en venir à cette conclusion, le ministre protestant fournit les preuves qui ont déterminé son opinion. Il cite les plaidoyers des Dominicains pour les Caraïbes, car ce n'étoit pas Las Casas seul qui prenoit leur défense; c'étoit son ordre entier, et le reste des ecclésiastiques Espagnols. Le docteur Anglais joint à cela les bulles des papes, les ordonnances des rois, accordées à la sollicitation du clergé, pour adoucir le sort des Américains, et mettre un frein à la cruauté des colons.

(1) Hist. de l'Amér. tom. IV, liv. VIII, p. 142–3, trad. franç. édit. in-8°., 1780.

Au reste, le silence que la philosophic a gardé sur ce passage de Roberston, est bien remarquable. On cite tout de cet auteur, hors le fait qui présente sous un jour nouveau la conquête de l'Amérique, et qui détruit une des plus atroces calomnies dont l'histoire se soit rendue coupable. Les sophistes ont voulu rejeter sur la religion, un crime que non seulement la religion pas commis, mais dont elle a eu horreur : c'est ainsi que les tyrans ont souvent accusé leur victime (*) (1).

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(*) Voyez la note P à la fin du volume.

(1) On trouvera le morceau de Robertson tout entier à la fin de ce volume, ainsi qu'une explication sur le massacre d'Irlande et sur la Saint-Barthélemy; le passage de l'écrivain anglais étoit trop long pour être inséré ici. Il ne laisse rien à désirer, et il fait tomber les bras d'étonnement à ceux qui n'ont pas été accoutumés aux déclamations des philosophes sur les massacres du Nouveau-Monde. Il ne s'agit pas de savoir si des monstres ont fait brûler des hommes en l'honneur des douze apôtres ; mais si c'est la religion qui a procoqué ces horreurs, ou si c'est elle qui les a dénoncées à l'exécration de la postérité. Un seul prêtre osa justifier les Espagnols; il faut voir, dans Robertson, comme il fut traité par le clergé, et quels cris d'indignation il

excita.

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CHAPITRE III.

Hôtel-Dieu. Sœurs-Grises.

Nous venons à ce monument, où la religion a voulu, comme d'un seul coup, et sous un seul point de vue, montrer qu'il n'y a point de souffrances humaines qu'elle n'ose envisager, ni de misère au-dessus de son amour.

La fondation de l'Hôtel-Dieu remonte à saint Landry, huitième évêque de Paris. Les bâtimens en furent successivement augmentés par le chapitre de Notre-Dame, propriétaire de l'hôpital, par saint Louis, par le chancelier Duprat, et par Henri IV; en sorte qu'on peut dire que cette retraite de tous les maux s'élargissoit à mesure que les maux se multiplioient, et que la charité croissoit à l'égal des douleurs.

L'hôpital étoit desservi dans le principe par des religieux et des religieuses, sous la règle de saint Augustin; mais depuis longtemps les religieuses scules y sont restées.

Le cardinal de Vitry, dit Helyot, a voulu sans doute parler des religieuses de l'Hôtel

Dieu, lorsqu'il dit qu'il y en avoit qui, se faisant violence, souffroient avec joie et sans répugnance l'aspect hideux de toutes les misères humaines, et qu'il lui sembloit qu'aucun genre de pénitence ne pouvoit être comparé à cette espèce de martyre.

Il n'y a personne, continue l'auteur que nous citons, qui, en voyant les religieuses de l'Hôtel-Dieu, non seulement panser, nettoyer les malades, faire leurs lits, mais encore, au plus fort de l'hiver, casser la glace de la rivière qui passe au milieu de cet hôpital, et y entrer jusqu'à la moitié du corps pour laver leurs linges pleins d'ordures et de vilenies, ne les regarde comme autant de saintes victimes qui, par un excès d'amour et de charité pour secourir leur prochain, courent volontiers à la mort qu'elles affrontent, pour ainsi dire, au milieu de tant de puanteur et d'infection causées par le grand nombre des malades. »

Nous ne doutons point des vertus qu'inspire la philosophie; mais elles seront encore bien plus frappantes pour le vulgaire ces vertus, quand la philosophie nous aura montré de pareils dévouemens. Et cependant la naïveté de la peinture d'Helyot est

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loin de donner une idée complète des sacrifices de ces femmes chrétiennes : cet historien ne parle ni de l'abandon des plaisirs de la vie, ni de la perte de la jeunesse et de la beauté, ni du renoncement à une famille, à un époux, à l'espoir d'une postérité; il ne parle point de tous les sacrifices du cœur, des plus doux sentimens de l'âme étouffés, hors la pitié qui, au milieu de tant de douleurs, devient un tourment de plus.

Eh bien! nous avons vu les malades, les mourans près de passer, se soulever sur leurs couches, et faisant un dernier effort, accabler d'injures les femmes angéliques qui les servoient. Et pourquoi? parce qu'elles étoient chrétiennes! Eh! malheureux! qui vous serviroit, si ce n'étoit des chrétiennes! D'autres filles semblables à celles-ci, et qui méritoient des autels, ont été publiquement fouettées, nous ne déguiserons point le mot. Après un pareil retour pour tant de bienfaits, qui eût voulu encore retourner auprès des misérables? Qui? elles! ces femmes ! ellesmêmes! Elles ont volé au premier signal, ou plutôt elles n'ont jamais quitté leur poste. Voyez ici réunies la nature humaine

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