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demandant l'aumône par là on prétendoit l'accoutumer au spectacle des douleurs humaines, et le préparer aux fatigues des

missions.

Il achevoit alors de fortes ou de brillantes études. N'avoit-il que les grâces de la société, et cette vie élégante qui plaît au monde? on le mettoit en vue dans la capitale, on le poussoit à la cour et chez les grands. Possédoit-il le génie de la solitude? on le retenoit dans les bibliothèques et dans l'intérieur de la compagnie. S'il s'annonçoit comme orateur, la chaire s'ouvroit à son éloquence; s'il avoit l'esprit clair, juste et patient, il devenoit professeur dans les colléges; s'il étoit ardent, intrépide, plein de zèle et de foi, il alloit mourir sous le fer du Mahométan ou du Sauvage; enfin, s'il montroit des talens propres à gouverner les hommes, le Paraguay l'appeloit dans ses forêts, ou l'ordre à la tête de ses maisons.

Le général de la compagnie résidoit à Rome. Les Pères provinciaux en Europe, étoient obligés de correspondre avec lui une fois par mois. Les chefs des Missions étrangères lui écrivoient toutes les fois que les vaisseaux ou les caravanes traversoient les

solitudes du monde. Il y avoit en outre, pour les cas pressans, des missionnaires qui se rendoient de Pékin à Rome, de Rome en Perse, en Turquie, en Ethiopie, au Paraguay, ou dans quelque autre partie de la terre.

L'Europe savante a fait une perte irréparable dans les Jésuites. L'éducation ne s'est jamais bien relevée depuis leur chute. Ils étoient singulièrement agréables à la jeunesse; leurs manières polies ôtoient à leurs leçons ce ton pédantesque qui rebute l'enfance.Comme la plupart de leurs professeurs étoient des hommes de lettres recherchés dans le monde, les jeunes gens ne se croyoient avec eux que dans une illustre académie. Ils avoient su établir entre leurs écoliers de différentes fortunes, une sorte de patronage qui tournoit au profit des sciences. Ces liens formés dans l'âge où le cœur s'ouvre aux sentimens généreux, ne se brisoient plus dans la suite, et établissoient, entre le prince et l'homme de lettres, ces antiques et nobles amitiés, qui vivoient entre les Scipion et les Lélius.

Ils ménageoient encore ces vénérables relations de disciples et de maître, si chères aux écoles de Platon et de Pythagore. Ils s'enor

gueillissoient du grand homme dont ils avoient préparé le génie, et réclamoient une partie de sa gloire. Voltaire, dédiant sa Mérope au père Porée, et l'appelant son cher maître, est une de ces choses aimables que l'éducation moderne ne présente plus. Naturalistes, chimistes, botanistes, mathématiciens, mécaniciens, astronomes, poëtes, historiens, traducteurs, antiquaires, journalistes, il n'y a pas une branche des sciences que les Jésuites n'aient cultivée avec éclat. Bourdaloue rappeloit l'éloquence romaine, Brumoy introduisoit la France au théâtre des Grecs, Gresset marchoit sur les traces de Molière: Lecomte, Parennin, Charlevoix, Ducerceau, Sanadon, Duhalde, Noël, Bouhours, Daniel, Tournemine, Maimbourg, Larue, Jouvency, Rapin, Vanière, Commire, Sirmond, Bougeant, Petau, ont laissé des noms qui ne sont pas sans honneur. Que peut-on reprocher aux Jésuites? Un peu d'ambition si naturelle au génie. «< Il sera toujours beau, dit Montesquieu, en parlant de ces Pères, de gouverner les hommes, en les rendant heureux. » Pesez la masse du bien que les Jésuites ont fait; souvenez-vous des écrivains célèbres que leur corps a

donnés à la France, ou de ceux qui se sont formés dans leurs écoles; rappelez-vous les royaumes entiers qu'ils ont conquis à notre commerce par leur habileté, leurs sueurs et leur sang; repassez dans votre mémoire les miracles de leurs missions au Canada, au Paraguay, à la Chine, et vous verrez que le peu de mal dont on les accuse, ne balance pas un moment les services qu'ils ont rendus à la société.

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CHAPITRE VI.

Papes et Cour de Rome. Découvertes modernes, etc.

AVANT

VANT de passer aux services que l'Eglise a rendus à l'agriculture, rappelons ce que les papes ont fait pour les sciences et les beauxarts. Tandis que les ordres religieux travailloient dans toute l'Europe à l'éducation de la jeunesse, à la découverte des manuscrits, à l'explication de l'antiquité, les pontifes romains, prodiguant aux savans les récompenses et jusqu'aux honneurs du sacerdoce, étoient le principe de ce mouvement général vers les lumières. Certes, c'est une grande

gloire pour l'Eglise, qu'un pape ait donné son nom au siècle qui commence l'ère de l'Europe civilisée, et qui, s'élevant du milieu des ruines de la Grèce, emprunta ses clartés du siècle d'Alexandre, pour les réfléchir sur le siècle de Louis.

Ceux qui représentent le christianisme comme arrêtant le progrès des lumières, contredisent manifestement les témoignages historiques. Partout la civilisation a marché sur les pas de l'Evangile, au contraire des religions de Mahomet, de Brama et de Confucius, qui ont borné les progrès de la société, et forcé l'homme à vieillir dans son enfance.

Rome chrétienne étoit comme un grand port, qui recueilloit tous les débris des naufrages des arts. Constantinople tombe sous le joug des Turcs; aussitôt l'Eglise ouvre mille retraites honorables aux illustres fugitifs de Byzance et d'Athènes. L'imprimerie, proscrite en France, trouve une retraite en Italie. Des cardinaux épuisent leurs fortunes à fouiller les ruines de la Grèce, et à acquérir des manuscrits. Le siècle de Léon X avoit paru si beau au savant abbé Barthélemi, qu'il l'avoit d'abord préféré à celui de

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