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gesse et prévoyance. Dans la simple économie humaine, tout porte l'empreinte d'une raison admirable: ainsi tous les êtres reçoivent leur conservation de la Providence, comme le corps reçoit de l'ame le mouvement et la vie. Ainsi, dans ce monde, non-seulement les empires et les provinces, la paix et la guerre, mais encore les moindres emplois, les familles, les troupeaux euxmêmes et jusqu'aux plus petits animaux domestiques, tout ressent l'action de l'autorité et de la prudence humaine; tout marche, dirigé, pour ainsi dire, par un bras secret et un gouvernail mystérieux. En cela, Dieu a fait éclater sans doute sa volonté souveraine et ses jugemens admirables; il voulait que l'homme apprît à gouverner les détails, et, pour ainsi parler, les membres du monde, comme il régit lui-même dans sa totalité le corps de l'univers.

A la vérité, direz-vous : Au commencement du monde, Dieu a établi cet ordre de choses, mais après avoir achevé et perfectionné son ouvrage, il a éloigné et repoussé de lui tout soin des affaires humaines; craignant peut-être le travail, il l'a exilé de sa demeure, s'est dérobé à l'embarras de la fatigue, ou, livré à d'autres occupations, il s'est déchargé d'une partie, dans la crainte de ne pouvoir vaquer au tout.

-Dieu, selon vous, rejette donc loin de lui le soin des choses d'ici-bas. Quel est alors le fondement d'un culte adressé à Dieu? quel motif d'adorer le Christ, ou quel espoir de le fléchir? Car si Dieu, dans le siècle, néglige la race des hommes, pourquoi chaque jour élever nos

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tendimus? cur orationibus crebris misericordiam Dei quærimus? cur ad ecclesiasticas domos currimus? cur ante altaria supplicamus? Nulla est enim nobis ratio præcandi, si spes tollitur impetrandi. Vides ergo quam stulta atque inanis sit hujus persuasionis adsertio : quæ utique si recipitur, nihil penitus de religione servatur.

Sed ad illud forte confugies, ut dicas nos metu futuri judicii Deum colere, et id omni præsentium officiorum cultu elaborare ut in die futuri seculi mereamur absolvi. Quid ergo sibi vult apostolus Paulus, præcipiens (1) quotidie in Ecclesia ac jubens ut offeramus jugiter Deo nostro orationes, obsecrationes, postulationes, gratiarum actiones? Et hæc omnia quam ob causam? quam utique, nisi, ut ipse dicit, ut quietam et tranquillam vitam agamus in omni castitate. Pro præsentibus, ut videmus, Domino supplicari jubet et orare, quod utique non juberet, nisi exorare posse con23 fideret./Quomodo ergo aliquis pro obtinendis futuri temporis bonis, apertas Dei aures, pro præsentibus autem, clausas atque obstructas putat? Aut quomodo nos in Ecclesia supplicantes, præsentem nobis salutem à Deo poscimus, si audiendos nos penitus non putamus? Nulla ergo nobis pro incolumitatibus ac prosperitatibus nostris vota facienda sunt. Quin potius ut modestia

(1) Epist. 1 ad Tim. II, 1-2.

mains au ciel? pourquoi, par de fréquentes prières, implorer la divine miséricorde? pourquoi courir dans les temples? pourquoi se prosterner devant les autels? car il ne sert à rien de prier, si l'on nous ôte l'espoir d'obtenir. Vous voyez donc le vide et la folie de cette assertion; si elle est une fois admise, c'en est fait de la religion.

Mais peut-être vous retrancherez-vous dans une nouvelle objection, en disant que nous honorons Dieu par la seule crainte du jugement à venir; et que tout notre but dans l'accomplissement de nos devoirs présens, c'est de mériter au jour du siècle futur une sentence favorable. Que veut donc l'apôtre Paul, quand il recommande et qu'il ordonne chaque jour dans l'assemblée d'offrir continuellement à notre Dieu des prières, des supplications, des demandes et des actions de grâces? Et cela pour quel motif?- Pour quel motif! pour quel autre, si ce n'est, comme il le dit, afin que nous menions une vie paisible et tranquille en toute piété et honnêteté. Il ordonne, comme on voit, de prier et de supplier le Seigneur pour le temps présent, ce qu'il ne ferait pas sans doute s'il n'avait la confiance d'être exaucé. Comment donc peut-on penser que les oreilles de Dieu seront ouvertes pour accorder les biens à venir, tandis qu'elles sont fermées et sourdes pour refuser les biens présens? Pourquoi, lorsque nous prions dans l'assemblée, demandons-nous à Dieu les grâces de chaque jour, si nous croyons ne pas devoir être écoutés? Il est donc inutile de faire des vœux pour notre bonheur et notre sûreté. Au contraire, pour que l'humilité de la prière fît agréer nos demandes, il nous faudrait peut-être par

supplicationis vocem conciliet postulantis, dicendum fortasse nobis est : Domine, non prosperitatem vitæ istius petimus, nec pro bonis præsentibus supplicamus, scimus enim aures tuas his obsecrationibus clausas esse, et auditum te ad preces istiusmodi non habere, sed pro his tantummodo petimus quæ sunt futura post mortem. 24 Esto igitur, postulatio talis utilitate non careat; quomodo ratione subsistit? Si enim Deus a respectu hujus seculi curam removit, et postulantium precibus aures suas clausit, absque dubio qui non audit nos pro præsentibus, non audit etiam pro futuris, nisi forte credimus pro precum diversitate aures suas Christum vel tribuere vel negare, id est, ut claudat eas cum rogatur præsen. tia, aperiat cum futura.

25 Sed de his dicendum amplius non est. Tam

stulta enim sunt, et tam frivola, ut cavendum sit ne id ipsum quod pro honore Dei dicitur, injuria Dei esse videatur. Tanta quippe est majestatis sacræ et tam tremenda reverentia, ut non solum ea quæ ab illis contra religionem dicuntur horrere, sed etiam quæ pro religione nos ipsi dicimus cum 26 grandi metu ac disciplina dicere debeamus. Igitur si stulte atque impie creditur quod curam humanarum rerum pietas divina despiciat, ergo non despicit. Si autem non despicit, regit; si autem regit, hoc ipso quod regit judicat, quia regimen esse non potest, nisi fuerit jugiter in rectore judi.

ler ainsi Seigneur, nous ne te demandons ni les prospérités de cette vie, ni les biens présens; nous savons que tes oreilles sont fermées à ces demandes, et que tu ne saurais écouter de semblables prières. Nous te supplions seulement de nous accorder ce que tu destines aux hommes après la mort. -Je veux bien qu'une pareille demandé ne soit pas sans effet; mais comment la concilier avec la raison? Si Dieu ne se mêle pas du soin de ce siècle, s'il ferme ses oreilles aux vœux de ceux qui le prient, comment nous exaucerait-il pour les biens futurs, lorsqu'il ne nous écoute pas pour les biens présens? A moins peut-être que le Christ ne ferme et n'ouvre ses oreilles selon la diversité des prières, c'est-à-dire les ferme quand on lui demande des faveurs présentes, et les ouvre quand on lui demande les biens à venir.

Mais en voilà bien assez sur ce sujet; car ces attaques sont si frivoles et si peu sensées, qu'il serait à craindre que les raisonnemens qui doivent servir à la gloire de Dieu, ne semblent au contraire dégénérer en injure. La majesté divine doit imprimer dans les cœurs une si profonde révérence, que l'on doit non-seulement n'entendre qu'avec horreur tout ce que les impies avancent contre la religion, mais encore la défendre soimême avec une sainte frayeur et une circonspection respectueuse. Donc, si c'est une folie et une impiété de croire que la providence de Dieu abandonne le soin des choses humaines, il faut conclure qu'elle ne les néglige pas; si elle ne les néglige pas, elle les gouverne; si elle les gouverne, elle juge par là même; car il ne sau

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