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jusqu'à la Chambre des pairs formaient contre

elle une sorte de ligue.

En était-ce fait de l'autorité? On put le croire après 1830. Selon le mot d'un publiciste, les évêques alors se tenaient cois. De trois ans, diton, les prêtres n'osèrent sortir avec leur costume. Saint-Germain l'Auxerrois venait d'être saccagé, la bibliothèque de l'Archevêché mise au pillage et la province imitait Paris. On abattait les croix sur les chemins. Dubois disait: <« Nous assistons aux funérailles d'un grand culte ; » et J. Janin : « Le catholicisme est une religion qui ne va plus 1. »

Les poètes même, de leurs doléances, faisaient chorus alors avec l'apostasie:

Je ne crois pas, ô Christ, à ta parole sainte;
Je suis venu trop tard dans un monde trop vieux.

Ainsi disaient-ils, et sans peine ils rencontraient créance.

1 Voir l'ensemble du tableau tel que l'a peint M. Thureau-Dangin.

Vigny, de même, cinq ans après la secousse, considérant tour à tour philosophes, artistes et politiques, ceux-là qui plaident la cause du catholicisme, ceux-ci qui plongent dans ses dogmes comme dans une source épique de poésie, ceux qui le choisissent enfin comme mot d'ordre et drapeau: « La croix, >> dit-il, «< n'est pas à leur côté dans la solitude, ils ne se mettent pas à genoux dans l'église qu'ils décorent, ils ne suivent pas dans leur vie la foi dont ils font parade. » Et il ajoutait :

Les Églises du Christ jour et nuit sont ouvertes:
Mais les piliers sont seuls, les stalles sont désertes,
Le marbre bleu des morts est humide, et chez nous
Personne ne sait plus l'essuyer des genoux.
L'étranger n'y vient voir que les lignes du cintre.
Les tableaux des martyrs n'ont devant eux qu'un
[peintre

Qui, debout, l'œil en flamme et la main sur le cœur,
Adore saintement la forme et la couleur,
Et l'Église sans foi, ce triste corps de pierre
Qui dans l'autre àge avait pour âme la prière,

L'Église est bien heureuse encore qu'aujourd'hui Les lévites de l'art viennent prier pour lui 1.

Cet état des vieilles croyances, Vigny le compare à un naufrage universel. Des deux ennemies, l'Église et la Révolution, l'une paraissait à terre et, moribonde, ne devoir plus se relever; l'autre, ivre de sa victoire, précipitait le cours de ses folies et de ses espérances.

Mais, quoi! la foi meurt-elle au cœur des hommes? La vie, la mort, le mal, les cieux. cessent-ils d'avoir leur mystère ?

Dans l'anarchie des opinions, quelques poètes prétendirent se frayer un passage et diriger la foule.

Autour d'eux, les esprits étaient comme à la fournaise. La Révolution secouait la léthargie et réveillait la mort. Une royauté élue par le peuple; l'imprévu de la victoire, l'étendue des conséquences; un pouvoir tumultueux, monstre

1 Journal d'un poète, p. 259.

à mille têtes, surgissant après quarante ans des ruines même qu'il accumula; la nécessité d'organiser; la licence de scruter et d'entreprendre; les doctrines encore en enfance; l'avide escompte de l'avenir; la raison individuelle lâchée; toute nouveauté reçue avec applaudissement, tout système avec espérance; un désordre où le pire se mêlait au grand, et la noblesse au ridicule; bref, cet air embrasé emplissait les généreux d'un fol enthousiasme.

A. de Vigny a décrit cette fièvre dans une pièce antérieure à la composition des Destinées. Elle a pour titre Paris. Pour notre objet, c'est un poème de toute importance.

CHAPITRE III

LA RÉVOLUTION DE 1830 DANS LE POÈME

INTITULÉ : Paris

Trois partis, selon mon auteur, se disputent en 1830 l'empire politique. Sur leurs ruines va s'élever bientôt un nouveau pouvoir, pouvoir social et religieux dont on entrevoit déjà le symbole.

§ 1. — Lamennais

Le premier est celui de Lamennais.

La sympathie de Vigny pour Lamennais n'est pas douteuse. Dès 1831, Paris l'atteste; en 1834, nouveau témoignage, alors que Rome a damné l'Avenir.

L'un soutient en pleurant la croix dépossédée, S'assied près du sépulcre, et seul, comme un banni, Il se frappe en disant : Lamma Sabacthani.

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