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de-ci, de-là, dans son Journal, les supplices d'outre-tombe, le « grotesque bourreau » et ce << vilain petit corps » menacé de souffrir durant l'éternité tout entière.

Que reste-t-il à ce stoïcien, sinon d'imiter ses vieux maîtres? Ceux-là du moins se comparent à leurs dieux. Ainsi fait-il.

« UN DIEU. Poème.

Drame.

La ques

tion serait que l'homme est plus grand que la Divinité, en ce sens qu'il peut sacrifier sa vie pour un principe, tandis que la Divinité ne le peut pas. >>

Et l'idée prend forme dans ce plan de poème qui a pour titre Cassandre ou un Dieu.

« Cassandre, fille des rois, est aimée d'Apollon.

Elle le déteste, lui et sa tranquille et trop paisible immortalité. « Tu avais bien du mérite à braver Achille, n'est-ce pas? Hector en a plus que toi. >>

((

Apollon s'humilie, se désespère, se courbe

devant elle, jure qu'il voudrait pouvoir souffrir

et mourir, se roule à ses pieds en pleurant.

>>

Et que faut-il enfin pour donner l'air moderne à tout ce paganisme? Que les docteurs séparent de Dieu le Fils de l'homme; qu'ils considèrent à part le Père, et Jésus: quand l'homme seul paraît dans le Christ, qu'est donc ce Dieu qui le fait tant souffrir? Tout noble cœur prend parti pour le Prométhée. On dédaigne l'Enfer, on plaint la victime, on maudit le bourreau.

CHAPITRE III

LA STROPHE DU SILENCE

Pour qui veut lire dans les vieux textes, cette révolte n'est pas au point juste. Elle nous égare. Elle tient isolé ce qu'il faudrait unir.

Rousseau se lève un beau matin, et s'en va contempler l'aurore. Hélas! d'un spectacle si beau, peut-il conclure à son Être suprême ? Songe-t-il bien aux maux qu'éclaire ici-bas le soleil? Telle est la vogue de la nature on ferme les livres, on fait de toute histoire table rase; après quoi l'on scrute le ciel, en homme tertiaire qui ne sait rien, et n'a rien appris. Le Messie reconnu par saint Jean prie le Père durant des heures et cependant maint philosophe ne connaît encore qu'un Dieu chiffre. Ce

dieu ne veut pas qu'on le prie. Butez-vous à ce

mur.

Voici donc comme l'entend Vigny :

« Providence. Que la divinité intervienne dans les choses humaines, je le veux bien. Mais ce n'a pu être que lorsqu'elle a ouvert toutes. les sources à la création, et tous les courants contraires du Juste et de l'Injuste, du bien et du mal. Une fois l'horloge montée, on ne peut t croire qu'elle en trouble l'ordre, en y mettan le doigt pour avancer ou pour retarder les aiguilles : ce serait attenter à la liberté de chaque créature et altérer le système régulier de la vie des races dans son cours. »>

<< Ne peut-on supposer un Dieu qui ait créé les constellations et les planètes en demeurant aussi indifférent à l'homme que l'homme à l'insecte, ou l'insecte à la fourmilière? »

« L'ouvrier.

Le vulgaire des philosophes

de tous les temps a dit que la beauté et l'har

monie de l'œuvre attestaient l'ouvrier. Rien de plus faux. Je suppose qu'un admirateur banal, comme il y en a partout, s'écrie que cet enfant nommé Astrolabe, né d'Héloïse et d'Abeilard, est plein de perfection. Il s'écriera quel est donc l'artiste divin qui a su mouler les jolis doigts blancs et roses de ces pieds d'enfant, et leurs ongles délicats et fins, ces dents enchâssées dans des feuilles d'œillet comme des perles dans une bordure de velours; quel ouvrier a formé les globes doubles et transparents de ces yeux bleus, y a placé une iris noire qui s'épanouit et s'humecte des larmes du bonheur ou de celles de la pitié. Ce doit être un génie dessinateur, chimiste, calculateur, géomètre et prophète, car il a conçu, inventé, formé, pesé, mesuré, prévu et prédit la croissance, les besoins, les rapports, l'étendue, le poids, la proportion, les rencontres, les choix, les désirs, les harmonies, les dissemblances... Pas du tout. Rien de tout cela. Le créateur était un jeune

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