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classes de lecteurs, et dont tous le poids retomboit sur le corps entier de la réforme, par les conséquences qui en résultoient contre les principes et les maximes qu'elle avoit professés.

Premièrement, Bossuet avoit établi en fait et constaté par les témoignages les plus irrécusables, que les protestans de France avoient pris les armes pour la défense de leur religion contre l'autorité légitime, en vertu des délibérations expresses et formelles de leurs synodes nationaux et sur l'avis de leurs théologiens. Il avoit opposé à cette conduite violente et si contraire à la tranquillité publique, la patience et la soumission inaltérable des premiers chrétiens et de l'Eglise entière pendant trois cents ans de persécutions.

La décision doctrinale de Luther, Mélanchton et Bucer pour permettre au landgrave de Hesse d'avoir deux femmes à la fois, étoit une seconde accusation d'une nature si grave et si opposée à la morale du christianisme, qu'elle laissoit une flétrissure éternelle sur la mémoire de ces célèbres réformateurs, qui s'étoient donnés au monde comme suscités de Dieu, pour rendre à l'Eglise de Jésus-Christ la pureté et la sainteté des premiers jours.

Burnet, qui étoit blessé au vif de la manière dont Bossuet avoit relevé dans l'Histoire des va

riations toutes les erreurs de son roman de la réformation de l'Eglise anglicane, avoit publié un petit écrit de trente-six pages; mais il y avoit plutôt cherché à attaquer Bossuet, qu'à se défen

*

dre lui-même. « Car, dit Bossuet, Burnet lui

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tions.

» passoit tous les faits qu'il avoit rapportés sur des varia»sa réforme anglicane, et sur son Cranmer, » aussi bien que sur ses autres héros, sans en con» trarier aucun ; et comment auroit-il pu les con»tredire, puisque je les ai pris de lui-même? »

D'ailleurs dans cet écrit si court Burnet montroit une si grande ignorance du droit public français, qu'il ne fit que s'attirer une leçon sévère de Bossuet, qui l'invita à s'instruire avec un peu plus de soin des matières qu'il vouloit traiter, avant d'en parler au public.

Jurieu n'auroit pas mieux demandé que de s'établir le vengeur des Eglises protestantes. Mais Jurieu étoit si décrié dans son parti même par ses extravagances et les inconséquences où l'entraînoit toujours le déréglement de son esprit ; « on étoit si las, comme dit Bossuet, * de M. Ju» rieu et de ses discours emportés, >> qu'on crut devoir confier la défense commune à des mains plus habiles, et à un homme doué d'un jugement plus sage et plus réfléchi. Ce fut sur Jacques Basnage de Beauval, ministre à Roterdam, qu'on

* Ibid.

jeta les yeux. Il faut convenir que Basnage étoit digne à plusieurs égards de prêter à la cause des protestans toute la force et tout l'appui, dont elle avoit besoin dans cette espèce de crise. Il étoit connu par sa grande érudition ecclésiastique et par une certaine modération qui honoroit son caractère; mais en hasardant de lutter contre Bossuet, il ne sut pas faire un usage fort heureux de son érudition; et il manqua même de cette mesure, qui auroit pu lui conserver une sorte de dignité, en succombant dans un combat où il étoit impossible de triompher. Mais il faut attribuer un pareil désavantage autant à la foiblesse des moyens qui étoient à sa disposition, qu'à la prodigieuse supériorité de l'adversaire qu'il avoit osé combattre.

Cependant il paroît que les protestans s'étoient si bien flattés d'avoir trouvé dans Basnage le défenseur le plus habile qu'ils pussent opposer à Bossuet, que Burnet, avec l'inconsidération habituelle de son caractère, se pressa d'annoncer au public, « qu'on préparoit une dure réponse à » M. de Meaux. » Cette réponse fut celle de Bas* Défense nage, « et elle parut, dit Bossuet, avec toutes de l'Histoire » les duretés que Burnet avoit promises. Mais,

des varia

tions.

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ajoute Bossuet, les injures et les calomnies sont » des couronnes à un chrétien et à un évéque.

Bossuet

Bossuet avoit rappelé dans l'Histoire des variations le supplice de Servet, qui fut très-certainement l'ouvrage de Calvin. Basnage ne le conteste pas; mais il étoit difficile de s'attendre à la manière dont il prétend excuser Calvin: il dit que c'étoit en lui un reste de papisme. Un aussi bon esprit que Basnage n'auroit jamais sans doute imaginé de lui-même une justification aussi singulière. Mais il avoit eu la foiblesse de l'emprunter à Jurieu; et Bossuet eut droit sans doute de lui en faire une espèce de honte.

Basnage vouloit se prévaloir de la tranquillité dont toutes les religions jouissoient sous la domination des protestans: et Bossuet lui demande *, << si la Suède a révoqué la peine de mort qu'elle » a décernée contre les catholiques? si le bannis» sement, la confiscation, et les autres peines » ont cessé en Suisse, en Allemagne, et dans les >> autres pays protestans? si l'Angleterre a re» noncé à ses lois pénales contre les non-confor>> mistes? si la Hollande elle-même a abrogé les » décrets du synode de Dordrecht contre les ar» miniens? » car il importe peu d'examiner, si ces lois pénales étoient exécutées à tous les momens; ou si, n'étant pas abrogées, elles ne pouvoient pas être remises en vigueur d'un moment à l'autre.

BOSSUET. Tome III.

ΙΟ

* Ibid.

Quant à l'accusation générale portée par Bossuet contre toute la réforme, d'avoir autorisé les révoltes et les séditions par des décisions formelles de ses synodes nationaux, Basnage cherche à affoiblir la force de cette accablante accusation par quelques faits particuliers; Bossuet les discute successivement les uns après les autres, dans sa Défense de l'histoire des variations; et après avoir démontré, selon les règles de la critique, que tous les faits allégués par Basnage étoient ou mal exposés ou contredits par tous les monumens de l'histoire, Bossuet le rappelle au véritable état de la question. Il ne s'agissoit pas de savoir si dans les premiers siècles quelques chrétiens entraînés par un zèle irréfléchi, s'étoient abandonnés à des actes répréhensibles; car, dit faisant l'Eglise infaillible, nous

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* Defense Bossuet «< des varia- » ne faisons pas pour cela les peuples et les chré

de l'histoire

tions.

» tiens impeccables. Pour nous produire des exem» ples de l'ancienne Eglise, qui est notre ques» tion, il ne suffit pas de montrer des faits an» ciens, il faudroit encore montrer que l'Eglise » les ait approuvés, comme nous montrons à nos

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réformés que leurs Eglises en corps ont ap

prouvé leurs révoltes par des décrets exprès, »> et Bossuet fait voir par les témoignages unanimes de toute la tradition, que « même dans le

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