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Bossuet, au contraire, avec son fier dédain' pour les mollesses du monde et ses vaines complaisances, paroissoit quelquefois abuser de sa supériorité, et vouloir arracher par la seule force de son génie, une victoire qu'il auroit également obtenue du mérite de la cause qu'il défendoit; et s'élevant au-dessus de tous les frivoles ménagemens, il disoit à Fénélon :

>>

* Vous vous plaignez de la force de mes expressions! il s'agit de dogmes nouveaux qu'on

* Réponse de M. de

Meaux aux

de M. de

>> voit introduire dans l'Eglise, sous prétexte de quatre lettres piété, dans la bouche d'un archevêque. Si en Cambrai.

>>

» effet il est vrai que ces dogmes renouvellent les » erreurs de Molinos, sera-t-il permis de le taire? >> voilà pourtant ce que le monde appelle exces» sif, aigre, rigoureux, emporté, si vous le vou» lez. Il voudroit qu'on laissât passer doucement » un dogme naissant, et sans l'appeler de son >> nom, sans exciter l'horreur des fidèles par des paroles qui ne sont rudes que parce qu'elles » sont propres, et qui ne sont employées qu'à >> cause que l'expression est nécessaire.....

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» Si l'auteur de ces nouveaux dogmes les cache, » les enveloppe, les mitige, si vous voulez, par » certains endroits, et par là ne fait autre chose, » que les rendre plus coulans, plus insinuans, plus dangereux, faudra-t-il par des bienséan

>>

* Réponse de M. de

quatre lettres de M. de Cambrai.

» ces du monde, les laisser glisser sous l'herbe, » et relâcher la sainte rigueur du langage théo

logique? Si j'ai fait autre chose que cela, qu'on » me le montre; si c'est là ce que j'ai fait, Dieu » sera mon protecteur contre les mollesses du » monde et ses vaines complaisances. >>

C'est ainsi que Bossuet répondoit au public.

Il répondoit avec la même énergie aux amis de Fénélon.

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«Les amis de M. de Cambrai n'ont à dire Meaux aux » autre chose, sinon que je lui suis trop rigou>> reux. Mais si je mollissois dans une querelle » où il y va de toute la religion, ou si j'affectois » des délicatesses, on ne m'entendroit pas et je » trahirois la cause que je dois défendre. »

Malgré toute la chaleur et toute l'activité que Bossuet et Fénélon mettoient dans leur attaque et leur défense, malgré les instances pressantes de Louis XIV, pour engager le pape à accélérer son jugement, Rome procédoit avec sa lenteur accoutumée; et rien n'annonçoit encore un jugement prochain; rien ne laissoit même entrevoir si ce jugement condamneroit, ou absoudroit l'archevêque de Cambrai. On croyoit seulement s'apercevoir que les apologies et les explications de Fénélon paroissoient faire impression sur l'esprit de quelques théologiens du pape,

et les disposoient à accueillir des interprétations, qui modifioient jusqu'à un certain point ce que le livre avoit de plus répréhensible.

Mais l'étonnement fut extrême à Paris, lorsqu'on y apprit tout-à-coup que les examinateurs nommés par le pape, pour donner leur avis sur le livre des Maximes des saints, s'étoient trouvés partagés d'opinion, après soixante-quatre congrégations de sept heures chacune, à un grand nombre desquelles le pape avoit assisté en personne. Sur dix examinateurs, cinq décidèrent que le livre des Maximes des saints devoit être exempt de censure. Cinq autres déclarèrent qu'il renfermoit un grand nombre de propositions dignes de censure.

La controverse de Bossuet et de Fénélon, malgré l'ardeur et la véhémence, qu'ils y avoient également montrées, s'étoit jusqu'alors renfermée dans les bornes d'une discussion doctrinale.. Mais elle prit un caractère plus affligeant, lorsque des discussions de fait et des accusations personnelles vinrent se mêler à un combat déjà

si animé.

Fénélon, dans l'une de ses lettres au pape, s'étoit plaint des procédés de ses confrères avec une sensibilité qui n'étoit pas exempte d'amertume; et il sembloit en donner l'opinion la plus

XVII.

Bossuet pu

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défavorable, en déclarant qu'ils avoient été d'une nature si offensante, qu'on ne pourroit jamais le croire, s'il les faisoit connoître. Bossuet se persuada peut-être trop facilement, qu'une accusation si grave exigeoit de sa part la justification la plus solennelle; et il publia sa Relation du quiétisme. Malheureusement cette Relation étoit plus faite pour achever d'aigrir le cœur de Fénélon, que nécessaire à la défense de Bossuet; et le souvenir qui en est resté, est également pénible pour les admirateurs de l'un et de l'autre.

La Relation du quiétisme se compose presque blie la rela- entièrement des extraits d'un mémoire, que Fétion du quié-nélon avoit adressé à M.me de Maintenon dans

tisme.

l'épanchement de la confiance et de l'amitié, et des fragmens de quelques manuscrits, que M.me Guyon avoit livrés à la discrétion de Bossuet, dans le temps où elle avoit réclamé ses avis et ses instructions.

Il étoit impossible sans doute de mettre plus d'art, d'esprit et de goût, dans le récit de toutes les folies et de toutes les rêveries de M.me Guyon. Bossuet avoit su joindre à ce tableau si piquant ces grands mouvemens d'éloquence, qui venoient y repandre tout-à-coup un caractère in* Relation attendu de gravité, de force et de majesté. du quiétisme «< * A l'égard de M. l'archevêque de Cambrai,

par Bossuet.

>> disoit

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disoit Bossuet, « nous ne sommes que trop justi>> fiés par les faits incontestables de cette Rela» tion, et je le suis en particulier, plus que je ne » voudrois. Mais pour faire tomber tous les injustes reproches de ce prélat, il falloit voir, » non pas seulement les parties du fait, mais le » tout jusqu'à sa source. C'est par là, j'ose le dire, qu'il paroît que dès l'origine, on a tâché de » suivre les mouvemens de cette charité douce, patiente, qui ne soupçonne, ni ne présume le » mal....

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» Où placera-t-on cette jalousie qu'on nous >> impute sans preuve ? Et s'il faut se justifier sur » une si basse passion, de quoi étoit - on jaloux » dans le nouveau livre de cet archevêque? Lui >> envioit-on l'honneur de défendre et de peindre » de belles couleurs M.me Guyon et Molinos? » Portoit-on envie au style ambigu d'un livre, ou » au crédit qu'il donnoit à son auteur, dont au >> contraire il ensevelissoit toute la gloire? J'ai >> honte pour les amis de M. de Cambrai, qui font profession de piété, et qui cependant ne lais» sent pas sans fondement d'avoir répandu par» tout, même à Rome, qu'un certain intérêt m'a » fait agir..... Quelques fortes que soient les rai» sons que je pourrois alléguer pour ma défense, » Dieu ne me met point d'autre réponse dans le BOSSUET. Tome III.

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