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» mêmes. Eh bien! les voici; c'est de vos mains » que je les ai pris et reçus. Je ne prétends faire » valoir contre vous ni les jugemens de nos papes » et de nos évêques, ni les décrets de nos conciles

généraux, ni douze cents ans d'une tradition » invariable. Vos chefs vous ont dit que de telles » autorités ne méritoient aucun égard. Je ne veux » discuter avec vous que les actes que vous pré» sentez vous-mêmes comme l'expression fidèle » de votre FOI et de votre DOCTRINE, comme le » résultat des profondes méditations de vos plus » grands théologiens et des longues discussions » de vos COLLOQUES et de vos SYNODES GÉNÉRAUX. » Vous les avez acceptés comme la règle de la » croyance commune de tous les membres de » votre communion. Vous leur avez donné le titre » imposant de PROFESSION DE FOI, pour leur impri» mer le caractère le plus auguste et le plus inva» riable en matière de religion. Vous ne pouvez » plus ni les désavouer, ni les rejeter. Ils sont le » seul lien qui vous réunit sous la forme d'une >> COMMUNION CHRÉTIENNE. Otez ces SYMBOLES ex» térieurs, vous n'êtes plus que des particuliers » plus ou moins recommandables par vos vertus, » vos talens, vos lumières et vos connoissances. » Mais vous n'offrez plus ni l'idée, ni l'autorité » d'une réunion d'hommes professant la même

II.
De l'His-

toire des va-
riations.
1688.

» doctrine et le même culte. Je vous invite à par» courir avec moi cette longue suite de vos PRO>>FESSIONS DE FOI; et nous verrons si vous êtes » en droit d'interroger l'Eglise romaine sur sa » croyance, vous, qui ne savez pas même encore » ce que vous croyez et ce que vous devez croire. »

Ces paroles que nous avons osé nous permettre de placer dans la bouche de Bossuet, nous ont paru rendre la pensée, l'intention et le plan de l'HISTOIRE DES VARIATIONS.

C'étoit en 1688 que Bossuet composoit son Histoire des variations des églises protestantes, l'un des ouvrages les plus étonnans de l'homme qui excite le plus l'étonnement et l'admiration.

La pensée d'un tel ouvrage et son exécution. demandoient à la fois le concours du génie et les connoissances les plus profondes dans l'histoire, la religion et la politique.

Il falloit réunir sous un seul point de vue, dans un tableau historique dont le cadre étoit nécessairement circonscrit, le récit des révolutions religieuses et politiques qui avoient ébranlé en même temps toutes les parties de l'Europe chrétienne. Lorsque du fond de la Saxe Luther donna le signal de ces terribles discordes qui ravagèrent pendant cent cinquante ans les plus belles contrées du monde civilisé.

Ces grandes scènes de l'histoire n'étoient pas le principal sujet du plan de Bossuet; elles n'étoient que le lien nécessaire qui devoit en unir toutes les parties; mais par un avantage précieux, qu'un écrivain tel que Bossuet ne pouvoit pas négliger, elles devoient servir à répandre un grand intérêt sur des questions d'un genre plus sévère.

Luther avoit porté les premiers coups aux institutions antiques consacrées par le respect des siècles; il avoit ébranlé les autels à l'ombre desquels il avoit été élevé. Mais bientôt, à son exemple, ses premiers disciples lui disputèrent l'autorité qu'il avoit conquise; et, après avoir combattu pour lui, ils combattirent contre lui. La réforme naissante fut déchirée en deux partis, aussi acharnés l'un contre l'autre, qu'ils l'étoient contre l'Eglise romaine; et ces deux grandes branches du protestantisme se sous-divisèrent en une multitude de sectes différentes, qui se prodiguèrent les censures, les outrages et les violences.

Il ne suffisoit pas encore aux vues de Bossuet de montrer, comment les communions protestantes différoient entre elles dans leurs professions de foi : il entreprit de faire voir comment

chacune d'elles avoit successivement varié dans la profession de sa propre doctrine.

Par une idée aussi neuve que profonde, Bossuet se place avec l'Eglise romaine, comme simple spectateur des violens débats de ces sectes innombrables; il se borne à les mettre aux prises les unes avec les autres; et il renverse ensuite chacune d'elles, en lui opposant les actes publics et contradictoires de ses propres symboles.

Il ne pouvoit appartenir qu'à Bossuet d'apporter dans l'exposé de ces questions si obscures, une clarté dont elles ne paroissoient pas susceptibles, et une exactitude qui devoit résister à l'épreuve de toutes les critiques.

Mais ce qui est remarquable, c'est que ce fut un écrivain protestant qui fit naître à Bossuet l'idée d'écrire un ouvrage qui devoit être si fatal à la cause des églises protestantes.

On peut se rappeler que lorsque Bossuet publia son Exposition de la foi catholique, le ministre la Bastide l'accusa d'avoir varié dans sa doctrine; il en alléguoit pour preuve les premiers imprimés de cette exposition, que l'on supposoit en opposition avec l'ouvrage, tel que Bossuet *Liv. m. l'avoit publié lui-même. On a vu * que cette pré

tendue contradiction n'avoit pas le plus léger fon

dement; mais en supposant même qu'elle eût été aussi réelle qu'elle étoit frivole et hasardée, une pareille accusation étoit entièrement étrangère à la doctrine de l'Eglise catholique; indépendamment du droit naturel qui appartient à tout écrivain de se réformer lui-même dans le cours de son travail, ce n'est point dans les opinions particulières d'un auteur qu'on doit aller puiser la véritable doctrine d'une Eglise ou d'une communion religieuse; c'est dans la profession solennelle de ses dogmes, tels qu'elle les a déclarés dans ses symboles, ses confessions de foi, ses décrets authentiques.

L'écrit du ministre la Bastide tomba sous les yeux de Bossuet en 1682. Il étoit alors occupé à lire le Syntagma confessionum, récemment imprimé à Genève. Cet ouvrage est un recueil complet de toutes les professions de foi des églises protestantes depuis la confession d'Ausbourg en 1530, jusqu'à celles des derniers temps.

Il fut frappé des variations et des contradictions qu'offroit cet amas de doctrines, non-seulement opposées entr'elles, mais dont les auteurs avoient sans cesse varié dans leurs systêmes et dans leurs principes; et cependant on lisoit dans chacune de ces confessions de foi, si contraire l'une à l'autre, qu'elle n'étoit que l'expression

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